Skip to main content

Full text of "Le Théâtre à Nantes : depuis ses origines jusqu'à nos jours, 1430-1901"

See other formats


U  dV   of   Oiiaua 


390030e2293e57 


k^  v^ïxxrr 


•  T-^ 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

Universityof  Ottawa 


http://www.archive.org/details/lethtrenanOOdest 


ETIENNE      DESTRANGES 


Le  Théâtre 


à  Nantes 


DEPUIS  SES  ORIGINES  JUSQU'A  NOS  JOURS 


±<l30    —     ±90± 


Nouvelle  Edition  revue  et  augmentée,  ornée  de  sept  Gravures, 
de  trois  Plans  et  d'un  Portrait 


PAIUS 

Librairie  FISGHBACHER 

(sociérÉ  anonymk) 
«y.V,   Hue  de  Seine,  .V.V 


NANTKS 

J.     UESSARD 

LIDUAIKK  ÉDITICUH 

î'i,    Hue    Kuben»,    13 


i  vus    '1 1  Dits    !'•  »(•(  r.  j 


/ 


f^^/^/y^ 


,^>^*- 


yar^^ 


Le    Théâtre    à    Nantes 


ÏA|  uir  ,*c^  Oçiyinc*  ju#qua  no*  jouçf 


DU  ijaêfiae  nws^ewp^ 


Etudes  unalytiques,  critiques,  thématiques 

L'Attaque  du  Moulin,  d'Alfred  Bninean. 

liRisÉis,  (YEmmanuel  C/iahrier. 

Le  Chant  de  la  Cloche,  de  Vincent  d'Inf/ij. 

L'KvoLUTiON  MUSICALE  CHEZ  Verdi  :  AiDA,  Otiiello.  P'alstaff. 

Les  Femmes  dans  l'œuvre  de  Richard  Wagner,  avec  une  préface 
d'Alfred  Bruneaii  et  vingt  dessins  d'A.  de  Broca. 

T'ervaal,  de  Vincent  d'Ind/j. 

HjEnsel  et  Ciretel,  d'E.  Huniperdinck. 

Kérim  —  Requiem  —  Penthésilée  —  Lieds  de  P'rance  —  Chansons 
a  Danser,  d'Alfred  Bruneaii. 

Les  Lnterprètes  musicaux  du  Faust  de  Gœthe  (épuisé). 

Messidor,  d'Alfred  Bruneau. 

L'Œuvre  lyrique  de  César  Franck. 

L'Œuvre  théâtral  de  Meyerbeer. 

L'Ouragan,  d'Alfred  Bruneau. 

Proserpine,  de  Saint-Saëns. 

Le  Rêve,  d'Alfred  Bruneau. 

Samson  et  Dalila,  de  Saint-Saëns. 

Sancho,  do  E.  Jaques-Dalcroze. 

TaNNH/EUSER. 

Les  Troyens,  de  Berlioz. 
Le  Vaisseau  Fantôme. 

Ouvrages   divers 

CoLLOT  d'Herbois  A  Nantes,  d'aprù.s  une  pièce  originale  décou- 
verte dans  les  Archives  de  la  Ville. 

Dix  jours  a  Bayreuth. 

Notes  de  Voyage. 

Souvenirs  de  Bayreuth. 

En  préparation 
Consonnances  et  Dissonances. 


Nantes.  —  Imprimerie  F.  Salières,  rue  Santeuil,  12. 


ETIENNE      DESTRANGES 


Le  Théâtre 


à  Nantes 


DEPUIS  SES  ORIGINES  JUSQU'A  NOS  JOURS 


±^30    —     ±90± 


Nouvelle  Edition  revue  et  augmentée,  ornée  de  sept  Gravures, 
de  trois  Plans  et  d'un  Portrait 


PAIUS 

Librairie  FISGHBAGHER 

(société  anonymk) 
.'y./,   Rue  de   Seine,  .Vi 


NANTES 

J.     UHSSARD 

LIBliAlRE  ÉnrrKUR 

75.    '•'•'-    '^'"'—     f' 


1002 
Tous  droits  réservés 


PM     .• 


A 
MON    VIEIL    AMI 

Alexis     Ba^cRman 


PREMIÈRE     PARTIE 


t)epuis  les  ^Origines  jusqu'à  la  \(yOnslrucLion  du  'Grand- JhéàLre 


1430  ?   —   1787 


LES    MYSTERES 
1430—  1518 

Jj.' jeu  fie  Bioii  advis«'pl  mal  advisé.  —  Diffi^entfs  pièce*  jouets  à  \nntcs 


NANTES,  comme  partout  ailleurs,  nous  devons  chercher  les 
l^i^^jj.j  origines  du  th(^àtre  dans  1rs  Mystùrf».  On  sait  que  ces 
Q^^iAfj)     niyst«'n'S  n'était'iU  aulro  chose  qur  il         '  nt 

écrites  relatant  des  épisodes  de  la  vif         ^  .    t 

de  Ji'sus  Christ  sur  la  terre.  A  cette  époque  de  foi  «C  de  croyance» 
naïves,  c'était  pour  le  peuple  une  grande  joie  de  voir  rendues  vivanu^s, 
devant  ses  yeux,  les  figures  du  Christ,  de  la  Vierge,  des  apùtn's  et  des 
martyrs.  L'Eglise,  qui,  dopuis,  a  foudroyé  le  théàtn'  et  los  comédiens, 
les  protégeait  à  cette  épo<jue.  Souvent,  elle  ouvrait  toutes  grande;» 
les  portes  do  ses  cathédrales  aux  f^On/r^n'n  dp  la  Pauttinn,  On  doit 
donc  considérer  le  clergé  comme  l'un  des  principaux  instigateurs  des 
représentations  dramatiques,  car  c'est  sous  ses  auspiix»  que  le  goût  du 
théâtre,  qui  s'était  perdu  dans  les  premiers  temps  de  barbarie,  résultat  (alal 
de  l'écroulement  du  monde  romain,  refleurit  de  nouveau  parmi  l«»s  popu- 
lations. 

De  nombreux  mystères  furent  donnés  à  Nant*»s,  pendant  toute  la  pén«>de 
du  Moyen-Age  et  de  la  It^maissance. 

Le  premier  dont  nous  trouvons  trace  fut  la  Passion  ci  fft'.turrrction  rir 
Notre- Seigneur  JestuA-Chriaty  joué,  sur  l'ordre  du  duc  Jean,  en  Tan  H'-V.K 


LK   TIIEATRK    A    NANTES 


Pour  cela,  on  fit  venir  de  Rennes  \{^'s  joueurs  nécessaires  â  cette  représen- 
tation. 

En  H.')."),  on  i-eprésenta  le  my.strre  do  Bien  fidniaè  et  mal  nclDiu'.  J'ai 
copié,  dans  les  comptes  du  bureau,  la  noie  de  Pierre  Lellù,  receveur  et 
misrur  des  œiwrcs  et  réparations  de  la  ville,  qui  : 

«  Sujjplye  lui  estre  fait  raison  des  paine  et  travault  que  il  eut  et  souslint 
aux  jeux  de  Jiic/i  adrisé  et  mal  adoisé,  que  le  duc  et  la  vilb:  lirent  joor 
dei'/iièreîuent  au  BoufFay  de  ceste  dite  ville,  tant  pour  l'ère  ferer  ia  roe  de 
fortune^  pour  faire  charréer  le  boays  d'icello  et  un  grand  nombre  de  clays  et 
de  boays  et  autres  plusieurs  choses  à  faire;  les  ciiafïdult,  tant  pour  les  joeurs 
que  pour  le  peuple  qui  estoit  à  vcoîr  lesditcs  jeuz  où  il  alla  et  envoya  par 
plusieurs  et  diverses  joies  et  y  fils  de  grandes  dilijences  qu'il  plaise  à 
mesdits  seigneurs  des  comptes  en  ordonner  à  leur  bon  plaesir...  Ensuyvent 
les  mises  faictes  pour  le  fait  du  mystère  de  Bien  adoise  et  mal  adoisé,  tant 
pour  matières,  ouvriers,  que  pour  aultres  choses,  ainsi  qu'il  ensuist,  quel  fut 
joé  devant  le  duc  et  la  duchesse,  —  Pour  une  douzaine  estam  vert  et  doré 
pour  la  goulle  d'enfer,  2'  6**.  Pour  deux  grandes  peaux  de  parchemin  et 
deux  cordes  de  boeau  pour  faire  h;  tonnerre,  3*  9''  .  Pour  deux  liv?es  rouzine 
à  faire  sortir  le  feu'par  les  naseaux  de  ladite  goulle,  16''  .  Pour  un  cent  de 
queues  de  vaches  à  mettre  sur  la  goulle,  5».  Pour  sept  linceuls  à  .')*  chacun, 
cinc|  touailles  à  '.i""  1''  chacune,  mis  à  faire  ladite  goulle,  les  orailles  et  les 
cornes,  51^  S'i  .  A  Louis  Blanchart  et  son  père  pour  la  façon  de  ladite  goulle, 
et  icelle  avoir  painti;  et  fourny  et  rais  autre  chose  qui  y  failloint,  112-  11''  . 
Pour  l'empidrenient  de  quatre  bourgrains  noirs,  pour  tandre  devant  l'enfer, 
qutMdx  turent  rompus  et  souillez,  2(>.  » 

Mellinet^  dans  sa  remarquable  notice  sur  La  Musique  à  Xantes,  raconte 
que  : 

«  Lors  des  brillantes  fêtes  données  par  François  II  à  la  belle  Antoinette  de 
Villequier,  parente  d'Agnès  Sorel,  les  t/'ois  galants  Sans  Soucf/,  comé- 
diens célèbres  lurent  appelés  exprès  à  Nantes.  Ils  y  représentèrent  des 
farces  pieuses  et  profanes,  la  Passion,  de  Jean-Michel.  d'Angers  ;  une 
Sottise  à  huit  personnages,  par  le  même  auteur  ;  le  Mj/stère  du  jugement 
de  Paris,  le  Mgstère  de  saint  Rogatien  et  de  saint  Donatien,  enfin  une 
Pastorale  dans  un  boccage,  avec  musique,  et  grandes  rejouissanees. 

»>  Le  spectacle  n'était  pas  cher  alors,  car,  en  novembre  1 175,  le  trésorier 
Cilles  Thomas  no  paya  que  vingt  livres  aux  compagnons  de  Sans-Soucy, 
pour  avoir  représenté  une/are^  devant  le  duc. 

))  La  représentation  des  Mystères  se  multiplia,  principalement  eu  1498. 
quand  la  reine  Anne  revint  à  Nantes,  après  la  mort  de  Charles  VIII,  ce  roi 
que  notre  duchesse  aoait  espouse  lorsque'le  ciel  voulut  moucheter  le  manteau 
roijal  de  France  des  hermines  de  Bretagne.  On  représenta  la  Feinte  de 
Fortune,  au  carrefour  Saint-Jean,  la  Feinte  du  Mijstère  de  Vérité,  au 
carrefour  Saint-Vincent,  et  la  ville  donna,  au  carrefour  du  Pilori,  une 
Morisque  de  moralité,  sorte  de  ballet  pantomime.   » 

A  l'occasion  du  mariage  de  la  reine  Anne  de  Bretagne  avec  Louis  XII, 
on  joua  aussi  différentes  pièces  dont  l'une  avait  pour  auteur  Siméon  Bour- 
gt?ois,  valet  de  chambre  du  roi. 

«  Les  théâtres  étaient  magnifiquement  ornés,  très  vastes,  avec  des  déco- 


LF.8    MY«tTi:RES 


rations  ;i  penipturtivcs,  où  l'on  voyait  les  (ontaineit  sourdant  des  croopcii  des 

montagrifs.  la  main  di^  )M'intrc<*t  l'art  du  i       '  '      • 

à  la  faron  d«'  la  naiiiro.  ««i  v«)\aii-nn  par  «-ii 
l>ouillonnaiit«,  • 
Ilots  vl  Ilots;  i>ii. 

|>att«*s  (>t  halLint  •!<'  ICau.  ei<:.  ;  mu  tl<  ^  iet>  uitieaux,  p^Tchc»  ^Qt 

it's  ranii<»rs,  g.i/.ouillaimt  a  IN-rivi  ft  !• 
)'  On  rcinar(|uaii  trois  dani<-^  (|iii  v 
\)iisst''  ;  ('«'st  à  savoir  avant  roln-  «I'hm  ' 
tiairnt  di'  rirhfs  rolrs  d«<  dnip  d'< 
d'or  «|iii  trou.s>ai(>ni  «-n    {«Mirs  c\u\-  ..,  ■  . 
<|ui  Ixiillairnl  à  leurs  \isaLr<s  un»*  \ir\i'r 

«lit«»s  danio  nM)n''M'nt;iMt  !»•>  f/'oi«  (Jifiri-g.  ,,-^   jmmk-  ou    i.un   i.m 

de  solcnnilt*.  Elles  tenaient  ehaeuiie  en   i  idh   un    pliiniail   (ait  en 

manière    «{'«'ventoir.    eoniine    |)our  soi    évenier    le    vi>;tpr  quand    il    fait 
eliaud  ').   » 


I    II   i.i  I i    .1    1 1< liii   I  i.ii  I  ^    I   il  I 


!"• 


nu     I  II)'  I  > 


c'est  (jne  les  auteurs  (•'  et  les  aeteur>  du  crû  étaient  nire".  Au^m,  la  |iUi|>.-irt 
du  temps,  les  faisait-on  venir  des  villes  voisines.  II  no  y«*  trouva  personne 
à  Nante>,  nous  dit  M.  DuK-i-st  Matifeux,  dans  une  int4''n'»s.iiite)-iiide  imMiif 
il  V  a  <|uel(jue  trente  ans  ilaiis  la  lierue  tien  l'rorinres  tir  l'dut.it,  r.<.  \.\. 
de  eoin|K}ser  un  divortisstMiient  ou  représentation  tliéàtrak  on  rhom 
Fraiifjois  I"^,  (|ui  devait  se  n'tidrt;  à  Nantes  en   eoni|Mi{;n!e  do   1 1 
Kléonoro,  sa  seconde  femme  et  du  dauphin.  11  fallut   reronrir  a  un    |)r<>.  ti- 
reur de  Poitiers,  en  renom  j)our  ses  vor>.  nommé  Je^in  Houihei. 

On  tn)uvera  |)eut-6tre  «-uricux  losdi^tails  suivant.s,  donnés  pr  M.  r)uKa>i 
Matifeux  : 

«  A  l'échafaud  «lu  earrofour  Saint-Nieolas.  à  l'enin**'  do  la  r**  >ii 

une  danie    nounine    Tlx^tis   ilisant    son    dii-ton.  r^> 

N(^r<^ides  vestues  <le  (alfetas  bleu,  lev  uinn<li<'s  »m>(iI!-  (\ 

|x'tiz  enfants  au  devant  vestus  de  ( 
Thélis  avait  la  této  miiverie  d'un  ■ 
étaient  vêtUs  de  talfetas  bleu  et  \ert  sur   le   nu.    l'A  a  1  entrée  liii   liaupjnn 

>  avoit  I grande  Iieriu\  ne.  nn-partio  de  fleurs  de  I,\s.  laquelle  se  .«untoiJ 

et,  par  dedans,  au  devant,  ung  jeune  enfant  disant  son  dioion  a  monsieur  !•• 
dauphin. 

»  Sur  l'échafaud  du  Chanj:»'.   il   v   avait   là  trois  p<»r.onnag<'«..  sa\oir  : 

humaine  Providence,  v^tue  de    taiîelns   bleu.    v,m:-      '" a>ant 

«levant   elle   Bonheur,  vêtu  «le  t;dTeias  vi«>l«»t.   et    N  d'une 

simple  robe  «le  t«)il«'.  Providtr      '      •  uail  l'un  ■  •• 

ch;ilne  de  for.  Sa  «oilî»'  «^tait  -  vert.  «1  i<- 

«le  honhiMirél.MtdeUilfiLis  i:riv,  tji.mc  et  violet  (livroc  «lu  d.iupliin).  .\laili«ur 
était  coitî»'  «l'un  bonml  de  «Mtoii  blain-. 

(I)«'.«mill«' M"  Uini'l.   hi  rommiinr  ft  ht  Milir,- d--   \"t.r»M.  lui.    ||I. 

j'i»  JeiH»  \..i-<   Ml."'!.  :'.  .iiiT  ,1.1.- 1.  t....i.-   I.  .11  \i.  «.-i    ,    '    .1,  ,  •.|uii  j  NaalM  rrr*  lll'i 
<t  T«Wut  i\  l;>  .  .M  AiiO».  11  «1  connu 

par  un  ctiritii 


LE  THEATRE   A   NANTES 


))  Les  sonneurs  du  roi  étaient  disposés  autour  de  l'échafaud,  et  jouèrent 
à  l'entrée  delà  reine. 

))  A  l'entrée  du  dauphin,  il  y  eut  le  comb;it  du  roi  Arthur  de  Bretagne 
contre  Flolo,  tribun  romiiin.  Une  pucelle,  la  fille  Michel  Le  Loup,  repri';- 
sentant  la  S;iinte-Vier^c,  protégeait  Arthur,  dont  elle  couvrait  l'écusson  de 
l'envers  de  son  m;jntoau  d'hermine  :  ce  qui  fut  cause  que  les  princes  de 
liretafjne prindrent  les  hevmtines  pour  blason  de  leurs  armes.  Le  man- 
teau de  la  Vierge  était  en  satin  blanc  de  Bourges.  Les  sonneurs  du  roi 
jouèrent,  ainsi  que  les  trompettes  des  galiotes.  Arthur  abattit  l'aigle  que 
Flolo  portait  sur  son  casque.  » 

A  la  même  époque  on  représenta  aussi  les  pièces  dont  les  noms  suivent  : 

Moralité  très  excellente  à  V honneur  de  la  glorieuse  Assomption  de 
Notre-Dame,  par  Jean  Parmentier. 

Mystère  du  vieil  Testament,  par  Jean  Petit. 

Mystère  de  la  Conception  et  Nativité  de  Icc  glorieuse  Marie  Vierge,  avec 
le  mariage  d'icelle,  la  Nativité,  Passion,  Résurrection  et  Ascension  de 
N.  S.  J.-C,  par  Joseph  de  Marnef,  etc. 

En  1515,  lorsque  Marie  Stuart,  encore  enfant,  passa  par  Nantes  en  se 
rendant  à  la  cour  de  France  pour  épouser  François  lï,  plusieurs  rej)résen- 
tations  furent  données,  notamment  à  la  Fosse,  où  l'on  avait  dressé  un  certain 
nombre  d'échafauds. 


II 


LE  PREMIER  OPERA  A  NANTES 


is'.x; 


lieprtiseiHntion  (TArimène,  dnn*  In  yrumlf  snlle  du  ChAtean 


'ai  cité,  dans  le  chapitre  précédent,  In  Pastorale  dann  un 
boccage,  qui  fui  représentée,  avec  musique,  lors  dos  f«''ies 
données  par  lo  duc  François  If.  Mcllinet  croit  qu«<  cette 
J'asiorattî  pourrait  bien  élre  le  jeu  do  lioiin  et  de  Marion, 
du  l)Ossu  d'Arras,  qui  date  du  XIII*  siècle,  et  que  l'on  peut  considérer 
comme  le  premier  opéra  comique  joué  en  France.  L'auteur  de  la  Musique 
à  Nantes  hase  cette  supposition  sur  le  lieu  de  la  svëuc,  qui  est  un  boceage 
dans  lo  Jeu  comme  dans  la  l'astorale;  mais  les  renseignements  précis  man- 
quant absolunu'Dt,  je  ne  crois  pas  devoir  signaler  cette  dernière  «pu vre  comme 
la  première  œuvre  lyrique  jouée  dans  notre  ville. 

Il  faut  attendre  entore  plus  d'un  siècle  pour  arriver  a  la  rcprc>i.'iiuiti'wi, 
non  pas  d'un  opéra  proprement  dit,  mais  d'une  pièce  qui,  par  son  genre, 
par  le  luxe  de  la  mise  en  scène,  s'en  rapproche  assez. 

L'ouvrage  que  l'on  peut  considérer,  avec  assez  de  raison,  comme  le 
premier  opt'ra  monté  dans  la  capitale  artistique  de  la  HreUigne,  fut  j«>ué 
sous  la  Ligue. 

Nantes,  ville  ultra  catholique,  était  alors  gouvernée  par  le  duc  de  Mer- 
cœur,  qui,  après  l'assassinat  du  duc  de  Guise,  s'était  déclaré  le  ' 
ligueurs  en  Hrotagne.  Le  duc,  et  surtout  sa  femme,  jouissaient  a 
d'une  grande  popularité.  La  duchesse  était  fille  du  duc  de  Penthièvre  ;  elle 
était  donc  issue  de  Charles  do  Hlois  et  de  Jeanne  de  Hret^igne.  C'était  assex 
à  cette  éi>oque  troubUn»,  qui  avait  déj;\  vu  sur^^ir  tant  d'étranges  compi^iitions, 
pour  que  lo  duc  de  Mercœur  rêvât  de  rétablir  à  son  profit  le  duché  de 
Bretagne.  Aussi  le  gouverneur,  en  attendant  qu'il  pût  définitivement  placer 
sur  sa  tète  la  couronne  tant  enviée  de  la  bonne  dur/iesse,  tenait-il  à  Nantes 
une  véritable  cour.  Les  courtisans  y  affluaient  de  toutes  jKirt>  et  comme  le 
duc  était  un  esprit  cultivé  qui  aimait  à  protéger  les  lettres,  les  poètes  ne 

2 


LE   THEATRE   A    NANTES 


ijiiUKiiiaient  point  autour  de  lui.  L'histoire  nous  a  conservé  de  nombreuses 
pièces  à  la  louange  du  ^/-t'.s-  illustre  et  du  très  magnanime  prince  Philippe 
Emmanuel  de  Lorraine,  duc  de  Mercœur,  et  de  Madame  Marie  de  Pen- 
thiùore,  son  épouse. 

Pendant  que  le  frère  Jacques  le  Bossu  prononçait  ses  fougueuses  haran- 
gues, soit  pour  légitimer  l'assassinat  du  roi,  soit  pour  exciter  le  peuple 
contre  Henri  IV,  au  château  les  fêtes  succédaient  aux  fêtes.  La  duchesse 
de  Mercœur  était  jeune,  ardente  au  plaisir,  et  même  elle  ne  dédaignait  pas 
de  se  mêler  au  peuple  et  de  prendre  part  aux  vieilles  danses  bretonnes  sur 
la  Motte  Saint-Pierre. 

Parmi  les  poètes  de  la  petite  cour  du  duc  de  Mercœur  se  trouvait  un  gen- 
tilhomme du  nom  de  Nicolas  de  Montreux,  qui  signait  ses  nombreuses 
productions  du  pseudonyme-anagramme  d'Olenix  du  Mont-Sacré.  C'est 
à  sa  plume  qu'est  duc  l'importante  pastorale  intitulée  Arimène,  représentée 
dans  la  grande  salle  du  Château  de  Nantes,  le  25  février  1596.  Malheureu- 
sement, si  la  pièce  nous  a  été  conservée  dans  son  intégrité,  il  n'en  a  pas  été 
de  même  de  la  musique,  qui  ne  nous  est  pas  parvenue. 

M.  Louis  Lacour,  dans  une  brochure  devenue  rare  aujourd'hui,  a  publié, 
en  1858,  une  notice  sur  l'opéra  d'Olenix  du  Mont-Sacré. 

Je  ne  le  suivrai  pas  dans  l'analyse  détaillée  d'Arimène.  La  chaste 
passion  du  berger  Arimène  pour  la  pastourelle  Alphise,  passionnerait  médio- 
crement mes  lecteurs;  je  donnerai  seulement  des  détails  sur  les  intermèdes 
mythologiques  placés  entre  les  cinq  actes  de  cette  pastorale  fadasse. 

Olenix  du  Mont-Sacré  publia  son  Arimène  à  Nantes,  chez  Pierre  Dorion, 
imprimeur  et  libraire-juré  de  l'Université,  demeurant  en  la  rue  Saint- Piprre. 
L'édition  porte  la  date  M.  D.  XCVII  L'auteur  prit  le  soin  de  joindre  à  la 
pièce  sa  mise  en  scène  détaillée.  Je  crois  intéressant  de  la  donner  ici  : 

«  Le  téastre  eslevé,  dit  Montreux,  à  l'un  des  boutz  de  la  grand'salle  du 
chastcau,  avoit  vingt-cinq  piedz  en  quarré  ;  la  face  en  estoit  abaissée  d'un 
pied  et  demy  pour  en  rendre  plus  apparente  la  perspective.  Il  portoit  en 
face  quatre  pantagones  chacun  rendant  cinq  diverses  faces  et  ces  pantagones 
estoient  meuz  et  tournez  par  une  seule  viz  de  fer  qu'un  homme  seul  pouvoit 
tourner  soubz  le  téastre  ;  les  faces  estoient  peinctes  diversement  selon  le 
subject  de  la  pastorale  et  des  divers  intramèdes,  les  chapeaux  des  panta- 
gones semez  de  fleurs  meslez  de  lambrisseaux  d'or  et  portant  chacun  quatre 
flambeaux  alumez.  » 

Ces  pentagones  dont  parle  Olenix,  remplaçaient,  selon  toutes  probabilités, 
les  châssis  placés  dans  les  théâtres  actuels  le  long  des  portants.  Grâce  à  ces 
pentagones,  les  changements  à  vue  dcA^aient  se  faire  avec  une  rapidité 
étonnante.  Il  est  vrai  que  ces  lourdes  masses  étaient  sans  doute  fort  embar- 
rassantes et  devaient  gêner  la  circulation  dans  les  coulisses  ;  cependant  il  faut 
avouer  que,  pour  l'époque,  c'était  vraiment  bien  imaginé. 


LE    PRKMIEfl   OPÉRA 


((  Sur  h'  K'iastre  ostoitun  grand  ciel  portant  la  face  nocturne  |v»ur  supporter 
les  corps  célestes  représentez  aux  intrainrdes.  Les  pant;igones  laissunnl 
diverses  ouvertures  entre  eux  par  où  sortoient  les  acteurs.  A  l'un  des  ^x»ulz 
du  téastre  estoit  la  grotte  de  Circimant,  magicien,  d'où  sortoient  lesd(^'n»ons 
alors  de  ses  conjuremens,  et  de  l'autre  un  antique  rocher  duquel  sortoient 
partie  des  effecls  de  sa  magie,  comme  feux,  fonUiines,  serjK'nts  et  autres 
choses.  Les  deux  costez  du  téastre  estoient  garni/,  de  rangs  de  lampes  de 
verre,  plaines  d'huiles  odorantes  et  de  toutes  couleurs., 

»  Près  du  téastre  estoit  eslevé  un  [M-rron  couvert  de  tapisserie,  où  estoient 
siz  nionseigncur,  mesdames,  monsieur  l'ainhassadeur  du  rov  catholi(|ue,  feu 
monsieur  le  marquis  de  Belle  Isje,  madame  sa  femm».',  monsieiirde  Kerlwrio 
et  plusieurs  autres  seigneurs,  daines  et  damoisclles  ;   le  Injut  et  le-  !o 

la  salle  garniz  de  siégt's  en  forme  d'amphité;istre  pour  as«.eoirgrai  :e 

de  damoiselles  et  autres  personnes,  avec  des  galleries  au  l>out  et  autour, 
faictes  exprès  pour  contenir  la  grande  et  immense  multitude  des  spectaUnirs; 
l'ordre  du  chasteau  si  prudemment  n»is,  suivy  et  parach.'M-  par  messietirs 
les  capitaines  d'iceluy  (ju'il  n'y  survint  ny  rumeur,  ny  désordre,  ny  i>éril. 

»  Derrière  le  théastre  étoient  plusieurs  salles  et  chambres  où  s'habilloient 
les  acteurs. 

»  Liutermède  du  coml)at  des  dieux  et  géautz  se  re  présent;»  de  la  sorte  : 
les  faces  des  pantagones,  qui  durant  le  premier  acte  de  la  p  istonle  avoienl 
paru  champestresen  divers  objeetz.  changèrent  repré.senUmtz  «  <s  rochers  et 
les  entassantz  les  ims  sur  les  aultres.  Il  demeuroit  au  lieu  d'eux  sni  lis  pin- 
tagones  une  certaine  représentation  que  laisse  une  pierre  arrachée.  .\u  lu  ml 
de  ces  hommes,  Jupiter  j)arul  au  ciel  en  un  glolxî  tournant,  qui.  venant  à 
s'ouvrir,  feit  voir  ce  dieu  assis  sur  l'arc  du  ciel,  vestu  d'une  robe  de  toille 
d'or,  avec  sa  couronnn  et  son  sceptre  :  à  ses  costés  l*allas  et  Mercure, 
habillez  en  leurs  habitz  ordinaires. 

»  Sur  téastre  se  feit,  «'t  comme  sur  le  ciel,  un  tint;imarre  et  bruit  ressem- 
blant au  tonnerre,  avec  son  de  tamlnjurs.et  mille  feuz  diversement  artificiel/. 
Jupiter  après,  tenant  dans  sa  dextre  son  fouidre  ardent,  le  lança  sur  les 
géantz.  (jui  mout(V,  sur  les  rochers  le  combattoieut  main  à  main.  .\  l'instant 
et  hommes  et  rochers  furent  abysmez  et  perduz  au  fond  des  enfers,  dispa- 
roissanl  comme  u\\  esclair  à  la  veue,  et  le  fouidre  alumé  courant  et  brui.inl 
sur  le  téastre  dont  les  fumées  étoient  douces  pour  avoir  entré  de>  |K»rfuns 
parmi  la  fouidre.  Le  ciel  s'estant  refermé  et  les  pantagones  ra|>porté  leurs 
faces  silveslres,  le  concert  des  musiciens  a\ec  les  voix  et  le«;  instrument^  de 
toutes  sortes,  chantèrent.  »> 

Deuxième  intermède  : 

«  Sur  le  téastre  parut  une  mer  agité,  et  les  pantagones  changeans  de  face 
parurent  portant  iWs  grotesques  et  rochers,  à  l'un  ilesquel/.  dont  \r  pied  m» 
ixiignoit  dans  les  Ilots  de  la  mer,  parut  Andromède  attachée  a\c. dis, haines 
de  fer.  Du  ciel  ilescendit  l'ersé'i^  sur  le  Pé'gaze  (jue  fort  intiu^tricii-.Miient  il 
faisait  mouvoir.  .\  l'instint  sortit  le  monstre  de  la  mer  a\»v  un  haut  bruit 
et  jaillissemens  de  floLs  (|ui,  s'approchant  pour  dévorer  Andromède,  fut 
empesclié  par  Persée.  longtemps  combattu,  puis  enlin  tué.  Le  chevallier 
après,  iléliant  sa  pucelle  et  la  mett^int  en  croupe  sur  le  Pégaze,  s'en  revoll.t 
victorieux.  Puis  les  chantres  chantèr.xt    » 

L'avant  dernier  intermède  ne  fut  pis  i.-  moins  curieux  : 

«    Les  pantagones  parurent  en   faces  Im>ci|  he  ^\\r  le 

théastre,  marchant  et  passant,  Argus  avec     .  icUcetlu 


LE   THEATRE    A    NANTES 


rcp;ardant  do  ses  cent  yeux  ;  Jupiter  descend  du  ciel  en  une  nue  et  dans  un 
globe  suspendu  en  l'air,  Mercure  à  son  costé  qu'il  feit  descendre  soubz  une 
nue  sur  le  téastre  pour  charmer  et  tuer  Argus  ;  ce  qu'il  feit,  sonnant  du 
flagcollot  On  vit  peu  à  peu  les  yeux  d'Argus  se  fermer,  comme  touchez  du 
sommeil,  estantz  tous  endormiz  ;  Mercure  lui  trenche  le  chef ,  met  la  A-achc 
en  liberté,  qui  s'en  court  sur  le  téastre,  puis  remonte  au  ciel  et  porte  la 
teste  d'Argus  à  Jupiter.  Cela  fait,  le  concert  des  chantres  chanta  avec  les 
instruments.  »        •  . 

Le  quatrième  et  dernier  tableau  des  intermèdes  montra  les  pentagones 

((  en  faces  tristes,  creuses,  noires,  semées  d'ombres,  des. serpents,  de  feux 
et  de  mille  horreurs.  Le  téastre  s'ouvrit  et  lors  parut  la  gueule  d'enfer 
ayant  eu  dedans  le  chien  Cerbère,  jetant  le  feu  par  les  trois  gueules,  Orphée 
habillé  d'un  satin  blanc,  et  à  la  mode  des  anciens  prebstres  de  Thrace,  un 
luth  en  la  main,  parut  sur  le  téastre  chantant  fort  doucement.  Peu  à  peu 
l'on  vit  Cerbère  cesser  son  feu  comme  ravy  de  ceste  douce  voix,  puis  l'ayant 
cessé  de  tout,  permettre  l'entrée  d'enfer  à  Orphée,  qui  devallant  chantoit 
toujours  ses  vers  asoupissant  la  flamme  et  les  fumées  qui  sortaient  de  ce 
creux  manoir,  où  arrivé,  charme  de  sorte  les  esprits  de  son  doux  chant  qu'ils 
luy  rendirent  sa  femme  dont  la  teste  parut  sur  le  téastre  et  hors  de  l'enfer  où 
soudain  elle  retomba  pour  l'avoir  tournée,  et  regardé  derrière  elle.  Orphée, 
se  retirant  triste,  en  piteux  regrets  récita  les  derniers  vers,  puis  le  concert 
des  musiciens  respondit.  » 

Quand  on  lit  ces  descriptions,  on  reste  étonné  qu'à  cette  époque  une 
pareille  mise  en  scène  ait  pu  être  exécutée.  Ce  serait  à  se  demander  si  le  récit 
d'Olenix  de  Mont-Sacré  est  vraiment  véridique.  Mais  comme  le  fait  si  bien 
remarquer  M.  Louis  Lacour,  l'auteur  nous  raconte  les  merveilles  de  sa  pièce 
avec  un  tel  accent  de  franchise,  qu'on  ne  peut  douter  de  sa  véracité.  Nos 
pères  étaient,  comme  on  le  voit,  fort  avancés  sous  le  rapport  de  la  machinerie. 
Il  est  vrai  qu'à  cette  époque,  Rugierri,  le  fameux  alchimiste  de  Catherine  de 
Médicis,  se  trouvait  aussi  au  château  de  Nantes.  Il  est  donc  plus  que 
probable  qu'il  collabora  d'une  façon  active  aux  décorations  et  aux  trucs 
d'Arimène.  Ce  premier  opéra  fut  joué  à  Nantes  avec  un  luxe  véritablement 
extraordinaire.  La  représentation  coûta  au  duc  de  Mercœur  la  jolie  somme 
de  quatre  mille  écus.  Il  en  fut  quitte  pour  élever  encore  les  charges  de  la 
ville,  mais  seulement  celles  de  la  bourgeoisie  et  du  clergé,  car  Monsieur 
de  Lorraine  ménageait  le  peuple,  dont  il  était  l'idole.  En  cette  qualité, 
il  jugeait  bon  de  le  flatter^  car  il  craignait  que  Jacques  Bonhomme  ne  vint 
tout  à  coup  le  réveiller  et  faire  envoler  le  beau  songe  qui,  selon  son  expres- 
sion, durait  depuis  dix  ans. 


coc. 


n^fm^^^^^ 


MOLIÈRE   A   NANTES.  —  TROUPES  NOMADES 


ir,3i)1720 


/."  ti'Oiip''  '/'•    /'lllii^trr  Ti'-aslro.  —  Dtms  qiipllp  si'H''  MoUv,-''  jmin-t-Uf  — 

lllfllfCl'I'lIff     lin     Vit')'!!!'. 


i/kpO'^uk  011  nt>ii>  arrivons,  le  iliéàtrc  s'ôtait  ilf  plus  fn  plus 
l)erf»'Ctionn«''  en  Fran<e.  Corneillo  avait  d('?jà  donné  plu-^icurs 
chofs-d'œuvre  à  la  sc6no  fraiit.aisc.  et  Racinr  se  pri"'p.irait  à 
niaroiicr  >nr  les  traces  ilc  son  illustre  devancier.  De  momiIm- 
iroupi's  de  eomodiens   nomades  exploitaient   la  province,  comme  li- 
iiijonrd'hui    les    tournées    f.rganisées   pour  faire  connaître  les   piwes  en 

N.llli<'>,     jMl      .suil     IIU|)Un,lH'  r,     i-i   III      i'Mli    lll<lli|il'-f   .mx    .iMi^"-   .inii'in.i.ii-. 

Aussi  irouve-t-on  dans  le>  rogistro  municipaux  de  nombreu^-es  traee-  du 
passage  des  comédiens  dans  notre  ville. 

Malheureusement,  les  détails  manquent  absolument.  <,Miolles  ont  éi<'  les 
|)ièces  jouées  à  Nantes  pendant  <  efte  j)ériode  ?  Malgré  des  recherche^ 
longues  et  minutieuses,  il  m'a  été  impossible  d'en  découvrir  la  liste.  J'ai 
luéme  du  ni'estimer  très  heureux  do  trouver  deux  ou  trois  noms  (fe  piêce> 
que  je  citerai  plus  loin. 

Il  est  bien  marqué  sur  les  registres  que   les  coniédieDs  ont  donné    la 

nomenclature  «le  leurs  pièces;  mais  le  greflier  a  négligé  de  transcrire  celte 

nomenclature  dans  le  compte  rendu  des  delibi'ralions  du  bureau.  Cette  lactuie 

st  des  plus  regrettables  ;  nous  en  aurons  de  bien  plus  gravi's  à  déplorer  plus 

ird.  Il  faut  bien  l'avouer,   nomlue  de  doeameuis  «|ui  auraient  pu  s.^rvir  a 

l'histoire  du  théâtre  à  Nantes  ont  disparu. 

C'est  à  la  date  du  .'»  mai  ir»:{<),  que  l'on  trouve,  dans  les  arclu\e^  mi; 
pales,  la  première  mention  touchant  les  comédiens.   Il  N*;igii  d'une  ti 
qui  était  à  .Vngers.  Le  bureau  ivfusa  à  ces  artistes  la  p«'rmission  de  re|)a'si    ' 
des  tragi-comédies  «  quant  à  présent  pour  plusieurs  cous idérat ions  u  <|Ui  ne 
-ont  pas  indiquées. 


LE   THK.VTHI-:    A    NANTES 


i'ji  IfîlT.  il  se  trouvail  aussi  une  troupe  do  comédiens  à  Nantes.  L'6ta- 
blisscnicnf  du  droit  des  pauvres  dans  notre  ville  remonte  à  cette  année.  Les 
conditions  étaient  alors  plus  douces  qu  aujourd'hui.  Voici  le  texte  de  la  déli- 
bération telle  qu'elle  existe  dans  nos  archives  : 

Du  diiuanclie  29  décembre  1(M7.  n  Sur  ce  qui  a  été  représenté  au  bureau 
(pa  •  M.  du  Perron),  qu'en  plusieurs  vilbis  du  royaume  les  eommédiens  qui 
di'sirent  monter  sur  le  téastre,  n'en  reçoivent  permission  qu'à  condition  qu'ils 
jouront  ung  jour  pour  les  pauvres  de  l'Hostel-Dieii  de  la  ville  oîi  ils  sont  ; 
ce  (|uy  se  p(MJt  aussi  bien  pratiquer  dans  ceste  ville  que  ailleurs  et  qu'il  serait 
facile  de  le  faire  à  présent  qu  il  y  a  une  troupe  de  eommédiens  en  la  ville. 
L'allaire  mise  en  délibération,  a[)rès  avoir  mandé  au  bureau  le  sieur  de 
Be.nipré,  l'un  des  coinniédiens.  auquel  on  a  fait  entendre  que  de  l'advis 
commun  du  bureau  conforinémenl  à  ce  qu'il  se  pratique  aux  bonnes  villes  de 
ce  loyaume,  les  conrmé(hViis  jouront  un  jour  ouvrable  tel  qu'il  plaira  au 
bureau,  pour  les  pauvres  de  l'Iiostel-Dieu  de  ceste  dicte  ville.  Et  en  l'argent 
rendu  à  la  port(^  du  Jeu  de  Paulnu^  pour  la  représentation  des  dicis  pauvres 
se  tiendront  si  besoin  est  ung  tie  Messieurs  les  eschcvins  et  ung  de  Messieurs 
les  F'èi-es  des  pauvres.  » 

L'année  1048  restera  justement  célèbre  dans  les  annales  de  notre  théâtre. 
C'est  celle  oîi  Moiière,  qui  alors  courait  la  province,  vint  donner  à  Nantes, 
du  23  avi'il  au  IS  mai  1048,  une  série  dereprésentations. 

On  lil  dans  les  registres  municipaux,  en  date  du  23  avril  1648  : 

((  Ce  jour,  est  venu  au  bureau  le  sieur  Morlière  Tsic),  l'un  des  eommé- 
diens de  la  troupe  du  sieur  Dufresne,  qui  a  remonstré  que  le  reste  de  la  dite 
troupe  doibt  arriver  ce  jour  en  ceste  vilb;,  et  supplyé  très  humblement 
Messieurs,  leui'  permettre  de  monter  sur  le  téastre  pour  y  représenter  leurs 
eomédyes.  »  Le  bureau  remet  au  dimanche  à  se  prononcer.  Le  dimani  he 
2(î  avril,  [\L  de  la  Meillerayc,  iiouverneur,  étant  malade.  «  déiTenses  feut 
faictes  aux  eommédiens  de  conmieiicer  à  monter  sur  le  téastre,  jusques  à  ce 
qu'on  aye  nouvelles  de  sa  convalescence.  » 

Le  nom  de  l'immortel  auteur  de  Tartuffe  a  été  mal  orthographié  par  le 
scribe  chargé  de  la  transcription  des  délibérations.  Il  n'en  faudrait  pas 
con<dure  de  là  que  Morlière  et  Molière  font  deux.  Il  n'y  a  pas  qu'à  Nantes 
où  le  grand  comédien  a  laissé  des  preuves  certaines  de  son  séjour  à  cette 
époque,  dans  les  provinces  de  l'Ouest.  D'ailleurs,  M.  de  la  Nicollière- 
Teijéro  le  savant  archiviste  de  la  ville,  a  découvert,  dans  les  registres  de 
l'église  Saint-Léonard,  l'acte  de  naissance  de  l'enfant  de  Pierre  Réveillon  et 
de  .Marie  Brel,  comédiens  de  la  troupe  de  Dufresne.  Cet  acte  est  signé  de  la 
plupart  des  camarades  de  Molière,  et  entr'autres  des  Béjart.  La  compagnie 
de  comédiens  dont  faisait  partie  le  grand  comique,  était  donc  bien  véritable- 
ment à  Nantes  en  1048,  et  le  génie  sublime  dont  la  France  est.  à  bon  droit. 
-i  fiète.  s'\   tiDUviiil  t'gal(Miieiil. 

M.  Lduis  de  Ke:j.'an  (Emile  (  iimiaud)  a  révoqué  en  doute  la  ve:u:e  d(! 
Molièie,   sous    !•   jinHcxu;  sni\aiii.    Molièiv,  no-.i-  dit-ii.  ••1:11;  le  /  li."  d-'  la 


MOLIÈRE.  —   LE8  TROUPE8    v,.vfAi.ic  U 


troupe  (Je  Vlllustrr  Thrntn',  et  dans  les  registn-s  municipaux  c'est  Dulresne 
<|ui  est  désigm-  eornino  dirtîcteur.  Cela  suffit  à  M.  de  Kerjean  pour  traiter 
d«'  l«''.i,'rMd«'  \r  sr-joiir  dr  M<di«;re  dans  uotrv  \'i\\r.  Il  «mi  profit»'  pour  railb-r 
«Ml  passant  C:imilh>  Mrilinct  sur  les  pag»'s  qu'il  a  cou.sacnfs  au  grand  comé- 
dien. Iri,  M.  (Jrimaud,  iuiprinjnur,  repralt  sous  le  noble  K  barn- de  son 
psi'udonynir.  Dans  \v  «-iitalogur  il-  la  l)il>liotli6qiie,  M.  P<^hant 
l'assoriion  tir  M.  île  Kerj«;tn.  Il  avoue  francliriuent  <|U<*.  |K'ndaiii  .(u.  i-jn' 
if'iiips.  il  a  doui»',  lui  aus-i.  de  la  vèrarit«'*  d«'  li  tradition,  mai»  «|u'.i\anf 
trouvi'  d.ins   lu  liil)liolhêt|ue  de  M.  tle  Soleiuiies  la   preuve  i-videntc  qu'il 

islait   dans   la   troujM'  d«'  V/tluMtrr  Thëiitri'  un    nommé  Dufn-sne,  il  lui 

'lublc  dorrna%Mnt  prouvé  qu«-  Molière  e>t  bien   venu  à  Nante>.  Poursuivi 

par  se>  «réauri» m>,  Molii're  avait  peut  être  tre.\rellent«'N  rais<»ns  |»our  ne  jias 

fif^iirer  à  ce  moment  à  la  tête  d'une  compaifiiie  de  couHnliens.  et  il  a  pu 

prendre  Dufresiie  comme  préte-nom. 

Le  prix  du  s|)ect;icle  était  fixé  jKir  |K'rsonnt' a  lô  >ous  tournois  pour  les 
|)icccs  nouvelles  et  à  10  sous  pour  celles  déjà  jouées.  La  repré.stmtation  pour 
les  pauvres  eut  lieu  le  18  mai  KA^. 

D'après  Camille  Mellinet.  Mcdière  joua  pendant  s«tii  s«'j(»iir  -i-*  deux 
pièces  de  Ui  Jaloiu<ie  du  /larhouillc  ri  <lu  I)ortriir  Amourrux.  L'auteur  do 
la  Miisiquo  à  Xante»  a  lU'jilijîé  de  nous  indiquer  d'où  vient  ce  renseigne- 
Mjent  ou  sur  quoi  il  fonde  son  assertion.  C'est  d'ailleurs  le  grand  défaut  de 
Camille  Mellinet.  Dans  ses  nombreux  travaux,  tous  si  utiles  et  si  curieux, 
il  a  troj)  souvent  le  tort  de  m»  jkis  signaler  ses  souree.s.  Lorsqu'il  s'agit  de 
|)oints  liistori«|ues  à  élucider,  c'est  i>ourtant  fort  nécessjiire.  Je  laisse  donc  à 
Mellinet  la  complète  respons;ibiIité  du  fait  qu'il  avance.  Que  Molière  ait 
joué  à  Nantes  les  diHix  petites  comédies  qu'il  venait  de  composer,  cela  me 
parait  fort  probable;  mais  connue  je  n'ai  rien  trouvé  dans  les  archives  sur 
ce  sujet,  et  qu'il  n'existei  point,  à  ma  connaissance,  d'autre  source  où  l'on 
puisse  trouver  des  renseignements  sur  le  séjour  de  Molière  dans  la  cité  nan- 
taise, j<»  me  gardi'rai  bien  d'  rien  affirmer. 

D'après  la  tradition.  Molière  joua  dans  la  salle  du  jeu  de  Paume  de  la 
nie  Saint-Léonard.  Cette  salle  fut  démolie  en  18^U>.  Son  emplaceujent  est 
a«'tuelU'nu'nt  oceU|H''  \>ar  un  mag-asin  de  droguerie.  I  ■...-•.  i!.t,..i>  ...iv  ii.i-  . 
été  placée  sur  la  fac.ade  [)ar  les  soins  d«'  .\L  Verger . 

ICI    EXISTAIT    us    AN<IEN   JEU    DE   PAI'ME 
I»KTRUIT  EN  IXttî.  DAN9  LEQUEL 

IN  M  O  L  I  K  R  ». 

JiU  A    l\    roMKlHi:    IN    l'»l>^ 

Aujounl'bui,  cett»'  plaque  est  dans  un  piteux  èiai  :  les  lettres  sont  etîacées. 
il  est  fort  difficil.>  d<-  les  déehilfr.T.  Il  est  xériiablement  lionieux  de  lai*M«r 


12  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 

ainsi  rinscri))tioji  destinéo  à  perpétuer  le  souvenir  tlu  séjour  à  Nantiîs  de 
r.'inteurde  tant  de  chefs-d'œuvre. 

Pourtant,  il  est  très  probable  que  ce  n'est  point  dans  cette  salle  (|ue 
Molière  donna  ses  représentations.  Les  troupes  de  passage  avaient  l'habi- 
tude déjouer  dans  le  jeu  de  Paume  de  la  ville.  Or,  le  jeu  de  Paune  de  la 
rue  Saint-Léonard  appartenait  à  un  particulier.  Celui  de  Messieurs  du 
bureau  était  situé  dans  les  Fossés  Saint-Léonard,  à  peu  ])rès  en  face  de 
l'église  de  ce  nom,  qui  occupait  le  fond  des  jardins  de  la  mairie  actuelle. 

A  la  date  du  17  mai  lfll8,  dans  le  compte  rendu  de  la  délibération  au 
sujet  de  la  j)ièce  due  à  l'hôpital,  il  est  dit  «  qu'il  sera  rais  ordres  à  ce  que 
l'argent  soit  receu,  à  la  porte  du  Jeu  de  Paulmes,  par  personnes  que  Ton  y 
commettra  a  cet  effet.  »  S'il  s'était  agi  d'un  autre  Jeu  de  Paume  que  celui 
de  la  ville,  on  l'aurait  spécialement  désigné,  car  il  en  existait  un  certain 
nombre.  Je  suis,  en  cela,  de  l'avis  de  M.  de  la  Nicollière,  et  j'ai  tout  lieu 
de  su[)poser  que  c'est  par  erreur  qu'on  a  cru,  jusqu'ici,  (|ue  Molière  donna 
SCS  représentations  rue  Saint-Léonard. 

Molière  et  sa  troupe  auraient  ])eut-êtro  prolongé  leur  séjour,  si  un  nommé 
Dominique  Ségalla,  italien  de  naissance  et  montreur  de  marionnettes  de  son 
état,  n'était  venu  établir  une  terrible  concurrence.  Les  spectateurs  délaissè- 
rent le  grand  comédien  et  allèrent  applaudir  les  pantins  du  bateleur.  Le 
caractèi'c  d<'s  Nantais  n'a  jias  changé  depuis  cette  époque,  puisque,  aujour- 
d'hui encore,  nous  vo\oiis  le  public  abandonner  le  théâtre  et  les  œuvres  de^- 
maîtres  pour  courir  au  cirque,  admirer  les  grimaces  des  clowns  et  battre  des 
mains  aux  dislocations  de  l'homme-serpent. 

Il  existe  plusieurs  petites  pièces  sur  le  séjour  de  Molière  à  Nantes.  J'en 
parlerai  plus  tard,  à  la  date  de  leurs  représentations. 

Camille  Mcllinct  a  publié,  sur  le  même  sujet,  une  scène  dramatique  qui 
n'a  jamais  été  jouée.  Cette  esquisse,  qui  met  en  scène  Molière,  M">^"de  Sévi- 
gné,  M.  Harrouys  et  un  gentilhomme  bel  e-sprit  nantais,  le  marquis  Ragault 
de  la  Hautière,  est  vraiment  fort  intéressante  et  mérite  une  mention  spé- 
ciale. 

A  partir  de  l(IU).  les  troupes  nomades  deviennent  de  plu>  en  plus  nom- 
breuses, .l'ai  extrait  des  registres  les  principales  délibérations,  au  >-uj(M  des 
comédiens.  Ces  documents  ont  un  certain  intérêt  : 

2(5  août  1619. —  «  Ce  jour,  le  sieur  Dupré,  commédien,  est  vemi  au 
l)ureau  et  a  supplié  Messieurs  luy  permettre  de  faire  monter  sa  troupe  sur 
h*  téasire,  en  ceste  ville,  et  représenter  nombre  de  pièces  qu'il  a  données  p;u' 
(léclaration  et  qu'il  se  contentera  de  six  sols  par  persontie  qui  désireront  la 
voir.  L'advis  counnun  du  bureau  arrête  permettre  au  sieur  Dupré  et  à  sa 
troupe  (le  monter  sur  le  léastre,  à  la  charge  de  iloimer  une  pièci^  aux  pauvres 
de  riiospital  de  cette  ville,  laijuelle  pièce  sera  choisye  par  le  bureau.  » 

•-'7  septembre  1049.  —  «  Ce  jour,  h;  sieur  Dupré.  commédien.  est  venu  au 


LES   TH0LPB9   NOMADE» 


biinNiii  nt  ;i  ;ipi'' 
«•Il  rc-^tf  \  illc  1 
la 

vil,    . 

preniin;  «■!  choisn  ji  |  ;.(•••  .;•    >    •..  r., 

la<|lH'l|i-    si'lM       .1.:  .  -.  •     .  .      i.  .1 

Dii|>r<^. 

'"est  la  promi^re  fol»  que  l'on  irouv»'.  dans  lf\s  rcgisiros,  le  nom  d'une 

pii'ce. 


la  troiii  laiiips.  !)<•  T  . 

Il  1 

rc'i 

pour  li.'.s  jJici  rs  ijUi  oui  C}    Uis 

14  avril  Vt't'*. —  «   l'iio  i  rn.ili.iK    ,\  int   riî.i  Ar,<^.fr   un 

têiislro  au  jeu  de  Pauliufs  d.  <ls 

aux  carrnfours  ot   pi ■  "  lu 

bureau,  cl  faite  ce  <|  ix 

mandez  de  venir  aiii  iti* 

par  ••ul\  f:ii('t«'  rxni-  wr 

sui  -<•- 

qii'  'T 

d'icfUca  cl  *'ij  il  tiiie  puiii    Us   j) . 

ville,   N'ur   a  f't  .-iti,    Mf-ruii^    d 
iidalr.   r 

lit   niai    l<i->).     --      '"    i'-l.  'VI    MCIM     '  '•IIMIi;'»!!    <l"    IM" 

prendre  que  huit  soh  pa' 

2-  juin  Wi.*!.'!.  —  «    '  .ti   »i«-iii  '  '  ne 

prendttî  que  dix  sols  ,       ,  .et  qu<'  :;  ,  ni 

la  comniédie  de  JutUcqur,  «pie  lo  l)uri'aii  a  clioisvf  |>our  les  paux  : 

Tniay  H'm'i.  —  ..  P  !  v  ..      •  „ 

do  ne  pn'Uilre  que    ,  ••$ 

nouvelli'-<  tprils  ont.  mi  iKs   mat!iiui>.   ili-.Mjiullcs  il.%  prmùront 

davanlig*'.  » 

il  est  ri'grellable  do  ne  p:is  "^avoir  ntudlcs étaient e^s doux  pièces  nouvelles 
ù  il  y  avait  des  macliine^  ne  pas  jwssrdrr  le  «oiupi:    n'iidu  de 

de  leurs  représentations.  Il  atr  ;ii|>:irrr  Li  mise 

en  scène  de  «es  «eu  vros  avec  .-.>  ,,,,,.    ..  m   .  .  < 

dont  j'ai  donné,  dans  le  ehapiiio  \  .  une  niu> 

:!  avril  l^îriM.  —  î,n  frotip  •  rln  <;ieitr  T>tirnrinier  rdttir'nt   It  p-Tin^^çinn  df' 
juii 

A  partir  de  celle  époque,  la  repp'-"'»»  ••!»'i  pour  I 
par  un  droit  dont  le  taux  varie  a\>  troupe. 

Les  troupes  des  sieurs  de  Villena^vt',    du  Cormni  la 


I  1  Lie    THKATKF,    A    NANTRS 


Coiistiire  donnent  des  représonlations  pendant  la  fin   de  l'année  Kmi;  ci 
l'annéo  lO.*)?. 

A  la  date  du  17  juin  KlôlJ,  il  existe  nne  très  curieuse  délibération  du 
luirciLi,  (|iii  j)eint  l)ien  l'esprit  de  répof|ne.  La  voici  '• 

»  Sur  ce  qui  a  été  représenté  par  M.  le  Procureur  syndic,  en  rabsence  de 
M.  le  Procureur  du  roy  de  la  prévosté  de  ceste  ville,  qu'en  toutes  les  bonnes 
villes  de  ce  royaume  pour  la  vénéracion  que  l'on  doibt  au  Saint-Sacrenieni 
de  l'autel,  l'on  ne  permet  point  pendant  l'octave  de  la  Feste-Dieu  que  les 
commédiens  ny  aultres  gens  fassent  auculnes  représentations  publiques  de 
téàstres  ;  iiéanmoins,  certains  commédiens  (|:ii  sont  à  présent  en  ceste  ville, 
forment  le  dessing  de  représenter  leurs  comédyes.  et  à  ceste  fin  ont  rais  les 
allielies  et  placards  par  les  carfours  de  ceste  dite  ville,  et  fauxbourgs,  qui  est 
une  yrré  vérence  de  ceste  auguste  sacrement,  contre  l'honneur  et  gloire  de  Dieu 
et  édification  du  prociiain,  requérant  y  estre  pourvu.  '> 

De  l'avis  général  du  bureau,  il  fût  défendu  aux  comédiens  de  représenter 
leurs  pièces  pendant  l'octave  de  la  Fête  Dieu.  Quantum  mutatus  ab  illoU 

2.")  mars  lG(!f).  —  Permission  accordée  à  Richemond  et  à  sa  troupe,  à  la 
condition  «  d'être  modestes  en  leurs  comportemens  et  de  ne  prendre  (jue 
quinze  sols  pour  chaque  piéc(>  connue,  et  vingt  sols  pour  chaque  pièce  nou- 
velle, et  de  payer  deux  pist.oles  pour  les  pauvres.  » 

25  avril  Kîfîl.  —  Autorisation  à  la  troupe  du  sieur  Fillandre.  ('eiii-  lois. 
le  droit  (Xi^^  pauvr(>s  est  nx('  à  la  somm(»  de  trente  livres. 

2Ô  mai  l(i.'14.  —  Autorisation  à  troupe  du  sieur  de  Boncourt. 

Le  droit  de  l'enlrée  permanente  des  autorités  municipales  au  théâtre  date 
du  27)  avril  1GG5.  Ce  jour  là,  le  sieur  Richemond  étant  venu  au  bureau  pour 
obtenir  l'autorisation  de  jouer  des  pièces,  cette  autorisation  lui  fui  accordée 

((  A  la  charge  oultre  celles  déjà  connues  de  mettre  un  banc  dans  le  jeu 
de  Paulmes  pour  Messieurs  du  corps  de  ville,  lesquels  pourront  aller  à  la 
comét.l\e  loisque  bon  leur  semblera.  » 

20  avril  1066.  —  Permission  accordée  aux  sieurs  Pierre  Chasteauneuf  et 
Nicolas  Besnard. 

;}  juillet  l(i()7.  —  Permission  à  la  troupe  de  Richemond  «  à  condition  d.> 
)ie  rien  jouer  et  représenter  contre  notre  saincte  religion.  » 

27  avril  1(580.  —  Permission  au  sieur  de  Ciuisteauneuf. 

;}  août  IGHO.  —  Autorisation  accordée  à  Delagarde,  «  commédicn  de  Son 
•Vitesse  Royale.  » 

1GS2.  —  Autorisation  aux  comi-ditMis  royaux  de  (Jliambord. 

1(!  avril  l()8'i.  —  Permission  aux  conu-diens  de  troupe  Lyonnaise  d'«'lever 
leui'  iln'àlre  dans  le  jeu  de  Paume  du  ("ha|)eau-Rougo. 

12  a\ril  l()^>^).  —  Autorisation  à  la  troupe  royale  de  Chambord.  «  à  condi- 
tion de  ne  représenter  aulcunes  pièces  pendant  le  service  divin,  ni  (pTelles 
soient  deshonnestes  ou  contre  la  religion  catholique.  » 

29  juillet  IGKIî.  —  Permission  à  'l'oulxd  de  Raselis  u  commédien  de  la 
seule  troupe  de  Madame  la  Dauphine.  •> 

2  mars  1GS7  et  2"»  janvier  K^t^'^.  —  Même  troupe. 


LKS  rnonpKS   XOMAhKS  I'. 


Coinino  on  I»»  voit,  \os  rm  ipagni'^s  d»- 

f'om<^<li(MH  >onl  fori  p.iiivros,  v> .  i ;....,, . ..,.,;. 

-*.'»  janvier  IfJHS.   —   [».rmi->i"n    lU    -i.ur  ToiiM  «  dr  faire  dresser  un 
léasirr  «M  «l'y  j<>ii.r  iH.t  ..g,  mais  no  pourra  jouer  li<^ 

(liin.'iiichr.^  l't  festrs  «|u'a|: -< 

I'  i|  I      Mfllini'f.  le  prpniiprop<'?M  fut  jou(^à  NantcM,  en  10M7, et  s'appelait 
IcH  Pfigini,  ur.    l^»s  Pygmrrn.  «jui  vo  tr«>uvcni,  dans  no* 

arcliives,   .  •  ,(.■>  1',.,  ,.  fun'nt  rcj.r  n  ICKK.   \\% 

avaient  ('U-  ,  .; %  d'un  a;.;..     .,„  .,i,  .•InVifi»*,   js,,,...  -  .,.   i  ,   »  -  '• — n. 

muniquo  de  Cainhert.  Cet  opéra.  ct6^  â  Londres,  fut  jou<*  jwur  .  .  r». 

fois  en  Fronre  à  Nantes,  sous  la  diriH'tiun  d'un  nommé  Aumont.  A  oeti** 
(époque,  on  tlonna  aussi  d<'U\  autres  œuvr»»s  de  Cambt^rt  :  I^omor-r  »m  |«>s 
f'rini'Mft  Plaisirs  rli'  rAiiiour. 

:   avril    VV.YA.     -  PiTun'ssion  au  sieur  Honneuil  «  d'élever  un  l<?:iNlre  a 
condition  de  n'y  représenter  aulcunes  piiVes  infamant*^  ou  inallionn-' 

Pour  toutes  CCS  troupes,  ainsi  que  pour  c«dlc>.  qui  \i>' 
lions  sont  les  mêmes  :   Kepréseni.ic'on  m  l»"i.i'f;,  .•  ■?.< 
et  banc  pour  messieurs  de  la  ville. 

•  mai  ]i\\H\.  —  Troupt»  de  S<>ipion  Clavel. 
iX  mars  l(î!»7,  1 1  avril   MVM,  \A  M'pteinl>re  P'/js.  _  Troupe  de  L 

7  avril  ITOI.  —  Troup*'  <i''  l'i  ti,.  (^ ,  i.t   ,!; i ,i...-  •.  i    ...  i 

de  rilùtel  de  Bourgogne 

l.'t  mars  1701  et  i:i  avril  17n:,.    -  Iioujkj  I)ut4'illav. 

M  mars  17UG.  -  Troup*-  «le  Touleville. 

'^  avril  1707.  —  Permission  au  sieur  Dumnnt.  dir«v»t«»Mr  do^  *<oti|. 
du  comte  de  Toulon- 

'22  »)clobre  17o7.  -     : 
du  CliaïKîau-linuge. 

H)  avril  17«W.  —  V  -leur  Ucbclhi  u  clc\ci  uu  ..  icoAlre  *>iUus 

le  jeu  de  Paume  du  '  :       .;i'. 

2  novembre  1720.  —  Permission  au  sieur  La  (traniçi*  de  jouer  au  CliapcMu* 
Hou(;e. 

Pendant  toute  la  périoile  de  17«iS  a  172(),  il  n'est  pn^  fait  nx^-oi.ui  ...... 

seule  fois,  dans  les  registres,  des  troupes  de  eominliens.  V.'o^i  for 

car.  a    cette  é]vxiuo.  le  pMit  du  ih'Vitre  était  ivi>sé  définitivement  dans  li>s 

mœurs.    Peut  être  les  troup<^s  se  midtipliT "       •  "  •  "      ,,• 

contentait,  au    bureau,  de  donn<*r  une  au;  r> 

pourquoi  nuMilionner  les  unes  et  se  tnire  sur  les  autres  ?  Peut-^*lrt>  auvsi 
y  avait  il  alors  ui  ri»  ^  Nair        ^'  '  i.» 

et  refouillé   |«s  A  ri.n  tr  t. 

définitive. 

Kn  1721,  il  fut  permis  au.\  comédiens  de  Michel  Lecocbais  de  r<»prés«»ni*»r 


16  lA^   TIIÉATR15    A    NANTES 


((  ]:i  coiiK'tl)  ('  ;iH  lii;U  de  Imi-  (•>limii>-L-iiii-iiu  j^'HiL  v  ii  t(ii  il>  in: .-.  i-<  .u  l'-m  y^jiHl 

de  la.  bioisciaiico  et  des  bonnes  mœurs,  à  la  charge  de  donner  aux  écoliers  du 
droict  douzi-  billets  francs  de  parterre,  clia((né  jour  de  représentation,  non 
compris  celui  de  l'écolier  qui  aura  soin  des  billets,  parce  que  lesdits  écoliers 
observeront  une  conduite  rt-gulière  pendant  les  représentations,  et  que 
déiïenses  leur  soient  laites  d'y  faire  aucuns  tioubles,  et  d'y  entrer  armés 
d'épées,  de  cannes,  de  bâtons,  sur  les  peiu<'S  portées.  » 

!!  janvier  172.").  —  Le  bureau  autorise  le  sieur  Mysoli,  qui  avait  obtenu  le 
privilège  de  jouer  dans  toute  la  Bretagne,  à  repl-ésenter  .ses  pièces  à  Nantes. 

10  mars  172^.  —  Permission  à  la  troupe  du  sieur  (iérardy. 

Pendant  ilouze  ans,  on  ne  rencontre  plus,  dans  les  Archivés,  trace  d'une 
autorisation  accordée. 

Par  contre,  à  chaque  instant,  on  trouve  montioii  de  l'invitation  faite  ])ar  les 
Pères  de  l'Oratoire  à  Messieurs  du  bureau,  pour  venir  écouter  la  tragi'dieou 
la  comédie  interprétée  par  les  élèves  du  collège. 

Dans  une  société  musicale  dont  les  réunibns  avaient  !i(Mi  rue  de  la  Fos>e. 

«  On  ne  se  bornait  pas  seuhMnentà  la  musique  de  concert,  nous  dit  Camille 
Mellinet.  On  jouait  aussi  l'opéra,  que  l'on  faisait  mémo  imprimer,  en  inscri- 
vant en  tête  du  titre:  Concert'  de  Nantes.  J'ai  retrouvé,  avec  ce  titre,  chez 
Pasquier,  bouquiniste  à  Nantes:  le  JaloKX corrigé,  opéra  bouffe,  sans  nom 
d'auteur,  à  trois  personnages  ;  Almazis,  acte-ballet,  avec  chant  et  chœurs 
d'indiennes;  les  Fcies  (jrecques  et  romaine»  ;  les  Fêtes  de  l'Hjimrn  et  de 
t Amour  ;  les  Amours  du  Temps  ;  Plaire.  >> 

Les  mots  hymen,  amour,  portèrent-ils  ombrage  au  clergé  ?  C'est  i)rolial>Ie, 
car  le  \''\  avril  1753,  M.  le  doyen  prit  un  arrêté  où  il  déclarait:  «  Qwe, 
suivant  les  instructions  du  chapitre,  il  avait  fait  déffenses  à  M.  Nicolas 
Thielin,  diacre  d'oflice,  d'aller  au  concert.  )> 

Voici,  d'après  des  documents  que  j'ai  découverts  dans  les  Archives  de  la 
ville,  les  noms  des  directeurs,  depuis  l'année  173S  : 

1738.  Mus,  Desforges  et  Leroi.  —  1740,  Loinvillect  Francis(|ne.  —  174i\ 
Fierville  t>t  Deschamps.  —  1743.  H  Lis  et  Desforges. 

A  la  date  du  14  août  1743,  est  enregistrée  cette  délibération  intéressante  : 

«  Il  a  été  arresté  (pi'il  sera  fait  une  loge  dans  l'appartemenl  appart(^- 
nantau  sieur  Bézier,  où.  se  représente  la  comédye,  pour  y  placer  Messieurs 
du  bureau,  en  remplacement  du  l)anc  que  la  communauté  y  avait  ancienne- 
ment, le  tout  suivant  l'usage  qui  se  pratique  dans  les  autres  villes  du 
royaume.  » 

Si  j'en  crois  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque,  riniolérance  catholique 
contre  les  gens  a])partenant  au  théâtre  sévissait,  à  Nantes,  en  l'an  de  grâce 
1714.  En  effet,  le  14  janvicu'.  un  comédien  ('tant  mort  en  refusam  de  -e 
confesser,  son  corps  fut  jeté  dans  les  fossés  Merca>ur,  où  il  resta  jusqu'à  ce 
que  des  personnes  plus  humaines  que  les  ministres  de  Celui  qui  prêcha 
l'Amour  \miversel  et  \o  pardon  des  offenses  vinssent  l'en  retirer,  pour  le 
j)orter  au  ciuuMière  des  protestant--. 


\\ 


LA  SALLE   DU    BIGNON-LESTARD 


PRKMIEKB    PKKIODK 


1725-1788 


Al  Montnnsier .  —  Cnllot-iVUerbois.  —  CmurriHc.   —  Laricf.  —  */"••  D^'ifilanJ^  et 
Lt'nfanf.  —  /Inrrrfofe*.  —  Appointements  des  artisteë  ti  celte  i^oque. 


H*^}^/vV^<)is  arrivons,  maintenant,  à  l'époque  de  la  premièn'  salle  de 

^r^Yr-^)]  spectacle  élevée  à  Nantes.  Celte  salle,  siluw  rue  du  HiKii<>n- 
'.    Lestard,    aujourd'hui    rue   Kub<*ns,   occupait   l'emplacement 

L'  •  --.  compris  entre  l'imprimerie  actuelle  de  la  rue  du  Chapeau- 
Roufçe  et  le  n*  G  de  la  rue  Rubcns.  L'entrée  princi|>ale  du  théâtre  éUiit  sur 
o<!tte  dernière  nie.  C'est  donc  par  erreur  que  le  Vieux  Nantais,  dans  ses 
souvenirs  si  inlt'rcssanls  et  si  curieux,  a  ccrit  que  l'hôtel  du  Phare  dr  la 
Loire  avait  été  l)dli  sur  le  terrain  de  l'ancienne  sxille  du  Bignon-La>tard. 

L'origine  de  ce  théâtre  est  d'ailleurs  fort  obscure,  et  ce  n'est  pas  sans 
peine  que  je  suis  arrivé  à  reconstituer,  d'une  fai.-on  à  peu  prt»s  certaine,  l'his 
toirc  do  SOS  commencements. 

Ll  d'alMjrd.  la  date  man<|uc  ;  nulle  part  je  n'ai  trouvé,  dans  les  registres 
municipaux,  une  délib«'*ration  première  touchant  une  salle  de  spectacle  à 
élever  rue  du  Higiion-Lest.ard.  Mellinet.  dans  son  Histoire  rfr  la  Afnsitjue, 
passant  en  revue  les  princip;iux  faits  relatifs  au  théâtre,  écrit  brièvement  : 
«  De  \Cà\0  à  l(î80,  constru«lion  de  la  première  salle  de  spectacle,  rue  du 
Bignon  Lcstird,  établie  et  surveillée  par  des  négociants  de  Nantes,  sous  la 
régie  du  sieur  Desiuarets.  »  L'auteur  de  la  Commune  et  la  Milice 
dr  Xantrs  s'est  trom|H^  de  prî'S  d'un  siècle. 

Mn  1(>8(),  les  représentations  se  donnaient  tout  simplement  dans  les  diffé- 
rents jeux  de  paume.  Au  fond,  l'on  dressait  des  tréteaux  sur  lesquels  on 
élevait  le  théâin^.  Ou  rempliss;iit  ensuite  la  s.Ule  de  bancs  et  d*  '  *'  -  ts 
autres  sièges  plus  ou  moins  cotnmodes,  et  c'est  ainsi  que  nos  |-  u- 

daient  tragédies,  comédies  et  opéras. 


18  LE    THÉÂTRE    A    NANTES 


Co  qui  projivo  cluircnient  l'erreur  de  Mellinet,  c'est  que  Desiuarets  élait 

(lircrrfeiir  vers  17H0.  11  n'est  pas  question  do  lui  avant  cotte  époque. 

D'ailleurs,  ou  n'a  qu'à  se  reporter  au  chapitre  précédent,  dans  lequel  j'ai 
cit(''i  toutes  les  troupes  dont  j'ai  pu  relever  les  noms  dans  les  Archives,  et 
l'on  verra  que,  souvent,  le  jeu  de  paume  dans  lequel  elles  devaient  jouer  est 
indiqué.  Il  est  donc  bien  évident  que  pendant  toute  la  fin  du  dix-septième 
siècle  et  la  première  moitié  du  dix-huitième,  Nantes  ne  possédait  pas  encore 
de  véritable  thécâtre.  En  1743,  —  j'en  ai  donné  la  preuve  la  plus  évidente,  — 
les  représentations  se  donnaient  dans  r appartement  du  sieur  Bézier.  Je  n'ai 
pu  décoLivrir  où  se  trouvait  cet  appartement. 

Cependant,  à  peu  près  vers  cette  époque  —  il  m'a  été  impossible  de  fixer 
la  date  exacte  —  un  nommé  Tarvouillet.  installa,  rue  du  Bignon-Lestard.  un 
commerce  de  traiteur.  Il  faisait  nopces  et  festins  et  construisit  un  lieu  ronrert 
pour  recevoir  les  convives.  C'était  la  salle  Leduit  de  l'époque.  C'est  là  l'ori- 
gine du  théâtre  du  Bignon-Lestard.  Le  commerce  de  Tarvouillet,  florissant 
à  l'origine,  tomba-t-il  plus  tard  en  décadence?  Un  rival  plus  heureux  eut  il, 
de  préférence  à  lui,  la  vogue  des  repas  de  fêtes?  Je  ne  sais,  mais  ce  qu'il  va 
de  certain,  c'est  qu'il  loua  sa  salle  aux  comédiens,  après  avoir  fait  faire 
quelques  aménagements  des  plus  rudimentaires. 

1745,  Direction  Leneveu.  —  1745,  Direction  Labatte  et  Guy.  —  1746, 
Direction  IIus  et  Desforges.  —  1747,  Direction  Dorville.  —  1748,  Direc- 
tion Giraud.  —  1750,  Direction  Demarignan.  —  1753,  Direction  Bessac.  — 
1759,  Direction  Stigny  et  Lebon.  —  1769,  Direction  Bernaud. 

Sous  la  direction  Demarignan,  en  1750,  voici  quels  étaient  les  prix  des 
places  :  Premières  loges  :  40  sous  ;  Secondes  loges  :  30  sous  ;  Parterre  : 
20  sous. 

En  1754,  un  nommé  Devais,  qui  tenait  auparavant  le  café  de  la  Bourse, 
prit  la  direction  du  théâtre  du  Bignon-Lestard.  11  la  conserva  jusqu'en  1758. 
Celte  année  là,  il  y  eut  une  grande  discussion  entre  le  directeur  et  Tar- 
vouillet. Ce  dernier,  propriétaire  du  théâtre,  profitant  de  l'absence  dos 
comédiens,  avait  fait  mettre  sa  provision  de  foin  dan  la  salle.  Mais  le  direc- 
teur l'emporta,  et  force  fut  à  Tarvouillet  d'enlever  son  foin.  Kien  que  par 
cette  petite  anecdote,  on  peut  voir  que  le  théâtre  du  Bignon-Lestard  était,  à 
cette  époque,  de  piteuse  importance. 

La  mémo  année,  les  sieurs  Rosimond  et  Parmentier  avaient  ohteiui  le 
privilège  du  théâtre  et  s'étaient  installés  au  Bignon-Lestard.  Mais  ils  ne 
tinrent  pas  leurs  engagements,  ils  ne  formèrent  pas  de  troupe  et  la  ville 
resta,  par  leur  faute,  dix  huit  mois  sans  théâtre.  Le  duc  d'Aiguillon,  gou- 
verneur de  Bretagne,  s'émut  d'un  pareil  état  de  choses,  et  il  engagea  le 
bureau  à  prendre  à  ses  frais  l'entreprise  des  spectacles. 


LA    SALLB   Dr    Bir.NON-LBSTARD  10 

\.i'  2<î  juin  ITC.K.  la  ville  alfcriiia,  moyennant  l'AH)  livres,  lu  salle  du 
Mignon,   au  sieur   TarvouflUît,  inarehand-traiteur,   propriélaim  do  la  salle 

'  iM)ur  neuf  ann('<'s  cons.cuiives,  à  partir  dr  la  Sainl-J<an  17^12  a  <  li.i 
la  ville  (|ue,  dans  les  rngageinenlîs  qu'elle  fera  avec  les  lroup<îs  «Ij-s  < 
<liens,  ledit  bailleur,  sa  femme  et  se>  enfants  auront,   dans   tous   l«'s    ^ 

I  i'l»'s.  leurs  en  tr«'*es  libres  sans  m  ri<'n  payer,  trois  biM  ■•'=  •■"-     ' ■ 

^'  tii  ition,  les  bals  a  leur  disposition,  plus  doux  clian«l' 

r<'|n<*sentation,  que   les  coni«*<liens  feroni  renwttre  emv  i« m  i.  nu.-- r  j»' nr 
faut'   la  visiirde  ladite  salle  à  la  fin  du  sjxTti»  b».  et.  on  outre,  un  fxjste   de 
.'W  sous  ('/".'V)  par  chaqu»' r<| 
libre  pour  lui,  sa  femme  n 

lu    ('bajM'a!!  Kouge,  en  tout  U.>iii|i>,  a  loul  h 

loii/aint's  de  cliaises  dans   la  salb'  m   bon  »'■' 
•ra  remise»  a  la  tin   du  pr«'*"«ent  bail  i.-  i..ii>  |. 

'  I  p'ns  de  la  troujx-  feront  leurs  mii.  par  lt>  \u> 

•  omluit  a  la  salb*,  sans  «ju'il  soit  permis  aux  arti'urs  d'«'nirer  ou  de  sortir  |iur 

II  cuisine  du  dit  bailleur,  qu'aut;int  que  cela  lui  en  fera  plaisir.  ■ 

he  plus,  Tarvouillet  se  réservait  le  droit  de  faire  vendre  des  rafraichissc- 
inrnts  dans  la  salle. 

I.c  l  décembre  1762,  le  duc  d'Aiguillon  arrêta  la  liste  des  p»«rsonnes 
i\aiit  leurs entn'-t's  libres  au  thMtre. 

(Jetaient:  MM.  Joubert  du  Collet,  maire;  Etienne  Maussion,  sous-maire  ; 
Pierre  Bordage,  de  I^intimo.  Le  Beau  du  Bignon,  Guérin  de  Bcaumont, 
Herrouëtte,  échevins  ;  Pierre  Greslan,  procureur  durci  syndic;  liolxTt 
Rouillé,  Pierre  Bruand.  greffiers  de  la  ville;  (îarreau.  major  de  la  milice 
liourgeoiso  ;  enfin,  le  lieutenant  et  le  grellier  de  police. 

La  ville  fit  faire  quelques  réparations  à  hi  salle  et  la  direction  fut  confiée 
!  Maron.  qui  loua  le  théâtre  pour  une  jx^riode  de  trois  ans. 

Hn  17»>,'),  les  sieurs  Bernard  et  Cressenl  alîermèrent  le  théâtre  et  legar  !■ 
rent  jusqu'en  1767.    Ils  mout(>rent   la  Fee  Urgèle,  de  Duni,  oi  le  G 
'U  la  Soirée  à  la  Mode,  de  Poinsinet.  M"'  Duminy.  pensionnaire  du  Boi. 
\int  donner  des  représentations  en  17«!7. 

Mil  17(W,  la  direction  passa  entre  les  mains  de  M""  Montansier,  la  future 
léatrice  du  Thé/itre  du  Palais-Royal.   KUe  n'administrait  pas  elle  même  le 
Hignon-Lesiard  ;  elle  avait  pour  régisseur  un  nommé  Bursay,  qui  était  son 
■lélégué  à  Nantes. 

Kn  177(),  plusieurs  négociants  de  Nanties,  MM.  Louis  Huguct.  Darrech 
iiiié,  (traslin,  Drouéi,  Lavigne,  Mosneron  et  Canier, tous  amateurs  despec- 
taeles,  voyant  ave»'  p<'ine  b>  tlnV 

d'une  din»otion    inlelligeiite.  se  i  .      :       , 

«le  lever  une  troupe  pour  jouer  «  latragtViic,  la  comédie  française  plitaliopm*. 
l'opéra,  l'operi  comique  et  le  boufTon.  » 

ils  se  déridèrent  à  faire  Mtir  une  salle  plus  élé. 
elle  qui  existait.  On   p«'nsa  a  l'élever  dans   le«. 


20  I-K   THÉÂTRE    A    NANTES 


nombreux  pourparlers  furent  entamés  avec  des   propriétaires  d'immeubles, 
mais  ils  n'aboutirent  pas. 

Le  temps  pressant,  on  résolut  d'agrandir  la  salle  du  Bignon-Lestard  et  de 
la  transformer.  Mellinct  et  le  Vieux  Nantais  ont  donné  de  cette  salle  deux 
descriptions,  que  je  ne  puis  mieux  faire  que  de  reproduire. 

((  La  salle,  richement  décorée,  était  peinte  rouge  et  or.  Elle  se  composait  : 
à  l'avant-seène,  entre  deux  colonnes  dorées,  de  deux  logos,  l'une  aux  armes 
du  roi,  l'autre  aux  armes  de  la  ville;  aux  premières  de  douze  rangs  de  loges 
soutenues  par  un  pilastre  représentant  Atlas  (il  n'y  avait  pas  de  baignoires)  ; 
aux  secondes  et  troisièmes,  des  galeries  régnantes.  Le  parterre  était  debout. 
L'orchestre  n'avait  que  deux  rangs  de  musiciens.  » 

De  plus,  sur  la  scène  même,  se  trouvaient  deux  balcons  dont  les  places 
étaient  très  recherchées. 

D'après  le  vieux  Nantais,  il  y  avait  : 

«  Au  rez-de-chaussée,  trois  cents  places  réparties  entre  le  parquet,  le 
parterre  et  les  loges  grillées  ;  aux  premières  loges,  deux  cents  places, 
cent  soixante  aux  secondes,  cent  soixante  aux  troisièmes,  où  conduisait 
un  escalier  de  bois.  L'orchestre,  disposé  pour  cinquante  musiciens,  avait 
sa  sortie  par  le  foyer.  Les  balcons,  les  banquettes  étaient  recouverts  de 
fourrures.  Un  grand  café  attenait  au  théâtre  de  la  comédie,  comme  on 
disait  alors.  « 

En  ce  qui  concerne  ce  dernier  détail,  le  Vieux  Nantais  confond  le  théâtre 
du  Chapeau-Rouge,  qui  fut  construit  plus  tard,  avec  la  salle  du  Bignon- 
Lestard.  C'est  à  celui  là  qu'il  y  avait  un  grand  café,  faisant  partie  du 
théâtre,  dont  la  vaste  terrasse  plantée  d'arbres  dominait  la  rue  Boileau 
actuelle. 

Toujours,  suivant  le  Vieux  Nantais,  ce  premier  théâtre  possédait  cinq 
sorties  :  l'une  de  deux  mètres  de  large,  sur  la  rue  da  Bignon-Lestard  ;  deux 
latérales  et  deux  sur  la  rue  du  Chapeau-Rouge.  Ces  dégagements  étaient 
insuffisants.  Aussi,  la  salle,  dès  1785,  était-elle  reconnue  des  plus  dange- 
reuses. Ce  ne  fut  cependant  qu'en  décembre  1811  que  l'autorité  se  décida  à 
ordonner  sa  fermeture.    Elle  devint  alors  un  atelier  de  chaudières. 

En  1770,  les  actionnaires,  qui  avaient  apprécié  les  qualités  de  M'i*  Mon- 
tansier  comme  directrice,  l'appelèrent  à  la  tête  du  théâtre.  Pendant  quatre 
années,  M^'"  Montansier  dirigea  encore  le  Bignon-Lestard.  Ce  fut  la  période 
la  plus  brillante  de  ce  théâtre.   Lekain  et  Mole  vinrent  y  jouer. 

Malgré  toutes  mes  recherches,  je  n'ai  rien  pu  découvrir  sur  le  séjour  do 
ces  artistes.  Il  m'a  même  été  impossible  de  trouver  quelles  pièces  ils  firent 
applaudir.  La  célèbre  tragédienne  Raucourt  fit  ses  premiers  pas.  en  1771, 
sur  la  scène  du  Bignon-Lestard.  Son  père  était  un  acteur  assez  médiocre, 
mais  il  sut  deviner  lo  talent  de  sa  fille,  qu'il  faisait  monter  sur  les  planches 


LA    8ALLK   OU    BIGNON-LESTARD 


•Jl 


à  peine  ugéc  de  quinze  ans.  L'année  suivant»-,  elle  débuUiii  .1   n  *    mum,. 
Française.  * 

Pri^ville  et  la  Saint-Val,  de  la  Comédie-Fnincaise,  donnèrent  aussi  des 
représentations  pendant  la  direction  Montansier. 

La  première  représentation  de  Zcmire  et  Aior  <^ut  lieu  en  1772.  l'our  la 
circonstance,  le  prix  des  places  fut  augmenté.  La  même  annej,  on 
joua  aussi  le  SuisHe  dupé,  pantomime.  A  l'occasion  de  cette  pièce,  le 
régisseur  demanda  à  la  municipalité  «  la  lilxîrté  entière  du  théâtre,  son 
espace  étant  ahsolumt'nt  nécessaire  pour  le  jeu  des  machines.  »> 

En  177:^  le  futur  conventioiniel  Collot  d'IIerbois  faisait  partie  de  la 
trou[M'  du  Bignon-L»'stard.  C'éuiit  un  pensionnaire  fort  médiocre  et  fort 
turbulent.  Il  e.viste  dans  les  Archives  un  cert^iiu  procès  verbal  drc^-sé  contre 
lui,  en  raison  du  tapngc  qu'il  fit  un  soir  au  ihêâtn\  J'ai  publié  séparmient 
ce  curieux  document  absolument  inédit  sur  If  fameux  révolutionnaire  (M. 

Desforges,  l'auteur  de  la  Femmo  jalouse  et  de  Tom  Jonra,  donna  aussi 
des  représentations  au  Dignon-LesUird.  Il  vint,  pour  la  prenuère  fois  à 
■  Nantes,  pendant  la  tenue  d.-s  Htats,  en  1770.  Dans  .ses  Mémoires,  il  se  loue 
beaucoup  du  publier  nantais.  Il  revint  en  177r»  et  se  fil  surtout  applaudir 
dans  Zrmire  et  Asor.  Le  21  octobre  de  la  même  année,  il  épou&i.  à 
l'église  Saint  Léonard,  une  de  ses  camarades,  qui  jouait  les  jeunes  r«Mes 
dans  l'opéra  boulFon. 

Comnie  je  l'ai  dit  déjà,  les  détails  manquent  sur  la  plupart  des  pièces 
jouées  à  cette  époque.  On  sait  cependant  qu'entre  autres  opéras,  le  théâtre 
de  Nantes  repsèsenti  :  /rU.s/,a.  de  Jéliote  :  la  Vénitienne,  de  LaUrre  ; 
Titon  et  V Aurore,  de  Mondoville,  paroles  d'un  Nantais,  l'abbé  de 
Lamarre  ;  le  Fils  indocile,  de  La  Santé  :  Sancho  Panra.  de  Phili«lor  : 
Aris  et  Galilée,  de  Lully  ;  Aline,  le  Cadi  dupé,  le  Déserteur,  le  Roi  et  le 
Fermier,  lioae  et  Colm^,  la  Reine  de  Golconde,  Félix,  de  Monsigny  ; 
Dardanu.s,  de  Kameau  ;  les  Chasseurs  et  la  Laitière,  les  Sahots,  de 
Duni  ;  le  Ifuron,  Lurile,  le  Tableau  parlant,  de  Grétry  ;  le  Maréchal- 
Ferrant,  le  Sorcier,  de  Philidor  ;  les  Troifueurs,  de  Dauvergne  ;  le  Derin 
du  cillar/e,  de  Rousseau  ;  r Amoureux  de  quiiue  ans,  le  Fermier  d'un 
Jour,  de  Martini  ;  le  Faui  Lord,  les  Pécheurs,  de  Gossce  ;  Cendrillon, 
d«'  Laruett<>  ;  les  Lihertins  dupés,  de  notre  compatriote  Thibault  ;  les  Trois 
Sulianes,(\c  Gibert  ;  le  Mort  marie,  de  Brianohi  ;  les  Trois  Fermiers,  de 
Dezaide  ;  /'/  Mèlomanie,  de  thampcin  ;  Jeannot  et  Cotin,  de  Higel  ; 
\rion,  de  Matheau. 

Outre  ces  différents  opéras,  on  donna  aussi  l\[renturière.  l'Amour 
filial,  les  Métamorphoses  de  Tricolin,  comédies  de  KoUand.  ingénieur  du 


(  1 1  l'.lieiiMf  DpsIrAiiRos,  —  Çnllnt  trih'r'mis  o  ynntes,  d'iiprèa  nnd«»ciiinont  «lècoiivert 
ilaiis  ira  arcliivrs  il»*  la  VilU'.  —  Stock,  «■dilcur. 


22  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


roi  ;  Niza  et  Bëkir,  de  M"«  Darcpy  ;  les  Plaisirs  de  l'esprit,  le  Jurjpment 
unicersel,  pièces  niécaiiiqucs  ;  le  Mariar/e  de  Toinetie,  par  Patras  ;  l'Elan 
de  cœur,  de  Dupray,  «  à  l'occasion  de  raccouchement  de  la  reine  et  de  la 
naissance  de  M.  le  Dauphin  »  ;  l'A  rnour  platonique. 

La  Montansicr  abandonna  la  direction  en  1774.  Gourville,  dont  je 
parlerai  plus  loin  avec  détails,  prit  sa  succession.  Il  monta  L'Amitir  à 
l'épreuve,  de  Gr(^try  et  la  Belle  Arsène,  de  Monsigny. 

A  cotte  époque,  la  saison  thf'âtrale  ooraraen^ait  le  lundi  de  la  Quasimodo 
et  se  terminait  le  jour  des  Rameaux. 

D'après  Camille  Mellinet,  en  ITTô  ou  1770,  le  Decin  du  cillaf/e  fut  joué 
par  des  amateurs.  Le  rôle  de  Colette  était  tenu  par  M'"*  Mosneron,  qui 
s'acquitta  de  cette  tâche  difllcile  avec  une  rare  perfection  de  talent.  Son  mari 
lui  adressa  le  lendemain  de  la  représenfcition,  sous  le  voile  de  l'anonymat, 
un  compliment  en  vers,  où,  faisant  allusion  au  personnage  qu'elle  avait 
rempli,  il  finit  par  lui  dire: 

Si  Colette  avait  eu  ta  grâce  et  ton  langage, 
Jamais  Colin  n'aurait  été  volago. 

Le  comte  d'Artois  vint  à  Nantes  en  1775  et  il  assista  a  une  représentation 
de  gala  au  Bignon-Lestard.  Le  spectacle  se  tomposaitde  la  Partie  de  chasse 
de  Henri  IV  et  de  Rose  et  Colin. 

((  Le  prince  parut  content  du  jeu  des  acteurs,  dit  un  manuscrit  du  temps, 
cité  par  Guépin.  On  le  vit  applaudir,  ce  qui  lui  valut  à  lui-même  les  vivats 
et  les  bravos  du  parterre.  A  la  fin  de  la  pièce,  il  fut  salué  par  M.  Gourville, 
le  principal  acteur  de  la  troupe,  et  la  manière  dont  il  reçut  cet  habile  comé- 
dien lui  valut  de  nouveaux  applaudissements.  » 

Le  lendemain,  il  vint  également  au  bal  donné  dans  la  salle  en  son  hon- 
neur. Il  dansa  trois  fois.  A  l'occasion  de  son  passage,  on  institua  un 
couronnement  de  rosière,  qui  continua  à  se  faire  chaque  année  sur  la  scène 
nantaise. 

A  cette  époque  le  théâtre  faisait  fureur.  Souvent,  la  salle  se  trouvait  trop 
petite  pour  contenir  les  spectateurs  ;  aussi,  donnait  on  parfois  deux  repré- 
sentations, l'une  dans  la  journée,  l'autre  le  soir.  Comme  on  le  voit  ce  n'est 
pas  d'hier  que  remonte,  à  Nantes,  la  fondation  des  matinées. 

En  1825,  MM.  GauUier  et  Chaplain  firent  représenter,  pour  l'ouverture 
de  l'année  théâtrale,  un  à-propos  en  vers.  Lorsqu'ils  publièrent  cet  à-propos 
en  brochure,  il  le  firent  précéder  d'une  courte  notice  isur  les  principaux 
artistes  qui  avaient  paru,  jadis,  sur  la  scène  nantaise  ;  ils  joignirent  à  ces 
notes  biographiques  quelques  anecdotes.  C'est  à  l'opuscule  de  MM.  GauUier 
et  Chaplain  que  j'ai  eu  recours  pour  la  plupart  des  détails  qui  vont 
suivre. 


LA    SALLe   DU   BIGNON-LeSTARD  23 

Il  |)aralt  qu'a  la  fin  du  dix-huitième  siècle  la  jeunesse  nautaise  ('•tait  fort 

turbulente,  et  qu'elle  choisissait,  quelquefois,  le  th<^dlre  comme  lieu  do   se^ 

\ploits.  Un  beau  soir,  plusieurs  jeun«'"<  gms  ayant  dos  reproches  à  (aire  au 

lirecteur  Longo,  décidèrent  qu'uno  brillante  représentation,  annoncée  pour 

le  lendemain,  n'aurait  pas  lieu. 

«  Ils  arrivent  i  la  m11«*  avant  l'ouveriur»^  de>  bureauT,  «î  placent  -«ur  'I 
iJKnes  dans  le  couloir,  et,   la    tr-tr  haute,  l'épée  x  la  main.   lU   nff.ii.!. 
\)tf)d  ferme  les  specLatciir>.  (Jcuxci  •«  présentent  ;  on  leur  a 
■|u'il  n'y  a  jkis  de  sjx'clacie  ;  rn  vain  invo«|ue  l  on  le  témo.^,. .. 
t  celui  des  receveurs  du  bureau,  loujoun   même  répf)nse  :  r>.  il 

n'y  a  pas  de  specljicle  aujmird'hui.  »    Ils  insistent,  on    leur    |>r'ijM)-.-   in  ^ 
honuOiemenl  d'aller  se  couper  la  gorge,  quelques-uns  acceptent,  mais  le  plus 
grand  nombre  prend  le  parti  de  se  retirer  et  <!     " 
gens  qui  ordonnent  de  fermer  le  théiiin'.  et  j. 

tout  un  public.  Bien  plus,  le  lendemain,  le  diruiJtcur  lui  oblige  de  Uctiiaodcr 
excuse  à  genoux  a  ces  despot^'s  nantais.  » 

.\I"*  Desglands,  qui,  plus  tard,  fît  partie  de  l'Opéra-Comique,  chanta  à  ce 
théAtro.  Une  autre  cantatrice  de  valeur,  M"«  Lentant,  débuta  la  veille  de  la 
fête  do  Noël.  Un  b«'l  esprit  nantais  en  profita  pour  faire  le  jeu  de  niot5  suivant: 
Puer  nciuH  es  nohix. 

l'arnii  les  autres  artistes  qui  parurent  a  ce  théÀtre,  il  faut  citer  I.Arive, 
|iii,  plus  tard,  devait  remplacer  Lekain  aux  Français;  Monvel,  le  futur 
auteur  des  Victimes  cloîtrées,  et  l'arrière-grand-père  du  peintre  Boutet  «le 
Monvel  ;  les  (iranger,  Brizard.  M"«  Dumesnil.  enfin  fiourville  le  favori  des 
iinateurs  nantais. 

Quelques  détails  sur  Gourville  ne  sont  pas  inutiles.  En  eftet,  cet  artiste  a 
joui,  à  Nantes,  p<^ndant  toute  sa  carrière,  d'une  telle  estime  générale,  —  très 
méritée  d'ailleurs,  —  qu'il  doit  avoir  une  place  a  part  dau>-  l'}ii<!»-->ir.i  ,i,, 
théâtre  avant  la  Révolution. 

Il  avait  d'abord  commencé  par  être  peintre,  et  avait  cultivé  cet  art  avec 
111  certiiin  succès  ;  mais,  tenté  par  le  démon  du  théâtre,  il  no  tarda  pas  à 
<  iiil)r.iss«'r  la  carrière  de  comédien.  Il  se  fit  applaudir  d'aUird  dans  les  rôles 
de  premier  comique,  qu'il  abandonna  pour  ceux  de  financiers  et  ceux  dits  à 
manteaux.  Sa  réputation  parvint  à  Paris,  et  un  jour,  il  reçut  un  ordre  de 
dél)Utàla  Comédie  Fnmçaise.  Le  public  parisien  lui  fut  tout  aussi  favor*'-'  • 
que  celui  de  la  province,  mais  (tourville  adorait  Nantes,  et  il  langui 
loin  du  ruisseau  du  Bignon-Lestard.  Dès  qu'il  le  put,  il  s'empressa  de  reve- 
nir dans  sa  chère  ville,  où  sa  rentrée  fut  fêtée  avec  empressement  par  un 
public  dont  il  était  l'idole. 

«  Le  meilleur  rôle  de  (lourville  était  l'/lcartf.  Il   était   surtc-»  ni»,,, nia.. 
dans  la  scène  où  il  arrive  pillé,  volé,  appelant  sa  chère  cassct 
rette  scène  qu'un  *«oir,  M.  (iraslin  enthousiasmé,  s'écria  en   s»ii;,r.,m   .  n 
dehors  de  sa  loge  et  a  plusieurs  reprises  :  Voilà  Cacart!  Voila  Carare  '  Cet 


24  LE   TURATRK    A    NANTES 


incidcDt  fut  s;ii>i,  et  des  applaudissciiK'nt.s  éclatèrent  de  toutes  parts,  (iour- 
villo,  le  lendemain,  s'empressa  de  donner  l'explication  de  cette  énigme. 
Quelques  mois  auparavant,  il  avait  demandé  à  M.  (iraslin,  après  unt?  repré- 
sentation de  r.4rrtre,  s'il  était  content  de  sa  manière  de  jouer  Harpagon. 
((  Oui,  répondit,  M.  Grasiin,  vous  avez  fort  bien  joué  V Avare,  mais  ce  n'est 
pas  l'AvAia-;.  (|uc  j'ai  vu  sur  l(.'  théâtre!  » 

»  Gourville,  qui  connaissait  M.  Grasiin  pour  un  liomnie  i'un  goût  su p»-- 
rieur,  pour  avoir  joué  avec  Lekain  et  plusieurs  acteurs  célèl»res,  soumit  son 
rôle  à  de  nouvelles  méditations,  et  s'associa  pour  ainsi  dire  au  génie  de 
Molière.  )> 

Gaullicr  rapporte  sur  Larive  l'anecdote  suivante  : 

((  Un  jour  qu'il  jouait  Pygmnlion,  déjà  livré  tout  entier  aux  inspirations 
de  son  génie,  il  semblait  s'être  identifié  avec  le  personnage  qu'il  représentait. 
Tout-à-coup,  ses  regards  rencontrent  une  statue  colossale  placée  sur  la 
scène.  Sa  vue  le  chociue,  il  la  saisit  avec  force  et  la  rejette  dans  la  coulisse, 
sans  sortir  du  caractère  de  son  rôle.  La  pièce  finie,  quelques  acteurs  s'éton- 
nait'nt  (ju'il  eût  pu  transporter  une  niasse  pareille  :  «  Rien  de  plus  facile, 
dit  Laiive  rcdcvtMiu  lui-même,  et  il  essaye  de  recommencer.  Mais  ce  fut  en 
Vain  :  la  force  ((ui  l'animait  nexistait  [)lus.  )> 

ï'n  autre  artiste  de  la  troupe  du  Bignon-Lestard,  Baudrier,  devint  plus 
lard  .sociétaire  des  Français.  Il  avait  quitté  le  barreau  pour  se  faire  acteur" 
C'était,  parait-il.  nu  Don  Juan  do  coulisse. 

«  Une  jeune  lille  de  dix-huit  ans,  attachée  au  théâtre,  tomba  amoureuse 
de  lui.  Une  autre  actrice,  maîtresse  de  Beaudrier,  le  surprit  dans  une  loge 
avec  la  jeune  lille.  11  s'ensuivit  une  scène  d'une  telle  violence,  que  la  pauvre 
enfant  se  précipita  hors  du  théâtre,  gagna  le  Port-au-Vin.  et  se  jeta  dans  le 
fleuve.  » 

Baudrier  jouait  fort  bien  à  la  paume  ;  les  amateurs  distingués  de  ce  jeu  le 
recherchaient  avec  empressement. 

(iourville  conserva  la  direction  jusqu'en  1778,  année  où  les  rênes  directo- 
riales passèrent  entre  les  mains  de  Desmarcts,  acteur  froid  et  correct,  qui 
les  conserva  pendant  six  ans. 

M.  Parenteau  a  fait  don  à  la  Bibliothèque  de  Nantes,  des  livres  d'émar- 
gements de  l'une  des  directions  de  Desmarcts.  J'y  ai  copié,  à  litre  de  eurio 
site,  les  appointements  des  principaux  artistes  pour  la  saison  17.'^1-17><:?. 
Malheureusement,  la  désignation  d<^s  emplois  fait  défaut  : 

par  ail 

MM.    lluin :?.4(X)  livres 

Kélix  et  son  épouse 5.000  — 

Gourville ; 3. (XX)  — 

Lavandaise ...      2  .')00  — 

Paulin 4.000  — 

Fleuri 3.<XM")  — 

Montville 3.C»00  — 

La  Marche 2  400  — 

Landrv M. 000  — 

Saint  Vair 1200  — 


LA    HALLE   Di;    DIGNON-LE8TAKO 


MM. 


(i^rnionl  .  .  . 
Deniuutiri 


M'««»  Vidim  . 

Ita-sf 

Kiîiiicheville 

Anjou 

Diitillent. 
Iluiii 


1  Jm»  hvrr 

1  :>UJ     - 

1  700    — 

'  MM)       — 


2.400  — 
2.200  — 
2.000    — 


La  livro  toiirnoi  valant  un  i»\i  immis  nw  p-  ir.uu- k  ui<i,  M.  l'.tului,  le 
plus  forU'nu'Ml  a})|)oinl(l'  des  artj>t<'S  nommés  ci di'ssus.  iif-  gagnait  il»»no  pas 
tout  à  fait  4.<N)U  francs.  Aujourd'hui,  ce  dernier  cliUfro  est  ce  que  gagne,  yar 
mois,  un  t<*nor  ronvrnablfî. 

En  17K3,  Longo  succéda  à  l)esmarct>.  ('e  fut  aous  sa  direction  que  se 
icruiina  la  première  |K'Tiodo  du  thrâln*  du  Hignon-l>;stard. 

Cette  nnni'te,  la  ville  donna  au  dircrteur  uni'  permission  qui  jadis  eût  été 
éncrgiqurmont  n-fnsér  ;  celle  de  jouer  le   jour  de  la  C'onr>. 
les  autres  jours  do  f<'i«'  de  l.i  Vierge.  Cett<*  autorisation   fut 
l>our  la  Fètc  Dieu.  Le  temps  ét;ut  loin  où  il  était  défendu  aux  comédiens  de 
reprévsent<'r  leurs  pières  pendant  -  l'octave  du  Sacre,  h 

(Juatrc-vingl-ncuf  arrivait  à  grands  pas. 


f^r^^^ 


>> 


o 


^    3 


<i 

a 

s: 

m 

ii) 

10 

^ 

-0 

te 

a 

ÇH. 

0 

O 


a 

c 

O 
"t 

Q) 

3 

a 

I 

H 
D* 
w- 

0> 


o       O 


*, 


mm  f^W$L^ 


DEUXIEME     PARTIE 


J)epuis  la  '|>onst.rucLion  du  ^firand-Jhéâlre  jusqu'à  l'fncendie 

1787    -    AN     IV 
»o:«i»« • 

I 

GRASLIN  et  la  CONSTRUCTION  du  GRAND-THÉATRE 

J)i/fi')'ents  jn  iijetx  lif  runsi  nictuni  n  iiii  ii  iiimi-  flii'rUre.   —  J.n  '/utilnr  iiriiMin 

Fureurs  et  niésnventures  dex  lili.  PP.  Capucins. 
Description  'lu  Grand-ThMtre. 


N  1704,  le  duc  d'Aiguillon  fut  nommé  gouverneur  de  Bretagne  ; 
il  résolut  d'user  de  sa  situation  pour  faire  entreprendre,  à 
Nantes,  des  travaux  d'embellissement,  que  la  prospérité 
commerciale  do  la  ville  appelait  depuis  longtemps. 
I)(''jà,  sous  radministralionétlain'O  de  Gérard  Mrllier,  on  avait  commencé 
I  bâtir  de  nouveaux  quartiers.  C'est  à  ce  maire,  autant  qu'à  la  protection 
intelligente  de  l'intendant  Feydau  de  Brou,  que  Nantes  est  redevable  de 
l'Ile  Feydau,  dos  quais  Brancas  et  Flcsselles,  des  cours  Saint  P'*>f>  -m 
Saint-André. 

Mellier  mourut  en  1729.  Ce  fut  une  i>erte  immense  pour  la  cite.  Les 
travaux,  qui  étaient  loin  d'étro  achevés,  furent  suspendus,  et  ils  ne  furent 
véritablement  repris  qu'en  1751. 

Le  duc  d'Aiguillon  fit  venir  de  Paris  rarchitccle  de  Vigny  et  lui  donna 
l'ordre  de  dresser  un  plan  général  de  la  ville. 

M.  de  Vigny  se  mit  au  tr.ivail,  et,  au  mois  d'avril  1755,  il  fournit  un  plan 
dont  les  grandes  lignes  ont  été  suivies  jusqu'à  nos  jours.  Ce  plan  portait  la 
construction  d'une  salle  de  spectacle  et  d'une  salle  de  concerts  aux  deux 
côtés  du  quai  Brancas  :  «  Los  bAtiments  qu'on  y  a  conmiencés  ne  pouvan' 
servir  de  Poissonnerie,  attendu  l'exiwsition  au  midi.  » 


28  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


Lo  plan  de  M.  de  Vigny  fut  ;ij)prouvé  par  le  roi,  mais  en  1750,  la  ville 
demanda  à  M.  Lebret,  intendant  général,  la  permission  de  ne  point  bâtir  la 
salle  de  concerts  et  la  salle  de  spectacle  sur  le  quai  Brancas  : 

((  L'une  des  raisons  (jui  ont  détourné  d'exécuter  la  Poissonnerie,  est  il 
dit  dans  cette  requête,  est  la  beauté  singulière  de  la  situation  de  ce  quai,  au 
centre  âes  opérations  de  commerce,  qui  pourraient  être  troublées  par  le  mou- 
vement et  l'embarras  inséparables  de  ces  lieux  publics.  La  même  raison 
semblé  s'opposer  à  l'établissement  des  salles  de  spectacle  et  de  concerts  sur 
ce  même  quai,  ce  qui  a  été  reconnu  par  le  duc  d'Aiguillon,  commandant  de 
Bretagne.  Les  quais,  d'ailleurs,  doivent  plutôt  être  consacrés  au  commerce 
en  y  construisant  des  maisons  propres  à  y  loger  des  négociants.  » 

Ce  projet  fut  donc  définitivement  abandonné. 
•  En  1761,  la  ville  chargea  rarchitecte  Ceineray  de  revoir  et  de  compléter 
le  plan  de  M.  de  Vigny.  Dans  ce  nouveau  projet,  il  éUiit  proposé  «  qu'une 
halle,  servant  à  la  vente  de  toutes  les  denrées,  serait  construite  dans  l'em- 
placement des  Fossés  Saint-Nicolas,  et  au-dessus  de  la  dite  salle,  des  loge- 
ments au  bout  desquels  serait  faite  la  salle  de  concerts.  A  côté  de  la  halle, 
une  salle  de  spectacle.  » 

Ce  plan  fut  accepté  en  principe  ;  mais  comme  l'argent  manquait  on  ne 
s'occupa  pas  immédiatement  du  ihéâtre.  Ainsi  que  je  l'ai  dit  au  chapitre 
précédent,  lorsque  plusieurs  négociants  de  Nantes  obtinrent  le  privilège  du 
théâtre,  ils  songèrent  à  élever  une  salle  sur  cet  emplacement,  mais  des 
difTicultés  étant  survenues  avec  des  propriétaires  d'immeubles  voisins,  ils 
se  bornèrent  à  faire  réparer  celle  du  Bignon-Lestard. 

En  1775,  Gourville,  qui  était  alors  directeur,  demanda  à  la  ville  la  per- 
mission de  faire  bâtir  une  salle  de  spectacle  dans  le  quartier  du  Jeu  de 
Paume  Saint  Nicolas,  entre  la  rue  Sainte-Catherine  et  la  Tour  des  Espa- 
gnols. Le  bureau  accepta  de  passer  un  traité  avec  Gourville  aux  conditions 
suivantes  : 

«  Le  sieur  Gourville,  directeur,  était  tenu  de  pa>  or  aux  propriétaires  le 
prix  des  terrains  et  des  maisons  où  devait  être  construite  la  nouvelle  salle, 
en  suivant  les  clauses  débattues  par  la  communauté.  Pour  faciliter  cette 
entreprise,  la  ville  abandonnait  le  terrain  en  toute  propriété  à  l'acquéreur,  avec 
les  matériaux  de  la  Tour  des  Espagnols.  Avant  d'entreprendre  la  construc- 
tion, le  sieur  (xourville  déposera  une  somme  de  cent  mille  livres,  pour 
prouver  qu'il  est  en  état  de  faire  l'entreprise.  Il  se  conformera  aux  plans 
et  devis  fait.s  par  l'architecte-voyer  ;  les  travaux  seront  surveillés  par  les 
officiers  muiiiiipaux  et  par  leurs  architectes  ;  le  directeur  ue  pourra  vendre 
qu'avec  l'autorisation  de  la  communauté,  qui  se  réserve  le  droit  d'acquérir 
elle-même  au  prix  de  revient,  ou  sur  estimation  d'expert  à  la  condition  de 
laisser  au  sieur  Gourville  son  logement  et  une  petite  pension.  » 

De  l'avis  de  Gourville  lui-même,  la  dépense  était  eslifliéc  à  plus  do 
700.000  livres. 


GRASLIN    ET    LA    CONSTRUCTION    DU    GUAND-THÉATKK  20 

Ce  projet  étiiit  des  plus  «sérieux,  mais  f-elm'  de  Graslin,  dont  il  sera  ques- 
tion tout  à  l'heure,  vint  à  surgir  et  remjjécha  de  se  réaliser. 

En  1782,  Longo,  qui  allait  bientôt  succédera  Desmarcts  dans  la  direction 
de  la  salle  du  BignonLestard,  obtint  de  bâtir  sur  l'emplacement  de  la  Tour 
des  Espagnols  (à  peu  près  l'Hôtel  des  Postes  d'aujourd'hui),  une  salle  de 
spectacle  provisoire  en  bois.  La  construction  devait  être  faiie  solidement  et 
aux  frais  de  l'entrepreneur.  En  outre,  Longo  s'engageait  à  démolir,  sur 
la  réquisition  de  la  mairie  ou  lorsque  la  salle  projetée  dans  le  quartier 
Graslin  serait  achevée. 

Le  Bureau  revint  plus  tard  sur  s;i  décision.  Ce  projet  avait  été  l'objet  de 
vives  critiques.  Longo  en  proposa  un  autre  (|ui  fut  aussi  vivement  attaqué. 
Il  s'a;,'issait  de  voiîter  l'Erdre  à  la  hauteur  de  la  rue  Sainte  Catherine  et  de 
construire  sur  cet  emplacement  une  salle  de  spectacle.  Comme  principal 
avantage,  on  faisait  valoir  qu'en  Gis  d'incendie  on  aurait  de  l'eau  à  discré- 
tion. Ce  projet,  défendu  dans  des  l)rochures  signées  Un  citoyen  de  Xaniea, 
fut  très  spirituellement  raillé  et  battu  en  brèche  dans  différents  opuscules, 
surtout  dans  celui  intitulé:  lioponse  à  un  citoyen  de  Xantes.  Cet  écrit  est 
anonyme,  mais  il  a  dû  être  inspiré  par  Graslin,  si  ce  n'est  (iraslin  lui- 
même  (jui  en  est  l'auteur. 

On  le  voit,  à  cette  époque,  la  construction  d'uu  nouveau  théâtre  passion 
nait  tous  les  esprits.  Cependant  les  projets  succédaient  aux  projets  etla  ville 
était  dans  l'indécision,  t|uand  le  Bureau  se  décida,  enfin,  àaccepter  les  pro- 
positions de  Graslin. 

Avant  de  commencer  à  parler  de  la  construction  du  Grand  Théâtre,  je 
crois  qu'il  n'est  pas  inutile  de  dire  quelques  mots  de  l'homme  qui  créa  le 
quartier  de  la  ville,  compris  entre  la  place  Royale,  la  Fosse  et  la  rue  des 
Cadeniers. 

(Graslin  n'était  pas  Nantai>.  Il  naquit  à  Tours,  en  1727,  d'une  famille  de 
financiers.  Après  de  brillantes  études  au  collège  de  Juilly,  il  se  fit  recevoir 
avocat  au  Parlement  de  Paris,  puis  il  entra  dans  la  finance.  Il  alla  d'abord  à 
Saint-Quentin,  et  enfin  fut  noiiuné  receveur  général  des  fermes  du  roi  à 
Nantes.  Il  se  maria  dans  cette  ville  avec  M"^'  Guymont,  fille  du  directeur 
des  vivres  de  la  marine. 

(irasiin  était  un  économiste  distingué.  Il  a  publié  divers  ouvrages,  doni 
le  plus  important  est  l'KHsai  analytique  sur  la  richesse  et  surCimpôt.  N'ou- 
blions i)as  non  plus  ses  brochures  et  ses  mémoires  écrits  pour  défendre  ses 
(lilFérents  projets,  (îrasliu  nuurut  en  17',>).   à  l'âge  de  soixante-quatre  ans. 

.Avant  la  construction  du  quartier  Graslin.  la  ville,  de  ce  côté,  s'arn'lait, 
en  réalité,  aux  fossés  Saint-Nicolas,  (pii  ilébouchaient  dans  la  Loire,  sur  l'em- 
placement de  la  rue  du  Couédic,  et  dans  ri'>dre,  sur  remplacement  de  la 
place  du  Cirque. 

De  l'autre  côté  de  la  porte  Saint-Nicolas,  à  l'endroit  où  est  située  la 


30  LE    THKATRE   A    NA.NTKS 


rue  Crébillon  actuelle,  s'élevuit  une  colline  c.srarpôe  et  rocheuse,   bâtie  de 
quelques  rares  maisons,  dont  l'une  était  habitée  par  Graslin.  Au  sommet  se 
trouvait  l'enclos  dos  Capucins,  qui,  plus  tard,  devait  devenir  le  cours  Cam 
bronne. 

A  droite,  la  rue  du  Bignon-Lestard  escaladait  la  colline  et  allait  se  perdre 
dans  la  campagne  ;  ;ï  gauche,  la  rue  de  la  Fosse  débouchait  sur  le  port. 

Telle  étJiit  la  topographie  de  ce  vaste  espace  que  le  génie  de  Graslin  allait 
transformer  en  une  ville  nouvelle. 

Dès  1778,  Graslin  avait  acheté  la  plus  grande  partie   des  terrains  rorapo. 
sant  ce  coteau  aride.  En  1780,  le  Bureau  adopta  le  projet  de  Graslin  et  les 
travaux  commencèrent.  Il  n'entre  pas  dans  le  plan  de  cet  ouvrage  de  racon- 
ter l'histoire  du  nouveau  quartier  ;  elle  contient  pourtant  bien  des  choses 
intéressantes,  mais  cela  entraînerait  trop  loin  du  Théâtre.  Disons,  seulement, 
que  si  le  projet  de  Graslin  trouva,  dans  la  ville,  de  nombreux  partisans,  un 
certain  nombre  de  détracteurs  ne  tardèrent  pas  à  surgir.  Graslin  fut  attaqué 
et  vilipendé.  De  nombreuses  brochures  furent  écrites  contre  lui  et  son  œuvre 
Ses  ennemis  acharnés  étaient  les  Pères  Capucins,  dont  le  couvent  se  trou- 
vait menacé  par  les  accroissements  du  nouveau  quartier.  On  ne  peut  s'ima- 
giner la  haine  que  les  bons  Pères  mirent  à  poursuivre  le  fermier  général,  et 
le  torrent  d'injures  et  d'infamies  qu'ils  déversèrent  contre  Vennemi  commun 
—  c'est  ainsi  qu'ils  appelaient  Graslin.  Il  est  vrai  que,  dans  cette  guerre,  les 
Capucins  reçurent  aussi  un  certain  nombre  de  dures  blessures,   dont  deux 
surtout  leur  furent  très  sensibles.  La  première  de  ces  histoires  est  connue. 
Le  Père  Jérôme  fut  attiré  dans  une  embuscade  avec  deux  autres  religieux  ; 
ils  trouvèrent  dans  un  endroit  écarté  un  certain  nombre  de  jeunes  gens  qui, 
sans  pitié,  leur  administrèrent  une  vulgaire...  fessée.  On  voulut  faire  remon- 
ter la  responsabilité  de  cette  affaire  à  Graslin,  mais  l'enquête  qui  fut  faite 
prouva  qu'il  était  complètement  innocent.  Quanta  la  seconde  anecdote,  j'ai 
tout  lieu  de  la  croire  inédite,  car  je  l'ai  trouvée,  écrite  de  la  main  do  mon 
aïeul,  en  tête  de  deux  brochures  du  Père  Jérôme — fort  rares   aujourd'hui, 
et   que   je    possède   dans    ma    bibliothèque:    —    Réponse   aux  rcjloxions 
indispensables  de  M.  Graslin  et  Les  Œufs  de  Pâques  pondus  en  1783. 

((  M.  Graslin,  pour  se  venger  du  Père  Jérôme,  lui  tondit  un  piège  affreux. 
A  cette  époque,  la  rue  Moquechion,  entre  Saint-Siniilien  et  le  Port-Commu- 
neau  était  fort  mal  habitée.  Un  jour,  une  femme  alla  chez  lo  Père  Jérôme  le 
prier  de  venir  confesser  une  de  ses  amies,  qui  n'avait  confiance  qu'en  ce 
saint  Père.  Celui-ci,  sans  défiance,  s'y  rendit  à  l'heure  indiquée,  mais,  a»i 
moment  d'entrer  dans  la  maison,  des  jeunes  gens  qui  l'attendaient,  ayant  en 
tote  Seheult  l'ainé,  dès  lors  architecte,  firent  un  hourra  sur  l'honnôte  moine, 
qui  fut  ainsi,  pendant  longtemps,  l'objet  des  plus  injustes  railleries.  » 

Cependant  le  nouveau  quartier  s'élevait  peu  à  pou.  Graslin,  comprenant 
que  la  nouvelle  salle  dont  on  parlait  depuis  si  longtemps,  avait  son  emplace- 


GRASLIN   ET   LA    CONSTRUCTION    DU   CRAND-THÉATBB  Ul 

ment  tout  maniutj  .>ur  i;i  place  à  laquelle  la  Ville  venait  de  donner  son  nom, 
et  sachant,  d'autre  part,  que  la  municipalilij  reculerait  devant  la  dépense 
d'achat  de  terrain,  se  résolut  à  un  nouveau  sacrifice. 

Il  proposa  au  Bureau  de  lui  céder,  gratuitement,  l'emplacement  nécessaire  a 
la  construction  d'un  ^,'raiid  tliédtre,  plus  le  terrain  pour  ouvrir  deux  rues 
latérale:  en  tout  vingt  mille  pieds  farrés.  C'était  un  cadeau  de  deux  cent 
mille  livres  que  le  fermier  général  faisait  à  sa  ville  d'adoption.  Et  dire  qu'il 
s'est  trouvé,  et  qu'il  se  trouve  encore,  dos  gens  jx)ur  prétendre  que  Grasliii 
n'a  pas  fait  de  sacrifier!  J 'oubliais  de  dire  qu'il  faisait  au^isi  niveler  à  s«'<  frais 
tout  le  terrain. 

Pourtant  la  Ville  hésitait  à  accepter  celle  ollre  généreuse,  et  il  fallut  que 
Graslin  écrivit  plu«»ieurs  brochures  pour  faire  ressortir  tous  les  avant;igcs  de 
son  projet.  Enfin  il  ne  tarda  pas  à  se  créer  dans  le  public  un  mouvement  en 
faveur  de  la  proposition  du  fermier  général,  et  le  Bureau,  dans  sa  délibération 
du  2  aoiît  1783,  adoptai  définitivement  le  projet  de  construire  le  Grand- 
Théâtre  sur  l'emplaicment  offert. 

Je  rel^ve  dans  cette  délibération  les  passages  suivants  : 

((  En  mémoire  dudit  abandon  de  terrain  et  à  titre  d'indemnité,  lacommu 
nauté  cédera  à  perpétuité  au   sieur  Graslin,  pour  lui.  les  siens  et  ayant 
cause,   une  lo^e  privative  de  quatre  places,  dans  la  nouvelle  salle,  qu'il 
choisira  parmi  celles  qu'on  nomme  les  baignoires,  et  pourra  en  disposer  en 
faveur  de  qui  lui  semblera,  » 

«  Les  revenus  de  la  communauté  ne  lui  permettant  \ysis  de  faire  la  dépense 
de  cette  construction  avec  ses  ressources  ordinaires,  elle  fera  un  emprunt 
(|ui  pourra  s'élever  jusqu'à  trois  cent  mille  livres,  et  dont  elle  payera  les 
intérêts  à  Ti  <>/„.  On  stipulera  les  termes  de  remljoursement  suivant  les 
ressources  de  la  Communauté.  » 

De  j)his,ilans  cette  déliW'ratiuii,  la  Couinuuianié  a\uii.ii(  <[iic,  par  le  projet 

lie  Graslin,  elle  faisait  une  économie  de  cent  cin((uante  mille  livres. 

Comme  on  vient  de  le  voir,  la  loge  Graslin,  à  cette  époque,  n'était  pas  où 

lie  est  aujourd'hui.  S'il  faut  en  croire  le  libellé  du  P^re  Jérôme  :  Réponse 

•  iiix  réflexions  indispensables  de  M.  Graslin,  ce  dernier  n'aurait  pas  été 

très  content  d'être  placé  aux  baignoires.  En  eflet,  on  lit  dans  la  brochure  du 

apucin  : 

«  Il  vous  déplaît  qu'on  l'ait  fixée  (la  loge),  au-dessous  des  premières  ;  là 
elle  n'est  pas  assez  apparente,  là  vous  et  votre  famille  restez  cachés,  là  le 
bienfaiteur  public,  le  célèbre  Graslin,  sera  confondu  dans  la  foule,  là,  il 
gémira  de  ne  pouvoir  se  montrer  au  peuple  reconnaissant.  » 

Ce  passage  peut  donner  une  idée  dn  ton  de  la  polémique  engagée. 

Aussitôt  la  proposition  de  (iraslin  définitivement  acceptiV;,  le  Bi;;  t 

chargé  Mathurin  Cruoy  de  dresser  les  plans  de  la  future  salle.  L  :;l 

architecte,  à  qui  Nantes  est  redevable  de  tant  de  beaux  monuments,  se  niit 


32  LE   TMKATRE    A    NANTES 


immédiiitftmeiU  au  travail  ot  présenta  bientôt  le  plan  du  iliéiiire,  t<'l  que 
nous  le  Connaissons.  Cependant,  la  salle  devait  être  réunie  primitivement 
aux  deux  maisons  voisines  par  deux  belles  areades,  qui  complétaient  la  déco- 
ration do  la  place.  On  renon(;a  ensuite  à  ce  projet,  je  ne  sais  pourquoi. 

La  Ville  décida  qu'avant  do  faire  commencer  les  travaux,  Cruey  se  ren- 
drait â  Paris  pour  étudier  les  différentes  salles  et  demander  a  l'Acadt-mie 
d'architecture  son  avis  sur  le  plan  adopté.  Sa  mission  finie,  Crucy  s'em- 
pressa de  revenir  à  Nantes,  rapportant  les  félicitations  de  ses  collègues  de 
Paris. 

Le  devis  dressé  par  l'architecte  s'élevait  à  la  somme  de  262.232  livres 
19  sols  11  deniers.  Le  2  août  1785,  Graslin  proposa  à  la  Ville  de  se  charger 
de  la  construction  du  monument.  Il  s'engagea  à  ne  pas  dépasser  le  montant 
du  devis  et  il  promit,  s'il  dépensait  moins,  d'offrir  à  la  Ville  la  différence. 
Tel  était  le  caractère  de  l'homme  que  l'envie  et  la  haine  attaquaient  de 
toutes  parts  et  dont  la  générosité  était  inépuisable. 

Graslin  se  chargeait  de  tous  les  travaux,  à  l'exception  dp  ceux  de  sculpture 
et  de  peinture,  qui  restaient  au  compte  de  la  Municipalité. 

Los  travaux  commencèrent  immédiatement.  Graslin  les  poussa  avec  une 
telle  activité  que,  dans  le  courant  do  1787,  la  construction  extérieure  se 
trouva  achevée. 

Restait  à  aménager  l'intérieur. 

Le  bureau  choisit  comme  sculpteur,  M.  Robinot-Bertrand.  Chaque  chapi- 
teau devait  lui  être  payé  500  livres,  et  chaque  rosace  18  livres. 

On  s'occupa  ensuite  des  décors.  Par  permission  spéciale  de  l'intendant  do 
la  [d'ovince,  ils  ne  furoit  pas  mis  en  adjudication.  La  confection  on  fut 
confiée  au  sieur  Jean  Bourgeois,  qui  devait  immédiatement  entreprendre 
onze  décorations  complctes.  Ces  travaux  devaient  lui  être  payés  d'apri's  les 
prix  de  la  Comédie-Française.  Bourgeois  s'adjoignit  M.  Coste  et  fit  venir  do 
Paris  quatorze  peintres  qui  se  mirent  aussitôt  à  l'œuvre. 

Voici  le  détail  des  décorations,  tel  que  je  l'ai  trouvé  dans  les  Archives 
municipales  :  le  Rideau,  Le  Jardin,  La  Salle  de  Molière,  Le  Camp,  Le 
Paliiis,  La  Priaan,  La  Plane  publique,  La  CJiambre  rustique,  La  Foret  et 
Le  Plafond.  Quelque  temps  plus  tard  on  fit  faire:  Le  Trône,  Le  Désert, 
Le  Palais  féerique. 

La  Ville  paya  à  MM.  Bourgeois  et  Coste,  pour  pointures  à  la  salle  de 
spectacle,  la  somme  de  29.G74  livres. 

Cependant  le  public  s'intéressait  de  plus  on  i)lus  à  l'œuvre  de  Graslin,  et 
tout  le  monde  attendait  avec  impatience  l'ouverture  de  la  salle.  Il  n'étut 
question,  dans  la  ville,  que  du  nouveau  théâtre.  Cette  idée  poursuivait 
même  les  esprits  les  pli,is  sérieux.  C'est  ainsi  que  l'abbé  Lefeuvre,  recteur 
de  Saint-Nicolas,  qui  avait  l'habitude,  assez  excentrique,  d'écrire  une  sorte 


GRASLIN    ET   LA  CONSTRUCTION    DU    GRANDTUÉATRE  33 


(lo  gazette  de  la  ville  sur  les  registres  de  sa  paroisse  au  milieu  des  mariages, 
des  naissances  et  des  décès,  a  eu  rorcasion  de  parler  plusieurs  fois  de  la 
construction  du  Théâtre.  Il  est  vrai  qu'après  avoir  décrit  les  travaux  et  les 
sommes  votées  pour  leur  acoomplissement,  le  brave  curé,  dont  l'église  était 
légèn'mont  dél;ibrt'<'.  sTm  ii:iif  t-n  p.iilnnt  de  l;i  salle  Gra>lin  : 

«  Que  (le  pères  et  nifr.-.-  àr  l.inulle-  vont  y  [)orter  de  jour  en  jour,  .  e  qui 
>erait  nécessaire  à  r«'ducation  et  même  à  "la  nourriture  de  leurs  enfants  ! 
Est-il  possible  qu'on  fasse  tant  d«'  dé|)en»e<  pour  de  pareils  établisM-ments, 
et  qu'on  ne  trouve  point  d'argent  lorsqu'il  ^'apit  de  réparer  les  temples  du 
Sei<^Mieiir,  (|ui  sont  tous  dans  un  pitoyable  étal  .i  Nantes  !  Le  jeu,  le  luxe, 
les  spectacles,  le<  plaisirs  de  to\ite  es[M''Ce  V  absorl>ent  tout  l'argent.  » 

Depuis  longtemps,  il  était  question  de  rebâtir  Saint-Nicolas,  sur  la  place 

Royale,  en  face  de  la  rue  Crébillon.  Mais  la  construction   du  Théâtre  vint 

faire  oublier  celle  de  la  nouvelle  église.  Aussi  comprend-on  l'amertume  de 

M.  Lefeuvre,  qui  voyait  avec  terreur  la  maison  du  diable  prédominer  sur 

•lie  de  Dieu. 

Quelques  mots,  maintenant,  sur  le  monument.  Je  ne  puis  mieux  faire  que 
de  reproduire  la  description  donnée  par  Crucy,  lui-même,  de  son  œuvre. 

((  La  principale  façade  du  llieaiic  iumir,  >ui' la  place  Graslin,  un  péristyle 
de  huit  colonnes  corinthiennes.  Au  fond  du  péristyle,  quatre  autres  colonnes 
du  même  ordre,  dont  l'enlnuolonnement  est  ouvert  dans  toute  leur  hauteur 
servent  d'entrée  et  de  décoration  À  un  vestibule  de  forme  carré  très  allongé, 
terminé  de  chaque  bout  i)ar  u«i  cul-de  four  et  dont  la  voûte,  en  pierre  de  tuf, 
est  décorée  c^e  cai.>sons  et  de  rosaces. 

»  L'escalier,  qui  conduit  aux  premières  et  secondes  loges  est  en  lace  de 
l'entrecolonnenjent  du  milieu.  A  droite  et  à  gauche  sont  les  escaliers  des 
troisièmes  et  quatrièmes  loges,  tous  construits  en  pierres. 

»  La  salle  a  soixanle-deux  pieds  de  diamèlre  dans  l'œuvre.  Le  théâtre, 
.>ans  comprendre  la  galerie  de  fond,  a  cinquante-huit  pieds  carr*>s.  A  chaque 
côté  du  fond  du  théâtre,  un  escalier  en  pierres  conduit  aux  loges  des  acteurs 
etau  ma^'asin  d'lial)illemeut  ;  à  l'extréiuité,  vers  nord  et  occcidont,  du  même 
«•Atéqueles  portes  des  acteurs,  est  le  magasin  d<'s  décorations,  au  dessus  des- 
quels les  décorateurs  ont  leurs  ateliers.  » 

Ajoutons  à  ces  détails,  que  les  colonnes  du  péristyle  sont  surmontées  de 
huit  statues  représentant  les  Muses.  La  neuvième  sœur  n'nyant  pas  trouvé 
place,  faute  d'une  colonne  de  plus,  a  été  exilée  à  la  Bourse.  Elle  se  trouve 
sans  doute  fort  déplacée  au  faite  du  Temple  de  l'Argent  et  du  Commerce, 
et  doit  souvent  envier  le  sort  de  ses  compagnes,  planant  au  fronton  du 
Temple  de  l'Art. 

Ces  sUitues  avaient  été  prévues  dans  le  plan  primitif  •'•'  <  '"!  ^  "'!-  •  l'-s 
ne,  lurent  placées  que  sous  la  Ilestqiiration. 

Les  inscriptions  suivantes  se  lisent  sur  le  monument. 


■<4  LE   TIIÉATRK    A    NANTES 


A  gauche 


l'an     1788,    LK    JKLl/lliMl-:    U\      KKI.NE 

DE  LOUIS  XVI,  LE  BIENI- AlSANT 

CE     MONUMENT      FIT     TERMINÉ 

LOI  IS-JEAN-MARIE   DE    BOURBON.    DUC    DE    l'KNTMIÉVRE 

GOUVERNEUR 

LE    COMTE    DE  THOUARS,  COMMANJDANT 

LR    DUC    DE   CERESTE  DE    BRANCAR 

GOUVERNEUR    DE    LA    VILLE    ET    CHATEAU    DE    NANTES 

DR    BERTRAND    DE    MOLLEMLLE,    INTENDANT 


A  droite 


ETAIENT    POUR    LORS,    MAIRE 

MESSIRK    PIERRE    RICHARD    DE    LA    PRR\  ENdll.RI. 

ÉCHEVINS 

RENÉ    DREUX,  SOUS-MAIRE 

JEAN-CHARLES    GÉBIER 

.lACQUES     BODIN     DES     PLANTES 

RENÉ   GESLIN,    SIMÉON    PLUMARD    DE    RIEUX 

JEAN-JACQUES  URBAIN  MESLÉ 

PROCUREUR  DU  ROI,  SYNDIC 

PIERRE,    GUILLAUME,    HENRI    GIRAUD    DUPLESSIR 

SUR    LES   DESSINS    DE   MATHURIN    CRUCY 

ARCHITECTE    ET   VOYER    DE    NANTES 

(Traslio,  seul,  manque  ilaus  r-ette  énuincration.  Les  plus  obscurs échevin- 
y  figurent,  mais  le  nom  de  l'homme  à  qui  l'on  doit  vraiment  lé  nionuniont 
n'a  pas  été  trouvé  digne  d'y  être  placé.  Ingratitude  humaine  ! 

Les  armes  que  l'on  voit  au  dessus  de  ces  inscriptions  n'ont  été  sculptée> 
qu'en  1812,  lors  de  la  restauration  de  ia  salle.  Celles  de  <:;auche  sont  celle- 
de  la  ville  sous  le  premier  empire  ;  celles  de  droite  appartiennent  au  l>aroii 
Bertrand  Geslin,  qui  alors  était  maire. 

Toute  la  façade  extérieure  du  Théâtre,  ainsi  que  le  grand  vestibule,  ont  été 
préservés  de  l'incendie.  Tels  nous  les  voyons  aujourd'hui,  tels  ils  étaient 
autrefois.  Cependant,  les  portes  étaient  remplacées  par  des  grilles  qui 
n'ont  disparu  définitivement  que  longtemps  a|)it's  la  reconstruction  du 
monument. 

Passons  à  la  salle.  \'oici  ce  qu'en  dit  Guimard  dans  les  Annales  Nnnt/iis(\^ 
qui  datent  de  l'an  IIL  Sauf  les  figures  de  la  Liberté  et  de  l'Egalité  ajoutéo 
sous  la  République,  la  salle,  lors  de  rouverture,  était  identique  à  la  des- 
cription suivanti'  : 

«  De  nombreuses  entrées  donnent  accès  dans  la  s;ille  construite  en  demi 
cercle  dont  l'avant-scéne  fait  la  base.  Elle  a  quatre  rangs  deloge.s.  dont  le- 


GRASLIN   ET   LA   CONSTRUCTION    DO   GRAND-THÉaTRE  35 


premières  sont  précédées  d'une  galerie  continue,  sans  parlerdes  loges  grillées 
au-dessous  de  celles  ci  et  pas  plus  élevées  que  le  parterre.  Le  parquet  est 
vaste  et  l'orchestre  étendu  L'avant-scènc  est  d«''Corée  à  droite  et  à  gauche  de 
(tolonnes  cannelées,  aussi  d'ordre  ionique  et  supportant  un  fronton  décoré 
de  figures  de  la  Liherté  et  de  l'Egalité.  Son  plafond  circulaire,  divisé  par 
cuujpartiments  garnis  de  rosaces,  est  du  meilkuir  efTet  ;  on  voit  au  milieu  un 
aigle  pendu  qui  scniljlo  tenir  en  son  be«-  le  cordon  du  lustre,  qui  est  riclie; 
le  devant  di-s  loges  est  peint  diversement  et  dan^^  le  genre  araJ>esque  ;  celle 
d'honneur  occupe  le  centre.  Cette  salle  peut  contenir  deux  mille  spectateurs 
et  plus.  Au  fond  du  théâtre;  on  a  pratiqué  un  puits  d'où  part  une  pompe  qui 
elé.ve  l'eau  au  dessus  du  hâtiment.  dans  un  large  bassin  ou  réservoiren  plomb 
de  quatre  pieds  de  profondeur,  à  l'effet  de  prévenir  l'incendie.  Les  connais- 
seurs admirent  la  charpente  de  la  couverture  et  la  distribution  des  issues 
nombreuses,  pratiquées  de  manière  que  la  salle,  fût-elle  pleine,  pût  se  trou 
ver  vide  en  cinq  minutes,  sans  accident,  comme  au  reste,  ils  ne  manquent 
j)as  d'être  choqués  de  léeho  fati;^'ant  qui  se  fait  entendre  vers  la  loge 
d'honneur  et  qui  répète  désagréiiblement  la  voix  de  l'acteur,  ou  le  son  de 
l'instrument.  » 

Tout  marchait  pour  le  mieux  et  la  nouvelle  salle  n'allait  pa*;  tarder  à  être 
entièrement  achevée,  (iraslin  forma  une  société  qui  prit  lenom  de  patriotique 
destinée  à  l'exploitation  du  Graud-Théiitre.  Cette  société  olfrait  les  garanties 
les  plus  sûres.  Outre  (Jraslin,  elle  se  composait  de  M. M.  le  comte  d'Aux,  le 
comte  de  Trévélec,  Kobineau,  de  Bougon,  Coustard,  de  Mani,  comte  de 
Roseoat,  Chaurand  de  la  Ranjoriuière,  Michel,  Deluynes.  Bureau.  A  cette 
époque,  des  hommes  comme  ceux  dont  je  viens  de  citer  les  noms,  ne  mu- 
gissaient pas  de  se  placer  à  la  tète  d'un  théâtre;  aujourd'hui  on  ne  trouverait 
pas  à  Nantes  trois  hommes  assez  dévoués  â  la  cause  de  l'Art  pour  le  faire, 
et  quelle  toile  général,  grand  Dieu  !  contre  ceux  qui  seraient  assez  courageux 
pour  se  moquer  des  préjugés  bourgeois! 

La  société  proposait  à  la  ville  de  lui  louer  la  salle  du  Grand-Thédtre  ceuj 
vingt  mille  livres  par  an.  Toute  perte  était  à  sa  charge;  mais  écoutez  bien 
ceci,  lecteurs,  et  vous  admirerez  ces  gens  là,  à  moins  que  vous  les  traitiez 
d'idiots,  ce  qui  ne  m'étonnerait  guère.  MNL  Graslin,  d'Aux.  de  Trévélec 
et  C'o,s'engageaient  adonner  à  la  ville  tous  les  bénéfices  de  l'entreprise.  Pour 
eux,  ils  se  contentaient  du  sentiment  du  devoir  artisti(|ue  accomj)li.  Vous 
croyez  peut  être  que  la  ville  accepta  avec  euipressement  cette  combinaison 
désintér(*ssée?  Allons  donc  !  Elle  repoussa  ce  projet. 

Cela  prouve  une  chose  :  c'est  que  les  munici[)alités  sont  comme  les  gou- 
vernements :  elles  changent,  mais  elles  se  ressemblent  t'>nt'- 


«Wûl^%?^2* 


II 

DIRECTIONS  :    LONGO.   —   RODOLPHE    ET   HUS 

JT88  —  171)1 


;.<;/,,,,,,  ,.i   ilu   'fhi'utir.  —  /,»'.f   i.r'ff  .    /..y.it.x'f .  —  Afo/»-.  —  /.<!  SainiJi 
Marsins.  —  Affaire  FU-ury.  —  \J**'  Stiint- J:\tnes.  —  Anecilutes 


,  1  A  pJNon  (loniu'o  jKir  la  Miini(i|);ilité  |)our  n'fKiussor  l'ofFri'  tlo 
^i  Grnslin  «'l  de  ses  assofirs,  était  que  k*  Iovjt  do  la  salle  d<'vuit 
'\      <''tr<'  mis  en  adjudication. 

L<'  10  mars  1788,  "Lonfro,  déjà  dirtHtonr  de  la  salle  du 
|{|giioq-Lestard,  fut  nommé  dire<*teur  du  Grand-Théâtre.  La  ville  lui 
;iirermail  la  salle  l.").! KM)  livres  par  an.  Ainsi,  au  rebours  de  ee  qui  existe 
(1(!  nos  jours,  le  théjUn;  êt;iit  p()ur  la  ville  une  souree  de  revenus.  Ce 
ystémj?  ne  devait  pas  durer  longtemps,  et  la  triste  ex|)érience  des  choses 
n'allait  pas  tardera  prouver  «ju'un  directeur,  livré  à  ses  propres  ressources, 
niarelie  presrju'infaillibleraeni  à  la  ruine. 

|jon};o  était  nommé  jKlTir  cinci  ans  à  partir  de  Pâques  1788.  Il  devait  se 
l>ourvoir  de  décorations  en  sus  de  celles  tenant  à  l'inventaire  de  ja  salle  et 
«l'iMi  magasin  fj'haliillcmciH'^. 

f.c  pri.\  des  places  fut  li\<-  ',,111111.     'il; 

Prelniéres  et  parqu,  W  livres. 

Secondes 2  li\  re^. 

Troisièmes ;;o  sols. 

Quatrièmes '2\  sols. 

Parleii  ,'(l  sols. 

paradis 12  soh. 

Kl  ou  bal ;{  livres. 

Les  abonnements  au  mois  et  à  l'aimée  furent  laissés  au  gré  du  tlirecteur. 
Le  bureau  s'occupa  très  nnnutieusemeiu  de  la  question  d'«>clainige.  Voici 
lo  |)assage  de  la  délibération  sur  ce  sujet  : 

i  Le  sieur  Longo  fera  plaççr  a  ses  frais  dans  le  vestibul- 
verbéres    à    quatre  mèches    chacun.    Ies(|ue|s    seront    - 


:i« 


Kh    iiii.Aii.l 


VirilrculoK  du  cul  de  four  qui  est  de  chacjuo  côté  ;  il  ciUn-tiendra  ot  mettra 
au  rez  de-cluiussée  un  révcrbt're  à  deux  nn'ches,  pour  éclairer  les  escaliers 
des  troisièmes  et  des  (|uatrièiues  loges  vX  le  passage  qui  conduit  au  corridor 
du  |)arterre  et  du  paradis  ;  il  sera  |)lacé  cinq  réverbères  à  une  mèche  dans 
le  corridor  du  parterre  et  du  |)aradis,  savoir  :  deux  au  fond,  deux  à  l'entrée, 
un  au  milieu.  Sur  les  rues  latérah.'S,  à  chaque  passage  d'entrée  et  de  sortie 
du  parterre,  i!  y  aura  un  réverbère  à  un<;  mèche...  Il  sera  mis  cinq 
réverbères  dans  le  corridor  des  premières  loges  ;  sur  chaque  pallier  des 
escaliers  dos  secondes  loges,  il  y  aura  un  réverbère  à  quatre  mèches  ;  cin(| 
réverbères  dans  le  couloir  dt;s  secondes  loges  ;  aux  troisièmes  loges,  quatre* 
réverbères  ;  aux  quatrièmes  loges,  quatre  réverbères.  Le  lustre  qui  éclaire  la 
salle  aura  quarante;  huit  lumières.  Le  foyer  sera  éclairé  de  huit  lumières,  et 
pour  pan^f  aux  accidents  de  feu,  il  sera  chîiuffé  par  deux  poêles  posés  dans 
les  deux  cheminées.  L(;s  latrines  seront  nettoyées  tous  les  jours  ;  les 
corridors,  les  vestibules,  les  escaliers,  le  jjarterre,  le  parquet  et  les  loges, 
une  fois  par  semaine.  Le  sieur  Longo  apportera  toute  l'atteMition  possible  a 
relFei  d'em[)écher  qu'il  nt;  soit  porté  dans  les  loges  ni  feu.  ni  chautferetles. 
sous  ((Uc|(|Ue  |ir(''ti'\fr>  ipie  ce   soit.   » 

Dans  les  premiers  mois  de  178S,  la  salle  fut  comjjlètement  achevée.  Les 
sommes  dépens(''es  par  la  \ille  s'élevaient  à  cinq  cent  mille  livres,  mais 
Nantes  était  dotée  d'un  superbe  monument. 

On  peut  regretter  cependant  les  dimensions  un  peu  exiguës  de  la  salle. 
D'après  Guimar,  l'ancien  théâtre  pouvait  cont«'nir  2,00r)  spect;iteurs. 
Aujourd'hui,  Graslin  ne  renferme  que  1,225  places  ;  c'est  un  écart  de  près 
de  8(K)  places.  Comme  il  est  iiu|)rol»able  qu'on  ait  reconstruit  la  salle  plus 
petite  (|u'elle  était  auparavant,  j'en  conclus  que  Guimar  a  fait  erreur.  11 
est  donc  malheureux  que,  de  prime  abord,  on  n'ait  pas  donné  à  la  salle  une 
grandeur  plus  considérable.  Aujourd'hui,  il  arrive,  continuellement,  de 
refuser  des  centaines  de  spectateurs.  C'est  un  sujet  de  perte  pour  la 
direction,  qui  ne  peut  rattraper,  par  une  recette  vraiment  considérable,  les 
recettes  minimes  des  mauvais  jours. 

Le  IT)  mars  17H8  fut  |)ublié  le  règlement  pour  la  police  du  théâtre.  Un 
certain  nombre  d'articles  sont  encore  aujourd'imi  en  vigueur.  J'ai  extrait  les 
priii.ipanx  paragraphes  de  ce  rèL'lenient. 

CllAIMlUi:  DM  LA  POLICE  E.XTKHILURE 


11.  —  Le  spectacle  commenc(M'a  régulièrement  à  cin(|  heures  et  demie 
du  soir,  sans  qu'en  aucun  temps  ou  quelque  prétexte  que  ce  soit,  l'heure 
puisse  être  retardée  ou  avancée. 

III. —  L'ouverture  des  bureaux  pour  la  distribution  des  billets  d'entrée 
se  fera  tous  les  jours,  à  (piatre  heures  un  quart  pré'cises  du  soir. 


XI.  —  Les  abonnés  n'auront  point  de  loges  lixes.  à  l'excepiiou  de  celles 
du  Ivoi  cl  de  la  N'ilie,  dont  le  direeteui'  ne  pourra  dis|)oser  en  aucun  t«'mps. 


DIREfTtON    LONT.O  30 


et  qui  resteront  vacantes,  (luoiqu^'elles  ne  soient  pas  gardées,  jusqu'au  lever 
(lu  rideau,  et  de  celles  «|u'ii  aura  lou»''es  à  l'année,  et  qui  ne  pourront  C'ire 

;iu\  premières 

XII.  —  Il  est  défendu  à  qui  que  ce  soit  d'entrer  au  bal  avec  épées, 
cannes  ou  autres  armes,  ••  <!''  l'.oir  I"  chapeau  sur  la  tête  pendant  la 
soirée. 

XIII.  —  11  est  égalemr'ui  deltiidu  d'avoir  le  chapeau  sur  la  tête  au  spec 
taclf,  depuis  le  commenoemeni  d'iccdui  jusqu'à  la  fin. 

XIV.  —  Les  dames  ne  pourront  se  placier  dans  le  parquet  ni  dans  les 
premiers  ranjîs  des  p;aleries  avec  des  chapeaux  à  plumes,  bonnets  et  grandes 
eoi'lb^s  qui  empêcheraient  ceux  qui  seraient  derrière  elles  de  voir  le  spec- 
tacle.  » 

Voilà  un  article  (|iii  deviiii  mkh  cncMn-  ctic  njipiKnn-,  >uit  dit  en 
passant. 


XX.  —  11  est  défendu  a  toutes  personnes  de  faire  garder  leurs  places 
avant  le  spectacle  par  leurs  gens,  à  peine  de  prison  contre  ces  derniers,  s'ils 
1  ('fusaient  de  se  retirer  sur  le  premier  avertissement  qui  leur  en  sera  donné; 
il  est  également  défendu  de  retenir  sa  place  en  y  mettant  son  chapeau  ;  en 
cas  de  contestation  à  cet  égard,  celui  (|ui  voudra  maintenir  cette  prétentittn 
sera  sur  le  chatnp  mis  hors  de  la  salle. . . 

\XI.  —  Très  expresses  défenses  et  prohibitions  sont  faites  à  qui  que  •  •' 
soit  de  sifller  et  d'élever  la  voix,  tant  au  spectacle  qu'au  bal,  de  troubler 
l'ordre  et  la  sûreté  d'aucune  manière,  d'insulU;r  les  gardes  et  sentinelles  a 
peine  de  soixante  livres  d'amende,  même  d'emprisonnement,  et  de  plus 
grande  pejn..  vil  ^  ,  i;,.ii  s.iuf  à  ceux  (jui  croiront  avoir  sujet  de  se  plaindre, 
à  le  faire. 

XXll.  —  Il  est  défendu  aux  perruquiers,  éteint  en  habit  de  poudre,  aux 
gens  en  livrée,  d'entrer  au  spectacle,  môme  en  payant,  sous  peine  de  prison. 

XXVI.  —  Défenses  sont  faites  à  toutes  personnes  qui  ne  sont  pas  atta- 
chées au  spectacle  d'assister  aux  rép<''titions.  Le  régisseur  étiblira  en  consé- 
quence un  contnMeur  à  la  porte,  lequel  n'y  laissera  entrer  que  les  gens 
nécessaires,  à  peine  de  prison  contre  le  conirO)leur  et  de  dix  livres  d'amende 
contre  le  régisseur,  en  cas  de  contravention  de  sa  p;irt  au  présent  article. 

XXVI I.  —  Ordonne  que  par  le  directeur  il  sera,  à  la  diligence  du  subs- 
titut du  procureur  général,  donné  chaque  aimée  au  profit  des  Hôpitaux  de 
Nantes,  une  somme  de  ('»()U  livres  ou  à  l'option  cl  au  choix  des  Juges  de 
police,  une  représentation  sur  laqiielli'  le  directeur  prélèv«>ra  \o  tiers  de  la 
recette  pour  tous  les  frais,  «pie  le  directeur  comptera  aux  mains  du  receveur 
(le  rilùtel  Dieu,  et  sera  tenu  d'en  donner  »|uiltance  au  dit  substitut  du  pro- 
cureur général,  (|ui  la  reportera  au  siège  de  police. 


XXIX.  —  Les  seuls  cochers  de  maison  ou  de  remise,  en  attendant  la  lin 
du  spectacle,  se  tiendront  sur  une  file,  dans  les  rue,s  de  Corneille  et  de 
Molière,  le  long  de  la  salle,  de  manière  (jue  la  moitié  de  la  rue  restera  libre. 
Ils  ne  pourront  prendre  leurs  maîtres  (ju'aux  portes  latérales  de  la  dite  salle, 
et  le  cocher  qui  sera  avancé  et  dont  le  maitre  ne  sera  pas  prêt  à  sortir  sera 
obligé  de  défiler  sur  la  place  pour  aller  prendre  le  rang  à  la  queue  de  file, 
sous  peine  de  prison. 


jO  I.K  THKATRF   A    NANTKS 

CHAPITRE  DK  LA  POLjCE  INTÉRIEUR!-: 


V.  L.;  ciic;l  d'orf!ii-.'4ii;  (luiiiujra  a  riii(|  li<'ur<'s  pici-cs  du  vjoir,  i  .icruiM 

aiiv  musiciens  dans  l'endroil  à  ce  ^f-slin/!  ;  ils  cnlrcronl  tous  :ï  cinq  heun-s 
un  quart  à  l'oiThcsirc  ««t  joun-ont  jiis(|u'au  lever  du  rideau  la  musique  la 
plus  analogue  à  la  pièce  «jui  sora  repiYjsentée.  Si  c'est  un  opéra,  ils  en 
joueront  rfuiverlure  de  manière  à  ce  que  les  acteurs  puissent  entrer  en  scèn.- 
a  cin<|  lieures  et  demie  du  soir,  et  ils  se  tiendnjnt  a  leur  place  |«'ndant  lu 
durée  du  spectacle,  pour  «Hre  prêts  à  remplir  les  entr'ijetes  (jes  pièce>,,  à  peine 
(\o  sis.  livres  d'a|nendo  contre  cha(iue  musi<i<''>  qui  >ie  sera  pus  veiui  a  cinq 
heures  etqqi  n'en  ira  pendant  }e  spectacle. 

VII,  _  Los  acteurs,  actrices,  (igurants  et  autres  qui,  so^s  pr(';tcxt^4'indis- 
position,  auront  obligé  le  régisseur  de  changer  le  spectacle  et  les  musiciens. 
qui,  sous  prétexte  pareil,  auraient  annoncé  qu'ils  ne  .se  rendraient  pas  à 
l'heure  fixée,  seront  punis  de  vingt  quatre  heures  de  prison,  s'ils  .sont  vus 
4ajis  |ps  rue^  ei  autres  lieux  publics. 

XIX.  —  Lfs  acteurs,  actrices,  musiciens  et  aut,res,  ne  s'occuperont  aux 
répétitions  que  de  leurs  rôles;  les  aotriees  n*y  pourront  travailler  à  aucun 
ouvrage,  comme  tricot,  broderie,  etc.,  ils  ne  pourront  lire  leurs  rôles  si  ce 
n'est  dans  le  cas  d'études  précipitées. 

XXI U.  —  11  est  défendu  à  tous  jeteurs,  actri^^e^.  figurants,  musiciens, 
machinistes  et  autres  employés,  de  se  placer  dans  les  coulisses  pendant  la 
durée  du  spectacle  de  manière  à  y  être  vus  des  spect;iteurs,  sous  peine  de 
trois  livres  d'amende. 

XXIV.  —  Toutes  les  amendes  prononcées  ci-dessus  et  encouru(^s  par  le^ 
acteurs,  actrices,  musiciens  et  autres  personnes  attachées  au  t|)éâtre,  seront 
déposées  sur  le  champ  dan-,  un  tronc  placé  à  cet  effet  i\\i  foyer  .i"<^  ...t,.M.< 
et  actrices,  ou  retenus  par  le  directeur  sur  leurs  appointements. 

XXV.  —  U  est  enjoint  aux  valets  du  théatr»'  d'avoir  toujours  slu-  eux  un 
fort  pouteau,  i)0ur  êlrcî  prêts,  eii  cas  d'incendie,  à  couper  les  cordes  et  même 
les  décoratjon.s,  lorsque  l'ordre  leur  en  sera  donné  par  le  régisseur  Qu  autres 
ayant  flrojt  tfp  le  faire.  " 

Le  7  avril  I790,.cc  règlement  fut  augmenté  de  quelques  articles,  entr'autres 

de  ceux-ci  : 

XXVI.  —  Défenses  sont  faites  aux  acteurs  et  autres  personnes  attachées 
au  ihéâtre  d'enU'cr  au  parterre  depuis  cinq  heures  du  soir  jusqu'à  la  tin  do 
la  dernière  pièce,  d'y  faire  Un;  ou  (loniier  a  lire  aucuns  papiers  quelconques, 
et  de  se  placer  pendant  toute  hi  durée  «lu  spect;icle  ailleurs  que  daps  les 
lo^-es  oui  leur  sont  destinées,  à  peine  de  dix  livres  d'amende  contre  le 
directeur,  et  pareille  amende  contre  l'acteur,  et  de  plus  .m.,m.i..  iw.;,,..  .ni  \ 
échoit. 

.\XV1|.  —  Il  est  défendu  à  toutes  personnes  attachées  au  théAtre  ou  non, 
de  fumer  la  pipe  dans  toutes  les  parties  de  la  salle,  au  théâtre,  aux  loges  et 
aux  di|réreu(es  loges  des  acteurs  et  actrices,  à  peine  de  dix  livres  d'amende 
par  chaque  contravention,  et  mémo  de  prison  s'il  y  échoit. 


I 


DIRECTION    LONGO 


11 


Le  Grand  Théâtro  ouvrit  le  23  Mars  1788,  le  jour  de  IViques.  J'ignore 
,.ir  f|iielle  pitVe.  Malgré  les  rechcrrlies  les  plus  minutieuses  il  m*a  été 
impossible  d'élucider  cette  question.  Je  n'ai  pu  trouver,  non  plus,  aucun 
détail  sur  la  soirée  d'inauguration.  A  la  mairie,  on  ne  poss^df'  absolumont- 
ricn  sur  ce  fait,  pourtant  intéressant,  de  l'iii^loire  de  la  ville.  Quant  aux 
journaux  cet  événement  semble  avoir  passé  inaperçu  pour  eux.  D'ailleurs, 
la  collection  de  la  Bibliothèque  est  loin  d'éire  complète,  et,  dans  les  feuilles 
du  temps,  il  n'est  ^'uëre  question  que  des  faits  commerciaux.  Je  mo  suis 
adressé  à  plusieurs  de  nos  concitoyens  qui  auraient  pu  posséder  des  notes 
manuscrites  contemporaines,  mais  en  vain  ;  rien,  toujours  rien.  Il  est 
étonnant,  comme,  à  cette  époque,  on  néglige;iit  tous  les  faits  d'histoire 
locale. 

Des  difficultés  s'élevèrent  entre  la  municipalité  et  Versailles  au  sujet  d%  la 
loge  de  la  reine.  Deux  loges  avaient  été  réservées,  l'une  pour  le  roi,  l'autre 
pour  la  reine.  Celle  du  roi  devait  être  occupée  par  le  gouverneur  de  la  Ville, 
celle  do  la  reine  par  l'intendant  de  la  province.  Mais,  (  orame  ce  dernier  ne 
résidait  pas  à  Nantes,  les  officiers  municipaux  avaient  Ihabitude  de  se  tenir 
dans  sa  loge.  Or,  un  arrêté  royal  réserva  cette  loge  absolument  à  la  reine  et 
à  l'intendant  ;  quant  à  la  municipalité  il  lui  était  enjoint  d'en  choisir  une 
autre  où  bon  lui  semblerait.  Les  maire  et  échevins  de  Nantes  réclamèrent 
mais  rien  ne  fit.  A  ce  sujet,  voici  la  lettre  que  reçut  M.  Bertrand  de  .Molle- 
ville,  intendant  de  Bretagne  : 

Versailles,  le  10  avril  ITHs. 

J'iil  re<;u.  Monsieur,  la  lettre  que  vous  m'avez  adressée  let>  de  ce  mois  concer- 
cornant  la  réclamation  des  Maire  et  «'Chevins  de  .Nantes,  contre  les  décisions, 
concernant  les  lo^e-;  d'honneur  dans  In  nouvelle  salle  de  s|>eclaclc  dans  celle 
ville,  mais  cette  décision  riant  conforme  à  l'ordre  observé  dans  toutes  les  salles 
de  spectacle  du  royaume,  l'intention  de  Sa  Majesté  est  qu'elle  soit  exéeulée  et 
que  les  officiers  municipaux  s'y  conforment.  Vous  voudrez  bien  les  en  instruire 
Si  les  armes  de  la  Ville  ont  été  peintes  dans  la  loge  de  la  Reine,  il  sera  facile 
de  les  elTacer  et  de  les  peindre  dans  les  autres  loges  que  les  ofliciers  municipaux 
pourront  choisir. 

J'ai  l'honneur  d'être,  etc.  Raron  i>e  RarrHi  il. 

La  Ville  fut  forcée  d'obéir,  mais  non  sans  mécontentement. 

Vu  sujet  de  la  loge  de  Graslin.  il  y  eut  aussi  des  discussions  entre  Longo 
.  .  Graslin.  Le  directeur  voulait  exiger  de  ce  dernier  le  prix  des  places  de  sa 
loge,  disant  qu'il  n'avait  que  le  droit  d'une  logo  et  non  celui  d'entn*r  sans 
payer.  Graslin  s'adressa  immédiatement  à  la  municipalité,  le  Bureau  se  e.>n- 
sulta  et  décida  qu'il  prendrait  l'avis  des  avocats.  Je  n'ai  pu  retrouver 
le  résultat  définitif  de  la  décision,  mais  il  fut  certainement  favorable  à 
Graslin,  car  la  réserve  de  la  gratuité  de  la  loge  Graslin  existe  toujours  dans 
le  cahier  des  charges  du  ThéAtre. 

10 


42 


Li:    THEATRK   A    NANTES 


Voici  le  tableau  delà  troupe  engagée  par  Longo  pour  desservir  le  nouveau 
théâtre. 

SAISON      1788 


MM.  LoNfio,  din'Ctc'iir  : 
FouRNiER,  réf;is.seur. 

OPÉRA 

MM.  Saint-Vai.i.teh  ,    iii-rmièrr    liante - 
contre  ; 

Dki'oni),  picinii  re  haute  contre  : 

Mo.NTViLi.K,  pnniièn;  liauto-conlre; 

CiiEVALiKU,  (liuxiènic  haute  contre; 

lUr.iiARD,  deuxième  haute-contre; 

(îHiMALDY, premiers  basse  taille; 

Allan,  i>reniière  has.se  taille  ; 

Massy,  première  basse  taille; 

DouviLLK,  deuxième  basse  taille  : 

Behoaviin,  laruette  ; 

Frédéric,  accessoire  ciuintant  ; 

Lesage,  trial. 

Mnips  DucHAUMosT,  première  ci)anti'U.se; 
Lesage,  première  chanteuse; 
Vai.vjlle,  première  chanteuse  ; 
Saint-Servant  ,    première    chan- 
teuse ; 
Serton,  preinière  duè{,çiie  ; 
DoRxiii.LY,  deuxième  duègne  ; 
TnfcODonK,  deuxième  ainounnisc  : 


M""    l'iAU,  deuxième  amoun-use; 
Massv,  deuxième  amoureuse; 
Frédéric,  ingénuité. 

COMÉDIE 

MM.  Dactiiav,  premier  rôle  ; 
Massin,  deuxième  rôle: 
Chevalier,  troisième  rùle  ; 
Lavandaise,  rois,  tyrans; 
GouR VILLE,  financiers,  paysans: 
CoMt'AiN,  premier  comicjue; 
Verteuil,  premier  comique  ; 
Frédéric,  deuxième  comique; 
Lesage,  niais; 
Vanhove,  père  noble; 
Saint-Servant,  accessoire; 
Giron  VILLE,  accessoire  ; 
MicHELOT,  souffleur. 

M""s  TouTEviLLE,  premier  rùle  : 
Barroykr,  deuxième  rôle: 
Verdier.  caractère; 
Massy,  troisième  rùlc  ; 
GoNTiER,  première  soubrette: 
MoNTviLLE,  deuxième  souhretto. 


Les  doux  Coquelin  do  l'opo((iie,  Baptiste  aîné  et  Baptiste  cadet,  qui 
allèrent  ensuite  à  la  Comédie-Française,  se  firent  applaudir  à  Nantes 
pendant  la  direction  Longo. 

Jiaptiste  aine  possédait  une  brillante  éducation  ;  il  jouissait,  à  Nantes,  de 
l'estime  générale,  et  était  reçu  chez  plusieurs  riches  négociants.  Il  avait  un 
très  bon  ton  et  un  esprit  achevé.  Les  pièces  où  il  se  fit  surtout  applaudir 
sont  :  Le  Glorieiw,  Les  Châteaux  en  It.spagne,  L'habitant  de  la  Guadeloupe, 
La  Mctromanie. 

Baptiste  cadet,  à  l'époque  où  il  parut  à  Graslin,  n'était  encore  âgé  que  de 
di.v-ncuf  ans.  11  s'essayait  dans  de  petits  rôles  où  les  connaisseurs  décou- 
vraient déjà  les  germes  de  sou  talent  distingué. 

Mole  revint  à  Graslin.  A  ce  sujet,  je  trouve  dans  Gaullier  l'anecdote  sui- 
vante : 

«  Plusieurs  anciens  habitués  du  Théâtre  étaient  rassemblés  à  V Hôtel  de 
la  Paix  au  moment  où  imc  chaise  de  poste  arrivait:  ils  voient  un  vieillard 
en  sortir;  sa  déuiurche  est  un   peu  tremblante,  sou  dos    est  voûté;   une 


MOLK   —    MARSIAS   —    LA    SAINT-HUBERTl  43 


vieille  perruque  dérobe  une  partie  de  sa  physionomie.  Personne  ne  le  con- 
naît. Il  demande  une  chambre.  Une  heure  après,  au  moment  où  les  hal)i- 
tués  allaient  se  mettre  à  table,  on  aperçoit  ce  môme  vieillard  entitrement 
rajeuni,  en  habit  de  soie,  perruque  élégante,  les  joues  couvertes  d'un  léger 
vermillon  ;  il  marche  avec  grâce  et  abandon  :  «  Eh  bien.  Messieurs,  s'écrie  t 
il  gaiement  en  entrant  dans  la  salle,  m(;  voici  de  retour  parmi  vous.  »  Les 
amateurs  ouvrent  de  grands  yeuv  et  le  même  cri  part  à  la  fois  de  toutes  les 
bouches  :  M.  Mole!  C'<''tait  lui-môme.  Dans  le  monde  comme  à  la  scène,  il 
savait  être  toujours  jeune  quand  il  le  voulait.  » 

Un  artiste,  dont  les  vieux  amateurs  de  notre  ville  ont  gardé  longtemps  le 
souvenir,  Lefèvre,  dit  Marsias,  commença  sa  carrière  sous  Longo;  il  devait 
la  continuer  jusque  sous  Arnaud.  Marsias  parut,  à  la  fois,  dans  la  tragédie, 
la  comédie,  l'opéra  et  le  vaudeville.  Il  chantait  tour  à  tour  les  Eltevions,  les 
Martins  et  les  basses-tailles.  On  l'a  vu  représenter  tous  les  personnages  de 
l'opéra  d'Œdipe,  sauf  ceux  d'Antigone  et  d'Eriphylc,  et  dans  le  Tableau 
Parlant,  il  remplit  tous  les  rAles,  môme  ceux  do  Colombine  et  do  la  pupille 
de  Cassandrc,  à  deux  représentations  travesties. 

\fmes  Maillard  et  Saint-IIuberti  donnèrent,  quelques  mois  après  l'ouver- 
ture du  théâtre  Graslin,  plusieurs  représentations.  Tout  Nantes  courut 
applaudir  M^''  Maillard  dans  \ù  Devin  du  Village,  dont  elle  chantait  le  rôle 
de  Colette  d'une  façon  exquise.  Elle  interpréta  au>>si  ArmidecX  Iphigénioen 
Tauride  avec  beaucoup  de  succès,  mais  l'enthousiasme  des  dilettmti 
nantais  ne  connut  plus  de  bornes  quand  ils  entendirent  la  Saint-Huborti 
chanter  Didon,  Ariane,  Phèdre,  Armide  et  Castor  et  Pollux. 

«  On  lui  demanda  le  Devin  du  Villar/e,  (|u'elle  n'avait  jamais  chanté  à 
Paris  :  elle  y  fit  fureur.  Pendant  ses  représentiitions,  on  ouvrait  les  portes 
I  miili,  et  le  public,  tant  les  places  se  disputaient,  avait  la  patience  d  attcn 
(lie.  durant  cinq  heures,  le  lever  du  rideau.  M'"**  Saint-IIuberti  n'éUiit  peut- 
être  pas  une  cantatrice  dans  l'acception  toute  nmsicale  du  mot,  mais  c'était 
une  actrice  passionnée,  imprimant  à  son  chant  cet  accent  irrésistible  qui 
remue  les  masses,  et  ajoutant  à  cet  effet  par  l'énergie  du  jeu,  qu'elle  rendait 
élo(iucnt  jusque  dans  son  silence  '''.  » 

Longo  ne  garda  pas  longtemps  la  direction  du  Grand  Théâtre  ;  en  elFet, 
le  2H  janvier  17S9,  il  fut  remplacé  par  Rodolphe,  musicien  assez  distingué, 
luteur  de  l'opéra  d'/sm^^or,  et  Hus,  maître  de  ballet.  Ces  derniers  obtinrent 
le  bail  à  ferme  de  la  salle  de  spectacle  pour  neuf  années.  Le  prix  de  la  loca- 
tion étiiit  de  vingt  mille  livres  par  an;  en  outre,  les  directeurs  devaient 
fournir  un  lustre  en  cristal,  semblable  à  celui  de  la  Comédie-Française,  en 
remplacement  do  celui  en  fer,  entretenir  les  pot'les  et  faire  tous  les  ans  une 
décoration  complète  sur  les  dessins  de  l'architecte  voyer. 

Les  sieurs  Rodolphe  et  Hus  obtinivut  du  duc  de  P.MiUiiêvrc  li^  privil'u'i' 
exclusif  du  théâtre. 

(1)  Mcllinet.  L<i  Musii/ur  i)   Xanie.-' 


4\  LK   TirKAIRi:    A    NANTES 


<(  En  conséquence,  il  <';tait  défendu  à  toute  autre  troupe  de  comédiens,  sau- 
teurs, baladins  et  joueurs  de  marionnettes  de  fair»*  des  exercises  ou  d«; 
donner  ses  spectacles  sur  aucun  théâtre  de  la  dite  ville  de  Nantes  sans 
payer  auxdits  sieurs  Rodolphe  et  IIus,  ou  à  leur  prépos.-  ).•  .m  .rr  ft.n.-  (],-'< 
produits  des  recettes.  » 

En  1789,  M"«  Saint  James,  pensionnaire  de  l'Académie  Royale  de  Musi 
que,  débuta  dans  l'éternel  Devin  du  Villar/r.  «  M'"  Saint  James  possédai^ 
la  \  oix  la  plus  agrcable  qu'on  ait  encore  entendue  à  Nantes  »,  nous  dit  h- 
critique  de  ï Abeille  Bretonne. 

Puisque  le  nom  de  cette  feuille  vient  sous  ma  plume,  j'en  profiterai  pour 
parler  immédiatement  de  V Affaire  Fleuri/,  qui  fit,  à  cette  époque,  tant  de 
bruit,  dans  lo  monde  Ihédtral  nantais.  Voici  les  faits  : 

Leraarquant,  rédacteur  de  VAbeille  Bretonne,  voulant  se  venger  de 
M'''"  Fleury,  qui  avait  dédaigné,  paraît-il,  ses  soins  amoureux,  fit  paraître, 
dans  son  journal,  une  critique  fort  dure.  L'actrioe  altaqu«'e  répondit  une 
lettre  à  M.  Leniarquant.  Dans  celte  lettre  qui  fut  publiée,  mais  non  vendue, 
l'artiste  ripostait  fort  bien,  témoin  ce  passage  : 

((  Eh  !  croyez-vous  de  bonne  foi  que  les  gens  honnêtes  et  sensés  vous 
sachent  j^ré  et  vous  en  estiment  davantap;e  d'avoir  décrié  avec  aussi  peu  de 
nn'nagement  une  jeune  personne  do  dix  sept  ans,  arrivée  malade  en  cette 
ville,  oîi  elle  est  sans  protection,  connaissances,  appui  ni  défenseurs? 
Crovcz-vous  que  le  dép;oiit,  car  d'après  votre  caract<''re  \indicatif  et  votre 
letti(>  menaçante,  je  m'attends  à  être  sifllée  par  vous,  ne  fut-ce  que  pour 
prouver  la  beauté  des  choses  que  vous  avez  dites,  croyez-vous,  dis-je,  que  le 
dégoût  et  le  découragement  amènent  la  perfection  dan.s  les  arts?  Non. 
M.  Lemarquant,  ce  sont  des  avis  doux,  honnêtes,  exempts  d'injures  gros- 
sières, tels  enfin  que  je  vous  crois  incapable  d'en  donner,  et  pour  joindre 
l'excîmple  à  la  leçon,  je  commencerai  i)ar  vous  dire,  moi,  d'après  ce  que  j'ai 
lu  (le  vous  : 

Eh!  qui  diable  vous  force  à  vous  faire  imprimer ( 
Si  l'on  peut  'pardonner  l'esxor  fl'un  tnauraiê  livre 
Ce  n'est  qu'au  malheureux  qui  co)npose  pour  vivre. 

VOUS  êtes  orfèvre  M.  Josse.  » 

La  lettre  continue  sur  ce  ton  pendant  trois  pages. 

Or,  au  théâtre,  à  une  représentation,  un  spectateur  jeta  cette  lettre  sur  la 
scène,  demandant  qu'elle  fût  lue  à  haute  voix  ;  une  partie  du  public  fil 
chorus,  le  directeur  céda,  et  la  lettre  fut  lue,  à  la  grande  colère  de  Lemar- 
quant,  qui  était  dans  la  salle.  Il  essaya  de  répoudre  dans  son  journal,  mais 
toute  la  ville  était  contre  lui  et  donna  raison  à  la  chanteuse. 

Les  représentations  étaient  alors  fort  accidentées.  Le  public  qui  aimait 
beaucoup  M""  Saint  James  désirait  l'entendre  dans  la  Caravane,  du  Caire 
dont  lo  rôle  principal  était  tenu  par  M"«  Saint-Servant.  Un  soir  que  cette 
dernière  jouait  l'opéra  do  Grétry,  le  public  réclama  tellement,  que  Rodolphe 
fit  baisser   le  rideau   et   ordoniia    à  M"^    Saint  James    d'aller  s'habill'T. 


m"*    saint- JAMES   —   ANECDOTES  45 


M™*  Saint  Servant  furieuse,  se  mit  à  injurier  le  directeur  et  donna  un  roup 
le  poing  à  M"«  Saint  James.  Saint-Servant  prit,  naturellement,  parti  pour  sa 
femme.  Croyant  ramener  la  tranquillité'.  Hus  ordonna  de  relever  le  rideau; 
au  même  moment,  Saint-Servant  tira  sacanm'  à  épée  ot  se  précipita  sur  le 
fils  Hus  qui  était  là.  Pendant  ce  temps,  le  rideau  s'était  levé  et  le  publia 
assistait  à  toute  la  scène.  On  désarma  Saint-Servant,  mais  dans  la  ^alle 
on  crut  que  IIus  avait  et»'  blessé  ;  des  femmes  s'évanouirent;  d'autres  se  sau- 
vèrent du  tlK'âtre,  les  hommes  escaladèrent  la  srène  et  le  spectacle  ne  put 
reprendre  qu'après  une  longue  interruption.  Le  public  exigea  que  M.  et  M"* 
Sainl-Scrvant  ne  reparussent  plus  devant  lui. 

Vers  cette  époque,  on  joua  les  pièces  suivantes  :  Lex  Sculpteurs,  Boni- 
face,  Pointu  et  sa  famille,  LWoocat  chansonnier,  Les  Cent  écus,  Le  Prince 
Ramonneur,  Gilles  Barilleur,  Les  Amours  de  Montmartre,  L'Anglais  à 
Paris,  Le  Café  dd  Nantes,  La  Mort  du  Capitaine  Cook,  ballet  en  a<tion  ; 
Dorothée,  pantomime  à  grand  sp<.'ctacle  ;  La  Rose  et  le  Bouton,  pastorale 
de  Robinot-Bertrand,  —  il  paraît  que  cette  dernière  œuvre  était  assez  leste, 
et  qu'on  en  supprima  plusieurs  passages  ;  —  le  Jugement  de  Midas.  de 
Orétry.  Au  sujet  de  cet  opéra,  Mellinet  cite  une  anecdote  assez  curieuse  : 

«  A  l'occasion  du  Jugement  de  Midns,  MM.  les  clercs  de  procureurs 
rernrent  tous  le  billet  que  voici  :  «  MM.  les  clercs  sont  invil^-s  à  aller  silllcr 
le  Jugement  de  Midas,  parce  qu'on  dit,  dans  celle  pièce,  que  Midas  était 
leur  com[>ère,  et  que  l'auteur  anglais  (M.  d'IIell)  donne  des  oreilles  d'âne 
aux  amis  de  Rameau,  en  face  des  Français  eux  mêmes.  »  —  Les  clercs 
eurent  l'esprit  de  faire  justice  de  ce  billet  ridicule  :  au  lieu  de  sitHcr.  ils 
ap])laudirent,  et  le  succès  fut  complet  :  c'était  donner  tort  à  la  fois  à  l'auteur 
de  ro[)éra  et  à  c«'lui  du  billet.  Lefèvre  produisit  un  effet  tel,  dans  le  rôle  de 
Margias,  «juc  le  nom  lui  en  resta.  » 

Le  célèbre  Gardel  éUiit,  en  1789,  maître  de  ballet  au  Théâtre  Grasiin.  Il  fit 
jouer,  le  23  mai  de  cette  année,  Mirxa,  ballet  en  action,  dont  il  était  l'auteur. 
Le  succès,  parait  il,  fut  complet. 

L'Assemblée  nationale  venait  d'accnirder  aux  comédiens  la  jouissance  des 
droits  civils  et  politiques.  Les  artistes  de  la  Comédie- Française  avaient  fait, 
i  ce  sujet,  une  démarche  auprès  du  Bureau  de  l'Assemblée.  Les  pension- 
naires du  théâtre  de  Nantes  écrivirent  la  lettre  suivante  aux  comédiens  du 
Roi  'I': 

.Nantes,  ce  1"  janvier  l"*.ll). 
Messieurs, 

Daignez  agréer  noire  félicilation  sur  votre  respectueuse  démarche  auprès  de 
M.  le  Président  de  l'.-Vssemblée  .Nationale,  sur  le  décret  dont  elle  nous  honon.  et 

I  l)Ju  dois  la  communication  de  celte  lotli\>  à  l'obligeance  de  M.Moaval.  archiviste  de 
iu  ComodioFran<;ai8e. 

U 


K»  I.K   TMKATKK    A    NANTK» 


nos  siiic"'rr'>;  itiiMicifineiils  dr  ri'iii|)res^<'iiMi!i  Mtn-  viiii>  .iv.-/  ut'i-^  ;i  ri'ni-  i-n  fHirc 
part. 

l'iiissfnl  tous  nos  raïuarodcs  do  iirovincc,  <jiii  Iruuvercnl  tl<'  tout  t<-ni>  lii  vous 
(li'R  modèles  dans  la  cairiere  théâtrale,  suivre  plus  scrupuleusement  encore 
l'exemple  «[ue  vous  leur  avez  toujours  donni-  des  bonnes  mœurs  el  de 
l'honnètt-lc'-. 

.Ndus  avons  l'honneur  d'être  avec  la  plus  p;irfaite  estime, 

Messieurs, 

\'its  très  hunddes  et  très  obéissants  serviteurs  et  servantes. 

MM.  (irimaldy.  —  Villeneuve.  —  Compain.  —  Allan.  —  Mus.  —  Chazel.  — 
Morpiay.  —  Lavandaise.  —  Dorvigny.  —  Haptiste  Anselme  et  son  épouse.  — 
M"'  Touteville.  —  iJaroyer.  —  Perlet.  —  Ferton.  —  Slephani.  —  Ducbaumont. 
—  Saint  N'iillier        (îourville.  —  Micbelot.  —  Devaugre,  secrétaire  soullleur. 


«  Rodolphe  et  Mus  donnèronl  au  Grand-Théâtre  une  extension  extraordi- 
naire :  tous  les  fj;enres  étaient  portés  au  grand  complet,  et  la  troupe  se 
composait  des  meilleurs  acteurs  de  la  province.  On  y  revoit  Haptiste,  l'infa 
li^'ablc  (iourvillc,  Lavandaise,  M"°  Touteville,  auxquels  viennent  se  joindre 
(kimpain,  l'excellent  comique,  dont  le  jeu  spirituel  et  la  verve  entraînante 
lui  valurent  les  plus  p-ands  succès  au  théâtre  de  la  Porte  Saint-Martin,  à 
Paris  :  il  finit  ses  jours  d'une  manière  tragique,  dans  une  émeute  qui  eut  lieu 
à  Bordeaux  ;•' Bergamin,  laruette,  l'acteur  de  la  nature,  qui,  sans  aucune 
instruction,  apportait  dans  tous  les.rôles  une  vérité,  un  abandon  admirables  ; 
Massin,  cliarniant  jeune  premier,  et  Mercero,  danseur  distingué  et  même 
parfait.  Mais  ce  règne  brillant  ne  fut  pas  de  longue  durée.  Les  dépenses 
excessives  de  celte  administration,  qui  avait  un  mobilier  et  un  personnel 
considérables,  joint(^s  à  celles  des  directeurs,  (pii  tenaient  chacun  une  maison 
montée  sur  le  grand  ton,  amenèrent  bientôt  la  ruine  de  leur  entreprise.  >»  '•'. 

Déjà,  dès  178*.),  on  prévoyait  la  chute  forcée  du  théâtre.  Pour  tirer  les 
directeurs  d'embarras,  quel(|ues  personnes  eurent  l'idée  de  faire  nue  sous- 
cription. Le  projet  fut  imprimé;  en  voici  un  fragment. 

«  Los  soussignés,  voulant  donner  aux  dits  entrepreneurs,  et  principale- 
ment au  sieur  IIus,  des  moyens  d'encouragement  pour  soutenir  le  théâtre,  et 
des  preuves  de  leur  satisfaction,  promettent  et  s'engagent  par  le  présent,  do 
compter  chacun,  d'ici  au  premier  Février  prochain,  une  somme  de  96  livres 

entre  les  mains  de  M demeurant qui  s'est  chargé 

d'en  faire  la  recette,  etqui  en  rem(>ttra  le  produit  total  aux  dits  entrepreneurs, 
sur  leur  quittance  et  d'après  la  soumission  solidaire  (ju'ils  feront  de  maintenir 
le  théâtre  jusqu'à  l'expiration  île  leur  bail  sur  le  pied  où  il  est  actuellement, 
et  de  lui  doimer  encon^  toutes  les  amélioration^  dont  il  peut  être  susceptible. 
Il  est,  au  surplus,  arrêté  que  le  présent  engagement  iu>  sera  valide  qu'autant 
(|u'il  sera  revêtu  de  'Mi)  signatiu'es  au  moins;  que  la  signature  simple  ne 
vaudra  que  ponr  une  seule  action,  et  que  les  amateurs  les  plus  zélés  et  les 

1 1 1  liiiuliu  r  el  t  iha|ilaui. 


SITUATION    DIKKKnLK    D«*    TIIKATUE  17 


liofs  (le  famille  (|iii  voudraient  souscrire  pour  plusieurs  a<'tions,  eu  égard 
lUX  nombreuses  personnes  qui  leur  sont  attachées  t-t  qui  fr(>quenient  le 
pecfcicle,  spécifieraient  le  nombre  d'actions  pour  lequel  ils  enteDd*"'  '•■'..- 
rire.  » 

Je  ne  sais  si  cette  souscription  réussit  ;  sauf  le  document  dont  je  viens  do 
iter  le  principal  passage,  je  n'en  ai  pas  trouvé  d'autres  traces, 
r.a  situation  politique  coiumcneait  à  s'obscurcir.  La  ville  se  trouvait  très 
■  •'■'•'•''•".  "t  les  directeurs  ne  payaient  point  les  quartiers  échus. 

«  Le  Conseil,  considérant  que  les  recettes  du  théâtre -«ont  si  minimes,  pi.' 
-ouvent  elles  ne  s't'K'vnit  (ju'a  quin/c  et  vingt  livres,  <;t  qui'  les  jour^  •!•• 
fét»',  c'est  à  peine  si  elles  atteignent  deux  cents  à  trois  cents  livre->  ;  considé- 
rant que  si  on  saisissait  ces  recettes,  ce  serait  enlever  aux  acteurs  et  aux 
musiciens  le  salaire  qui  leur  est  dii  et  forcer  les  directeurs  à  fermer  le  s{>ec- 
tacle  ;  arrête  (ju'on  suspendra  les  poursuites  et  qu'on  avisera  plus  tard.  •• 

Le  22  octobre  179(),  le  Conseil  se  décida  à  mettre  en  vente  le  riiéiitie, 
mais  un  arrét*^"'  du  Directoire  du  département  interdit  à  la  commune  d'aliéner 
la  salle. 

<i)uelque  temps  aprt»s  les  sieurs  Perlet  et  Chazellc,  comédiens,  deman- 
dèrent à  la  municipalité  de  les  nommer  administrateurs  ou  direett»urs. 

•<  Sur  quoi  le  bureau  délibérant,  ouï  les  conclusions  du  procureur  de  la 
commune,  a  arrêté,  avant  de  rien  statuer  sur  le  plan  présenté  par  les  sieurs 
l'crlet  et  Cha/elle  pour  l'administration  du  (Jrand  SpecUiclc  d<>  cette  ville, 
de  nommer  des  commissaires  du  conseil  pour  examiner  ladite  requête,  ainsi 
(jue  les  fermes  et  traités  passés  avec  les  sieurs  Rodolphe,  Hus  «t  ('ompaguie, 
pour,  d'après  leurs  observations,  être  statu»-,  s'il  y  a  lieu  ;  et,  ii  cet  clfet,  le 
bureau  a  nommé  pour  ses  commissaires  MNL  Clavier,  Gedouin,  Carrié  et 
Kyédy,  à  qui  il  a  été  remis  six  pièces  relatives  à  l'objet  qu'ils  sont  chargés 
trcxaiuincr,   >» 

Dans  la  même  séance,  on  discuta  aussi  la  question  de  la  résiliation  des 
l'aux  des  directeurs. 

«  Messieurs,  dit  le  procureur  de  la  commune,  vous  n'ignorez  pas  dans 
<iuel  état  de  détresse  se  trouvent  aujourd'hui  les  ilirecieurs  du  spectacle.  IN 
doivent  aux  comédiens  du  théâtre  plus  de  soixante  mille  livres  ;  plusieui*s 
quartiers  du  loyer  de  votre  salle  sont  dus  ;  ces  direct^^urs  doivent  à  tout  le 
inonde,  et  l'absence  de  plusieurs  d'entre  eux  semble  annoncer  une  faillite 
au  carême  prochain.  Je  pense,  Messieurs,  qu'il  est  instant  de  prendre  un 
parti  sérieux  ;  non  seulement  pîirce  que  le  temps  est  court,  mais  parce  que 
nos  revenus  en  soulîtent  et  en  souffriront  davantage  par  la  suite,  .^i  on 
dilfére  encore  quelques  jours,  il  pourrait  se  faiiv  que  votre  théAtie  fut 
dépourvu  de  coiui'dieiis  ;  une  cessation  subite  de  specta<le,  dan»  une  grande 
ville  comme  Nantes,  où  les  citoyens  sont  habitué^  à  cet  amusemeni.  ne 
pourrait  être  que  dangereuse.  Je  requiers,  pour  l'intérêt  public,  que  vous 
délil)éric/  sur  mon  e\|>osé,  et  que  vou>  avisiez  aux  moyens  à  prendre  dans 

itc  circonstance.  » 


48 


LE   TIIEATKË   A    NANTES 


"  Sur  ((uoi  délibérant,  lo  conseil  décerne  acte  au  procureur  de  la  coni- 
niiiiic  de  son  ré(|ui.sitoire,  rt  apr*''-  s'être  fait  donner  lectun;  par  son  secré- 
t;iire  grcllier  du  bail  à  U'.rn\r  fait  avec  le  sieur  Longo,  son  pré(îédeni  fermier, 
et  de  eolui  fait  avec  le  sieur  Hus,  Rodolphe  et  Compagnie,  notamment  de 
l'article,  etc.,  a  chargé  le  procureur  de  la  commune  de  faire  les  suites 
nécessaires  pour  parvenir  au  résiliement  desdits  baux.  " 

Le  8  avril  17'J1,  les  sieurs  Ilodolplic  et  Hus  furent  déclarés  en  faillite. 


fv^*^v'i^,-<^w'f5 


111 


DIRECTIONS   ;    FERYILLS.    —    VIOLETTE     et    C 

DANGLAS 

PÉRIODE    RÉVOLUTIONNAIRE 

1791  —  An  IV 
Atiecdole.x.  —  Carrier  et  le  régisseur  du  Grand  TliMtre 


PRÈ9  la  faillite  de  Rodolpho  et  Hus,  la  direction  passa  ontro 
les  mains  de  Forvillo.  Fervillc.  de  son  vrai  nom,  s*ap|)fl;ijt 
Vaiicorboil.  C'(''tait  le  |)ropre  aïeul  de  l'ancien  directeur  de 
l'Académie  Nationale  do  Musique. 


((  Fcrville,  comme  aeUur,  /'tiit  le  sujet  le  plus  précieux  de  sa  troupe.  Il 
ivait  pris  l'emploi  des  cmniques,  ce  qui  ne  remp«?chail  pas  dt>  jouer  tous  les 
ircnres  au  besoin.  Un  d«''butanl  voulait  paraître  dans  le  rôle  de  Zopire,  mais 
il  ne  pouvait  réussir  à  monter  la  pièce.  —  (^uel  est  le  rôle  qui  vous  manque," 
demande  Ferville.  —  Mahomet  1  —  Ce  n'est  que  cela,  répondit-il,  p,irbleu, 
je  le  jouerai  !  Kl  il  le  joua  en  elFet.  » 

«  Un  autre  acteur,  nommé  Lafond,  assez  bon  premier  rôle,  mais  ayant 
parfois  un  jeu  désordonn»''.  n(>  man(|u:iit  jamais,  lors<ju'il  se  laissait  emp  -rirr 
par  la  chaleur  de  sa  diction,  de  briser  les   fauteuils  qui  se  trouvaient 
ses  mains.  Il  demanda  k  Ferville,  un  jour,  ce  qu'il  jwnsait  de  st)n  jfn.  "  \ 
n'avez  qu'un  défaut,  lui  dit  le  directeur,  c'est  que  vous  ne  ménaj^cz  ; 
< eux  qui  se  trouvent  en  scène  avec  vous,  et  clKujue  soir  il  arrix»- 
l'uts.  —  (.'ommcnt  !  s'<'«ria   Lafond,  queU  accidents*.^  —  Vous  allez  voir, 
■prend  Ferville.  et  ouvrant  la  (Kirte  du  garde  meuble,  il   lui    montrt»   une 
ingtaini»  de  fauteuils  brisés.  —  Voilà  vos  victimes,  lui  dit-il,  n'en  augmeji- 
'cz  pas  le  nombre,  je  vous  prie.  »  Lafond  partit   d'un  long   éclat  de  ^  ■>•■■. 
i)(>puis  ce  temps,  lorsque  Ferville  était  en  scène  av»»c  lui  et  qu'il  le  ^ 
prêt  à  entrer  en  fureur,  il  lui  disait  tout  l>a<.  «  (îràce  {x>ur  mes  fauten  i^. 
Lafond.  »  Ce  mot  arrêtait  soudain  le  terrible  exterminateur.  »  (•) 


(Il  (laiilliiT  rf  ( ■liaiiiil.'iin. 


12 


50 


I.K    TIIKATUK    A    NANTKS 


Je  tiome  dans  VAlmanac/i  des  Sj.'-rfurlr.s,  d»-  IT'Jl.  If   lahlcau   complot 
de  la  tioupo  de  Fervillo.  Le  voici  : 


SAISON      1791 

FERVILIjE,     Directeur 

iMiciiKr.oT,  nxissf'ur.  —   Kourmer,  caissier.  —  I^k  IJniiTON,  ciui  n  «iiiiKstie. 


COMKDIK 
MM.  i'.nw.KT  ; 

I)0I1.SAN  ; 

Mérikl; 
TinKi'ENNic  ; 
Dumily; 
Lavandaise  ; 
(jounvir.i.E; 
Sainï-Auiiin  ; 

l'iIClIAIID  ; 

Dauiuony; 
IIknry; 

EUDER  ; 
M""»  TOUTKVILI.E  ; 

GuftRiN  : 
Frkton,  more  ; 
BooNOLi  ; 
I>aui>ré; 
I)orsan  ; 
Constance  ; 
Dugazon. 


OPKRA 


MM.  LoTH  ; 

Moi.iituE  ; 
BodNioM  : 
Olivier  ; 


MM.  Gkxtii.  : 

Jui.ii;n. 
.M""  Loth; 

Mé.siP:res; 

Frétos,  lillc  ; 

Cassin; 

<'.AMILLE  ; 

MÉniEL  ; 
Dei.or  ; 

iioYER. 

Oiclioslre  de  dix  huit  musictonS; 

M  .M  Vauoeois,  mécanicien  ; 
PiiiL.vTRK,  peintre  ; 
Dlfay,  i)f.intre  : 
Asr<KÉ.  costumier  ; 
Lkuri:n,  imprimeur  : 
Béziers,  fournisseur: 
<lAii.i.AHn,  mafiasinior  ; 
BoNAix,  contrôlp  ir: 
Behn.\rii,  contrôleur. 

Neuf  charpentii'rs,  un  coëlTeur.  quatro 
pardt's  du  tlioàtre.  six  jierruquifrs  en 
sous-ordri'.  dix  oivreu.ses.  quatre  habil- 
leuses, deux  burr.iistes  et  vingt  autres 
employas  y  compris  la  jjarde.t'n  tout  conî 
viii^t  piTSoniU's. 


On  joua,  sous  la  direction  de  For\  ille,  les  Deiu-  Miliciens  et  les  Souliers 
Mordovcs,  opéras  du  compositeur  italien  Fridzeri,  que  le  comte  de  Cha 
teaugiron  avait  amené  à  Nantes. 

Le  r.)  jiiillot  1701,  Forville  abandonne  la  direction.  Il  écrit  au  Conseil 
«  qu'il  voit  avec  regret  que  sa  direction  ne  peut  marcher  avec  ses  propres 
i-es.sourccs,  et  qu'un  abonnement  qu'il  avait  ouvert  pour  l'aider,  ne  couvri- 
rait pas  le  quart  île  ses  dépenses.  »  Le  21,  les  artistes  se  léunissenl  et  déci- 
dent de  continuer  la  campagne. 

Le  29  septembre  1791,  la  municipalité  prit  un  arrêté  faisant  défense  aux 
comédiens  de  rien  ajouter  ou  retrancher  dans  leurs  riMes. 

Lf  2H  février  170;î,  la  municipalité  passa,  moyennant  vingt-ciuci  mille 
livres,  nu  bail  de  neuf  ans  avec  M^L  Kiedy.  Turminger.  etc.,  etc.,  négo- 
ciants. 


pi^:riode  révollt 


Ces  derniers  s'entendirent  avec  Ferville,  et  lui  transportèrent  tous  leur^ 
droits:  ils  lui  louèrent,  pour  toute  la  durée  du  bail,  les  magasins  d'habillo 
iiients  et  dr  d(^<ors,  à  raison  d»î  dix  mille  livres  pour  chaeune  des  huit  pn*- 
uiières  ann(''eset  d(;  douze;  mille  livres  pour  la  dcrnii-r.'  F.i\  iU.-,  .-i  1 1  Hn  .lu 
hail,  devait  ôtrc  propriétaire  unique  des  magasin- 
La  nuniieipalité,  sur  la  demande  de  Ferville.  aUiissa  le  loyer  a  dix-sept 
mille  francs,  et,  qucNiues  mois  aprt'-s,  à  quinze  mille. 

Le  Théâtre  (iraslin  prit  pendant  la  péi  ioile  r«'volutionnairc.  le  nom  de  Grand 
'riiéâtre  de  la  République. 

Gaullicr  <'t  Cliapplain  lapportent  l'anecdote  sm'vante,  se  i-atlaehanf  a 
r.innée   171)^: 

((  Un  jeune  acteur  qui  représiiii  11  i  «lUine  daij.->  1.1  n  i;;i(ii>-  (p-  idnc 
irrive  en  scène  sachant  a  peine  son  rôle,  (iiace  au  souMleur  et  à  son 
froid,  il  était  parvcMUi  au  long  récit  du  eombat;  là,  sa  mémoire  se  trouve  tuu: 
.1  fait  en  défaut:  Soudain,  comme  s'il  eut  cédé  à  une  inspiration  sul)lime.  il 
pailc  (Ifs  (,'X|)loits  de  'l'ancrède  et  des  soldats  n'-publicaius.  des  chevaliers  de 
Syiaeuseci|(l(;  l'armée  de  Saml)re  etMeuse;  il  mêh;  les  extrait-  du  Moniteur 
et  les  v(!rs  (le  VolUiire.  et  suant,  haletant,  gesticulant,  il  teimine  sa  tirade 
.lu  milieu  dos  ai)[)lau(lis.sem(.'nts  et  des  cris  d'enthousiasme  de  la  multitude,  x 

Toujours  d'après  (Jaullicr,  la  troupe  (h?  Kerville  était  assez  médiocre.  I) 
tiouva,  pourtant,  moyen  de  gagner  beaucoup  d'argent  en  distribuant  des 
billets  d'aboimem(»nt  à  bas  prix;  il  remplissait  ainsi  sa  salle  tous  les  jour>. 

Sous  sa  direction,  le  th(''àtie  fut  un  jour  foret'  d'affîeher  ((  Relâche  »  avec 
( cite  singulière  nu'nlion  :  «  Attendu  le  di'part  des  acteurs  |)our  la  moisson.  » 

(  Ml  éUiit  alors  en  pleine  guerre  civile.  Les  armées  vendéennes  se  prépa- 
raient à  attatjuer  Nantes,  aussi,  les  esprits  n'étaient-ils  guère  tournés  vei-s 
l(»s  choses  du  tlH-âtre.  Le  G  août  1793,  le  Conseil  arrêtii  que: 

((  Prenant  en  considération  la  eireonstance  de  l'étiit  de  sièp*  d(>  la  vilU». 
iui  a  appelé  tous  les  citoyens  pendant  plusieurs  jours  ;i  la  défense  de  la 
place  et  du  service  (|u'(;lle  a  nécessité,  ce  qui  l'a  ol>ligé  de  cesser  son  spi-. 
tacle,  arrête  que  Ferville  ne  comptera  au  trésorier  de  la  commun.'  que  ir  ;- 
mille  deux  cents  livres  au  lieu  de  ciualn'  mille  deux  cents  qu'il  doit  lui 
compter  en  avance  du  loyer  des  mois  d'août  et  do  si'ptembre  prochain.  » 

Des  jours  épouvantables  allaient  commencer  pour  Nantes.  Carrier  entra 
lins  la  ville  le  8  octobre.  Jusqu'au  10  pluviôse  .'\n  II,  ce  monstre  à  face 
iiumaine  devait  faire  peser  sa  tyrannie  sur  notre  malheureuse  cité.  Que 
devint  le  théâtre  jjcndant  celle  période?  Sauf  les  quelques  faits  que  je  cite 
plus  loin,  je  n'ai  pu  découvrir  rien  d'intéressant  sur  lui.  Et  pourtant,  il  est 
probable  qu'il  devait  marcher  régulièrement  :  Carrier  aimait  trop  le  plaisir 
pour  permettre  que  le  spectacle  fit  relâche  en  ces  jours  de  deuil. 

Il  étiiit  absolument  défendu  aux  acteurs  de  prononcer  le  mol  de  i.>i. 

(t  Dans  la  lielte  Arsène,  lorsque  le  charbonnier  dit  qu'il  est  r-ii  dans   sa 


LE   TUl^ATRF    A    NANTES 


chaumiéro,  le  chanteur  <';tait  oMigé  de  substituer  les  mots  :  Dans  ma  chau- 
mirrn  je  fais  loi.  Lorsqu'on  pût  rire,  sans  redouter  la  guillotine  commr 
punition  d'un  rire  aristocratique,  cette  substitution  ne  manquait  jamais 
d'exciter  les  quolibets  du  ()ublic  (|ui,  par  un  calembourg  très  pardonnable, 
ch;ingcait  Loi  en  Voie,  en  laissant  interdit  le  pauvre  chanteur,  quand  surtout 
il  /îtait  médiocrement  en  faveur,  ce  ((ui  rendait  l'allusion  trop  directe  (')•  " 

Le  citoyen  Faure,  régisseur  du  théâtre,  osa,  un  jour,  tenir  \Ii\ft  à  Carrier.  Il 
a  raconté  ainsi  son  entrevue  avec  le  proconsul  : 

((  J'arrive  chez  Carrier;  il  était  avec  un  général  et  i)lusieur<  autres  per- 
sonnes; <Mi  m'a|)crc(;vant,  le  voilà  qui  se  met  à  m'apostropher  dans  son  lan- 
gage énergique,  me  rei)rochant,  ainsi  qu'à  mes  camarades,  de  ne  pas  jouer 
les  pièces  du  vrai  théâtre  républicain,  et  principalement  les  chefs-d'œuvre 
de  son  ami  Collot  d'IIerbois  ;  puis,  il  termine  son  allocution  par  nous  traiter 
de  j...f...  et  de  canailles. 

((  Canailles  !  m'écriai-je  ;  nous  sommes  des  canailles,  nous  qui  allons 
nous  battre  tous  les  jours  pour  la  défense  de  la  République! 
■  «  Un  général  se  hâta  de  faire  notre  éloge,  et  déclara  que,  pour  mon 
compte,  j'étais  un  brave  patriote,  et  que  j'avais  bien  mérité  de  la  patrie. 
Mais  Carrier  n'entendait  rien  ;  il  jurait  comme  un  possédé,  menaçait  de 
nous  faire  jouer  la  tragédie  au  naturel,  et  n'épargnait  pas  les  injures. 

»  J'avais  une  tête  du  diable  :  je  rendis  au  représentant  ses  invectives  et 
ses  jurons.  En  vain  le  brave  général  voulait  m'imposer  silence...  j'étais 
monté.  Carrier,  furieux,  tire  son  sabre  et  s'avance  sur  moi  ;  j'étais  sans 
armes  :  j'avise  en  ce  moment  un  buste  de  Mar^it,  (|ui  éUiit  sur  un  meuble; 
je  m'en  saisis,  et  je  le  lanrc  à  la  tête  du  représentant.  Quelques  lignes  plus 
bas,  et  la  boule  du  chef  des  montagnards  écrasait  celle  de  son  ami.  Par  mal- 
heur, le  buste  ne  fit  que  lui  effleurer  la  face.  Les  assistants  se  jetèrent  entre 
nous  d(Mix  ;  on  se  hâta  de  me  faire  sortir.  Je  m'attendais  à  être  guillotiné  le 
lendemain  ;  mais  mon  patriotisme  bien  connu  et  mes  nombreux  amis  me 
sauvèrent.  Tous  les  habitués  du  théâtre,  d'ailleurs,  auraient  pris  ma  défense. 
Carrier  dissimula,  et  déclara  plus  tard  qu'il  s'était  trompé  et  que  j'étais  un 
bon  b » 

Le  12  pluviôse,  An  II,  la  Société  de  Vincent  La  Montagne  demanda  que 
chaque  (a  décadi,  et  par  avance,  le  directeur  donne  le  répertoire  des  piè<es 
qu'il  se  ])ropose  de  faire  jou'^r,  afin  d'examiner  celles  qui  sont  susceptibles 
d'être  représentées.  » 

Des  représentations  gratuites  étaient  offertes  tous  les  ans  le  dernier  jour 
des  sans-culottidés  ;  le  directeur  recevait  pour  cette  représentation  une  indem- 
nité de  quatre  cents  livres. 

A  cette  époque,  le  public  avait  pris  l'habitude  de  jeter  sur  la  scène  cer- 
taines élucubrations  littéraires,  politiques  ou  autres,  et  d'en  demander  la 
lecture.  Dans  sa  séance  du  8  prairial  .\n  III.  le  conseil  s'occupa  do  réprimer 
cet  abus,  et  prit  l'arrêté  suivant  : 

((  Toute  personne  (pii  voudra  faire  lire  une  de  ses  productions  sur  le 
théâtre  sera  tenu  de  la  présenter  préalablement  au  bureau  de  police  muni- 

(1)  Camille  Mellinct  :  La  Commune  et  lu  Milice  de  ^'ante4. 


l'IKCI'S    RÉVOLUTIONNAIRES 


53 


,  ipal.,'  qui  en  f.-ii  rrxniiu-i.  cl  pi'rnioura  k-cluro  uu  th^âtro  s'il  n'y  entr«»nen 
qui  puisso  troul)ler  loidn-,  la  triinquililé  «-i  la    ;  "f' 

arrête   «'•g-alcnioiu  que  tout  biM«'l,  soil  vers,  <      ,  ""* 

jetés  sur  U-dit  théâtre  ne  pourront  élre  lus  qu'après  avoir  ete  exauiiue:»  par 
le  bureau  de  police  iiiunicip;il-    ■' 

•F^rvillo  réda  la  dirr-iion  du  * .;  nil  rhèairoaux  sieurs  Violette,  Monlavai, 
Duboscq  et  C'«  le  2A  lloréal  an  III  <^uani  à  lui,  il  partit  pour  Paris  prendre 
une  part  dans  lentreprise de  l'Odéott.  Il  devait  se  ruiner  dans  cette  affaire. 

La  vogue  (''Uiil  alors  aux  pièces  révolixionnaires.  Pendant  cette  période, 
ou  rijprésenui  plusieurs  ouvrages  inédits  :  La  J*nse  de  CUarette,  comédie 
éu  deuN  ac  tes,  pu-  le  citoyen  Mayas,  "chef  de  la  34«  demi -briffide,  La  Mort 
d/Vincent  Mnlif/non,  par  Elieniu-  (Josse,  Ae«  Itrigand»  de  la  Vendée, 
opéra-vaudeville'  en  un  acte,  de  Roullant,  et  Le^  Kmujn's  à  Quibenm,  du 
même  auteur.  Au  sujet  de  cette  dernière  pièce,  les  entrepreneurs  du  théâtre 
vinrent  déclarer  au  maire  qu'il?  ne  pouvaient  se  procurer  de  la  jwudre  pour 
Il  jouer.  On  leur  en  accorda  dix  livres. 

rn  nouveau  règlement  pour  la  police  du  théâtre  fut  publié  le  8  thermidor 
an  III.  C'est  à  peu  de  chose  près  la  réédition  de  l'ancien.  Citons  pourtant 
ces  deux  articles  : 

\.  —  La  lu^-e  «lu  [oiui  c^t  ivm:i  vée  pour  Ici  ollicicr^  uc  p-nr,-.  L'entrée  en 
est  interdite  à  tn-ue  autn-  piT^nime. 

XXIV.  —  Il  est  défendu  à  qui  que  ce  soit  d'amener  des  chiens  dans  la 
salle,  même  on  les  portant  sous  le  bras. 

Le  25  thermidor  de  cette  aimé*',  les  sieurs  Violette,  Uuboscq  etC"  u-mau 
dêreiil  l'autorisation  d'ani^menlcr  le  prix  des  places,  vu  la  cherté  des  vivres 
qui  les  forçaient  à  élever  les  appointements  do  leurs  artistes.  Les  premières 
furent  fixées  à  huit  livres,  les  secondes  à  cinq,  les  troisièmes  à  trois,  les 
quatrièmes  à  trente  sous  et  le  parterre  à  une  livre. 

Li'  même  jour  le  Conseil  arrêta. 

«  One  par  le  ré-isseur  du  spectacle,  il  serait  enjoint  aux  artistes  de  chan- 
ter en  entier  l'Iivuine  de  Ix  Ma''!ie,Unise  lorsqu'il   se  irou\e  a  faire  partie 
d'une  pièce  telle  que  la  Pris^  de  Qniheron.  et  autres,  et  de  ne  pas  omettre, 
comme  il  est  arrivé  plusieurs  fois,  le  couplet  :  Français   en  guerriers  ma 
fjnanimes,  ce  dont  quelques  citoyens  s6  sont  ai)er(;us  de  1  oubli. 

Le  théâtre  attirail  peu  de  monde  sous  c**lto  direction  puisque  le  ;  v.ndé- 

miaire  An  111  : 

«(  les  direct.urs  .i.Minnu.-.u  ..  .  iredisp^uisés  d'entretenir  une  troupe  perma- 
nente et  complète,  tant  que  durera  la  |HMmne  qui  se,  fait  sentir  en  tout 
genre,  attendu  «luils  sont  dans  l'impossibilité  de  satisfaire  aux  demander 

i:t 


54  LK   TMEATHK    A    NANTKS 


des  artistes,  (jui  exigent  un   salaire  qui  absorberait  de  beaucoup   le  produit 
de  la  recette. 

»  Le  Conseil,  ouï  l'agent  national,  vu  son  ineompétencc  à  prononcer  sur 
la  fixation  du  traitement  des  artisU'S  et  qu'il  ne  peut  rien  changer  aux  enga- 
gements pris  par  les  eiitfcpp'neurs  du  grand  spectacle,  lorsqu'ils  ont  succédé 
au  citoyen  Fervillr,  arrête  «|u'il  n'y  a   {)as  lieu  de  d/^libérer.  » 

Pour  dédommager  les  directeurs,  le  maire,  le  22  vendémiaire,  leur  permit 
d'augujenter  encore  le  prix  des  places.  Les  premières  furent  mises  à  quinze 
francs,  les  seconde»  a  dix  francs,  les  troisièmes  à  sept  francs  cinquante,  les 
<|uatri«Mnes  cinq  francs,  le  parterre  cinquante  sous.  Le  22  brumaire  une 
nouvelle  augmentation  fut  encore  autorisée  :  Premières,  vingt  cinq  francs  ; 
secondes,  quinze  francs  ;  troisièmes,  dix  francs  ;  quatrièmes  et  parterre, 
cinq  francs.  Toutes  ces  permissions  sont  inscrites  :  «  Accordées  vu  l'exces- 
sive cherté  de  toutes  les  denrées  qui  contril)ueiit  aux  dépenses  indispensables 
(lu  théâtre.  »  An  picniier  abord,  ces  prix  nous  paraissent,  à  bon  droit, 
exorbitants;  mais  en  réfléchissant  que,  vu  la  rareté  du  numéraire  à  celte 
époque,  c'était  probablement  en  assignats  qu'on  payait,  le  plud  souvent,  sa 
place  au  théâtre,  et  connaissant,  d'un  autre  côté,  la  dépréciation  du  papier 
monnaie,  on  ne  s'étonnera  plus  de  l'obligation  où  les  directeurs  se  trou- 
vaient de  coter  leurs  places  à  un  si  haut  prix. 

A  la  date  du  G  frimaire  An  IV,  je  relève  dans  les  registres  municipaux, 
la  demande  suivante,  qui  montre  quelle  pénurie  existait  à  Nantes  au  sortir 
de  la  Terreur. 

(V  Les  entrepreneurs  du  ^Mand  s|)eetaele  exposent  à  la  municipalité  qu'il  leur 
est  difficile  de  se  procurer  les  huiles  nécessaires  pour  les  illuminations  de 
leur  salle  et  que  d'autres  considérations  les  empêchent  de  mettre  le  prix  à 
cet  article;  en  conséquence,  ils  demandent  à  l'Administration  qu'elle  leur 
fasse  délivrer,  au  prix  qu'il  lui  plaira  arV)itrer,  des  huiles  d'olive  grasses, 
qui  sont  dans  les  magasins  de  l'approvisionnement  de  la  République,  en 
cette  ville,  et  dont  le  représentant  du  peuple  leur  avait  accordé  une  partie 
qu'ils  ont  entièrement  consumée. 

))  L'administration  passe  à  l'ordre  du  jour,  motivé  sur  ce  que  les  huiles 
appartiennent  à  la  République  et  ne  sont  nullement  à  sa  disposition.  » 

Le  2''i  \  entôse  An  IV,  la  municipalité  prit  l'arrêté  suivant  : 

«  Considérant  que  les  troubles  fréquents  qui  ont  lieu  aux  spectacles  sont 
principalement  occasionnés  par  la  présence  des  filles  publiques  qui  s'y  per- 
mettent les  propos  les  plus  obscènes.  Considérant  que  si  la  faculté  d'entrer 
aux  spectacles  et  aux  bals  publics  ne  doit  pas  leur  être  interdite,  elles  sont 
néanmoins  aux  yeux  de  la  loi  dans  le  cas  d'une  surveillance  toute  particu- 
lière, et  que  pour  réussir  avec  succès,  il  est  nécessaire  de  leur  assigner  un 
lieu  dans  l'enceinte  des  dits  spectacles  où  l'action  de  la  police  puisse  être 
aussi  rapide  qu'elle  est  nécessaire. 

Arrête  :  Que  h's  filles  publiques  et  femmes  portées  sur  les  registres  des 
commissaires  de  police  sur  la  colonne  des  susp.'cts  et  des  gens  sans  aveu, 
comme    favorisant  la  débauche  ne  pourront  occuper  dans  l'enceinte   de^ 


PÉRIODE   RÉVOLUTIONNAIRK 


deux  specL'icles,  f\uo  les  six  promit-res  se<ond«'s  loges  à  gauche  en 
entrant,  et  leur  enjoint  de  s'y  comporter  avec  décence,  sous  p«'ino  delre 
.'irritées  sur  le  champ  et  punies  selon  toutes  les  rigueurs  de  la  loi.  » 

Le  27  du  mùme  mois,  le  directeur  reçut  ordre  : 

((  De  faire  jouer  chaque  jour  par  son  orchcslro,  avint  le  lever  de  la  toile, 
les  airs  chéris  des  républicairts,  tels  que  la  Marneillaine,  Cà  ira,  VeiUonn 
au  salut  de  t'i-mpirc  et  le  ('/mnt  du  di'jutrt.  Dans  l'intervalle  des  deux 
pièces,  on  chantera  toujours  l'hymne  d"  la  MarneUtaine,  ou  quciqu'autre 
chanson  patriotique.  Il  est  expressément  défendu  de  chanter  l'air  homicide  : 
Le  Réreit  du  jifitple. 

»  L'adminisfralionchar^elescommissaires  de;  ution 

du  présent  ;  dti  faire  arrêter  tous  ceux  qui.  dans  i  lient 

par  leurs  discours  le  retour  de  la  royauU',  provoquer.iieul  l  aueai  it 

du  corps  législatif  ou  du  pouvoir  exécutif,  exeiteraienl  h'  peuple  a  I 
troubleraient  l'ordre  et  la  tranquillité  publique  et  attenteraient  aux  bonnes 
mœuis.  )) 

Le  T)  pluviôse,  la  Ville,  d'après  l'arrêté  du  Directoire  exécutif,  ordonna  au 
directeur  de  donner,  une  fois  par  moi<,  une  représentation  au  bénéfice  des 
pauvres. 

La  fonction  de  médecin  de  théûtre  fut  créée  à  Nantes  cette  an  née -la.  A  ce 
sujet,  voici  la  délibération  du  Conseil  de  la  commune. 

«  Le  commissaire  du  Directoire  a  exposé  que  le  Tribunal  de  police  éprou- 
vait une  dillieulté  à  résoudre  TalFaire  de  la  citoyenne  Talduc,  en  ce  que 
rodicier  de  santé  chargé  par  le  commissaire  de  police  de  constater  la  santé 
do  cette  citoyenne  a  déclaré  qu'elle  était  en  étal  de  jouer  son  rute  {fie),  et 
qu'elle  maintient,  au  contraire,  par  un  autre  officier  do  santé  qu'elle  a  été 
attiiquée  toute  la  nuit  de  coliques  néphrétiques  ;  que  celle  maladie,  loin 
d'altérer  la  santé,  n'en  donnait  que  plus  de  force  à  la  voix  et  plus  d'éclai  au 
teint,  etc.,  etc. 

L'Administration,  faisant  droit  aux  conclusions  et  n*quisiloires  du  com- 
missaire du  Directoire  exécutif,  arrête  que  dorénavant  les  artistes  qui  ne 
pourraient  jouer  pour  cause  de  maladie  imprévue,  dans  les  pièces  |K)rtt*es  au 
répertoire,  seront  tenus  de  s'a.ln'sser  au  citoyen  Cantin,  officier  de  santé, 
pn^'s  le  Bon  Pasteur,  ou  au  citoyen  Fabré,  aussi  odicier  de  santé,  demeurant 
place  Cîraslin.  maison  Toché.  pour  faire  certifier  par  eux  ou  l'un  d'eux,  leur 
étiit  de  maladie  et  causes  d'emp«"'chemenis.  faute  de  quoi  ils  encourreront 
les  peines  portées  par  les  lois  et  rèj^lements  de  police,  et  pour  l'exéiution  du 
présent,  lesdits  citoyens  Cantin  et  Fabré  auront  la  faculté  d'entrer  au  spec- 
tacle, et  notamment  an  théâtre,  et  les  directeurs  sont  priés  de  donner  de.M 
ordres  à  cet  efFt't.  » 

Le  4  lloréal.  an  IV,  Violette.  Monlavai,  Dulx)scq  et  C'"  traitèrent  avec  un 
tapissier  du  nom  de  Danglas,  et  lui  abandonnèrent  tous  leurs  droits  moyen- 
nant la  somme  de  trente  mille  livn»s,  payables  en  dix  années  avec  intérêt  à 
cinq  pour  cent,  jusqu'au  remb<iurseinent.  Ils  se  réservaient  seulement  la 
ji>uissance  d'une  loge  grillé**  pendant  le  rest»'  du  bail. 

Quatre  mois  après,  le  Grand-Théâtre  brûlait. 


rrr 


■^^ 


/^T^ 

<-''', 


"4A 


IV 


INCENDIE   DU   GRAND-THEATRE 


7  Fructidor  An  IV 


Di'iiositiuns  ftfs  (l'mot/ts.  —  Souscriptions  en  foreur  des  artistes. 


^rttac)  ^(ycàlre  De  ia  (DîépuGCiqite 
J^iijoiirîï'fiui,   LE  LEGS,  Comcbic 

ZÉMIRE   ET  AZOR 

Oprra  avec  fon  ptoCoQiic  et  jnr famorpfiofe 
£e  baCCet  bcf  lëràcef 

AU     S'"     KCTr 

Cafjpnririoii  6f  fa  Oeeffe  bauf  un  miaQe 

£e  6ufte  i)\'^;or 

(Touromif  be  fCeurf  pav  ^emire 

^uïvi  be  (a  mcfainorpHofr 

Vu    les   dépenses   considérables    de    cette 
entreprise,  on  prendra  : 

Aux  premières,  loges  ci  parquets,  3o  sous 

Aux  secondes 20     — 

Aux  parierrc  ei  troisièmes...  1  :;     — 

\(\x  quatrièmes — 


a 


mmBsmsÊSUÊm 


58  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


Sur  los  promesses  dp  oette  alléchante  affiche,  un  public  fort  nombreux 
était  accouru  au  Grand-Théâtre  et  la  salle  était  pleine. 

Les  deux  premiers  actes  avaient  été  joués  sans  encombre.  Il  était  à  peu 
près  8  heures  et  l'on  était  au  troisième  acte,  lorsque  l'incendie  se  déclara. 

Immédiatement  la  salle  entière  se  leva  et  se  précipita  vers  les  portes  au 
milieu  d'un  tumulte  indescriptible.  Heureusement,  les  issues  étaient  nom- 
breuses, —  ce  sont  les  mêmes  aujourd'hui,  —  et  l'on  n'eut  à  déplorer  que 
peu  de  victimes.  Lors  du  déblaiement,  on  retrouva  les  cadavres  de  sept  per- 
sonnes : 

Cascayne,  machiniste. 

Veuve  Doussaint. 

Anne  Lan  Robert,  enfant  de  cinq  ans. 

La  fille  Vivier. 

La  femme  Dolbaut. 

Galipaud,  fif,'urant. 

Une  jeune  fille  restée  inconnue. 

il  y  eut  aussi  quelques  blessés,  mais  en  nombre  insignifiant.  C'est  donc 
une  preuve  que  Graslin  offre  une  sécurité  relative,  à  la  condition  que  l'on 
ne  s'affolle  pas.  A  cette  époque,  le  public  n'était  pas  terrifié  par  les  nom- 
breuses catastrophes  qui  ont  ou  lieu  pendant  ces  dernières  années,  et,  dans 
sa  fuite,  il  garda  un  certain  ordre.  Plusieurs  citoyens  firent  preuve  du  plus 
grand  dévouement  et  rentrèrent,  un  certain  nombre  de  fois,  dans  l'intérieur 
du  Théîltre  pour  voir  s'il  n'y  avait  pas  des  victimes  à  arracher  aux  flammes. 

Quelle  fut  la  cause  du  sinistre  ?  De  l'avis  général,  ce  fut  une  bougie  qui 
enflamma  un  transparent.  Le  feu  se  communiqua  dans  les  frises  avec  une 
rapidité  vertigineuse  et,  quelques  secondes  après,  le  théâtre  entier  était 
en  feu. 

Voici  les  dépositions  recueillies  à  la  Mairie.  Elles  raconteront,  mieux  que 
je  ne  pourrais  le  faire,  ce  triste  épisode  de  notre  histoire  théâtrale.  On  verra, 
d'après  elles,  que  l'incendie  de  l'Opéra-Comique  présente  cerUiines  analogies 
avec  celui  du  thcAtre  de  Nante-^.  Pourquoi  faut-il  que  le  nombre  des  victimes 
n'ait  pas  été  le  même  ? 

DKPOSITION    DE    DANGLAS 

«  Je  soussigné.  Directeur  du  Théâtre  do  la  République,  déclare  qu'après 
avoir  fait  tout  préparer  pour  représenter  sans  accidents  et  à  la  satisfaction 
des  spectateurs  la  pièce  de  /(-miro  et  Asor,  je  descendis  à  la  fin  du  deuxicmc 
acte  dans  le  parterre,  afin  de  juger  inoi-mème  de  l'effet  des  machines.  J'y 
étais  à  ptMiie  que  je  vis,  ou  crus  voir,  une  lueur  filer  le  long  des  frises.  Je 
saute  sur  le  théâtre,  et  vois  (|ue  le  feu  prenait  au  chAssis-transparent  de 
l'appartement  de  Zémire.  Je  m'en  affecUii  peu.  par  l'habitude  d'éteindre  de 
pareils  accidents,  et  montai  moi-inénie  sur  le  pont  volant,  d'où  je  coupai  la 
frise  où  le  feu  pouvait  se  communiquer.  Déjà  je  croyais  le  mal  réparé,  quand 
le  rideau  d'avanf-scène,  tombtS  me  fit  presque  suffoquer  par  la  fumée.  Je 


.o 

-o 


a: 


a 


â 


o     5 


^^<nra& 


INCENDIE   DU    CRANDTIIKATRK  't*à 


criai  :  liaut  le  rideau  !  il  lut  Irvi-  ;  mui>  alors  le  bruit  qui  .se  fil  entendre  au- 
dessus  df  ma  tùte  ayant  attiré  mes  regards,  je  vis  le  toit  en  feu. 

M  Désespérant  alors  d'éieindre  un  incendie  dont  les  progn-s  >«urprenaiits 
donneraient  matière  à  d'étranges  conjectures,  si  la  raison  n'erapécliaitdes'y 
livrer,  je  sautai  sur  le  Théàiro  de  l'endroit  où  j't'tais,  à  seize  pieds  à  p«'u 
près  de  hauteur.  Les  llammes  m'en\  ironnant  déjà  et  me  coupant  toute 
retraite  du  côté  des  sorties  ordinaires,  je  gagne  le  foyer  de:*  acteurs  :  il  était 
en  feu.  Je  me  jette  dans  le  cabinet  des  armes,  à  cùté  ;  j'y  trouve,  étendus, 
plusieurs  individus  qui,  désespérés  et  perdant  la  tête,  n'attendaient  plus  que 
la  mort.  Sans  m'amuser  à  les  réconforter,  je  prends  parmi  les  lx)ucliers  et 
ferrailles  un  vieux  sabre  en  fer  dont  je  me  sers  pour  dé()ateli«her  la  porte 
qui  s'offre  à  moi  comme  seul  moyen  de  salut.  Je  fais  sauteries  loquetaux  du 
haut  et  du  bas,  ainsi  que  les  fiches.  I^e  sang  qui  coulait  de  la  blessure  que 
je  m'étais  faite  à  la  tempe  droite  en  m'élançant  sur  le  théâtre,  m'emp«''chait 
de  voir  qu'il  restait  une  serrure  à  faire  sauter.  M'en  apercevant  alors  à  mon 
grand  désespoir,  je  passe  entre  cette  serrure  et  la  porte  la  lame  de  mon 
sabre  ;  je  réussis  mieux  que  je  ne  m'en  étais  flatté,  puisque  la  serrure  vint  et 
céda  à  mes  elForts.  La  porte  s'ouvre  :  je  crie  alors  à  mes  infortunés  compa- 
gnons :  Venez,  amis,  du  courage,  nous  sommes  sauvés!...  je  le  croyais  ; 
j'avance;  ô  désespoir  !  un  mur  se  présente  à  moi,  et  nous  n'avons  rien  fait. 
La  n)ort  dans  l'àme,  je  passe  mes  doigts  dans  un  grillage  de  fil  de  laiton 
qui  couvrait  une  petite  lucarne  Dès  lors  je  criai  aux  gens  du  dehors  de 
nous  sauver  en  secondant  mes  efforts  pour  jeter  bas  le  briquetage  qui  nous 
enfermait  plusieurs  dans  une  fournaise  dont  les  flammes  nous  gagnaient  à 
tout  moment.  Les  efforts  du  dehors,  réunis  aux  miens,  firent  enfin  une 
brèche  par  laquelle  je  fis  passer  ces  malheureux.  Mais  alors  mes  forces 
m'abandonnent,  et  l'on  me  retire  presque  sans  mouvement  et  sans  connais- 
sance. On  m'emporte  chez  moi,  où  je  me  suis  trouvé  en  reprenant  mes 
sens.  » 

DÉPOSITION   DU  RÉGISSEUR  MASSY 

'<  Je  jouais  Sander  dans  la  pièce  intitulée  Zémire  et  Asor.  Au  troisième 
acte,  on  devait  faire  paraître  une  grotte  qui  devait  se  changer  en  Azor, 
changement  qui  a  manqué,  je  ne  sais  pourquoi.  Mais  enfin,  comme  régis- 
seur, je  cours  de  suite  pour  m'en  informer.  Au  même  instant,  je  vois  le 
transparent  qui  porte  ces  mots  :  Appartement  d*'  Zémire,  qui  n'est  autre 
chose  qu'un  petit  cadre,  je  le  vois  en  feu.  Je  m'en  approche,  pour  donner  les 
ordres  nécessaires,  et  l'éteindre  moi-même.  .Mais  mes  efforts  sont  inutiles, 
et  dans  une  seconde  je  vois  tout  le  cintre  en  feu.  Je  crie  a  tout  le  monde  de 
se  sauver.  Je  le  fais  moi-même  ;  je  cours  à  ma  loge  pour  me  déshabiller  ;  je 
n'en  peux  monter  les  marches,  vu  que  la  fumée  in'étouffait.  Je  suis  donc 
<ontraint  de  me  sauver  tel  qu.'  j'étais  m  liabit^  de  théâtre,  tout  cela  en 
moins  de  trois  minutes.  » 

DÉPOSITION  nu  cnKi    d'orchestre  le  breton 

((  J'ai  vu  le  feu  au  transparent  qui  etiiit  au-dessus  dt>  l'appartement  de 
Zémire.  Un  instiint  après  devait  monter  le  buste  d'Azor  ;  le  câble  i|ui  servait 
à  le  monter  ayant  manqué,  on  s'est  occu[>è  à  le  réparer.  Dans  cet  iuti*rvalle, 
je  voyais  le  feu  au  même  transparent,  mais  qui  ne  paraissiiit  pas  s'étendre, 
puisque  le  citoyen  Le  Fanre.  (jui  ét.iit  dans  ce  moment  sur  le  tlioâtre,  dit  au 
public  que  ce  n  était  rien  Cependant,  on  baissa  le  rideau  d'avant  scène  ;  cela 
mo  fit  croire  que  l'on  avait  trouvé  quelque  moyen  d'éteindre  le  feu.  Dans 


60  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


cctto  n'"Suasion,  je  rostai  à  l'orclu'stre.  voulant  >auver  la  syiui^lioiiie  d. 
rop.V;i  I.  rsqiie  j'entends  un  l)ruit  t.-rrible  ;  je  vois  le  nd.MU  d*avant  scen- 
en  feu.  J.  me  sauve  par  d<'ssus  l'onljf-stre,  par  la  galerie  des  baignoirvs.  J. 
n'étiis  p.-  encore  au  bout  de  cetti'  gab-rie,  (|ue  j'entends  crier  au  parterre: 
Sauve/ vous,  la  voûte  tombe!  Je  regardai  par  une  loge  et  je  vis  etfective 
ment  le  lustre  tomber  et  la  voûte  du  parterre  qui  s'écroulait.  » 

DÉPOSITION    DE    LA    CITOYENNE  SAINT-JULIEN 

«  J,-  soussignée,  artiste  attachée  au  Grand  Théâtre  de  la  République, 
déclare  que  lorsque,  dans  l'opéra  de  Zémire  et  Asor,  je  dus  dese<-ndrc  dans 
le  char  de  la  gloire,  il  n'y  avait  pas  une  seule  chandelle  dans  le  cintre  du 
théâtre  puisque,  pour  m'eolairec,  un  gan.on  m'alla  chercher  une  plaqu.-. 
Descendue  sur  la  scène,  la  machine  devant  monter  la  cage  d'Azor  ayant 
manqué  je  regardai  en  l'air  et  vis  toutes  les  frises  et  le  cintre  en  feu,  quoique 
le  châssis  du  transparent  de  l'appartement  de  Zémire  fut  à  peine  pris. 
Désespérant  alors  d'éteindre  un  incendie  si  prononcé,  je  m'elforçai  de  gagner 
la  porte,  lors<|ue  j'entendis  le  citoyen  Danglas  (monté  sur  le  pont  volant 
pour  couper  les  fri.ses),  eiier  de  relever  le  rideau  d'av.mt  .srène.qu  on  venait 
de  baisser.  Le  rideau  fut  effectivement  relevé,  mais  le  lustre  de  dessus  le 
parterre  tomba,  ce  qui  me  parut  d'autant  plus  surprenant,  que,  connaissant 
la  direction  des  machines,  je  devais  croire  que  le  feu  (s'il  n'eut  eu  d  autre 
source  que  cette  apparence),  aurait  consumé  le  Uimbour  du  grand  rideau 
avant  de  parvenir  à  attaquer  celui  du  câble  en  cuivre  du  lustre  précité.  » 

DÉPOSITION    DE    DUMANOIR 

((  Je  déclare  qu'étant  présent  lorsque  le  malheur  arrivé  le  7  fructidor  au 
Grand-Théâtre  a  commencé,  les  effets  ont  été  si  pn.mpis  que  je  ne  puis 
ra'empécher  de  les  regardr  comme  extraordinaires.  En  effet,  je  n  ai  point 
aperçu  le  feu  au  théâtre,  et  étant  sorti  un  des  premiers,  j'ai  vu  la  toiture  de 
la  salle  loui  en  feu  :  la  chute  du  lustre  entr'auties  est  une  les  circonstances 
sur  laquelle  je  m'appuie  pour  fonder  mon  étonnement,  puisque  cette  chute 
a  eu  lieu  dans  un  moment  où  il  était  impossible  que  le  feu,  quelqu  aciiviic 
qu'on  puisse  lui  supposer,  ait  pu  gagner  le  tourniquet  ou  contrepoids  auquel 
il  était  attaché.  » 

DÉPOSITION    DE   A.    DROTGOURVILLE    FILS 
Adjoint  auGî-nic  militaire 

((  Je  soussigné  déclare  que  le  7  fructidor  An  IV,  à  huit  heures  environ  du 
soir,  étant  au  spectacle  à  l'entrée  de  la  gal.«rie  du  côté  droit,  j  ai  vu  le  feu 
prendre  au  théâtre  par  le  transparent  do  l'appartement  de  Zémire.  ce  qui  m  i 
paru  alors  de  peu  de  conséquenee.  mais  qu'ayant  ma  femme  et  mes  amis  au\ 
loges  dites  baignoires,  j'v  suis  descendu  promptement    A  peine  suis  je  enii" 
dans  la  baignoire,  où  il  u'v  avait  personne,  j)our  ramasser  des  mantelets  .1. 
femme,  que  j'ai  vu  le  lustre  tomber.  Epouvanté  de  la  rapidité  de  1  incendi-'. 
je  suis  remonté  aux  premières  lo^^es  pour  m'assurer  si  ma  mère,  la  citoyenii. 
Martin,  ouvreuse  de  loges,  s'éUiit  sauvée,  mais  le  feu,  la  fumée,  m  ont  for.. 
de  descendre  et  de  sortir  de  la  salle.  Etant  sur  la  place  j'ai  vu  le  faite  .  ;; 
feu  et  une  fumée  très  épaisse  sortir  par  les  fenêtres  de  1  escalier  des  tro: 
sièmcs  et  quatrièmes  loges,  côté  de  la  ruo  Molière.  » 


INCENDIE   DU    CRAND-TIIÉATRE  61 


DKPOSITION    DE   CLAVEL,    DIT    BOBINFTT 


I.o  f(m  pril  auKianil  spoiiacle  4li  7  fructidor,  l/on  jouait  Zt^mireei  Azor. 
rét.'iis  aux  s«H:on(k"s  loges.  Le  oaltle  d'une  niarhine  cassa  dessous  leth<''âire  ; 
son  fracas  fixa  l'aHeutio!!  de  fout  le  |)ul)liç  et  attini  les  soins  de  tous  les 
inacliinistes.  A  l'instant,  «luchjues  voix  crient:  Le  feu  !  le  feu!  le  feu!  Le 
ritoyen  Le  Faure,  pour  rassurer  les  esprits  et  ép;nRner  Irs  plus  grands  ujal 
Ixîurs,  dit:  »  Ce  n'est  rien  »».  Quelques  voix  le  répétèrent, et  chacun  se  ntirc 
II'  sang-froid,  .l'étais  un  des  premif-rs  sauvés  avec  un  enfant  que  j'emp-  ruii 
'  t  deux  femmes  que  je  (•on«luis;ii8  en  les  rassurant.  Une  minute  m'a  suffi 
pour  arriver  au  vestilude.  Je  n'avais  pas  vu  brill«*r  une  «'■lincelle  avant  d<*  me 
lever  (le  nia  place,  et  à  peine  metiais-je  lo  pii'd  sur  les  hautes  marches  de 
rentrée  que  l'ineendie  l'itif  ;:énéral.el  (jue,  malgré  les  efforts,  le  feu  ne  s'est 
•'•(eiiit  qu'à  mesure  qu'il  a  iu;tti(|ué  d'aliments. 

DHPOSrnON    DE   LA    CITOYKNNF.   SAIT-AMAND 

Le  7  fructidor,  à  sept  heures  et  demie  du  soir,  on  cominen<.a  le  deuxième 
icte  de  Xcmire  et  ^4;oret  le  même  acte  fut  exécuté  jusqu'à  la  fin,  et  l'on 
nmmeiK.a  le  troisièuje  sans  aucun  trouble,  jusqu'à  l'instant  où  le  transp 
If  l  api  art'ment  de  Zémirc  parut.   L'appartement  fut  ouvert  trop  i<'' 
uiachinoî)  manquèrent,  et  ce  fut  dans  ce  moment  qu'une  frise  s'eml' 
j'elais  si  persuadée  que  cela  n'aurait  point  de  suite  que  je  (|uittai  la  - 
ans  effroi.  Jo  rencontrai  M.  Normand  à  qui  je  me  p^Tutis  de  dire:  «  Mon 
leur,  no  vous  dérangez  pas,  ea  ne  sera  rien.  »  Kt  je  me  réfugiai  dans  la  loge 
de  la  portière,  croyant  revenir  sur  la  scène  pour  finir.  Mon  mari  vint  mv 
rejoindre  sur  le  champ  et  m'emmena  deliors,  e'    i!  "^  "  >"<  aperéum*'^  !i 
flamme  qui  embrasait  le  toit  de  différents  côtés. 

DÉPOSITION    DE   LE   FAIBK 

Je  déclare  aux  citoyons  administrateurs,  que  j'élais  sur  le  théAtrc  occupt' 
t  omme  danseur,  lorsqu«i  le  càbU»  de  la  grotte  d'Azor  vint  à  se  rompre  :  tous 
le-  gardons  de  théâtre  se  portèrent  sous  le  théâtre,  à  cette  même  machine, 
pour  aid<'ïr  à  leurs  camarades,  je  vis  alors  le  feu  paraître  au  transparent  de 
/émire.  .Mors  plusieurs  femmes  se  mirent  à  crier  :  «  Au  feu  !  n  J'apais^ii  le 
public  à  plusieurs  reprises  en  lui  disant  :  <t  Que  cela  n'était  rien  •>  (ce  qui  fit 
grand  effet),  au  même  instant  je  me  transportai   à  la  coulisse  enflani;       . 
lors(|ue  le  changement  à  vue.  malheuicus^neui.  fit  augmenter  le  feu.  A 
je  me  transportai  au  foyer  en  a|>pelani  la  eitoyenne  Douté,  ma  • 
pour  la  sauvt'r  (\\\  péril.  Klli^  voulait  monte-r  a  sa  loge,  je  la  pris 
corps  et  IT'inpoitai.  .\u  luèmc  instant  que  je  traNcrs:iis  le  théâtre,  le  ciuire 
écroula,  et  je  m»*  sentis  mouillé,  piobablement  \K\r  l'tMU  tlu  r.  si  rv.iir. 

Les  secours  furent  ass(>x  promptement  organisés.  Il  ne  fallait  p.i.'.  ?mi;.>  i  a 
proléger  la  salle,  mais  bien  les  immeubles  voisins,  no|:imment  les  mai- 
sons (iraslin,  Ooisneau  cl  Villemain.  que  les  flammes  eomincin^aient  à 
atteindre. 

Le  feu  était  d'une,  violence  extrême;  de  plus,  il  était  favorisé  par  le 
\'Mit.  Des  matières  enflammées  étaient  projet«Vs  dans  les  rues  et  sur  les 
maisons  avoisinantes.  Il  en  iomb.iii  même  dans  la  Loire,  ol  les  navir©» 
jugèrent  prudent  de  gagner  le  large. 

14 


G2  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


I/iiict;iidio  (Juki  jusqu'au  '.)  fructidor,  jour  où  il  fut  coinpK'tenaent  t-teint. 

L(!s  maisons  Graslin  ei  Villeuiain  n'ourciit  que  des  dcgdts  insignifiants  ; 
seule  la  maison  (Joisncau  qui  (''Liil  adosser' à  la  salli' du  côté  de  la  rue  du 
Bignon-Lestard  fut  entièrement  détruite. 

On  put  sauver  tm  nombre  considérable  de  parties  d'orchestre  et  une  cer 
tiiinc  (juantit»'  de  costumes. 

Voici  le  rapport  de  Crucy,  qui  résume  parfaitement  la  catastrophe  '• 

<i    Un  fatal  incendie  vient  de  dt'vorer  la  salle  de  spectacle  de  Nantes. 

»  Le  feu  a  consunn''  le  llit''atie  et  la  salle  entière,  le  magasins  des  d<'Coni- 
tionsel  le  foyer  des  acteurs,  les  palâtresde  toutes  les  ouvertures  (|ui  donnent 
sur  la  salle  et  sur  le  théâtre,  et  ceu.x  du  magasin  de  di'corations.  toute  la 
couverture  de  Tt-difice,  même  celle  du  vestibule,  à  l'exi-eption  du  péri^tyl.* 
et  des  parties  de  façailes  latéiales  les  plus  voisines  du  vestibules  sur  les  rues 
Coincillc  et  Molière;  enfin,  une  giande  paitie  des  soliveaux  et  <-harp<'nles 
dis  l);iiinioiits  (|ui  (lomieiil  sur  ces  deux  l'ues.  Le  péristyle,  le  grand  vestibule 
et  les  deux  petits  vestibules  qui  lui  servent  d'entrée,  les  escaliers  des  prc- 
uiièics,  secondes,  troisièmes  et  quatrièmes  logessont  conservés  en  entier.  Un 
grand  nombre  de  chambres  ou  loges  des  acteurs  et  actrices,  les  planchers 
(l(?s  foyers  publics  et  les  bureaux  n'ont  pas  souffert.  I^es  murs  du  foyer  des 
acteuis  et  ceux  du  fond  du  théâtre  sont  bons.  Le  premier  de  maçonnerie, 
a])pclée  piei-re  de  mo(''llons,  a  parfaitement  résisté  à  l'action  du  feu,  seule ■ 
merit  les  enduit^  y  ont  cédé  En  gém-ral,  toutes  les  pierres  de  taille  de  Saint- 
Savjuien,  degianitet  de  tuf  qui  se  sont  trouvées  soumises  à  cette  action  sont 
calcinées  ou  brûlées. 


»  C'est  un  jeu  de  décuis  qu'on  |)eut  assurer  être  la  cause  de  l'incendie  : 
soit  accident,  soit  maladresse,  soit  précipitation  ordinaire  et  presque  inévi- 
table dans  les  mouvements  du  théâtre,  le  feu  a  pris  dans  une  bande  de  toile 
qui,  en  descemlant,  est  tombée  sur  un  lampion.  H  s'est  activé  et  propagé 
avec  la  rapidité  do  l'éclair;  aucun  secours  n'a  pu  l'éteindre.  Quand  il  y 
aurait  eu  (|uatn'  fois  plus  de  bassins  <|u'il  n'y  en  a.  <|uand  il  eut  été  possible 
de  faire  jouer  sans  délai  plusieurs  pompes,  on  n'aurait  pu  réussir  à  l'arré 
ter;  on  a  vu  à  rineendie  de  r(;)pêra  de  Paris,  l'exemple  de  cette  funeste 
rapidité. 

1)  Le  seul  remèilo  eût  étt"  de  précipiter  la  chute  île  la  toile  embrasée,  mais 
le  feu  ]»lus  rapide  (|ue  la  pensée,  s'était  iléjà  élevt-  à  reiidroit  du  théâtre  où 
sont  suspendues  tçiUes  les  toiles  des  riileaux  île  fond,  de  plafonds  et  des 
bandes  d'air,  etc.,  etc.  Poussé  avec  violence  par  le  courant  d'air,  il  avait 
gagui-  le  portique  et  une  vaste  salle  en  charpente  destinée  à  servir  d'atelier 
aux  peintres  décoratein-s  et  de  d('>|)ôt  aux  décorations,  i»t  «pii  n>gnait  sur 
toute  la  longueur  du  théâtre  et  de  la  scène.  11  fut  arrêté  quelques  temps  par 
le  nnu"  de  l'avant-scène.  ipii  l'empêcha  de  pénétrer  dans  l'intérieur  de  la 
salle,  mais  alors  même  il  éclatait  au  dehors  et  il  avait  fait  tant  de  progrès 
dans  la  partie  supéri/'ure  que  la  corde  du  lustre  s'était  eidlammée  et  ipie  le 
lustre  touillait  au  moment  où  il  y  avait  encore  <|uelques  personnes,  soit  dans 
le  parterre,  soit  dans  les  loges. 

>»  Les  monuments  publics  participent  à  la  destinée  des  personnes  célèbres  ; 
il  semble  t|ue  ni  les  uns  ni  les  autres  ne  doivent  périr  d'un  mal  ordinaire. 
On  accepte  des  circonstances  ijui  n'ont  point  existé,  on  recueille  mille  bruits 
faux  et  contradictoires,  et  l'on  refuse  d'ouvir  les  yeux  sur  les  faits  qui  sont 
cdiistauts  et  sur  les  causes  (pu  sont   rt'elles. 


INCENDIE    nu    GRAND  THÉÂTRE  03 


)»  H  mV'St  iiiipossil»l<!  pour  h'  inomcnl  de  tlonnor  un  rolexYî  eslimalif  de- 
tt.ivaiix  d«!  n'p.inition,  ou  plufc>t  ât*  ri;oon>tructioM  clu  théâtre  et  de  la  ««allr 
n'ayant  pu  rcconiiaitr»'  au  juste  lY'tat  do  toutes  les  parties  des  bdtinieuts 
iidjacciils  qui  sont  cm  don  imagés.  C<'|)<Midaut.  on  peut  porter  par  apcr(,u,  eelt«' 
df'^pfnse  à  trois  rciit  vingt  inill<'  francs.  » 

L'cn(|iiétt',  faite  avec  un  soin  minutieux,  avait  prouvé  jusqu'à  révidence 
(|Mc  la  catastrophe  était  due  à  un  a<'cidcnt.  Pourtant,  un  certain  nombre  de 
personnes  croyait  toujours  (pic  la  malveillance  n'avait  pas  été  étrangère  à  <'e 
malheur.  Le  mirnstre  de  la  police  reçut  même  une  dénonciation  contre  le 
>ieMr  Julien,  directesir  (l<.' l'ancienne  salle  du  Bij^uon-Lestard. 

I,e  citoyen  Letourueux,  commissaire  du  Directoire  à  Nantes,  adressa  à  eo 
iijet  la  lettre  suivante  à  la  Muin'cipalit»'. 

((  Il  a  et»'-  adresse  au  ministre  d<' la  poliecgén^T.ilc,  sous  ladaledii^l  ni\<'>'' 
dernier,  [)ar  un  citoy»'ii  de  Nantes,  un  mémoire  particulier,  reiaiivcni'!'  i 
riiKîcndie  dc!  la  salle  de  spe(;lacle.  L'objet  du  nu'moire  parait  être  d- 
(|u'un  l'vénenienl  que  le  \  ulgaiie  a  cru  et  qu'on  s'est  elforcé  de  ]' 
éire  un  |)ur  a<-cidenl  indépeiid;ini  ilc  toute  combinaison  et  esprit  di*  malveil- 
leuce,  n'est  au  «-ontiaiie  (pie  l'circt  d'un  intérêt  blessé  et  d'un  alFrcux  projet 
de  vengeance.  Il  déi.iille  dilTcrents  f.iits  à  l'appui  de  cette  dénonciation  et 
•illègue  en  preuve  les  diverses  dé<'laraiions  qui  ont  été  faites  et  re<.ues  à  volro 
Iministration. 

«  Il  conclut  :  tju^il  cfti  dos  vrritrs  tinns  cettr  affaire  quf  les  Administira- 
ilnns  n'ont  jxis  roiilii  voir  un  (/ii'cllrs  ont  roula  cficher  an  Gourfrne- 
inrnt. 

))  Voilà  ilonc  riionixHir  «le  l'Administration  engagé  à  mettre  dans  un 
jour  tout  ce  qui  a  nipport  à  cet  événement  d'un  souvenir  trop  dftulourenx. 

»  Je  vous  prie,  Citoyens.  <'hargé  <|ue  je  suis   de  prendre  toutes  les  infor- 
mations, tous  les  renseignements  (pii   peuvent  conduire  à  la  découverte  dr 
ii:s  rrrtiés   laissées  ou  jetées  sous    un  prétendue  voile,   de  me  transmettre 
ipie  en  forme  des  pri)eès  verbaux,  dé<-larations.  dt'-positioiis  et  générale- 
iiienl  de  toutes  les  pi.u'cs  qui  sont  relatives  a  l'incendie  en  question. 

»  J'ai  été  princip.ilement  frappé  d'un  rapprochement  fait  pr  l'auteur  du 
mémoire  dont  il  s'agit,  c'est  qu'il  prétend  (jue  la  salle  du  petit  spectacle  avait 
été  interdite  huit  jours  avant  rincendie  delà  grande  salle... 

»  Il  est  extrêmement  importmt  d'approfondir  la  vérité  de  ces  faits,  el 
j'ai  du  y  fixer  mon  intention.  » 

Signé:  Letolr.nei'X. 

La  MuniciiulUc  répondu  aussitôt. 

«  Nous  avons  lu  votre  lettn»  du  \Tt  de  <•(•  mois,  qui  nous  instruit  qu'il  a 
été  adress»'  au  .Ministre  ib»  la  j)olic.e  générale,  sous  la  date  du  '2\  iiivAse  der- 
nier, par  un  citoyen  de  Nantes,  un  mémoire  p;»rticulier  relativement  à  la 
salle  de  spectacle.  Vous  ndus  demandez  copie  en  forme  des  proeèii-verbaux, 
déclarations,  dépositions  relatifs  à  l'incendie. 

»  Nous  avons,  dans  le  temps,  envoyé  tant  au  Ministre  de  l'intérieur  qu':\ 
l'administration  ctMitrale  copie  de  tout«>s  ces  pii^'ccs;  vous  les  trouverez  dans 
les  bureuixdu  Déparleincni.  Cependant,  si  elU>>  s'y  trouvent  égaré^'s,  nous 
vous  en  feron>  faire  de  nouvelles. 

»  Nou.s  vous  observons,  citoyen,  que  nous  >omines  loin  de  part  iger  l'opi- 
nion de  l'auteur  du   mémoire.    Nous  croyons  que  la  malveillance  n'existe 


64  I-E   THÉÂTRE    A    NANTES 


(luo  dans  In  m(''ch;incotù  du  diiioiiciuteur.  Ce  fju'il  av.mce,  fjuo  la  5;alle  du 
petit  siH^ctade  avait  l'-tf*  iiHerdit«i  huit  jours  avant  l'incendie  de  la  prande 
salle,  est  faux. 

»  Nous  f)rhnP3  .seulement  «jn  arrét(''  le  27  nivôse,  mais  qui  n'interdisait 
point  l'iis.ige  de  la  p''tit(;  salle. 

»  L'incrndie  a  eu  lieu  le  7  fructidor  à  environ  huit  heures  du  soir;  notre 
arrêté  du  8,  qui  interdit  à  la  veuve  Tenêbr»'.  propriétaire  de  la  salle,  et  au 
sieur  Julien,  direeti-ur  du  i»etit  s|)ectacle,  la  faeulté  de  donner  aueuno  repré- 
sentation dans  cette  jsalle,  leur  fut  envoyé  le  9.  Ci-joint,  copie  de  ces 
pi  (M  es.  »  "" 

Signé  :    Beaufrancuet.  président. 

Le  citoyen  Letourneux  fit  une  contrcenquétc  et  il  arriva  au  même 
résultat  que  la  municipalité.  Il  adressa  son  rapport  au  ministre  dr  la  police* 
En  voici  la  conclusion. 

»  Si,  entre  plusieurs  causes  probables  de  cet  incendie,  on  peut  hésiter  à 
prononcer  quelle  est  la  véritable  et  l'unique,  il  est  du  moins  certain  que  le 
principe  du  feu  est  indépendant  d'aucune  volonté  humaine.  Que  l'impré- 
voyance, la  négligence  ou  quehjue  désordre  aient  contribué  à  faire  naître 
révénement,  (u'Ia  est  possil)le  encore,  mais  tout  repousse  l'idée  d'une  combi- 
naison de  la  malveillance  ou  de  la  i)assion.  Cette  idée  api)a:  tient  tout  entière 
et  exclusivement  au  rédacteur  du  mémoire  que  nous  examinons;  la  plus 
douce  dénomination  qu'on  puisse  donner  à  cette  idée,  c'est  qu'elle  est  une 
erreur,  une  précipit;itioii  de  jugement,  une  prévention  de  son  esprit,  ou  un 
clîet  de  l'ignorance.  Vous  ne  croirez  donc  plus,  Citoyen  Ministre,  qu'il  y  ait 
à  découvrir  des  reriios  que  les  Adminiatrateurs  n'ont  pas  coulu  voir  ou 
qu'Us  ont  voulu  cacher.  Ce  n'est  point  à  de  parei.'s  traits  que  l'on  peut 
reconnaître  l'administration  de  Nantes. 

»  Mais  l'auteur  du  mémoire  doit  être  sommé  de  rendre  compte  comment 
il  a  sii  et  comment  il  ose  affirmer  que  deux  quidams,  un  surtout,  avant  l'in- 
cendie déclaré,  se  disaient  entre  eux  sur  la  place:  <(  Est  ce  que  cela  aurait 
manque'^  )) 

H  Nous  lui  demanderons  s'il  a  entendu  ce  discours,  ou  s'il  ne  le  certifie 
que  sur  un  rapport. 

)»  S'il  l'a  entendu,  devait  il  donc  hésiter  un  instant  à  faire  arrêter  deux 
hommes  qui  s'accusaient  du  crime  d'incendiaires  ?  Son  inaction,  son  silence 
ne  seraient-ils  pas  une  sorte  de  eomplicitéV 

»  S'il  n':iffirin(}  le  lait  que  sur  un  rapport,  indiquc-t-il  les  personnes  ou  la 
personne  de  qui  il  le  tient  ?  Et,  dans  ce  cas,  sa  rélicence  ou  sa  crainte  ne 
sont  elles  pas  de  nouveaux  crimes  contre  la  Société'.' 

»  Citoyen  Ministre,  tout  concourt,  comme  vous  le  voyez,  à  faire  sortir 
cette  vérité  :  l'incendie  du  7  fructidor  est  un  malheur,  et  le  Gouvernement 
n'y  verra  qu'un  motif  d'exciter  sa  sensibilité  et  sa  bienfaisance,  pour  réparer 
les  suites  funestes  qu'il  a  entraînées.  >■ 

L'affaire  en  rosta-là. 

Disons  cependant  que,  dans  une  lettre,  le  général  Hoche  accusa  les  roya- 
listes et  les  Anglais  de  l'incendie  de  la  salle  Graslin.  Mais  cette  accusation, 
pas  plus  que  la  première,  ne  reposait  sur  aucune  base  sérieuse. 

Le  malheur  qui  veniutde  frapper  Nantes  avait  eu,  en  province,  un  grand 


INCENDIE    DU    ORAND-THÉATRE 


retentissomont.  La  Municipalité  adressa,  dès  le  9  fructidor  à  tous  les  direc- 
teurs des  théâtres  de  France,  l'appel  suivant  : 

({  Citoyens, 

»  Un  événement  terrible  vient  de  répandre  une  consternation  générale 
dans  la  commune  fie  Nanti's.  La  grande  salle  de  sjxîolaele,  dite  de  la  R^'-pu 
bliquo,  qui  en  faisait  ini  des  plus  beaux  ornements,  vient  d'être  entièrement 
consumée  par  1(!  feu.  l'lusi«'urs  infortunés  ont  été  les  victimes  de  éternel 
malheur  et  ont  péri  dan>  les  flammes;  d'autres,  et  ce  sont  plus  de  cent  de 
vos  camarades,  ont  été  assi'Z  heureux  pour  sauv«>r  leur  persoune.  mais  toute 
leur  fortUM(r  mobilière  a  été,  en  un  instant  la  proie  des  flammes  dévoniutes. 
(Jlitoyens-,  \ous  ne  serez  pas  insensibles  à  leur  eruelle  position.  Vous  ferez 
]>oiir  eux,  ce  qu'eux  mêmes  ont  fait  pour  les  artistes  d'Angers,  dont  la  posi 
tion  était  bien  au-dessous  df'smaUnMirs  qu'ils  viennent  dé|)rouver. 

»  Si,  dans  le  cours  de  la  Révolution,  le  philosophe  et  I  homme  sensible 
ontqiieUjuefois  vu  l«*ur  patrie  souillé»;  |^ir  les  forfaits  d'hommes  exécrables, 
il  faut  l'avouer,  la  Réj)ul)lique  des  lettres  et  d«'s  arts  a  fourni  peu  d'exemjdes 
en  ce  genre,  et  l'histoire  s'empressera  de  transmettre  à  la  postérité  les  ex''m- 
ples  éclatants  de  courage,  de  bienfaisance  et  du  p;itriotisme  qu'un  gnnd 
nom4)re  d'artistes  a  donné  à  ses  eoniem|><irains. 

»  Pour  nous,  magistrats  du  peuple,  ei  plus  encore  ses  sincères  amis,  nous 
nous  empressons  de  <lésign<»r  à  la  biiMifaisanee  publi(juo  et  surtout  à  la  vôtre, 
des  infortunés  dont  le  malheur  est  trop  grand  |)ourque  vous  n'y  soyez  pas 
sensibles. 

)»  Nous  vous  invitons  donc  a  faire  verser  dans  les  mains  du  citoyen 
Mouton,  trésorier  et  [)ereepteur  de  la  commune,  le  produit  d'une  ou  |»lu- 
sieurs  représentations  que  nous  vous  engageons  à  donner  au  bénéfice  de  vos 
camarades  de  Nantes.  » 

Cet  apf)el  fut  entendu,  et  les  villes  snivanles  versèrent: 

Rouen Km  liv.   l  s. 

Marseille . .    r)(^T       » 

Paris 5r>y      8 

Orléans 181       7 

Rayonne VS      » 

Dos  souscriptions  particulières  furent  faites  en  faveur  de  certains  artistes, 
entre  autres,  de  M.  Dufailly,  peintre  décorateur,  qui  avait  pu.  à  grand  peiii". 
(•(•happer  à  l'incendie. 

Le  directeur  Danglas  eut,  lui  aussi,  une  conduite  digne  d'éloges.  Mal^Tc 
ses  pertes  personnelles,  il  paya,  pendant  dix-neuf  jours,  ses  artistes,  qui, 
pourtant,  n'avaient  point  joué. 

Le  20  septembre  suivant,  la  municipalité  demanda  au  Gouvernement  la 
permission  de  disposer  de  l'emplacement  et  des  restes  de  la  salle,  à  charge 
pour  la  commune  de  la  reconstruire  à  ses  frais.  Le  Directoire  ne  donna  p.Ts 
^uito  à  luette  demande. 

Fcrville  proposa  en  17'.>7,  de  rebâtir  le  ihàltre  à  se»  frais,  à  conditîxi 
(|u'il  en  aurait  la  concession  gratuite  f>endant  trente  années. 

La  Ville  n'accepta  point  celle  proposition,  qu'elle  considérait  comme  peu 
nv.intageuse. 


66  LE   TIIÉATRK    A    .VANTES 

I)anglars  fit  îius.si  la  inéme  o/fre,  niais  il  ne  demandait  la  concession  <iuo 
pour  vingt  ans  ;  il  ne  fut  pas  plus  heureux  que  Ferville. 

La  Municipalité  revint  à  la  charge  en  1798,  et  demanda  au  Gouverne- 
ment la  permission  do  louer  les  parties  du  monument  qui  étaient  restées 
intactes.  L'autorisation  fut  accordée. 

Enfin,  la  môme  année,  M. M.  Pelloutier,  Laraaignière,  Candeau,  Richeux 
et  Vallinse  mirent  à  la  tête  d'une  souscription  destinée  à  faire  reconstruire 
le  Théâtre.  La  salle  devait  être  abandonnée  en  toute  propriété  à  la  ville, 
quand  cette  dernière  aurait  pu  rembourser  les  souscripteurs. 

Ce  projet  n'aboutit  pas,  quoique  la  souscription  eût  parfaitement  marche. 

Le  (Trand-Théâtre  ne  devait  être  définitivement  reconstruit  qu'en  IHV.i. 


0\1 


»ou«c 


Plan   du   Théâtre   du   Chapeau-Rouge 
(La  ligne  pointée  indique  le  tracé  de  la  rue  Soileau  actuelle) 


TROISIEME     PARTIE 
^epuis  r;l,ncen(jie  du  %ranil- Jhéâtre  jusqu'à  sa  Reconstruction 

AN     IV    -   1813 
Théâtres  du  Chapeau-Rouge,  du  Bignon-Lestard  et  de  la  Rue  du  Moulin 


\L_X\tv     jourd'hui  ot  si 
W'^>MI     annérs,  l'II6tel 


LES    PETITS    SPECTACLES 
178-1.  —  An  IV. 

Pi-rmif-rr  p>'rii)(h'  ih'  la  salle  du  Chapenu-Riiuge.  —  Dfuxûhnr  pcrf'"'"  -'"  /-^   ••  •'/ 
'/il  Bignon-Lestard.  —  Pièces  révolutionnaires, 

\  1784,  un  sioiir  J.  Reconnais  fit  construire  dans  le  haut  de  la 
rue  du  Chapeau-Rouge,  en  face  du  Cercle  Catholique  d'au- 
jourd'hui et  sur  le  terrain  où  se  trouvait,  il  y  a  quelques 
'1  des  Postes,  une  salle  do  théâtre  destinée  aux 
spectacles  des  «  Variétés,  Ambigu-Comitiue,  Théiltre  de  Nicolet,  Spectacles 
des  Boulevards  et  do  la  Foire.  »  De  plus,  il  construisit,  attenant  à  la  salie, 
un  circiue.  Le  théâtre  prit  le  nom  de  Menus  Plaisirs  et  fut  loué  à  un  nommé 
Colmann. 

Celte  salle  ouvrit  en  septembre  1784,  mais  Longo,  alors  directeur  du 
théâtre  du  Bignon-Lestard,  préscnt;i  immédiatement  la  requête  suivante  à 
la  municipalité. 

«  Li»  spect;i(le  permanent  doit  être  ;  des  raisons.  Son 

entreprise  va  à  i)liis  de  quatorze  mille  ,  ^a  nvette  peut-<Mlc 

y  faire  face.  Si  on  admet  les  Petils-Speruules  a  commencer  à  six  heures  et 
demie.  <'est-à  dire  une  demi  heure  apn's  l'ouverture  du  grand,  les  recettes 
se  font  dans  les  mêmes  temps,  alors  on  diminue  le  moyen  de  soutenir  le 
spectacle  principal. 


)i  CetU'  ville.  quol<|ue  considérable  qu'elle  soii,  no  lest  pas  encore  assex 
|)Our  soutenir  deux  ««poctacles  à  la   fois.   Que  deviendrait  donc  le  grand 


68  1  E   THÉÂTRE    A    NANTE?: 


spoctaclp,  que  devient  le  privil^gc  (\ur  \r  [hiiki;  a  rendu  au  suppliant  et  que 
la  vill(!  a  enregistré,  si  le  sit'ge,  proiccieur  des  spectacles,  ne  le  maintient 
dans  toute  son  intégrité?  Sans  cela,  il  tombera,  et  la  ruine  du  suppliant 
s'ensuivra  nécessairement. 

»  Qu'il  vous  plaise  de  faire  défendre  au  sieur  Colraann  et  à  tout  autre  de 
donner  leurs  spectacles  pendant  la  durée  du  grand  spectacle,  à  peine  de  tous 
les  dommages  et  vous  ferez  justice.  » 

Longo  fut  débouté  de  sa  demande  parce  que  : 

((  Dans  une  grande  ville  comme  Nantes,  dont  la  population  est  nombreuse 
et  reçoit  des  accroissements  chaque  jour,  il  faut  des  spectacles  analogues 
aux  goûts  et  aux  facultés  des  difTérentes  sortes  de  citoyens  ;  il  est  même  a 
propos,  que  les  Petits-Spectacles  aient  autant  de  liberté  que  le  grand,  parce 
qu'il  vaut  mieux  que  le  peuple  soit  amusé  et  détourut*  par  des  amusements 
peu  coûteux,  que  de  se  livrer  à  la  débauche  et  à  tous  les  vices  qu'elle 
entraîne,  n 

La  ville  se  basait  aussi,  pour  repousser  la  demande  Longo,  sur  la  dififé- 
rencedu  public  qui  fréquentait  les  deux  théâtres. 

En  1785,  Longo  revint  à  la  charge.  Cette  fois-ci,  il  demandait  :  «  V  que 
les  Pelits-Spectacles,  courses  et  combats  d'animaux,  bateleurs,  etc.,  etc.,  lui 
comptassent  le  cinquième  de  leur  recette;  2°  qu'ils  fussent  finis  une  heure 
avant  l'ouverture  du  grand  spectacle.  »  La  municipalité  accorda  seulement 
la  seconde  de  ces  demandes. 

La  construction  du  Grand  Théâtre  fit  émigrer  l'opéra,  la  tragédie  et  la  haut»- 
comédie  du  Bignon  Lestard  à  Graslin.  Mais  le  propriétaire  de  la  salle  du 
Bignon  ne  laissa  pas  longtemps  son  immeuble  sans  emploi.  Le  sieur 
Julien  Sévin  loua  la  salle,  lui  donna  le  nom  de  Variétés  et  se  proposa  d'y 
jouer  les  mômes  spectacles  qu'au  Chapeau-Rouge,  qui  était  fermé,  le  direc- 
teur n'ayant  pas  fait  ses  affaires.  Longo  eut  peur  de  la  concurrence  et  ne 
trouva  rien  de  mieux  que  de  s'associer  avec  Sévin. 

On  comprend  sans  peine  que  les  renseignements  sur  ce  théâtre  sont  encore 
moins  nombreux  que  ceux  qui  existent  sur  le  grand  spectacle,  comme  l'on 
disait  à  cette  époque. 

Sous  la  Révolution,  la  salle  du  Bignon-Lestard  prit  le  nom  de  Théâtre  do 
la  Nation  (Variétés).  Sévin  restii  directeur  jusqu'en  1790.  Sous  sa  direolioii, 
il  y  avait  souvent  du  tapage  au  théâtre  et  le  commissaire  de  service  n'était 
jamais  présent.  Sévin,  dans  une  requête  au  maire,  insiste  sur  ce  fait  : 

((  L'absence  de  ce  coramissain*  autorise  les  spectiiteurs  mal  inteniionnos 
à  faire  du  bruit  et  à  commettre  des  indécences  dans  la  salle  des  Variétés  ; 
très  souvent,  les  acteurs  sont  interrompus  et  les  spectateurs  murmurent,  ce 
qui  entraîne  une  perte  notable  pour  le  suppliant  ». 

Kn  1791,  la  direction  passa  aux  mains  d'un  nommé  Nicolas  Hébert. 


.S\LL»!;S  I»U  t.HAPKAU  KOtIGK  Kl    D(J   HIONf  »N-LKSTARD  (^.) 

La  mùino  ann<!e,  lu  lliOatre  du  CliaiH.'au-KouKe  rouvrit  quelque  loiiips, 
avec  une  troupe  dramatique  loqjjpnstH)  d'amatours.  Ces  artistes  firent  à  la 
lUunicipalMt',  une  demande  tondant  à  <-c  que  le«  oHicicrs  municipaux  n'en- 
trassent point  diins  la  salle,  décorés  do  leurs  écharpes,  «  le>  dames  ét;int 
particuliriemcnt  affectées  einjéme  iiitimi»l«'4'>  par  ci- signe  d'auiorilë.  »  Aucune 
suite  lie  fut  donnée  à  cette  baroque  demandf. 

Julien  Sévin  reprit  la  direction  de  la  salle  da  litguun-Lustard,  après  Ilé- 
beit . 

Pendant  la  période  révolutionnaire,  on  joua,  à  ce  théâtre,  un  grand  nom- 
bre de  pièces  do  cireonstanees,  dont  les  titres  DO  nous  sont  pas  |)arvenus. 
Les  registres  niuniei|)aiix  contiennent  seulement  une  protestation  d'Haudau- 
dinc  contre  la  permission  accordt'»^  à  la  date  du  lô  trrrminal  An  IV.  de 
jouer  :  ChareUe,  chefden  Jirit/ands. 

Mais  la  salle  du  Bignon  Lest;ird  était  dans  un  délabreinenl  déplorable.  La 
ville  s'émut  d'un  pareil  état  de  choses  ;  elle  fil  visiter  le  bdtimiMit  par  l'ar- 
cliitécte-voyer,  (|ui  indiqua  les  réparations  urgenU.'s  et  immédiates.  Kn 
attendant (lu'elles  fussent  faites,  un  arrêté,  en  date  du  27  thermidor  An  IV. 
ordonna  la  fermeture  du  Bignon  Lestird. 

(^)nel«|ues  jours  après,  le  (irand  TlittUre  brûlait  : 

Dés  le  H  fructidor,  la  municipalité  prit  l'arrêté  suivant  : 

u  L'administration  municipale,  d'après  la  funeste  espérience  qu'elle  vient 
d'acquérir  la  nuit  dernière,  considérant  que  les  lieux  destinés  à  reet'voir  un 
grand  nombre  d«^  citoyens  ne  peuvent  jamais,  en  cas  d'incendie,  avoir  une 
qiianiit»'- (l'issues  sidfisaiite  pour  (|u'aucuii  de  ceux  qui  s'y  trouvent  ne  soit 
victime  de  la  vivacité  dn  feu,  considérant  qu'il  était  impossible  <i  .• 

plus  de  précautions  que  l'on  avait  fait  lors  de  la  construction  du  f. 
laile,  tant  |)()iir  mullij)lier  les  sorties  que  pour  él;il>lir,  dans  le  lo.  ai   m.  uic. 
Ic's  moyens  de  secours  les  plus  pressants.   Que,  néanmoins,  plusi.  wrs    m  il 
heureux  y  ont  péri,  et,  qu'en  pareil  cas,  le  danger   serait  incalculable  dans 
tout  autre  lieu  ijui  ne  serait  pas  distribué  propoitionnellement.  -urtoui  dans 
l'ancienne  salle  du  Higiion  Lestanl. 

»  Ouï  le  commissaire  'lu  .lir.-.t.iir  .«vicutir 

Arrête  ce  qui  suit  : 

>'  Il  est  expressément  défendu  n  la  veuve  Ténèbre,  jiropriélaire  de  ladit»- 
salle,  sous  les  peini's  de  rigueurs,  de  destiner,  à  l'avenir  ce  local  à  aucune 
espèce  de  thé-aiie.  liln  consccjuenee,  le  pn«sent  lui  sera  transmis,  ainsi  qu'au 
citoyen  Julien.  priii<i|)al  l«»caiaire,  |)our  qu'il  ait  à  faire  prononcer  la  résilia- 
tion (le  son   bail,  --'il  (r.)il  r.?\i(ir:i  f:iire. 

Cette  défense  ne  faisait  pas  lalfaire  de  Julien,  et  ein-ore  moins  celle  île  la 
veuve  Ténèbre.  Ils  avaient  cru.  après  l'incendie  de  Graslin,  que  le  Bignon- 
Lestird  allait  revenir  ses  beaux  jours  d'antan  :  l'arrt'té  municipal  brisait  toutes 
leurs  esjiérances. 

Les  de^ix  intéressés  s'adressèrcul  alors  a  l'autonlc  dcpailcmenlale,  pour 


70 


i.P.   TMEATRK    A    NANTES 


obtenir  la  \o.vre  de  rinterdiftion.  Les  habitants  du  quartier  firent  une  péti- 
tion, engaf^caiit  la  municipalité  à  persévérer  dans  sa  défense.  Le  Déparle- 
ment était  assez  disposé  à  accorder  la  levée,  mais  la  Commune  déi^-lara  que 
si  on  autorisait  la  réouverture  de  la  salle,  elle  déclinerait,  en  cas  d'accident, 
toute  respoiisabilittî.  Bref,  pendant  (jncique  temps,  on  resta  sur  le  «ra/a  yuo, 
puis,  le  souvenir  de  l'incendie  s'atténuaut  peu  à  peu,  l'autorisation  de  rou- 
vrir la  salle  fut  accordée. 


•^Cyir0^  ^:^JuL» 


u!' 


II 


DIRECTIONS 


DANGLAS  ;   —  DUMANOIR.    TERMETS 
et  Julien  SÉVIM 


Scandales-   -  Anecdotes.  —  Chants  patriotiques.  —  Pii'ces  interdites  ou  expurges, 
—  La  Vestale.  —  Napoléon  à  Nantes.  —  Josepli,  Af"*  Pelel. 


E  (Jraïul  Théâtre  n'était  plus  (ju'im  amas  de  décombres,  la  salle 
du  Bignon-Lestard  était  frappée  d'interdiction,  et  cependant  les 
^.  artistes  avaient  le  plus  grand  besoin  de  continuer  les  repré- 
i  seoUitions  thédtrales.  Ils  songèrent  à  la  salle  du  Chapeau- 
Rouge,  qu'on  avait  transformée,  depuis  plusieurs  années,  en  atelier  de  chaus- 
sures. Ils  adressèrent  à  ce  sujet,  à  la  municipalité,  la  lettre  suivante  en  date 
du  11)  fructidor  : 


Citoyens  administrateurs, 

A  peine  sortis  des  dangers  et  de  l'état  de  stupeur  dans  lesquels  nous  a 
plongés  l'affreux  incendie  d'un  des  plus  intéressants  monuments  de  cette 
commune,  et  l'un  des  plus  beaux  consacrés  à  l'art  que  nous  cultivons  nous 
aurions  peut-être  gardé  le  silence,  dans  la  crainte  d'arr.icher  à  leurs  impor- 
Umtes  fonctions  nos  magistrats  dont  tous  les  moments  sont  précieux  à  la 
ciiose  publique,  si  nous  n'avions  cédé  au  sentiment  <|ui  nous  a  fait  sonder  la 
profondeur  de  l'abime  où  la  sûreté  d««  cette  malheureuse  cité  pouvait  se  voir 
entraîner  par  suite  de  cet  alFreux  événement,  objet  de  nos  communs  regrets 
et  de  votre  sollicitude  paternelle. 

Déjà  votre  sagacité  vous  en  a. pénétré  sans  doute.  Déjà  vous  voyez  les 
oisifs  ilonl  abonde  toute  cité  populeuse,  surtout  quand  elle  fume  encore  des 
feux  (le  la  guerre  civile,  profiter  des  longues  soirées  d'hiver,  |K)ur  emplover 
à  toutes  sortes  de  désordres  le  temps  au'ils  passaient  au  spectacle,  le  plus 
sûr  et  le  plus  heureux  moyen  que  put,  en  les  occupant,  leur  opposer  la 
police. 

A  ces  considérations  déterminantesse  joindra  dans  vos  cœurs  le  sentiment 
de  justice  et  d'hmnanité  que  réclament  nos  malheurs,  et  pour  satisfaire  à  la 
fois  à  la  sûreté  de  vos  administrés  en  général  et  aux  extrêmes  Ix'soins  nés 
de  notre  déplorable  situation  en  p;irticulier.  vous  ferez  droit  à  la  plus  juste 
demande,  en  affectant  aux  artistes  du  Théâtre  de  la  République  la  s;ille  du 
Chapeau  Rouge,  que  de  légères  répantions  peuvent  mettre  en  ét;it  de  sup- 
pléer à  la  salle  incendiée,  jusqu'à  la  réédifie-alion  de  celle-ci. 


72 


.E  THEATRE   A    NANTES 


Noii»^  iijoiitcroiH,  fMtoycns  adiniiiistr.'iimirs,  que  nous  croirioii'^  injuste 
.iiitant  <|iriiiliiiiii;iiM,  de  rie  p.is  nous  conserver  notrȔ directeur  Danglas,  dont 
l'active  intelligence  avait  dans  si  peu  de  temps  organisé  notre  entreprise,  el 
(jui  a  montré  un  /èl»;  si  dévou*'  au  milieu  des  dangers  de  l'inecndie. 

L'administration  prit  dès  le  lendemain  cet  arrêté  : 

AuTicLK  i'REMn:i<.  —  La  salle  de  speet  icle,  dite  du  Chap'»au- Rouge,  et  le 
cirque  avej  les  appartements  qui  en  dépendent,  appartenant  à  la  citoyenne 
\euve  Héeonnais  sont,  dès  ce  moment.  t>)i<  ■'  ji  ill^o  i^itii.n  iln  di.v.'n 
Danglas  avec  tous  leurs  accessoires. 

AuT.  2.  —  En  conséquence  du  précédi-iit  irci  h'.  i<'  cuovtii  Im!i;;i  as  irn- 
téra  de  ^rd  à  gré  avec  la  citoyenne  Béconnais  pour  la  location  de  laditi-^  salle 
et  du  cirque. 

Akt.  .'{.  —  Dans  le  cas  où  les  parties  ne  convienilrriirnt  pts  nmiab!em<''nt 
sur  le  prix  de  location,  il  sera  nommé  des  arbitre 

Art.  4.  —  Lo  citoyen  Tousnel,  commissaire  omon  i.iu-ir,  --^i  lu.iL.  .i 
faire  mettre  à  la  dispo.sition  du  citoyen  Danglas  les  clefs  desdits  lociiux  et 
de  toutes  leurs  dépendances  dans  le  délai  de  trois  jours. 

Art.  .").  —  L'aichite 'te-voyer  est  chargé  de  se  transporter  dans  le  plus 
bref  diMai  audit  local,  tant  poar  les  objets  d;  stîreté  intéia'oure  qii*extéri"ure 
et  notaumienl  [)();ir  le  pavage  de  la  rue  dite  du  Talvairo. 


(_)n  fit  faire   les    quel<|Ucs    n-paratioiis    iici-c>- iiri"'^  ,  ou  rcjin^MiM     i;i  ^illc, 

enfin  on  la  mit  en  état  d'ouvrir  le  plus  promptemcnt  possible. 

Dès  le  18  fructidor,  alors  que  les  travaux  n'étaient  point  encore  achevés, 
les  artistes  doniièriMit  un  grand  concerta  leur  bénéfice. 

Le  programme  de  celte  soirér>  iiou^  a  et»'-  conservé,  le  voici  : 


PliKMIKU  INTKllMKDK 

1 .   Syinplionie  i\  grand  orcliestiv  ; 

i.  Ariette    iVdùiipi'    t)    Colonne,  pnr    lo 
ritoyen  .M  an  seau  ; 

3.  ('.oiiccrli)  (le  huilbois   par  le   citoyen 
Doiijroii  ; 

^.   Sri'iie  d'dùli})!'   l'i    Colonne,  par  le  ri- 
Invi'u  .\huv'ias  : 

6.  Syniplionieconcf^rtanle parles  citoyens 
Casimir  et  JiOduc  ; 


DEUXIÈME  ISTERMP.de 

7.  Un  divertissi-nimt  du  citoyen  Girault 

père  ; 

8.  Ariolt<»  iVfE'lipf  à    Colonni»,    par    la 

citoyenne  Saint-Amamt; 

9.  Syinplionit»  concortan»»  de  la  composi- 

tion'du    ciioyi'u    Girault   père,    el 
t'Xirati'.'  par  lui  el  son  fils  : 

KJ.  Air  df  Philippe  et  (ieorgette,  i>ar  le 
liloyf  n  Ak'l  : 

11.  ^Concerto  de  piano  fort'-,  par  lecilovi-n 
Herniann  : 

12    Chasso  de  V Amoureux  d''  quinze  ans 
par  le  ciloyon  Massy. 


0.  Glio'ur  (lu  Seignriir  liienfnisnnl. 

Pl'iiX  ;   l'romii  rcs  et  Parquet,  4U  sons.  —  Douxii'ines,  'i\  sous. 
.\  .j  heures  et  demie  pr("cises. 

Le  nouveau  liiéàtre  ouvrit  le  22  fructidor  par  le  Docin  du  \  illayc  et  les 
Folirs  AinoureitueA. 

La  salle  du  Chap(iau-Kou;j;e  avait  deux  ran.içs  de  loges  avec  baignoires. 
nous  apprend  Camille  Mellinet.  Elle  était  peinte  bleuet  gris  avoo  ornements 
doréa.  Le  rideau  était  bleu, 


8ALLB    DU    CHAPEAU-ROUGB  73 


Voici  quoi  était  le  prix  des  places  : 

Promi^r(!S  logCN  et  aiiiptiithéAtre,  âffesous.—  Parquet.  224  kou«.— Secondas,  20  8OUR. 

A  cotte  «époque,  la  rue  Boileau  n'allait  pas  jusqu'à  la  rue   Rubens.  On  ne 
pouvait  donc  parvenir  à  la  salle  du  Chapeau-Rouge  que  par  la  rue  de  C6 
nom  et  p;ir  la  m»;  du  r!alvaire,  <|Ur  l'on  lit  paver  j)our  la  circonstance  (' 
dorniôro  rue  communiquait  avec  la  rue  du   Ohapciu- Rouge  par  un   fwi- 
|)lac<^  à  côté  du  cirqur»  qui  atlonait  à  la  salle  do  sper-tacle. 

La  ville,  le  2."»  frimaire,  arnMa  qu'il  serait  p^TÇu  un  décime  pjir  p<'rsonne, 
ti  >us  du  [)rix  de  chaque  hillct  d'tTitrcc,  pour  secourir  les  indigent.**  qui 
icfaicnt  pas  dans  un  hospice. 

Le  H  pluviôse,  une  scène  scandaleuse  qui,  est  longuement  racontée  dans 
les  Archives  nuiniei|)ales,  eut  lieu  à  la  salle  du  Chapeau- Rouge.  Une  actrice 
la  citoyenne  Lacombe,  s'était  placée,  malgré  le  défense  faite,  dans  l'or- 
hestre.  Le  coramissairo  de  service  voulut  la  faire  sortir,  mais  elle  persista 
I  rester.  Ayant  aperçu  le  citoyen  Fourmy,  administrateur  dans  la  logo 
luunicipale,  elle  vint  l'y  trouver  et  lui  fit  une  scîme  des  plus  inconvenantes, 
ilisaut  qu'il  n'y  avait  qu'à  Nantes  <|u'on  s'étudiait  à  avilir  le?  artistes.  K||.« 
|)ailait  à  \oix  haute  et  ne  tarda  pas  à  am»niterla  salle.  Enfin  elle  quitta  la 
lofxe  et  alla  se  remettie  à  l'orchestre.  Fourmy  n'osa  pas  la  faire  expulser, 
craignant  : 

((  <|uc  ecttt»  femme,  extrême  en  les  passions.  n'efTectu.U  la  menace  qu'elle 
vaii  faite,  d'abandonner  le  sp<'(îiacle,  où  dlo  montre  des   talents  qui  baUu- 
i"ut  peut  être  ses  défauts,  la  font  ch6rir  et  la  rendent  intéressante  »». 

Pour  éviter  le  retour  de  pareilles  scônes,  la  municipalité  arrôta  : 

«  (|u'il  demeurait  expressément  défendu  à  toute  autre  personne  que  les 
musieiens  de  se  placer  dans  rorchestre,  et  enjoignit  au  citoyen   Danglas, 

iip'cteur,  de  veiller  à  son  t?xécutiou,  .sous  sa  res|K)nsabité  personnelh'  .... 

!(•  nieitre  à  la  disposition  des  artistes  une  loge  ou  deux  do  chaque  c6té  de 
orchestre,  étant  de  toute  justice  qu'ils  no  .soient  pas  privée  de  la  vue  du 

l»ei'tacle  ". 

11  parait  que,  sons  i.t  lvi-v.>u'tiou,  les   bals  mas'Hn-^   t-i  la  \<  :,.  rlu 

mardi  gras  étaient  défendus.  Ou  en  trouve  la  preuvedans  les  r^ v  -  :iuni- 
.  ipiux,  à  la  date  du  15  pluviôse  an  V,  à  la  suite  d'une  demande  do  Dangliis 
pour  obtenir  l'autorisation  de  donner  des  bals  masqués  dans  la  salle  du 
("irque  : 

«  L'administration  municipale,  considérant  que  ces  <>p.r(N  ,i,.  rasseuible- 

ment  ont  toujours  été  l'occasion  de  désordres  et  de  sc/'iies  immorales,  qu'eu 
iMuornent  .surtout  ils  peuvent  devenir  très  dangereux,  on  »• 
landii  liberté  (pie  l'on   se  p  Tm't  sous   le   misrjup  pmirrn't 

licence  d(;  la   put   de  ceux   duitlc 

choses,  et  qu'alors  les  coup.vbles  élu  i 

lance  de  la  police* 


LE   THÉÂTRE   A    NANTES  74 


«  Consid/'rant,  en  outre,  que  la  permission  accordée  pour  un  bal  masqué 
entraîne  la  (xîrnussion  tacite  pour  toutt;  espace  de  mascarades,  qui  courraient 
toutes  les  rues  de  la  ville,  olfrant  à  chaque  insLinl  les  tableaux  les  plus 
obscènes,  et  provoquoraicnl  des  troubles  que  la  plus  exacte  surveillance  ne 
pourrait  punir  ni  emp(>sciier,  après  avoir  entendu  le  citoyen  Douillard,  pour 
\r.  commissaire  du  pouvoir  exécutif,  arrête  qu'il  n'y  a  lieu  de  délibérer.  » 

Danglas  passa  outre  et  alfioha  un  bal.  en  se  basant  sur  ce  que  l'arrêté 
oi-dessus  était  un  simple  refus  de  permettre,  mais  non  une  défense  absolue 
de  donner  un  bal.  L'Administration  municipale  se  réunit  aussitôt  et 
arrêta  : 

Article  Premier.  —  Tous  déguisements  et  travestissements  sont  expressé- 
ment défendus. 

Art.  2.  —  Les  personnes  do  l'un  comme  do  l'autre  sexe  qui  seront 
trouvées  travesties,  masquées  ou  déguisées  dans  les  rues,  salles  de  spectacles 
et  de  bals,  et  autres  lieux  publics,  à  quelque  heure  que  ce  soit,  seront  arrêtées 
et  traduites  devant  les  ofliciers  de  police. 

Art.  3.  —  Les  citoyens  tenant  bals  et  danses  publics  qui  auront  chez  eux 
des  personnes  ainsi  déguisées,  seront  ti-aduits  devant  les  tribunaux  de  police, 
conformément  aux  lois. 

Art.  4.  —  Ils  ne  pourront  prolonger  leurs  bals  et  danses  au-delà  de 
minuit. 

Les  recettes  étaient  peu  considérables.  Danglas  obtint,  le  5  prairial  an  V. 
de  ne  payer,  pendant  l'été,  que  15  francs  pour  le  droit  des  pauvres. 

Dans  le  courant  de  messidor  de  la  même  année,  le  chanteur  Josse,  des 
Italiens  de  Paris,  passa  par  Nantes.  Il  promit  aux  directeurs  du  Chapeau- 
Rouge  et  du  Bignon-Lestard  de  chanter  à  leurs  théâtres.  Ces  derniers  l'alli- 
chèrent  le  même  jour,  d'oiî  contestation,  chacun  des  directeurs  prétendant 
avoir  la  priorité.  Il  fallut  recourir  à  l'Administration,  qui  décida  que  Josse 
jouerait  d'abord  chez  Danglas. 

Cependant  une  réaction  anti-révolutionnaire  avait  lieu  dans  la  ville.  Les 
esprits,  délivrés  de  la  crainte  des  exécutions  sommaires,  ne  se  gênaient  plus 
pour  critiquer  le  Gouvernement.  Un  jour  môme  les  couleurs  nationales 
furent  insultées  au  café  Graslin.  Le  3  messidor,  la  représentation  du  Concert 
de  la  rue  Feydeau,  pièce  qui,  en  maints  endroits,  touchait  à  la  politique,  fut 
l'occasion  d'un  tapage  prolongé.  L'Administration  interdit  dès  le  lendemain 
ladite  pièce.  Les  comédiens  reçurent,  à  cette  occasi<)n,  la  lettre  suivante  de 
la  Municipalité. 

«  Vous  ne  pouvez  pas  douter,  citoyens,  de  l'intérêt  que  prend  à  voliv 
théâtre  l'Administration  centrale.  Lorsque  les  agents  du  royalisme  cher- 
chaient à  corrompre  l'opinion  publique,  à  travestir  nos  spectacles  en  écoles 
de  contre-révolution,  vous  avez  su  résister  aux  sourdes  impidsions,  vous 
avez  continué  de  donner  des  représentations  morales  et  civi(|ues. 

»  Cette  conduite,  c(>tte  cause  des  pertes  que  tous  avez  essuyées  est  trop 


PIÈCES    INTERDITES  75 


respectable  pour  que  nous  n'applaudissions  pas  aux  efforts  que  vous  faites 
aujourd'hui. 

»  Continuez,  citoyens,  à  consacrer  vos  talents  au  proférés  de  l'art  drama- 
tique, à  consulter  le  bon  goùl  plutôt  que  l'esprit  de  parti,  à  écarter  de  la 
scène  tous  ces  tableaux  d'immoraliK'',  toutes  ces  productions  factieuses,  tout 
ce  qui  rappellerait  l'ancien  avilissement  du  peuple  français,  tout  ce  qui 
tiendrait  à  réveiller  des  haines,  à  affaiblir  l'amour  de  la  liberté  ;  c'est  le  moyen 
d'intt'resser  à  vos  suecès  les  autorités  républicaines  et  tous  les  vrais  amis  de 
la  patrie.  » 

Danj^'las,  voyant  que  ses  affaires  ne  prospéraient  pas,  prit  la  fuite  dans  l« 
courant  de  vendémiaire  an  VI.  Ix's  artistes  abandonnés  prirent  le  parti  de 
se  réunir  en  société.  Ils  avertirent  la  Municipalité  de  leur  résolution  de 
continuer  l'entreprise  sous  la  dénomination  de  Grand-Théâtre  de  la  Répu- 
blique. «:  Ce  mot  si  cher  à  nos  yeux,  ajoutent  ils  dans  leur  leltre,  sera  toujours 
notre  ralliement,  et  nous  mourrons  en  le  prononçant.  » 

Dumanoir,  père  noble  de  la  troupe,  et  Termets,  prirent  la  direction  au 
nom  de  leurs  camarades. 

Le  29  frimaire  an  VI,  le  maire  interdit  la  représentation  d'A'//Vfe  dans  le* 
Bois.  A  ee  sujet,  l'Administration  départementiile  avait  écrit,  la  veille,  à  la 
Municipalité  nantaise,  la  lettre  que  voici  : 

«  Plusieurs  citoyens  éclairés  et  sages  nous  ont  fait  part  de  leurs  inquié- 
tudes sur  les  effets  des  re[)réscntations  qu'on  affecte  de  donner  au  premier 
théâtre  de  notre  ville. 

»  Le  directeur  de  ce  spectacle  a  souvent  mérité  des  rejiroches  :  il  semWait, 
avant  le  18  fructidor,  que  son  théâtre  avait  été  choisi  pour  école  d'incivisme. 
Nous  ne  pouvions  concevoir  alors  conmient  des  Français  pouvaient  prendre 
plaisir  à  se  rappeler  les  détails  affreux  d'un  régime  violent,  se  réunir  pour 
s'exciter  à  la  vengeance  à  l'aide  des  exagérations  dramatiques,  et  se  réjouir 
comme  des  sauvages  en  applaudissant  tumultueusement  aux  chants  de  mort, 
à  tous  les  cris  de  vengeance.  Nous  ne  tardâmes  pas  à  découvrir  le  but  de  ce 
système  :  il  fallait  déshonorer  la  Révolution,  avilir  le  nom  de  patriote  ;  et  si 
l'on  était  parvenu  à  attribuer  aux  républicains  les  crimes  dont  la  Révolution 
a  été  le  prétexte,  si  l'on  était  parveim  à  faire  croire  (jue  chaque  individu  a  le 
droit  de  venger  ces  crimes,  on  en  aurait  conclu  que  tous  les  républicains  sont 
des  scélérats,  «qu'ils  sont  dignes  de  mort,  et  notre  pays  eût  été  couvert  d'assas- 
sinats. 

»  Nous  crûmes,  en  conséquence,  devoir  empêcher  la  repré^^ent^ition  de 
V Intérieur  des  Comités.  On  reprend  aujourd'hui  les  mêmes  errements.  Cette 
pièce  à'Hlise  dans  les  Ijoia  tend  à  la  même  fin  ;  et  «-i,  comme  nous  leptMisons, 
ce  n'est  pas  là  l'intention  de  l'auteur,  il  sullit  (|ue  l'esprit  de  parti  ou  la 
malignité  puissent  en  profiter,  pour  que  sa  pièce  soit  dangereuse. 

»  Quel  ami  de  la  patrie  ne  doit  pas  désirer  que  toutes  ces  haines  s'éteignent, 
que  d'aussi  cruels  souvenirs  s'effacent,  et  que  l'histoire  ne  puisse  retrouver 
les  monuments  de  cette  époqu»'  honteuse  !  Et  si  l'on  invoquait  contre  le 
royalisme  les  massacres  de  Machecoul,  de  Marseille,  d'Avignon,  tous  les 
meurtres,  toutes  les  cruautés  horril)les  que  cette  faction  a  commis  }>^ndant 
la  guerre  civile  ;  si  tous  les  partis  faisaient  ainsi  l'apjx'l  do  leurs  pertes  etd« 
leurs  victimes,  on  rougirait  peut  être  d'a|>partonir  a  l'humanité,  et  l'on  par- 
viendrait à  prouver  la  justii-e  d'une  proscription  générale  de  l'espièco. 
Travaillons,  au  contraire,  à  soutenir  la  dignit»'.  de  l'homme,  à  rappeler  la 


76 


LE   THEATRE   A    NANIES 


concorde,  à  obtenir  enfin,  par  la  sagesse  ot  la  modération,  la  paix  au  milieu 
de  nous,  après  l'avoir  donnée  à  l'Europe  par  nos  armes  et  notre  courage. 

»  Ces  considérations  nous  portent  à  vous  inviter  à  défendre  la  représen- 
tation û'Eli^e  dans  les  Bois.  » 

En  nivôse  an  VI,  on  joua  une  pièce  de  l'architccle  Ogée,  intitulée:  Le 
Départ  des  Français  pour  l'Angleterre.  La  première  représentation  lut 
donnée  au  bénéfice  des  souscriptions  pour  la  desconte  en  Grande-Bretagne. 

Le  vieux  Gourville  qui,  depuis  quelque  temps,  s'était  retiré  du  théâtre, 
donna  à  cette  époque  quelques  représentations.  Il  joua  Tartuffe,  le  Bourru 
hiei}J'aisant,  Turcaret.  Il  était  tellement  affaibli  que,  s'étant  agenouillé  dans 
une  pièce  où  il  jouait,  on  fut  obligé  de  le  prendre  sous  le  bras  pour  le  relever, 
et  cependant,  à  la  vivacité  de  son  jeu  on  se  fut  dillicilement  aperçu  de  son 
grand  âge.  Gourville  ne  devait  plus  reparaître  sur  la  scène.  Il  mourut 
quelques  mois  après,  entouré  de  l'estime  et  du  respect  général. 

Les  artistes  réunis  et  Julien  Sévin,  directeur  de  la  salle  de  la  rue  Rubens 
(anciennement  rue  du  Bignon-Lestard),  comprenant  que  les  deux  théâtres  se 
faisaient  mutuellement  tort,  s'associèrent  ensemble,  en  floréal.  Il  fut  décidé 
que  la  troupe  jouerait  à  la  salle  Rubens  pendant  l'hiver,  cette  salle  étant  plus 
chaude  que  celle  du  Chapeau-Rouge,  qui  fut  réservée  pour  les  mois  d'été. 

Le  célèbre  Franconi  vint  donner,  le  même  mois,  des  représentations  au 
cirque  du  Chapeau-Rouge. 

Par  arrêté  du  21  fructidor  an  VI,  l'Administration  décida  : 

«  ([ue  dorénavant  tous  les  artistes  chanteurs  qui  viendraient  au  théâtre  de 
la  ville  et  prêteraient  leurs  talents  pour  la  célébration  des  fêtes  nationales 
seraient,  pour  cette  considération,  dispensés  de  tout  service  dans  la  garde 
nationale  sédentaire.  » 

La  troupe  qui  desservait  alors  le  Chapeau-Rouge  était  assez  faible.  Je  n'ai 
pu  retrouver  sa  composition  exacte.  Tout  ce  que  j'ai  pu  recueillir,  c'est  le 
nom  de  certains  artistes  qui  jouèrent  pendant  les  années  de  direction  de 
Dumanoir,  Termets  ot  Julien  Sévin  sur  la  scène  de  Nantes  : 


MM.  Paiî.\n. 
Germain. 
]}audry. 

LEFÈriUUK. 
IjEKOUX. 

Joseph. 

Taille  T. 

Belval. 

Maurin. 

Belfon. 

Masst. 

DEanuissKAUx. 

c.hapekon. 

Lacroix. 

DUMONT. 

Lamareille. 


M. M.  liEEÈvBE  (Marlias). 

BiGNUN. 
DliRO.N. 
SULEAU. 

Gows . 

ClIAlSSEAi;. 
VrLLENEUVÉ. 
(.'.LÉMENT. 
TlPlIAINE. 

iiumiîert. 
Letertre. 
Baudrier. 
Auguste. 

LloNSTANT. 
MONROSE. 

Calclna,  maîlre  de  l)aIlol. 


ANECDOTES 


77 


M  mes  u'H  MUTAIS. 
Vaxhovk. 
Valeruv. 

MiOXOT. 
MOUMN. 

Mayki  n. 

JOKXNA. 

Lkbrux.' 
Lecleb".. 
Peltier. 

BuRttÈRK. 

Lemaire. 
Flkury. 
Louise  Mi.TÉ. 
Ter  mets. 

DUBET. 


I'abax. 
Segnerot. 
Decooukbert. 
Chaperox. 

MONRÛY. 

Leclkrc. 
i)  kg  re  ville. 
r.\RTii;sY. 

II EX EAU. 

DUMONT. 

NORMAXl). 

.JOLV. 

LOLISE. 

AUBERT. 

H»;uiiERr. 

A'iLSAX. 


La  première  chanteuse,  Mi'e  Moulin,  ne  connaissait  pas  plus  les  lettres  lie 
Talphabot  que  les  notes  de  la  musique,  aussi  avait  elle  une  personne  jiour 
lui  apprendre  ses  rôles  de  mémoire,  comme  elle  avait  un  r»'pétiteur  pour  le 
chant.  Une  autre  actrice  avait  le  môme  degré  d'instruction. 

Un  acteur  de  cette  troupe  qui.  tous  les  soirs,  était  accueilli  parles  plaisan- 
teries et  les  sitllets,  fit  insérer  dans  un  journal  cette  allégorie  de  sa 
faeon  : 

«  Une  Société  de  gens  honnêtes  elconséquemment  paisibles,  fréquentait  un 
jardin  pul)lie.  Elle  avait  les  yeux  fixés  sur  un  jardinier  qui  cultivant  des 
fleurs,  étjlit  depuis  longtemps  aceablé  parles  frelons  qui  bourdonnaient  a  ses 
oreilles  et  fai.saient  même  l'impossible  pour  le  picpier.  Sachant  combien  il 
est  dangereux  d'jrritrr  cette  sorte  d'insectes,  il  demanda  à  quelques  per 
sonnes  de  la  société  quel  parti  il  avait  à  pr<'ndre  ;  elles  lui  répondirent  :  le 
mal  subit  que  l'on  ne  mérite  point  se  dissipe  de  lui-même.  11  se  trouva  alors 
plus  consolé  qu'il  n'avait  été  atUigé,  et  il  reprit  tninquillem'Ut  son  ouvrage 
en  disant  :  Un  souille  léger  m'a  apporté  ces  petits  insectes,  un  coup  de  vent 
les  enlèvera  t').» 

Le  20  nivôse  An  VI,  le  théâtre  joua,  à  l'occasion  du  traité  de  Campo- 
Formio,  une  scène  lyrique  :  La  Fcte  de  la  Paix,  paroles  de  Blan<hard  de 
la  Musse,  musique  du  citoyen  Saint-Amand.Saint-Amand  était  un  musicien 
d'un  ci-rtain  talent,  qui  s'était  fixé  à  Nantes  en  1794  ;  il  retourna  ensuite  à 
Paris  et  entra  comme  professeur  au  Conservatoire. 

En  r.\u  VU,  les  recettes  étaient  loin  d'être  brillantes;  elles  s'évevaient  à 
peine,  dans  les  plus  belles  soirées,  à7<:0  francs. 

Sous  la  République,  des  chants  patriotique-;  étaient  exécutés  au  Théâtre 
pendant  les  entr'actes.  Au  Chapeau-Rougo  on  s"ét:»it  relâché  de  cette  hat-iiude 
Le  coniinissain^  du  Directoire  réclama  près  de  l'.idministration  municipale. 


(Ij  Gauliei  otCbapplain. 


78  LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


La  lettre  (îcrite  dans  le  style  hoursoulllc  du  temps,  est  assez  curieuse  et  m'a 
paru  \  aloir  la  peine  d'être  nubli/;. 

N'anli'S,  !•'  '^tl  muIosi-,  an   VII  d'-  la  Rcptilili'iui-  I- raiM  :ii>e  un»-  '-l  iri<Ji\  i^iol'-. 

J.e  (.'umniissairt'  du  l)irerloire  ej'f'c.utif  prè»  f  administrât  ion  centrale 
du  drjurrteiiii'nl  de  la  Loire  /nfrrieure. 

Aii.rMcrnOres  de  t'Adiainistfation  municipale  dr  \nrde.s. 

CitoN'cns, 

Des  affaires  pressantes  et  des  circonstances  m'ont  empêché  de  répondre 
plus  tùt  à  votre  lettre  du  l'J  de  ce  mois,  que  j'ai  reeue  le  22. 

l'ar  cette  lettre,  vous  objectez  à  ma  demande  pour  l'exécution  des  airs 
patiiotiques  au  ihéùtrê,  à  l'ouviîrture  et  entre  les  pièces,  que  ces  airs  au 
nombre  de  (|uatre,  ne  peuvent  ôtre  assez  variés  pour  plaire  constamment, 
que  ce  nombre  est  trop  médiocre  pour  être  joué  deux  fois  par  jour,  que  vous 
eraindriiv.  (|ue  cette  prodi-^alité  ne  les  avilit,  que  la  satiété  déf^oiite  des  mets 
les  |)lus  exquis,  que  vous  vous  contenterez  de  les  faire  exécuter  les  quintidi 
et  décadi. 

.l'a\oue  que  ces  obser\ations  m'ont  causé  quelque  surprise  ;  on  ne  se  lasse 
jamais  de  ce  qui  est  essentiellement  bon  :  la  République  doit  se  pré^;enter 
continuellement  aux  regards,  aux  oreilles,  à  tous  les  yeux.  Quoi  de  plus 
pro|)re  à  l'àme  que  les  chants  qui  ont  si  souvent  donné  le  signal  de  la  victoire 
et  rappellent  les  immortels  exploits  de  nos  guerriers?  Les  prêtres  dn  chris- 
tianisme n'oliraient-ils  pas  constamment  aux  yeux  du  peuple  les  mêmes 
images,  ne  frappaient-il  pas  les  oreilles  des  mêmes  chants,  des  mêmes 
accents,  n'était-ce  pas  ainsi  qu'ils  en  avaient  telU'inent  pénétré'  la  multitude, 
que  la  plupart,  identifiés  avec  leurs  principes,  avec  des  objets  fantastiques, 
ont  combattu  jus(|u'à  la  mort,  pour  les  défendre  et  les  maintenir? 

Quel  avantage  ne  doivent  pas  avoir  les  principes  et  les  emblèmes  de  la 
Rt  |)ul)lique,  de  ce  gouvernement  si  propre  à  élever  la  nation  au  plus  haut 
degré  de  perfection,  de  gloire  et  de  bonheur. 

Comment  se  faisait-il  que  jadis,  rassemblés  presque  toujours  à  ia  même 
heure,  on  semblait  se  délecter  d'une  psalmodie  monotone?  C'est  quç  des 
])rêtres  avaient  su  adroitement  établir  cet  usage,  l'on  s'asservit  à  ces  stériles 
iiommages,  et  rhat)ilude  dégénère,  pour  ainsi  dire  en  besoin. 

Mais  des  Républicains,  des  Fram.ais  qui  doivent  aimer  la  République  et 
n'aimer  qu'elle,  se  lasseraient  ils  d'entendre  ou  n'entendraient  ils  que  froi- 
dement e(*s  airs  chéris  qui  sont  nés  avec  leurs  liberté  et  l'ont  embellie  et 
aniinécul'une  vie  nouvelle  ? 

\'ous  pensez  que  les  airs  républicains  ne  sont  pas  assez  nombreux  pour 
etnî  variés  et  plaire  coustamuuMit  ;  vous  n'en  connaissez  que  quatre,  j'en 
t-onnais  dix  que  voici  : 

1.  Allons  t'iif/intx  d<'  In  pntrir.  —  '^.  ]'i'illiins  nu  saint  <(>'  l'empirr.  —  3.  Af>  î  •." 
i)'i'.  —  4.  Au  pri'wii'r  Sun  du  tatttbour.  —  i).  Dansons  la  Curviui/nole.  --  <>.  L<' 
victiiirc  t'n  cfiuntont.  —  7.  Xous  ne  rcrottnuissuns,  Pn  détestant  les  rois.  — 
8.  .Mourir  pour  lu  patrie.  —  0.  Le  citant  dit  retour.  —  10.  (Hoire  ou  peuple 
f'rnnrais. 

Il  y  en  a  c(^rtainement  beaucoup  d'autres,  et  si  les  musiciens  veulent, 
comme  je  le  pense  bien,  y  mettr»;  l'accent  du  patriotisme  qui  les  anime,  ils 
sauront  les  rendre  toujours  nouveaux  aux  oreilles  républicaines.  Si  des  indi 
vidusremar(|uables  par  leurs  ridieuleset  leur  nullité,  qui  semblent  dédaigner 


PIÈCES      EXPURGÉES  79 


la  République  pari'c  fiu'ils  sont  in(;ip;il»l«'s  de  1 1  <  .nii|>rfi(i[i-  ri  iimi^-nf  ci.- 
la  servir,  si  ces  iudividus.  flis-jc,  sont  <lésagr(^abl«'nionlatre<;l«''s  deces  chants 
iv'iques,  qu'ils  se  rclirt'nt.  Au  p'ste.  il  est  bon  de  l«'S  en  p^inétrer  m  i" 
iix,  peut-être  y  prendront-ils  j;out.  Il  est  bon  d«'  faire  triompher  le  ; 
rf|)ublieain  ;  il  faut  qm'  Ir  gouvernement  se  montre  partout  vl  hautonuni. 
<'t  alors  qu'une  coalition  secrète  semble  nous  menacer  par  une  marche  lente 
ei  perfide,  il  faut  /'lever,  pour  ainsi  dire,  autel  contre  autel,  et  se  roidir  afin 
de  ne  pas  faire  de  pas  rétrogrades. 

Il  serait  inutile  de  mV'tendre  davantage  sur  ce  point  et  sur  d'autres  con- 
sidérations que  Vous  avez  ap(;rçues  <orame  moi.  Je  |xjnse  donc  que  vou--  ne 
"udrez  pas  aux  objections  qu«'  vous  m'avez  faites  ;  et  je  |)ersiste  de  i>lus 
lort  à  désirer  que  vous  donmCz  l'ordre  de  jouer  chaque  jour,  à  l'onhestre. 
avant  l'ouverture  du  tlnVilre.  et  entre  les  deux  pièces,  un  des  airs  républi- 
cains dont  j'ai  f)arlé;  et  à  votre  recommandation,  les  musiciens  y  mettront, 
je  n'en  doute  pas,  le  zèU»  et  l'expression  convenables, 

.rol>serve,  en  outre,  que  l'on  ne  joue  plus  de  pi- 
fort  rare.  Ne  serait-il  pas  pos.sible  de  faire  jouer  <!• 

petites  pièces  patrioti<|ues  de  choix.  Je  désire  que  cet  objet  li.ve  voiitj  alicu- 
fion. 
Je  vous  prie  de  m'accusrr  réeeption  de  la  présente,  et  de  me  faire  part  de 

\   I  llf  |>     ijl'IiTI  II  I  ll'O  II  ><  I 

Salut  et  fraternité, 

Signé:  Mahsskn. 

Kn  frimaire  An  \'II!,  I-   dn»it  des  pauvres  fut  rédiui ..  t.  n  im  ~  ^..u  i.i.n- 
entation. 

Les  pièces  inédites  suivantes  furent  jouées  dans  le  courant  de  l'An  VIII  : 
V Kncicuv,  comédie  en  cinq  acte  et  en  vers,  de  Hyacinthe  David  ;  Soliinan, 
'•M  la  suite  de  Joseph,  drame  en  trois  actes  et  en  vers,  par  Clavel,  artiste  du 
théâtre  de  Nantes,  musiqjcdu  citoyen  Breton  ;  le  Triouijthe  de  lionapnrir 
'"  ^'"/7///^'^'  ^^^  '"^  Reprise  (f'AhnuLir,  grand  opéra  à  spectacle,  |)ar  Briss, 
irtiste. 

Le  2r>  germinal,  l'interdiction  de  jouer  Athalie   fut  signifiée  aux  artistes. 

Le.'i  prairial,  une  grande  représentation  fut  donnée  au  bénéfice  des  parent:? 

des  victimes  «1»;  l'explosion  du  château.  On  joua  (Hfielloet  les  Trois  Sfeurs. 

Dans  le  courant  de  brumaire,  l'acteur  Julliei  vintdonner  des  représentations. 

Lo  17  de  ce  mois,  la  Jeune  Nanette  eut  le  mëm«'  sort  c(\x'At Italie.  On  ne 

peut  se  figurer  aujourd'hui  avec  quelle  sévérité  les  pièces  étaient,  on  peut  le 

lire,  épluchi'cs.  liirhard-Ca-ur-de-Lion  était  proliibé  aussi  lui.  Les  artistes 

Icmandèrent  la  levée  de  l'interdiction  en  proposant  d«'  dire  : 

O  Hichnrd,  c'rxt  à  toi  qur  mon  etrur  s'obandUmne 

lu  lieu  du  vers  que  tout  le  monde  eonnait.  J'icnore  si  cette  autorisation  fut 
donnée. 

On  ne  s'adresse  jamais  en  v.uii  .m  <  nui  <i«  >  .iin^u-^.  »  iii\  tm  *  n.. 
Kouge  étaient  loin  d'être  riches,  pourt^tnt  ils  saisissaient  toutes  les  occ.< 
de  soulager  queUiue^  misères.  Je  n'en  veux  que   la  pnnive  suivante.   L" 


HO  LE  THÉÂTRE   A  NANTES 


^'1    vfiilii^c  ,111   .\j   II  ml  (M»jiiii'  uni:  1  iMii  f.M'ii  laimn   >•  an    oi- nrjiiti    u  nnr  l'inm- 

fini  cii'iit  (Vndojjter  un  enfant  nouccau-né  qui  avait  H«^  j*'t(^  ce  malin  flans 
(/('N  lalrinctfd'où  il  a  ôlé  retiré  nicant.  »  Toxtuel. 

Le  :20  friiuaii'o  iin  Xï,  un  anété  do  la  mairie  dércjidil  la  vont».*  des  coutro- 
marqucs. 

Ku  1^05,  notre  compatrioli.'  rjuillauine  de  Bouieillcr  remporta  le  grand 
prix  do  composition  j)Oiir^  sa  cantaUî  Hèro  et  Le  a  ndre,  dont  les  paroles 
t''laient  aussi  d'un  Nantais.  M.  Binsso  de  Saint-Virtor.  Los  artistes  du 
Cliapeau-Kouge  doum'-ront  deux  auditions  de  cette  cantate. 

Dans  lo  courant  de  l'année  180C,  les  troupes  de  la  Porte  Saint-Martin  «t 
de  l'Ambigu  vinrent  donner  à  Nantes  quatre  représentations.  Cette  môme 
année,  l'autorisation  de  reprendre  At/ialie  fut  accordée. 

<  )n  était  alors  à  l'époque  des  pièces  militaires  et  de  mélodrames  noirs  aux 
sous-titres  ronilants.  On  représenta  au  Chapeau-Rouge  une  parodie  de  ces 
soiies  de  pièces  sous  le  nom  de  Rode  rie  et  Cunt-f/onde  ou  Vh'rniitf  di- 
Mnntinartre  o\\  \a  Fortcrcsae  de  AJo/inos  ou  le  Ji'erenant  de  la  galerie  di- 
rfJuest,  galimathias-butlesco  niélo-patho-dramatique,  en  -lactés.  Grand  sue- 
eè.s  de  fou  rire.  Le  l'i  août  181  )G,  on  joua  les  Souliers  mordorés,  de  Fridzt-ri. 
à  son  bénéfice.  L'affiche  jiortait: 

((  M.  Fridseri,  aveugle  dcpuinlnge  d^ un  an,  jouera  une  sonate  deciolon 
et  :  ur  la  mandoline  les  deux  airs  de  Monte-au-Ciel  et  du  grand  cousin  du 
Hv^cr\cuv  (/u'il  exécutera  à  la  fois  sur  le  même  instrument,  de  manière  à 
faire  entendre  distinctement  les  deux  parties.  » 

Le  fait  musical  le  plus  important  de  l'année  1^07  fut  la  première  repré- 
sentation (le  la  Vestale.  Je  n'ai  pu  retrouver  les  noms  des  artistes  »iui 
ercTcnt  dans  notre  ville  lo  chef-d'œuvre  de  Spontini. 

La  même  année,  M.  et  M"'"  Fay,  de  Feydeau  et  Tiercelin,  du  thé^itre 
Montansier,  vinrent  jouer  à,  Nantes  différentes  pièces  de  leur  répertoire. 

lîoullant  maître  de  pension  à  Nantes,  fitjouer.  à  cette  époque,  un  vaude 
ville  :  le  J'risonnicr  de  cingt-quatre  heures. 

La  situation  du  théâtre,  était  alors  fort  mauvaise.  Les  recettes  étaient  des 
j)lus  minimes,  et  les  malheureux  artistes  miseraient  Cependant  ils  lutt;iient 
courageusement,  contre  la  fortune  adverse.  Un  seul,  Termcts,  l'un  des 
administrateurs,  voulait  déposer  le  b  lan,  et  pour  arriver  à  ee  but,  occasion 
n;iit  tous  li>s  désagréments  possibles  à  la  Société.  Les  artistes  se  plaignifeni 
au  maire,  et  le  10  mars  18()S,  Termets  futeassé  doses  fonctions.  Dumanoir 
et  Julien  Sévin  restèrent  seuls  adininistr.iteurs. 

Napoléon  visita  Nantes  en  1808.  De  grandes  fêles  furent  données  en  Sun 
honneur.  Lo  \)  août,  on  joua,  par  extraordinaire,  aux  deux  suJles  «  eu 
réjouissance  de  l'arrivée  do  l'Empereur.  »  On  représenta  au  Cbapeau- 
Rouge  :  Misanthropie  et  Hc'peniir  nu  rjnconnu,  drame  en  einq  aetes  :  Ir 


NAPOLÉON   A   NANTES   —   JOSEPH  81 

Calife  de  Bagdad  et  une  scène  lyrique  «  à  grand  orchestre  et  à  spectacle 
analogue  à  la  circonstance  »,  disent  les  afKclies.  A  la  salie  Rubens,  on 
donna  Euphrosine  et  Coradin  et  le  Jeu  de  l'Amour  et  du  Hasard. 

La  scène  lyrique  (-hantée  au  Chapeau-Rouge  était,  pour  les  paroles,  de 
Bl'inchard  delà  Musse,  et  pour  l;i  iuu3i(iu(î  de  Scheyermann,  un  des  meil- 
leurs professeurs  de  piano  delà  ville.  Le  théâtre  représentait  une  place  pu- 
blique où  le  peuple  était  réuni  en  foule.  La  messagère  des  dieux,  Iris,  des- 
cendait dans  un  nuage  et  venait  annoncer  l'arrivée  de  l'Knipereur  ;  alors  la 
joie  éclatait  de  toutes  parts.  Voici  un  échantillon  de  la  poésie  de  M.  Blan 
chard  : 

CNB    FEMME 

Puissent  l'amour,  lu  franchise  et  le  zèle. 
D'une  ville  toujours  à  ses  devoirs  fidèle. 
Dans  ses  murs  fortunés  fixer  Napoléon. 

UN    PAYSAN 

Ah  !  qu'il  sache  que  le  Breton, 
Tout  en  changeant  de  non\, 
N'a  point  changé  son  caractère. 
Que  fier,  loyal  et  sincère. 
Il  met  sa  {/loire  ta  jilus  chère, 
A  chérir,  d  servir  le  grand  Napoléon. 

II  paraît  que  l'enthousiasme  ne  connut  plus  de  bornes,  et  que  dans  la 
salle  des  larmes  d'attendrissement  coulèrent  de  tous  les  yeux,  quand  le  peu- 
ple reprit  en  chœur  : 

Veille    sur  notre  appui. 
Dieux,  dont  il  est  l'image. 
El  conservez  en  lui 
l'oi/r  plus  bel  ouvrage. 

Un  superbe  bal  fut  douné  à  l'Empereur,  dans  la  salle  du  cirque.  Pour  la 
circonstance,  un  arrêté  du  maire  prescrivit  aux  invités  de  ne  se  présenter 
qu'en  habit  à  la  fran«;aise,  avec  épée  et  chapeau  sous  le  bras. 

Le  G  septembre  1808,  eut  lieu  la  première  représentation  de  Joseph.  L'ad- 
mirable chef  d'œuvre  de  Méhul  remporta  un  succès  sans  précédent.  Dans 
l'espace  de  trois  mois,  il  atteignit  seize  représentations.  Joseph  était  chanté 
par  Richebourg,  Jacob  par  Iluel  et  Benjamin  \mt  M"*  Oranger,  délicieuse 
dans  ce  rôle. 

Un  opéra  qui  eut  encore  plus  de  succès  que  Joseph,  fut  la  CendriUon  de 
Nicolo,  une  partition  bien  oubliée  aujourd'hui. 

En  1809,  une  jeune  artiste  qui  devait  rester  plusieurs  années  à  Nantes, 
\Iiio  Pelct,  débuta  dans  le  rôle  de  Juliade  la  Vestale.  Elle  était  ausiii  bonne 
cantatrice  qu'excellente  comédienne. 

18 


si^  '    xt  YSiA^r^W à' N^;^^ • 


' «  À  o^Xf'  Ai^'SV^"  Pclct.  (lifCamfllo  Mellinc*t,dans  La  Mimique  n  Nnntest, 

oi»!- reulircfiiait  te  vifnre  ti^nor  Jos^^'pli,  acteur   plut(Vi  q««î  ch/mieur,   acteur 

munie  assf'/,  mt^uiéré,  cependant  assez  l>on  musiciep  ot  qui  jouait   VIrato 

av<'f  mu- '»  jiiifonncri"'  font  italienne.  » 
;  :-/.r  ;: 

A  cette  époque,  les  amateurs  Nantais  applaudirent  aus?i  M"'  Lemaire^ 
Cetleartiste  remporta  un  véritable  triomphe  dans  A<?Z)erm  daVillaye^Aoui  la 
vogue,  qui  durait  encore,  ne  devait  pas  larder,  pô'urtant,à  diminuer.  Quand 
M»"  Lerhaire  partit,  oTi  la  couvrit  de  bouquets,  de  couronnes,  dé  palmes  et 

de  vers.  McUiriet  Cite  ecux-ci  :  '        '     •      ' 

Pottr  hicn  te  payer  du  plaisif  .que  tu  fais. 

Il  fiiHflritit  Apollon  lui-même, 

Il  faudruit  des  lauriers  comrhi:  on  n'éVi  'oit  jàmms. 

Le  31  décembre  1811,  un  arrêté  du  maire  ferma  définitivement  la  salle  de 
la  rue  Rubens,  reconnue  de  plus  en  plus  dangereuse.    L'ancien  théâtre    du 
Bignon-Lestard  devint  un  atelier  de  chaudières.  Aujourd'hui  son  eniplace 
ment  est  occupé  par  une  serrurerie. 

Un  professeur  de  clarinette,  M.  Canongia,  fil  jouer,  le  15  février  1812,  un 
opéra  et  un  acte,  Les  deux  Juliês.  Cette  œuvre  médiocre  échoua  complè- 
tement. 

Le  3  décembre  ISI'2,  Jean  de  Paris,  c]c  Boieldieu,  fit  son  apparition  à 
Nantis.  Cet  opéra  du  îfutur  auteur  de  ia /)am5  Blanche  n'cui  qu'aUtlemi- 
succos. 

Cette  même  année,  Mi'"  Clairville,  de  l'Académie  impériale  de  musique, 
vint  chantoi'  Didon,  Ariane,  Alceste,  et  différents  autres  chefs-d'œuvre  du 
vieux  répertoire. 

Le  20  mars  1813,  la  salle  du  Chapeau  Rou^e,  clôtura  par  le  Désespoir  de 
Jocrisse,  l'Lrato,  Jocrisse  alix  Enfers  et  Stratonice. 


III 

LA  SALLE  DE  LA  RUE  DU  MOULIN 

L'ancienne  chapelle  des  Cannes.  —  Pottirr 

r.us  1802,  lin  petit  thrdirc  s'éleva  rue  du  Moulin,  (];mi.s  l'aji- 
cienne  chapelle  des  Carmes,  qui  renfermait,,  jadis,  le  tombeau 
de  I'>an<:ois  de  Bretafjne,  cheM"<cuvre  do  Michel  Columl».  Je 
n'ai  aucun  renseignement  exact^uf  'les  commencements  de 
fctto  sc«'ne  d'ordre  si^coiidaire.  Tout  ce  que  JK  sais,  c'est  qu'une  dame  Char 
les  voulut  en  faire  un  Ihcàtre  d'éducation..  J'ai  trouvé  dans  les  archives 
municipales  la  protestation  des  artistes  du  Chapeau  Rouge,  qui  ne  voyaient 
pas,  sans  appréhension,  une  entreprise  rivale  s'établir  à  Nantes.  Voici  un 
passage  de  ce  factuiu. 

»  La  dame  Charles,  élève,  dit  elle  dans  son  prospt'ctus  imprimt',  un 
rhodtfp  d'éducation,  c'est-à-dire  un  théâtre  d'iMifants  des  deux  sexes,  à 
(|ui  l'on  enseignera  {gratis /n  danac  et  le  culte  rjunn  doit  à  l'/'^tre  supprèmei  ta 
musique  et  le  respect  pour  les  purents,  le  cah'ul  rt  la  déclamation  qui  fait 
passer  dans  l'âme  la  joie  et  la  pitié,  la  pantomime  et  la  tenue  des  lirres, 
l'opéra  cominue  et  le  commerce,  les  aecoirn  du  citoyen  '■'  '"  ''auderllle 
enjolivé  par  les  ballets. 

»  Dans  une  telle  entreprise,  la  morale  et  la  politique  ne  i>-uvent  rosier 
•^ans  intervenir.  La  morale  comlamne  cette  doultle  spt'culation  sur  l'inno- 
nocence  d'un  grand  nombre  d'enfants  des  deux  sexes  et  sur  la  faiblesse  et 
l'avarice  de  leurs  parents  Ce  qui  séduit  ceux-ci,  c'est  que  la  dame  Charles 
leurdit:»  Vous  n  ara  aucun  dcbour.-é  à  /aire  pour  l'éducation  de  vos 
enfants,  au  contraire,  ils  sont  payés  pour  acquérir  du  talent,  leur  traitement 
augmente  à  proportion  de  leur  travail,  et  ils  ne  sortiront  des  mains  de  leurs 
iiiaitres  c|uecapai)lcs  tie  prendre  l'état  qui  puisse  convenir  à  leurs  parents. 

Une  pareille  école  ne  peut  entrer  dans  le  système  de  l'instruction  publi- 
«jue.  Qu'est-ce  d'ailleurs  qu'une  école  d'enfance,  dont  la  dame  Charles  dit  : 
Point  de  deroirs.  tout  est  plaisir  pour  eux  N'est-ce  |xis  dire  :  ce  sera  une 
école  de  corruption  V 

»  Sans  doute  la  malignité  remarcinera  qu'il  nous  convenait  moins  qu'à 
d'autres,  di'  nous  ériger  en  maîtres  de  morale. 

»  Mais  n'est-ce  donc  j>as  là  le  premier  but  de  notre  institution,  et  notre 


84  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


premier  di'voir  VS.inicuil  no'nons  a  til  pas  donné  pour  devise:  Casligai 
ridendo  mores  ?  et  quand  nous  honorons  notre  état  par  nos  mœurs,  lie  soin 
mes  nous  donc  pas  ies  professeurs  de  la  morale]  publique  ?  .) 

J'ignore  si  cette  protestation  fut  écoutée  et  si  la  dame  Charles  obtint  l'au- 
torisation qu'elle  demandait,  mais  le  théâtrede  la  rue  du  Moulin  n'en  ouvrit 
pas  moins. 

En  1803,  il  avait  pour  directeur  Ferville,  fils  de  l'ancien  directeur  du 
Grand-Théâtre.  Le  3  janvier,  les  artistes  du  Chapeau-Rouge  revinrent  à  la 
charge  et  adressèrent  une  pétition  au  Préfet  pour  obtenir  le  privilège  exclu- 
sif du  théâtre  à  Nantes. 

Le  Préfet  demanda  au  Maire  son  avis.  Ce  dernier,  après  avoir  donné  les 
raisons  suivantes,  concluait  au  maintien  des  deux  théâtres. 

»  L'afîluence  de  spectateurs  qu'on  y  remarque  prouve  combien  le  specta- 
cle a  besoin  d'être  conservé  à  Nantes.  L'extrême  éloignement  où  il  est  du 
Grand-Théâtre,  ne  le  rend  pas  nuisible  aux  intérêts  des  directeurs  de  ee  der- 
nier, car  la  majeure  partie  des  spectateurs  qui  se  rendent  aux  Variétés  sont 
les  habitants  de  l'ancienne  ville,  qui  assurent  être  dans  l'intention  de  se 
passer  de  spectacle  s'il  leur  fallait  aller  jusqu'à  la  rue  Rubens  J'ai  remarqué 
souvent,  qu'en  l'absence  de  la  troupe  des  Variétés,  le  nombre  des  specta- 
teurs du  Grand  Théâtre  n'était  pas  plus  fort  que  lorsque  le  petit  théâtre 
était  ouvert.  J'ai  vu  encore  que  les  jours  de  dimanche  et  de  fêtes,  ces  deux 
théâtres  ne  suffisaient  pas,  et  qu'à  chacun  des  deux  on  refusait  de  donner  des 
billets  d'entrée.  » 

La  salle  de  la  rue  du  Moulin  continua  donc  d'être  exploitée  par  Ferville. 
On  y  jouait  surtout  la  grosse  comédie. 

Pottier,  le  futur  artiste  du  Palais-Royal,  fit  ses  premières  armes  vraiment 
sérieuses,  à  ce  théâtre  oîi  il  était  le  favori  du  public. 

A  la  fin  de  l'Empire  et  au  commencement  de  la  Restauration,  beaucoup 
de  concerts  se  donnèrent  dans  cette  salle.  Demouchy,  l^"^  violon-solo  du 
théâtre,  élève  de  Kreutzer,  s'y  fit  entendre  plusieurs  fois  avec  succès. 

Le  fils  du  directeur,  Ferville,  qui  devait  plus  tard  acquérir  une  légitime 
réputation  dans  la  capitale,  remporta,  tout  jeune  encore,  de  vifs  succès  à  la 
salle  de  la  rue  du  Moulin.  Il  garda  toujours  aux  Nantais  une  vive  reconnais 
sance  pour  les  encouragements  qu'ils  lui  prodiguèrent  alors. 

La  salle  de  la  rue  du  Moulin  existai  jusqu'en  1818.  Elle  fut  transformée 
alors  en  un  grand  magasin  d'épicerie.  Dure  décadence  pour  un  théâtre. 


'■'^<'^^'%'WW-9^^^->'^ 


QUATRIEME     PARTIE 
le  la  §(8conslruclion  du  -llrand- jhéâire  à  sa  ^|leslion  par  la  'Mille 

181 3    -    1857 
— — >o:«(p« 

Théâtre  Graslin.  —  Théâtre  des  Variétés. 


I 

DIRECTIONS  :  ARNAUD;  —  BRICE  ;  —  JAUSSERAND 

18ia  —  1820 

La    nouvoUo   snlle.    —   M»»    Pelft.   —  Jaubrrt.   —    Tttbnn.   —    Don    .laan. 

Afi'«  Georges.—  Af'i««  Mars.  —  Jaussemnd.  —  J/""  Lnin„rin  nt  Floriny 

Huny.  —  Boieldieu. 

Ai'OLÉON,  lors  de  son  séjour  à  Nantes,  avait  été  frapp<^  do  la 
tristesse  que  les  ruines  du  Thé^itrc  donnaient  au  ])lus  beau 
V^j  quartier  de  la  ville. 

Le  II  août  1808,  il  signa  le  décret  imiiérial  suivant  : 

Article  premier.  —  La  salle  brûlée  en  l'an  IV  sera  reconstruite  et,  à  ret 
elTet,  la  ville  de  Nantes  est  autorisée  à  ouvrir  un  emprunt  d'une  somme  de 
400.0()0  francs  pour  cette  reconstruction. 

.\rt.  2.  —  La  ville  de  Nantes  e.«ît  autoriser  ;i  tMiuMuiin-r  a  ia  e  ais.se 
d'amortissements,  la  somme  de  400.0(')0  francs  pour  reconstruire  la  salle  de 
spectacle  Notre  ministre  de  l'intérieur  mettra  cette  somme  à  la  disposition 
du  maire  à  mesure  de  l'avancement  des  travaux. 

Art.  3.  —  Cet  emprunt  sera  remboursé  en  six  années  ef  l'intérêt  qui 
courra  à  compter  de  l'époque  de  la  délivrance  faite  par  ladite  Cais.se  en  sera 
payé  à  raison  de  5  0/0  par  an. 

Les  travaux  de  restauration  ne  commencèrent  définitivement  qu'en  1811. 
sous  la  direction  de  Crucy.  Us  furent  activement  poussée  «t.  eu  1813,  la 


H(j  LK   TirÉATRE    A    NANTES 


iiuii\i-llc  ^^;lll<î  fut  prùdj.  Profitant  d.'  l'.\i..rionce  acquise,  Crucy  détruisit 
if  d('sagr«'';iljlo  t':clio  qui  exisUiit  dans  l'ancien  Tln-âtre. 

La  maison  Goisncau,  qui  se  trouvait  adoss<^e  à  la  salle  du  cAté  de  la  rue 
Uuhens  et  qui  avait  été  bruire  en  |m-tie,  lors  de  l'inciindic,  fut  acquise  par 
la  \'illo.  Le  Grand-Tliéatro  fut  ainsi  isolé  de  tous  les  côté<. 

Les  premières  loges  étaient  décorées  des  attributs  de  la  tragédie,  les 
S3Condes  de  ceux  de  la  comédie,  les  troisièmes  de  ceux  de  l'opéra,  les  qua- 
trièmes de  ceux  des  variétés  et  de  la  danse.  Les  galeries  étaient  enricbies 
djins  leur  parcours  d'une  draperie  ornée  de  franges.  Le  pUfond  représentait 
une  coupole  avec  des  caissons  et  des  rosaces.  Les  armes  de  l'Empereur, 
accompagnées  de  deux  génies,  étaient  peintes  au  milieu  de  la  corniclie.  Le 
fond  de  la  salle  était  vert.  Les  soffites  des  loges  étaient  ornées  de  moulures 
et  d'im  tour  de  marbre  .blanc.  Tous  les  ornements  étaient  rehaussés  d'or.  Le 
rideau  était  bleu  et  parsemé  d'abeilles. 

La  décoration  de  la  saHe  avait  été  confiée  à  M.  Coste  ;  elle  coùUi 
:L8f)l)  francs.  Ce  peintre  fit  aussi  pour  2 1.300  francs  de  décors  ainsi  rép;irtis  : 
le  iial'tis,  le  union  brillant,  lu  cfiamhre  de  Moindre,  la  chambre  rustir/ue, 
la  place  pnblifjue,  la  foirt,  le  jardin,  le  hameau. 

La  ville  choisit  comme  directeur,  pour  une  période  de  cinq  années,  M.  Ar- 
naud, premier  comique  du  Chapeau-Rouge;  il  conserva  aussi  cet  emploi  à 
Graslin.  Le  ministre  ratifia  ce  choix,  et  le  préfet  comprenant  qu'une  indem- 
nité était  indispensable  au  diTccteur  pour  mener  à  bien  l'entreprise  du 
(rrand-Tliéàtre,  proposa  ù  la  ville  d'allouer  de  10  à  15.(X3D  francs  par  an,  à 
M.  Arnaud.  Le  Con.seil  réuni,  ne  se  trouva  pas  plusieurs  fois  en  nombre 
suflisanl  jwur  délibérer.  Cependant,  ;'i  l'une  des  réunions,  les  conseillers 
présents  déclarèrent  • 

((.  Qu'à  raison  de  l'utilité  d'un  spectacle  à  Nantes,  la  Ville  avait  fait  pour 
la  reconstruction  d(>  la  .salle  un  emprunt  de40O.O(K>  francs,  qu'ils  pensaient 
que  cet  édifice  devait  être  administré  comme  tous  les  biens  communaux, 
c'est  à  dire  alferiné  au  plus  oifrant  et  dernier  encliérisseur  et  que  ce  n'était 
(lu'après  cette  adjudication  qu'on  pourrait  juger  s'il  était  nécessaire  de  sou- 
tenir l'adjudicataire  dans  son  entreprise.  >» 

Le  Conseil  municipal  ayant  été  réuni  une  cinquième  fois  sans  se  trouver 
en  nombre,  le  Préfet  passa  outre  et  ordonna  qu'une  subvention  de  15. CGC»  fr. 
ser-ait  alloiée  au  directeur.  La  municipalité  ne  se  montra  pas  contente  de 
cette  façon  d'agir  ;  force  lui  fut  cependant  de  courber  la  tète  devant  l'admi- 
nistration supérieure. 

Il  m'a  été  impossible  de  donner  jusqu'ici  les  tableaux  de  troupes  d'une 
fatjon  régulière,  pour  l'excellente  i-aison  que  je  ne  pouvais, la  plupart  du  temps, 
les  retrouver.  A  partir  de  la  réouverture'  de  (iraslin,  j'ai  pu  les  reconstituer 
tous. 


OUVERTURE   DÉt   LA 'WÔUVëLLB  SALLE 


SAISON      1813-1814 
ARNAUD,    Directeur 

VinAt-,    ri'niss.-ur.    —    (Iajon,    chef  d'orobe^tre. 


ui'r;i;A 

MM.   Joseph,  pr»'mi<ire  luutt-rontre; 

jAL'itEKT.  baryton  ; 

])AHii;.s,  iircriiière  basse  taille: 

HuET,  baBSf'-laJile  ; 

EloiI)Evii,i,E.(ieiixii'infhaule-contre; 

F.  LEsr.oT.  dcuxifiiit:  haute  conlrc 

LEr^:vRE,  troigièmc  ténor  ; 

SioNoi.,  trial  ; 

PouoAOD,  laructte  ; 

Saist-Martin,  deuxième  basse; 

lOchaiiti-urs  de  clururs. 
Mmerf  t'Ki.KT,  premién-  chanlpusc, 

HuHOK.ni:,  dii^azon; 

PiEHuoN,  jcuni.'  diiga/on; 

Demouchy,  mère  duga/.on  : 

Lai.aii.i.k,  dui'j^ne. 

M  chanteuses  de  rhn'ur. 


iIlA(iÉI)IK  ET  COMtlilK 

MM.  SouvRAY.  premier  rylo  ; 
DALJa,  ji.'une  premier  : 
Devii.lb,  jeune  amoureux 
Collet,  père  nobl»-  , 
I.ecoLVREUii.  tinani-ii-r  : 
AnNAiD.  premier  comique: 
Aij<it;8TE,  premier  comique  . 
I.BVÉrvRE.  troisième  rftle. 

M'iie»  lUnBiKRE-MKSiKR.  reift«-8; 
I.kt>:llikr,  premiers  rôles  ; 
l>BvtN,  ingénuités  ; 
Lacaillk,  caractères  : 
Arnaup.  soubrettes  ; 
TossiKH,  première  amoureuR.- 


Un  petit  ballet  d'enfants,  sous  la  directirui  de  M.  Spitâillier. 

Voici  quels  étaient  l«»s  prix  dos  places  : 

l'rem:ère8.  loges,  tjaleries.  parquet  et  baignoires,  :{  francs  ;  deuxièmes  loges,  2  Tranés; 
parterre  assis,  troisièmes  loges,  1  fr.  5();  quatrièmes,  1  franc. 

Abonnements.  —  A  l'année  :  Hommes,  U'à)  francs;  Dames,  JIO  fraRCs.  —  An  mois  : 
Hommes,  24  francs  :  Dames,  18  francs. 

Le  thô/ltre,  on  le  voit,  était  bon  marché  en  1813.  A  cette  époque,  lu  saison 
tliédtrale  s'ouvrait  ordinairement  à  la  fin  d'avril  et  se  terminait  à  la  veille  des 
Rameaiix.  T. e  spectacle  commençait,  comme  au  XVIII'  siècle,  à  six  heures. 

Le  mode  de  débuts,  sous  cette  direction  et  sous  les  suivantes,  était  des  plus 
simples  :  les  sifflets  ou  les  applaudissements  décidaient  de  la  réussite  des 
artistes  qui  deraient  subir  trois  épreiii^ffs. 

Le  ;{  mai  1813  eut  lieu  l'inauguration  do  la  nouvelle  salle.  On  joua  Alinf 
et  un  prologue  :  Molière  à  la  nourelle  salle.  Celte  pi«'ce,  due  à  la  plume  de 
M.  de  la  Harpe,  avait  été  écrite  pour  l'ouvertare  de  l'Odéon.  On  l'arrangea 
quelque  pou  ;ifin  qu'elle  piit  servir  a  Nantes. 

Touti'  la  haute  société  nantaise  s'était  donné  rendez  vous  au  théâtre.  Lrs 
loges  resplendissaient.  Crucy  parut  dans  colle  de  la  Mairie  à  côté  de  M.  Ber 
trand-Geslin.  Il  fui  accueilli  par  des  applaudissements  unanimes.  Tout  le 
monde  était  d'aCcord   pour  louer  la  beauté  de  la  salle  et  du  tnonument 
restiiuré. 

La  nôUN-ello  campagne  s'ouvrit  donc  sous  les  meilleurs  auspices. 


88  LE   THÉATKE    A    NANTES 


La  foule  ne  tarda  pas  à  affluer  'i  Graslin.  Tous  les  soirs,  la  salle  était 
pleine  Le  public'.était  heureux  de  posséder  frifin  un  Tlir'àtcf  dif/n<'dc  la  villi'. 

«  C'ritait  alors,  écrit  C.  Mellinot  da/'s  un  feuilletuu  du  lireton,  le  beau 
temps  des  mélodrames,  de  CfiarleH  le  Téni(''raire,  des  ('orheavu- acitinatenrs. 
du  Sif;ge  du  Clocher  et  autres  de  la  même  famille  ;  pour  remplir  la  sali»-,  il 
suffisait  de  mettre  sur  l'affielie  que  MM.  Signol  et  Fontaiue-Lescol  evi'-.;u- 
teraieut  di^grands  combntuà  coupade  /<ac/<e (historique).  Alors,  on  ne  laissait 
pas  une  seule  plaee  à  prendre,  non  seulement  dans  les  loj;t's  et  dans  h-s 
galeries,  mais  dans  les  couloirs,  dans  les  foyers,  sous  le  péristvie,  quoique 
les  places  fussent  à  cinq  francs,  quand  une  afficheàdix  feuilles  énumérait  la 
quantité  de  spectacles  variés,  d'ombres  chinoises  et  de  marionnettes  qui 
composaient  la  Fèie  vénitienne.  » 

Pendant  les  premières  années  de  la  réouverture  de  Graslin,  le  samedi  était 
le  jour  sélect. 

Parmi  les  artistes  d'alors,  on  remarquait  Lefèvre,  dit  Marsias,  qui  faisait 
déjà  partie  de  la  troupe  de  Longo  en  1788.  Il  était  bien  vieux,  bien  cassé, 
mais  il  conservait  encore  certains  restes  de  son  talent  d'autrefois.  Il  était 
devenu  un  jouet  pour  ses  camarades  qui  lui  faisaient  mille  plaisanteries.  L' n 
soir  qu'il  jouait  Thésée  à! Ariane,  un  artiste  s'amusa  à  lui  faire  flamljer  sa 
perruque  de  filasse  ;  une  autre  fois,  dans  la  Vestale^  M'"  Burgère  lui  piqua 
de  longues  épingles  noires  dans  ses  faux  mollets  et  le  pauvre  Lefèvre,  qui 
ne  s'était  aperçu  de  rien,  entra  gravement  en  scène  au  milieu  des  rirea 
de  tous. 

Le  2  septembre  1813,  la  Vestale  fut  brillamment  reprise.  Mi'**  Pelet  qui, 
lors  de  son  arrivée  à  Nantes,  avait  débuté  par  le  rôle  de  Julia,  retrouva  son 
légitime  succès.  Jaubert,  dans  Cinna,  partagea  le  triomphe  de  sa  jeune  par- 
tenaire ;  un  soir  môme,  il  fut  solennellement  couronné  sur  la  scène.  Les 
décors  étaient  entièrement  neufs.  On  remarqua  surtout  la  vue  de  Rome. 
Tous  les  changements  se  firent  à  vue.  Le  rideau  ne  baissa  pas  une  seule 
fois  pendant  l'exécution  de  l'opéra  de  Spontini. 

La  première  représentation  du  Nouveau  Seigneur  du  Village  eut  lieu 
le  21  septembre  ISl.'i  ;  ce  charmant  ouvrage  éprouva  une  chute  à  peu  près 
complète. 

Le  5  octobre,  la  direction  donna  une  représentation  pour  célébrer  la  mé- 
moire de  Grétry.  Le  spectacle  se  c'om])Osait  de  \a  Fausse  magie,  d'Anacréon 
chez  Polycarpe  et  d'une  apothéose  du  comp<jsiteur.  Le  buste  de  l'auteur  de 
Richard,  placé  sur  la  scène,  était  entouré  de  tous  les  artistes  en  grand 
deuil.  A  un  moment  donné,  une  Renommée  descendit  des  frises  et  couronna 
Grétry. 

Le  mois  d'octobre  1813  réservait  aux  Nantais  une  joie  longtemps  attendue  : 
celle  d'entendre  Talma.  Le  grand  tragédien  remporta,  il  est  inutile  de  le 
dite,  un  réritable  triomphe.  Il  joua  successivement  ,.4 n(/roma<yue,  Sémira 


TALMA    A    NANTES  89 


mis,  Afanlins,  Iphi'génin  en  Tanride,  Hamloi,  Britannicus,  les  Temptierê, 
où  il  tint  le  rôle  du  grand-niailre  qu'il  n'avait  pas  encore  joué  à  F^aris, 
Shakespeare  amoureux,  Nicodéme,  Œdipe,  Ninus  II  et  Macbeth.  Camille 
Mellinet,  bien  jeune  alors,  mais  déjà  lancé  dans  le  monde  théâtral,  eut 
l'occasion  do  parler  seul  avec  Talma  et  d'avoir  une  longue  conversation 
aveclui.  Le  futur  auteur  de  la  Commune  et  la  Milice  de  Nantes  a  publié 
cette  conversation  dans  une  brochure  fort  intéressante  et  très  rare  aujour- 
d'hui. On  en  lira  avec  intérêt  quelques  fragments  : 

«  —  Il  me  semble,  lui  dis  je,  qu'en  scène,  l'acteur  s'oublie  complètement, 
pour  s'identifier  avec  le  personnage  qu'il  représente? 

»  —  Cette  croyance,  répondit  Talma,  est  assez  généralement  répandue, 
mais  sans  raison.  Un  acteur  ne  s'oublie  jamais  en  scène  :  il  y  est  toujours 
comédien;  autrement  ce  serait  un  fort  mauvais  comédien  s'il  gesticulait  à 
tort  et  à  travers  suivant  ses  inspirations,  fiît-il  môme  dans  la  position  de  se 
croire  fermement  le  personnage  qu'il  s'est  chargé  de  reproduire. 

»  '■ —  Mais  comment  arriver  à  l'expression  de  la  vérité.  >i  ce  n'est  en  s'ef- 
forçant  d'exister  de  la  vie  même  du  personnage  ? 

»  —  Assurément,  il  faut  cette  vie:  mais  elle  ne  s*iniprovi<e  pas  comme  un 
ornement  dans  un  morceau  de  musique;  et,  encore,  j»}  vous  paraîtrai  trop 
exclusif,  l'improvisation  d'une  seule  phrase  d'agrément  dans  un  air  est  une 
faute  de  la  part  d'un  artiste...  Un  artistequi  tient  à  son  nom. avec  l'ambition 
de  faire  école,  et  nul  n'est  artiste  sans  cette  ambition,  doit  être  sur  de  la 
moindre  expression  de  sa  voix  ou  de  son  g.'stc.  Quant  à  cette  vie  même  du 
personnage,  que  vous  avez  raison  d'exiirer  dans  le  connKiien,  ce  n'est  pas 
l'improvisation,  l'entraînement,  où,  comme  disent  certains  aristiirques. 
l'abandon  qui  la  communique,  c'est  l'étude....  La  plus  forte  critique  d'un 
acteur  est  celle  qui  proclame  son  abandon  :  voilà  pourtant  le  grand  éloge 
de  vos  journaux,  éloge  bien  irréfléchi.  » 

Voici  maintenant  des  détails  sur  la  façon  de  travailler  de  Talma  : 

((  Je  relis  donc  encore,  je  me  pénètre  du  {personnage  et  de  son  entourage. 
Ayant  ainsi  examiné  à  fond  la  coniexture  de  la  pièce,  je  m'elForee  d'imposer 
silence  à  mon  imagination,  afin  (|u'elle  ne  remplace  pas  la  réalité.  Alors,  si 
mon  héros  est  (îrec  ou  Romain,  je  me  promène  dans  les  musées,  j'étudie  les 
médailles,  j'examine  les  statues,  je  note  celles  que  je  dois  plus  spécialement 
consulter.  Mon  étude  suivante  consiste  dans  les  écrivains  de  l'époque  :  je 
les  lis,  je  les  médite,  j'y  prends  mon  personnage  extérieur  dans  les  actes  de 
son  existence  publique,  heureux  quand  quelques  précieuses  p;iges  m'initient 
à  sa  vie  privée.  Kn  ces  moments  aucune  autre  pensée  ne  me  peut  saisir  : 
celle  de  mon  personnage  m'accompagne  et  m'occupe  p;irlout.  Aussitôt  que 
je  crois  l'avoir  compris  avec  les  éiîrivains,  je  retourne  aux  médailles,  aux 
dessins,  aux  statuts  qui  le  représentent;  j'en  calcule,  j'en  imite  les  diverses 
positions  ;  en  quelque  lieu  que  j'aille,  sans  y  songer,  je  me  pose  comme  mon 
héros  ;  il  est  toujours  avec  moi.  J'ai  vécu  dans  une  autre  vie  que  la  mienne. 
Après  cela  seulement,  rap|M^lant  a  moi  toute  mou  imagination,  jxirce  que  l'é- 
tude est  désormais  assez  forte  pour  l'éclairer  si  elle  s'égiire,  j'esj)ère  faire  revi- 
vre sur  la  scène  le  personnage  lui  même  avec  son  costume,  sa  physionomie,  ses 
gestes:  je  dirais  presque  avec  son  accent,  ou,  au  moins,  avec  ses  intentions 

19 


90  LE  THEATRE   A    NANTES 


(''Vidantes  dans  la  situation  où  l'auteur  l'a  [Ancé  :  c'est  là  mon  étude  préli- 
minaire. » 

Mftllinet  lui  ayant  demandé  quelle  était  sa  pièce  de  prédilection,  le  prand 
tragédien  lui  répondit  : 

«  —  Nicodème!  je  le  dis  sans  balancer,  Nicodème,  œuvre  de  vraie  grandeur 

théâtrale,  œuvre  brillante  de  vigueur  réelle  et  non  de  ce  gigantesque,  de  ce 
clinquant,  de  cette  enflure  qui  en  tiennent  souvent  lieu,  remarquable  par 
cette  puissante  et  vive  ironie  qui  donne  un  earaeU'-rc  si  remarquable  au  héros 
de  Corneille,  œuvre  d'un  tragique  sublime  et  tout  entier  dans  la  nature.  » 

La  conversation,  à  un  moment,  tomba  sur  Goethe  et  ses  ouvrages  : 

«  —  Oui,  Fau.si  !...  oui,  vous  avez  raison.  Quel  beau  rôle  à  créer!  Mais 
pour  conserver  la  grande  conception  de  Gœthe  dans  toute  sa  philosophie, 
(|uel  écrivain  français  serait  assez  indépendant  pour  garder  et  offrir,  sans 
nuire  à  la  pièce  allemande,  ce  que  notre  public  et  surtout  nos  auteurs  et  nos 
aristarques  y  appelleraient  puérilités,  choses  oiseuses,  détails  niais,  etc... 
Le  dochîur  Faust  !...  A  ce  nom,  Talma  s'arrêta  un  instant  en  {jortant  la 
main  à  son  front...  Il  continua:  Faust!  oui,  ce  serait  une  admirable  créa- 
tion pour  moi...  Je  n'y  ai  jamais  songé...  Que  de  vérités  nouvelles  à  y  dire 
à  notre  public  blasé...  Pourquoi  ne  suis-je  qu'acteur  >"  Que  je  con(;ois  bien 
Molière,  comédien,  Molière  le  plus  profond  des  écrivains  dramatiques  de 
tous  les  peuples...  Peut-être  je  voudrais  Faust  plus  positif  que  ne  l'a  fait 
Goethe,  moins  lancé  dans  les  espaces  imaginaires  où  l'a  jeté  l'auteur  alle- 
mand :  d'ailleurs,  si  l'on  s'avisait  de  le  laisser  ainsi,  l'Empereur  ferait 
tomber  l'auteur  sous  son  fatal  nom  d'idéologue...  En  définitive,  il  ne  laisse- 
rait pas  jouer  Faust. 

—  NLiis  Egmont  t 

—  Il  s'y  trouve,  en  efïet,  des  scènes  délicieuses.  Cet  amour  de  grisette  si 
pur  et  tout  d'abandon,  l'amour  de  cette  charmante  Claire,  si  aimante,  si 
dé\ouée.  Et  croyez-le  bien,  ce  n'est  pas  là  un  caractère  idéal  :  combien  de 
nos  jeunes  filles  du  peuple,  séduites,  ont  la  même  tendresse  pour  leurs 
séducteurs  !...  Combien  ai-je  vu.  Monsieur,  de  dévouements  de  ce  genre 
dans  notre  Révolution...  Mais  ne  songeons  pas  plus  à  Eqmont  qu'à  Ftiust. 
L'Empereur  ne  souffrirait  pas  les  premières  scènes  d'Epmont,  ces  conci- 
liabules populaires  sur  la  place  publique,  empreints  de  trop  de  vérité 
positive...  Or,  ces  scènes,  quelle  main  barbare  oserait  les  mutiler?  Que 
ferait  on  d'ailleurs  du  tableau  du  songe,  de  cet  appel  à  la  liberté  avec  le 
bonnet  phrygien?...  Non,  non  :  j'en  reviens  à  mon  idée  dominante  :  de  nou- 
veaux essais  au  théâtre  ne  peuvent  désormais  se  tenter  que  par  une  nouvelle 
génération  d'écrivains.  La  mission  de  nos  auteurs  aujourd'hui  en  vogue  a 
été  de  régénérer  le  goût,  de  ramener  la  langue  à  la  pureté  du  siècle  de 
Louis  Xl\'.  ils  l'ont  remplie,  cette  mission;  ils  l'ont  remplie  peut  être  avec 
trop  de  scrvilitt',  d'imitation,  à  des  exceptions  près;  mais,  après  cela,  le 
maître  le  voulait  ainsi  :  c'était  la  volonté  de  l'Empereur.  Les  auteurs  la 
subissent  comme  le  peuple  :  ils  vivent  en  écrivant  sous  son  inspiration  dans 
notre  belle  France,  comme  le  peui>lc  va  mourir  sur  la  terre  étrangère  en 
criant:   Vire  L'Empereur  ! 

—  Mais,  Monsieur,  je  vous  croyais  admirateur  enthousiaste  de  l'Empe- 
reur...  Et  n'est  ce  i)as  une  mort  glorieuse  et  désirée  que  celle  trouvée  ><iir 


TALMA   A   NANTES  01 


un  champ  de  victoire,  dis-je  à  Talma  avec  le  ton  d'un  reproche  de  jeune 


h  rren. 


—  Oui,  oui,  assurénioiit,  répondit  froidement  Talma,  l'Empereur  est  un 

ind  homme,  et  j'en  suis  l'admirateur  sincère.. ..Mais  ]«•  suis  aussi  un  peu 

comm<'  tout  h-  monde,  je  reconnais  la  nécessité  d'ime  halte...  Toutefois,  avec 

jnes  affections  et  votre  cntiiou.siasmc  déjeune;  homme,  quoique  nous  soyons 

d'accord  sur  le  personnage  principal,  c'est  un  sujet  brûlant...  » 

M"«  Levert,  de  la  Comédie-Franc^aise,  et  Philippe,  du  Vaudeville,  vinrent 
en  représentations,  pendant  la  saison  1813  1814. 

La  question  de  la  subvention  se  posa  encore  au  Conseil  au  sujet  de  la 
campagne  1814-1815.  La  municipalité  adressa  la  réclamation  suivante  à 
l'administration  supérieure. 

«  Si  le  sol  et  l'édifice  de  la  salle  de  spectacle  appartiennent  à  la  Commune, 
comment  se  fait-il  que  les  revenus  lui  en  aient  été  enlevés  pendant  cinq 
ans  pour  en  gratifier  un  directeur'.^  Comment  se  fait-il  que,  malgré  l'avis  du 
conseil  municipal,  ce  direct«'ur  reçoive  de  la  commune,  [vir  forme  d'indem- 
nité, une  somme  annuelle  de  l.").(XX)  francs.?  Comment  se  fait-il  que,  privée 
de  sa  propriété  et  payant  à  celui  qui  en  dispose  l.'i.lXX)  fr.  par  an.  la  Com- 
mune soit  assujetie  aux  réparations  de  cet  édifice,  au  paiement  de  la  contri- 
bution, à  l'acquit  de  4  )O.tX)0  fr.  empruntés  pour  la  reconstruction  de  la 
salle  et  des  intérêts  de  celte  somnuî*.'*  Comment  se  fait-il  ijue  la  Commune 
»oit  enroro  ohligée  de  dépenser  une  somme  de  l.'iD.lKK)  fr.  pour  la  construc- 
tion de  deux  salles  de  hal  et  de  concert  dont  le  directeur  doit  encore  aroir 
la  Jouissance  f/ratuite  ï'  Tontes  les  lois  sur  la  propriété  ont  été  violées  dans 
cette  cireonstinee.  Jusqu'à  présent  on  a  dédaigné  de  prononcer  sur  notre 
juste  réclamation,  et  le  directeur  n'en  a  pas  moins  touehé  son  indemnité. 
Nf .  le  maire  est  chargé  de  la  ren<tuveler  à  celui  des  conseils  du  roi  comj)é- 
tent  pour  prononcer  l'annulation  des  actes  illégaux.  Qui  peut  douti^r  qu'elle 
sera  accueillie,  surtout  si  l'on  fait  attention  que  la  classe  malheureuse  mur- 
mure du  poids  de  l'octroi  dont  ui.e  partie  du  produit  est  sacrifiée  à  la  fortune 
d'un  individu  et  au  plaisir  de  la  classe  aisée.  » 

Pourtant,  le  29  mai  1814,  le  Conseil  votii  au  directeur  12.000  francs  d'in- 
(liMunité,  considérant  : 

((  Que  le  speetaele  est  un  ohjet  (i'utiliie  puhli({ne;  <(ue  >ou>  le  rap|»ori  p.ih- 
titjne  il  serait  dangereux  de  le  sus|)rndre,  et  (|ue  les  recettes  «lu  direrf««ur 
sont  infiniment  faihl<>9,  mais  sans  (jnecette  allocation  puisse  êtr-  réc 

connue  étant  faite  en  exécution  du  traité  attaqué,  le  maire  étant  <  la- 

tivement  de  se  ponrvoir,  au  nom  de  la  Commune,  au  Conseil  d'Eial,  pour 
faire  annuler  ledit  traité,  etc.  » 

Le  ministre  ne  trouva  pas  cette  somm<-  >umi-  un.-  ii,  ddili. .-,  ii  ^nnn  a 
!.').(  H  H)  francs. 

\  |>art  quelques  changements,  la  troupe,  pour  la  .seconde  année  de  la 
direction  .\rnaud.  éuiit  la  même  que  celle  de  la  première. 


92 


LE  THÉÂTRE   A    NANTES 


SAISON   1814-1815 


ARNAUD.  Directeur 


VinAî,,  régisseur.  —  Cajon,  chef  d'orcheslrc. 


OPÉRA 
M.M.    Jo-SEPH,  première  haute-contre; 
(loYON,  preniif-re  haule-contrc  ; 
Fo.NTAiNE-I.EScoT,  dcuxIème  haute- 
contre. 
jAuiiicnT,  Martin  ; 
HuET,  première  liasse-taiili'  ; 
Darius,  première  basse-taille  ; 
Lefkvre,  rôles  de  pères  : 
SiGNQL,  trial  ; 
PouoAUD,  laruette  : 
Lhahkt,  troisième  basse. 

M"'*s    LuiiiR-ScHREUTZKR,  première  chan- 
teuse. 

BuRdftRE,  dugazon  ; 

PiERsoN,  dugazon  ; 

Lacaili.k.  duègne  ; 

(JoYON,  mère  dugazon. 


COMÉDIK-TRAGÉDIE 

MM.    SouvRAY.  premier  rôle  ; 
Picard,  jeune  premiej;; 
Collet,  père  noble  : 
Lecouvreur,  financier; 
Arnaud,  premier  comique  : 
PouoAUD,  premier  comiiiue  ; 
Auguste,  deuxième  comique 
Skjnol,  deuxième  comique  ; 
Lkkèvre,  troisième  comique  : 
BizET,  utilités. 

M^'s    Leteli.ier.  premier  rôle  ; 
Devin,  jeune  j)remière  : 
Lacaim.k,  cai-aclère; 
GoYON,  mère  noble  ; 
Arnaud,  soubrette  : 
Mayeux,  troisième  amoureuse. 


Le  17  m;ii  1814,  on  joua  au  théâtre  Graslin,  «  à  l'occasion  île  la  paix 
générale  »  une  comédie  de  Victor  Mangin  père,  intitulée  La  Bonnr  r>oiirpl/>' 
de  l'heureuse  Journée. 

Mozart  eut  les  honneurs  de  cette  saison.  En  effet,  ce  fut  le  14  novembre  1814 
que  l'immortel  Don  Juan  fit  sa  première  apparition  sur  la  scène  nantaiso. 
Le  croirait-oii,  ce  cht'f  d'œuvre  passa  presque  in;iperçu  pour  les  journaux 
du  temps  ?  Le  Journal  de  Nantes  se  borne  à  dire  que  «  le  luxe  des  décora- 
tions égale  celui  de  la  musique.  »  Les  Mt/stères  d'Isis,  interprétés  à  la  per- 
fection par  M'"*^^  Pelet  et  Jaubert,  furent  jouéb  le  2  mars  1815.  Cet  opéra 
était  bien  monté,  lui  aussi.  Cette  année  on  représenta  encore  Joconde,  de 
Nicolo. 

En  m;irs,  notre  compatriote  Boullant  fit  jouer  un  drame  intitulé  Bèlisaire 
Ce  fut  l'auteur  lui-même  iiui  parhi  de  s;i  pièce  dans  le  Journal  de  Xantes. 
Dans  son  article,  il  remercie  le  public  du  succès  fait  à.son  œuvre. 

Sous  la  première  Restauration,  il  fallut  supprimer  les  aigles  romaines 
dans  la  Veaiale,  car  elles  ne  pouvaient  plus  paraître  sans  être  acclamées. 

Le  retour  de  Napoléon  fut  fêté,  le  25  mars  1815,  au  Grand-Théâtre,  d'une 
façon  toute  particulière.  Un  intermède  fut  joué  entre  la  Vestale  et  Lea  ïiabi 
tantadcii  Landes. 

«  Le  foiul  de  la  scène,  dit  le  Journal  de  Xantes,  reprt'sente  ime 
brilhmte  ilhuuin;ition  ;  des  groupes  de  peuple  g;irnissaient  les  deux 
côtés  ;  à  droite  de  l'acteur,  en  face  de  la  loge  de  M.  le  général,  on  avait  placé 


niRRrrioN  arnati» 


o:{ 


l'aiglo  iinporialo,  r^iir  les  militaire.»  du  61'  avaient  roiiserxé  coiunie  \omv 
jinltadiniii,  dans  k'ur  caséine.  Des  troupes  françaises,  avec  armes  et  ba^a^es 
cl  décorées  do  branches  de  lauriers  arrivent  avec  leurs  drapeaux  et  leurs 
aigles  ;  elles  sont  re<,ues  par  les  lKil)it;ints  avec  la  joie  qu'exciie  la  présence 
dcK  braves  cl  celle  (le  savoir  le  vaiiif|ucur  d'Ansferlitz  et  d'Icna.  rev«^tu  de 
la  pourpre  impériale  et  remonté  sur  le  trône  où  l'avait  appelé  la  nation  et 
l'armée.  Les  spectat<'urs.  à  l'entrée  des  aigles  ont  prolongé  leurs  applaudis- 
sements, parmi  lesquels  on  distinguait  de  noml)reux  «-ris  de  :  «  Vive 
l'Empereur.  » 

Pendant  cette  saison,  plusieurs  artistes  de  l'aris  vinrent  à  Nantes. Citons: 
M"'  Georges,  accueillie  avec  fa\eur  dans  ^lerope,  Phèdre,  Iphigrnie  en 
AuUde,  Didon,  dahrieUe  de  Verr/i/,  //orare,  Jinjaset,  Sémiramis,  Méder; 
Lafond,  de  la  Comédie-Française,  applaudi  surtout  dans  le  Cid  ; 
M''"  Regnault,  de  l'Opéra,  qui  possédait  une  voix  exquise;  enfin  Lavigne» 
qui  produisit  beaucoup  d'effet  dans  VlD/iir/énie  en  Tauride  de  Gliick. 


La  subvention  fut  maintenue  par  VV.IaX  au  chillre  de  15. (KH)  francs  pour  la 
troisième  année  de  la  direction  Arnaud. 


SAISON    1815-1816 

ARNAUD,   Directeur 

Vu>AL.  régis.seur.   —  Cajon,  chof  d'ûrihestn- 


OPfiHA 

MM.    PoNCHAHD,  première  hanle-conlrf  : 
Casskl,  Martin  : 

FONTAINK    LkSCOT.   ilcil\i''iii">    linil.. 

contre  ; 
lIuKT,  basse-taillc  : 
Leroux,  ba.sse-taille  ; 
(IiKuLEi.M,  lariK'tte  ; 
AudUSTE,  trial  ; 
LKKfcVRK,  pères  : 
Ric.yuiER.  troi.sièmo  ba^se. 
M""'    SaixtJames,  «'liantt'use  à  roulades 
RuRt'.KRB,  du^'azoïi  ; 
PiER.soN,  dtiitnzon  ; 
Lacaillk,  duègne  ; 
CiFOLELi.',  Iroi-sièmc  ciianleuse. 


COMÉDIE  el  THAGÉDIi: 

MM.   .Sot  VRAV,  premier  plie  . 

Picard,  jfune  premier  ; 

Saint-Fran<-..  père  noide  : 

('iFOLKLLt,  linancii-rs  : 

.\RNAf  D,  premier  c«imi<pie  . 

Auguste,  deuxième  comique  , 

Chapus,  deuxième  amoureux 

Lefèvre,  troi.sième  rAIe  : 

RiOOiKR.  utilités. 
M-"    LoiiK  GHAfCs,  premier  rôle  : 

1")evi>,  jeune  première: 

('iKOLKLLi.  deuxième  amoureuse 

Lacaii.le,  caractère . 

Pir.ciM,  nière  noble  ; 

AnsAUi»,  soubrette. 


Dans  cotte  troupe  on  remarquait  Ponchard,  qui  sortait  du  Conservatoire, 
el  qui,  dans  Joseph,  obtint  de  véritables  triomphes. 

M'"  Saint-James  avait  paru,  jadis,  à  (iraslin  lors  de  l'ouverture  de  la  pre 
mi^re  salle.  Mlle  avait  laissé,  à  Nantes,  les  meilleurs  souvenirs.  Quoi  qu'elle 
eût  encore  conservé  de  rares  qualités,  et  notamment  une  voix  d'une  éton 
nantc  étendue,  elle  éprouva  une  vive  opposition  de  la  piirt  d'une  certaine 


90 


IH  LE  THÉATHE  A   NANTES 


partie  du  public.  On  prclendait  que  cette  artiste  (Hait  a  la  fin  de  sa  carrière. 
Arnaud  fut  donc  obligé  de  remplacer  M"=  Saint-James.  Ct*  fut  une  jeune 
chanteuse,  douée  d'une  voix  très  fraîche,  M"*  Marido  qui  lui  succéda. 

La  jeune  prcniif'ire  de  la  troupe  de  comédie,  M"'  Devin,  possédait  un  réel 
tah'iit.  Le  Tliéâtrt'- Français  m;  tarda  pas  à  l'engager  (.omme  pensionnaire. 

M"*  Pelet  se  retira,  cette  année,  du  théâtre.  Elle  se  fixa  à  Nantes  comme 
|)rofes.seur  de  chant.  «  La  môme  estime  qui  n'avait  cessé  de  l'entourer  au 
théâtre,  dit  Mellinet  dans  la  Mimique  à  Nantes,  l'accompagna  dans  b- 
monde.  » 

Le  12  août  1815,  le  duc  de  Bourbon,  de  passage  à  Nantes,  assista  à  une 
représentation.  Naturellement,  on  chanta  en  l'honneur  du  prince  les  couplets 
obligatoires.  Blanchard  de  la  Musse,  dont  la  plume  louait,  tour  à  tour. 
Napoléon  et  les  Bourbons  avec  le  même  enthousiasme,  confectionna  la 
poésie  de  circonstiincc. 

Voici  un  couplet  de  cette  piètre  élucubration. 

Air  de  RICHARD 

Et  ziij  et  zog 
Kt  fric  et  fi'or 

Oui  jurons 
Foi  de  Bri'toiit! 
D'aimer  toi'.iours  les  Jiouritnus 

V.n  entendant  ces  vers,  Son  Altesse  se  leva,  salua  la  salle  et  dit  au  préfet: 
((  Assurez  bien  les  Nantais  que  nous  jurons,  foi  de  Bourbons,  d'aimer  tou- 
jours les  Bretons.  » 

Dans  le  courant  d'avril  1816,  Talma  revint  à  Nantes.  Il  fut  accueilli  avec 
lo  même  enthousiasme  que  quatre  ans  auparavant,  Il  joua  successivement  : 
Iphigénie,  Manlius,  RJiadamiste ,  Gabrielle  de  Vergij,  Coriolan,  fes 
Templiers,  la  Mort  d'Hector,  Hamlet,  Britannicns,  Polyeucte  et  Abufar. 

Dans  le  courant  de  cette  saison,  à  lyie  représentation  de  VAbbé-de-l'Epér, 
ce  fut  un  sourd-muet  de  naissance  qui  joua  le  rôle  de  Théodore.  La  public 
fut  très  impressionné  jiar  cette  interprétation  d'une  saisissante  vérité. 


SAISON   1816-1817 
ARNAUD.  Directeur 

Vidal,  rogis-scur.  —  Dkmouchy.  cliof  d'orchestre 


OPÉRA 
.MM.    RoRDKs,  pieiuiiTo  haute-r<inlri' : 
MoNR.visiN,  haule-conlrp  : 
\VEXca.«.  .Martin  : 


HuKT.  premièro  bass<'t.iille  ; 
LbuoulI:;,  deuxii>inf  b:>-<s. -i  .il 
SioNOL,  trial; 
Auguste,  laruette. 


luîmes  THIBAULT   ET  FOULQUIER  —  POTTIER 


—    xill'î 


M'»''  MARS 


9.'. 


.Mi»'.v    KoL'LQUiER,  première  clianteusc  ; 
'l'mnAULT,  forti^  chaiiteus*-: 
PiKhKON.  (lu^rnzon  ; 
MuMUisTN,  travi'stia. 
13KMOUCHY,  jeune  aDiourcutic  ; 
Pk:cini,  mèff  diiga/.on  : 

UKHUSSAf.,  duèglir. 

COMÉUIK  .t  THA<iI-:DIK 

X.M.  Valmore.  premier  1  Ole  ; 
Picard,  jeune  jimiiii-r  ; 
Saint-P'kanv.,  père  noble  : 


Cauvis,  linancier  : 
Arnaud,  premier  comique  ; 
Auguste,  deuxième  comique  ; 
SioNOL.  deuxième  comique  ; 
(JuAi'US.  troisième  rôle; 
Kiouibr.  <leuxièrae  père,  conlident, 

M-'s   Chapos,  premier  rôle  ; 
Devis,  jeune  premier»; 
.MtiNRAisiN.  seconde  a mour<fuse  ; 
Arxald,  soubrette  ; 
Deiiêssa).,  ciiraclère  ; 
PirciMi,  mère  noble. 


Chœur»  18  personnes  :  n  hommes,  n  femme.<«. 


i^f  prosjtecdis  (k-  l;i  n.u.soii  1810-17  iikIkhk?  (ju  u  fi;in  jx'niiis  :iii\  ,tt»jiiné« 
(le  conduire  une  parente  aux  priMuirres  avec  un  billet  de  secondes.  Cette 
faveur  fut  abolie  en  1821. 

M'''^  Devin,  après  avoir  passé  un  an  aux  Français,  revint  à  Graslin.  où  le 
|)ublic  la  revit  avec  le  plus  vif  |)laisir. 

Les  doux  premières  chaiit^nises,  M'»8>  Thibault  et  Foulquier  étaitiit 
(louées  de  fort  belles  voix.  En  outre  M™«  Thibault  ét;iit  très  jolie  femme,  »t 
fît  tourner  bien  des  têtes. 

Pottier,  qui  avait  jadis  joué  au  lliéairc  de  la  rue  du  Moulin,  et  qui  faisait 
ilors  les  beaux  jours  du  Palais-Roy:il,  vint  donner  des  représentations  au 
•  irand-Thédtre.  Le  premier  soir  qu'il  joua,  il  chanta  le  couplet  suivant  : 

Ici  (l'un  talent  faible  encor, 

Jr  fis  Vhturetix  apprentissage. 

Enhardi  par  votre  suffrage 

Vers  Paris  je  pris  mon  essor. 

Si  chaque  jour  an  tn' encourage. 

En  applnudissant  >iies  essais. 

C'est  d'après  votre  témoignage. 

Et  mon  honheur  est  votre  ouerage, 

i'our  vu^riter  d'autres  succès, 

Ches  tous  je  viens  Jaire  un  voyage. 

Deraouojiy,  premier  violon-solo,  devait  succéder,  cette  ajiuée,  à  Cajoo,  qui, 
pendant  de  longues  années,  avait  dirigé,  avec  une  rare  fermeté,  l'orchestre 
(lu  Grand-Théâtre.  Kn  juillet  18H).  on  donna  au  bénéfice  du  nouveau  <hef 
la  première  rcprôsentiition  du  liosaif/noL  Cette  ineptie  musicale  eut  un 
^uccès  inouï.  M"''  Thibault  était  charmante  dans  Philis  dont  elle  qarrfnuil- 
Inda  le  r6ic  à  la  perfection. 

Les  amateurs  d'art  S('rieux  purent  se  consoler  eu  ecoutani  M''»  Mars  qui 

'[ui  vint  en  août.  L'illustie  comédienne  joua  Le  Misanthrope.  Les  Fans.^e.s 

onfidences,  Tartuffe,  Les  Jeux  de  CA  mour  et  du  ffanard.  Les  Deux  Frérea. 

L'Intrigue  épistolaire.  Les  Trois  Sultanes,  Madame  de  Sècigné,  La  Co- 


îm; 


LK    THKATHE    A    NaNTKS 


qupJtfrorrl;,ro,  La  .h-um-Hne  d'Henri  I\\  Calh^rine,  Lo  PhUo^ophf  manr. 
Lr  /{orhier  >h  Séoille,  Le  Secnt  du  invna;ic,  La  P'aunne  A;,nès,  La  Partir 
de  r/w.sse  de  Henri  IV.  La  .lenno  femwe  colère,  La  Gayeure  imprécue, 
La  Comédienne.  \.e  Mariage  de  Fifinro.  La  AUre  snppo.Hee,  L'Eprmrr 
noiirel/e. 

M"«  Mars  suscita  lo  mérac;  cnlhousiasine  qur  Talma.  La  ^allf  ne  désein- 
plissaif  pas.  Apn-s  uiw  représmlation  des  Trois  Su/ianes,  on  «hanfa  df- 
roiiplets  on  son  honneur,  tout  comme  à  une  Alr<'....  Impériale  ou  Rovale. 

Voici  l"iiii  (les  couplets  : 

Ah  :  .sous  les  traits  ih-  Rnxi'lune 
Qui  n'aimerait  pas  à  la  voir  : 
Tes  rharnifis,  aimable  Sultane, 
Partout  exercent  leur  pouvoir. 
Que  dis-je  f  Même  un  seul  sourire 
Tnssun;  un  rspoir  bien  doux 
Soliman  tombe  à  tes  genoux 
Et  nous  partageons  son  rUlire. 

A  la  fin  du  spectacle  l'orchestre  alla  donner  une  Sf'icnadc  sous  le>  fenêtres 
de  M"-  Mars.  Le  Journal  de  Nantes  publia  aussi  en  son  honneur  le  qua 

train  suivant  : 

Comment  un  nom  cher  nu  courage 
T'appartient- il  objet  charmant  ? 
("est  que  Vénus  par  badinage 
A  pris  le  nom  de  son  amant. 

M'i»  Mars  venait  à  peine  de  quitter  Nantes  que  Dérivis,  l'excellente  basse 
de  l'Opéra,  arriva  donner  une  série  de  représentations.  Son  plus  grand 
succès  fut  Œdipe  à  Colonne,  où,  à  côté  de  Im',  M"«  Thibault  se  fit  vive- 
ment applaudir  dans  Antigone. 

M"«  Petit,  des  Français  ;  Clozel,  de  l'Odéon  ;  Honoré,  des  Variétés, 
jouèrent  aussi  àGraslin  pendant  la  saison  1816-1817. 

Le  18  décembre  1816,  Arnaud  demanda  à  la  Ville  la  pern.ission  de  céder 
son  privilège  à  un  certain  ^L  de  Rauchoup.  L'administration  refusa.  Dans 
la  même  séance,  la  subvention  de  15.000  francs  proposée  pour  la  saison 
1817-1818  ne  fut  pas  votée. 

Arnaud  (jui  luttait  avec  courage  et  habileU-  depuis  trois  ans  contre  la 
mauvaise  chance,  fit  faillite  en  mars  1817.  Les  trois  premiers  mois  de  l'ou- 
verlure  de  la  salle  avaient  été  très  brillants;  mais,  à  l'entrée  des  troupes 
étrangères,  les  recettes  avaient  baissé  considérablement  ;  les  quelques  repré- 
sentations fructueuses  produites  par  les  artistes  en  représenUitions  ne 
pouvaient  suffire  à  combler  le  déficit.  La  direction  coûtait  à  Arnaud 
:{0.:U4  francs,  somme  à  laquelle  il  fallait  ajouter  ','2.084  francs  de  déror> 
laivsétf  à  la  Ville  et  27. 1".)7  francs  d'habillements,  d'armes  et  de  musique. 


DIRECTION  ARNAUD  —  LA  PAH-LITE  97 

Arnaud  était  un  honnête  lionmif  ;on  finit  par  s'en  a  j)crcevoir,  mais,  au  premier 
moment  on  déversa  sur  lui  un  torrent  d'injures.  Sa  conscience  se  révolta  et 
il  publia  la  lettre  suivante  : 

«  Au  public  de  Nantes. 

«  Accablé  depuis  quelques  jours  sous  le  poids  des  calomnies  les  plus  noires, 
j'ai  eu  l'honneur  de  demandera  M.  le  Préfet,  à  M.  le  Maire  et  a  M.  le  Pro- 
cureur du  roi,  de  faire  faire  Vcnf/urte  In  plus  m-cère  sur  ma  gestion,  et  j'ai 
offert  de  me  constituer  prisonnier  jusqu'à  ce  que  l'on  soit  pleinement 
convaincu  que  l'on  ne  peut  m'accuser  de  malversation  !  Ma  eonseienee  est 
pure,  je  le  dis  arec  assurance,  j'ai  toujours  été  honnête  homme  et  n'ai 
d'autre  tort  à  me  reprocher  que  celui  d'avoir  voulu  lutter  contre  les  circons- 
tances !...  Je  l'expie  bien  cruellement!  Je  supplie  le  publie  de  vouloir  bien 
suspendre  tout  ju^'ement  sur  moi  jusqu'à  ce  que  les  personnes  chargées 
d'examiner  mes  comptes  puissent  attester  ma  bonne  ou  ma  mauvaise 
volonté. 

((  Mon  épouse  et  moi  sortons  de  Nantes  dépouillés  de  tout  ce  que  nous 
possédions,  de  tout  absolument  de  ce  que  nous  avions  acquis  par  notre 
travail,  notre  économie  et  notre  conduite  irréprochable  dans  tout  pays. 

((  Qu'il  nous  reste  au  moins  l'estime  des  honnêtes  gens  et  que  l'on  ne  puisse 
dire  de  nous  autre  chose,  sinon  qu'i7.s  ont  été  malheureux  !  Cette  assurance 
adoucira  notre  terrible  situation. 

«  Beaucoup  de  personnes  soulFrent  de  nos  malheurs,  c'est  là  mon  désespoir, 
mais  il  n'y  a  pas  de  ma  faute,  je  peux  l'attester  devant  Dieu  et  devant  les 
hommes. 

<(  J'ai  l'honneur  d'être,  avec  le  plus  profond  respect, 

Arnaud.  » 

Malgré  le  ton  un  peu  déclamatoire  de  cette  défense,  on  sent  qu'Arnaud 
dit  la  vérité. 

Arnaud  n'avait  rien  négligé  pour  donner  au  Théâtre  le  plus  d'éclat  possible. 
Talma,  M""  Mars,  M"'  (ieorges  avaient  été  appelés  par  lui  à  Nantes  ;  toutes 
ses  troupes  offraient  d'excellents  éléments  qu'il  savait  employer  avec  beau- 
coup d'habileté.  C'est  certainement  l'un  des  meilleurs  directeurs  qucGraslin 
ait  possédés.  Si  la  subvention  avait  été  plus  élevée,  il  aurait  pu  sûrement 
tenir  tous  ses  engagements.  Malheureusement,  la  Ville  n'avait  pas  ouvert 
les  yeux  et  ne  croyait  pas  encore  à  la  nécessité  de  soutenir  le  directeur. 

Les  artistes  se  réunirent  en  société  pour  terminer  la  c^impagne  qui  n'avait 
plus  qu'un  mois  à  courir,  et  la  municipalité  choisit  comme  directeur,  pour 
la  saison  suivante,  un  baryton  de  valeur,  Brice,  sur.  qui  Camille  Mcllinet 
porte  le  jugement  suivant,  dans  wne  lettre  inédite,  qui  m'a  été  communiquée 
par  son  frère,  le  vaillant  général  Mcllinet,  avec  celte  amabilité  exquise  dont 
il  avait  le  secret  : 

((  M.  Bricc  pus^ciir.  a  iiinii  .i\  i-,  un  talent  bien  rnrc  :  celui  de  broder, 
d'embellir  la  musique  du  compDsileurjSans  la  déi»alurer;  on  ue  chante  pas 

21 


98 


LE    THéATRB   A    NAMTBS 


une  romance  d'une  manière  plua  ravissante,  on  ne  rend  pas  l'expreaiiou 
musicale  avec  plus  d'âme  et  plus  de  sentiment.  Enfin,  on  ne  fait  pas  mieui 
sentir  les  productions  de  nos  grands  maîtres.  » 


SAISON     1817-1818 
BRIOB,  Directeur 

Dkmouchv.  chef  d'orchestre.  —  Vidal,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.   I.AriTTE.  première  haute-conlie. 

Brice,  Martin. 

Pons,  deuxième  haute-contre. 

Mas,son,  Philippe  et  Gavaudan. 

Dopuis,  première  basse-taille. 

Lkc.hkvalier,  seconde  basse-taille. 

Floricourt,  trial. 

Saint-Martin,  laruette. 
M">'«  Thibault,  première  chanteuse. 

BossAND,  première  dugazon. 

Saint-Laurent,  première  dugazon. 

Masson,  deuxième  chanteuse. 

DuROzÊ,  jeunes  rôles. 

Debussac,  duègne. 


COMÉDIE  ET  TRAGÉDIK 

MM.   PoHiER,  jeune  premier. 

•Saint  Franc,  père  noble. 

Ruelle,  financiers. 

Masson,  raisonneur,  trois,  rôle. 

PoNS,  deuxième  amoureux. 

Armand,  premier  comique. 

Floricourt,  deuxième  comique 

Saint- Martin,  utilité. 
M""  CiiAPts,  premier  r61e. 

TioÉ,  jeune  première. 

Masson,  deuxième  amoureuse. 

Thibault,  deuxième  amoureuse. 

Debussac,  caractères. 

DoRSAN,  soubrette. 


Le  Conseil  municipal  avait  refusé  de  voter  la  subvention,  mais  le  ministre, 
comme  les  années  précédentes,  avait  passé  outre,  et  les  15.000  francs  ordi- 
naires avaient  été  alloués  à  Brice. 

Cette  saison  ne  fut  pas  brillante.  La  troupe  était  de  beaucoup  inférieure 
à  celle  d'Arnaud.  MM.  Pons,  deuxième  haute-contre,  et  Armand,  premier 
comique,  étaient  régulièrement  siffles  chaque  soir. 

Le  ténor  Jausserand,  qui  sortait  de  l'Opéra-Comique.  vint  donner  des 
représentations  à  Nantes  en  1817.  Son  grand  triomphe  était /o6'e;>/j.  il  n'était 
plus  jeune,  mais  il  avait  conservé  une  très  belle  voix;  et  il  chantait  avec- 
expression;  malheureusement,  il  avait  le  défaut  de  défigurer  la  musique  de^ 
maîtres  pour  l'orner  à  sa  fantaisie.  On  pouvait  lui  appliquer,  dit  Mellinet.  le 
mot  de  Cimarosa  :  «  Vous  venez  de  chanter  votre  air,  vous  plairait-il  de 
chanter  le  mien.  » 

En  octobre,  Brice  abandonna  la  direction.  Les  artistes,  sous  la  direction 
de  Jausserand,  continuèrent  de  jouer. 

Le  4  novembre,  le  duc  d'Angoulême,  de  passage  à  Nantes,  alla  au 
Théâtre.  L'on  joua  Françoise  de  Foix  et  un  Hymne  à  la  Paix,  composé  et 
chanté  par  Jausserand. 

A  partir  de  cotte  année,  les  gros  mélodrames  commencèrent  à  tomber 
en  défaveur.  Les  journaux  menaient  contre  eux  une  vire  campagne.  Le 
25  novembre,  Le  Sergent  Polonais^  après  avoir  excité  un  rire  continuel 


m'J»  lalandk 


90 


pendant  trois  actr*^,   finit  au  milieu   des  sifflets    de    la  salle    entière.  La 
scronde  représentation  ne  put  être  achevée.  Le  publi(^  criant  qu'il  en  avaU 
assez,  on  fut  obligé  de  baisser  le  rideau  et  de  jouer  l'opéra  du  Tonnelier. 
Comme  nouveauté,  on  monta  Les  Rosières,  d'Hérold. 


A  l'Hxpiration  de  la  campagne,  Jausserand  demanda  la  direction  en  son 
nom  personnel.  La  ville  accueillit  favorablement  sa  demande  et  il  fut  nommé 
pour  deux  ans.  Le  Conseil  se  résigna  à  voter  une  subvention  de  15.0<X)  fr.. 
pour  la  raison  «  que  l'on  n'aurait  pas  plus  d'égard  au  rejet  que  les  années 
préocdentes  »  mais  il  n'en  protesta  pas  moins  contre  «  cette  injustice.  »i 


SAISON      1818-1819 
JAUSSSKAriD,  Directeur 

HuNT.  chef  d'orchestre.  —  Gabriel,  régisseur. 


OPÉRA  ET  COMÉDIE 
MM.    lAusHERàND,  première  haute-contre, 
premier  nMe. 

VioNBM.elleviou,  premier  amoureux. 

Olivier,   clloTiou.  deuxième  amou- 
reux. 

Ki.AvioNY,  martin. 

Mezebay,  première  ba.sse-taillo.  pre- 
mier rôle. 

Gabriel,  deuxième  basbe-taillo.  pre- 
mier comique. 


MM.    LcKÈvRE,  laruetle,  financiers. 

AsTRi;r:.  trial,  deuxième  comique. 

Leroux,  basse. 

M""  Lalande,  première  chanteuse. 
I-OTii,  dugazon. 

Emmanuki.  ,     deuxième     chanteuse, 
jeune  première. 

Clermont,  dugazon. 
Decoouebert,  premier  rôle. 
MÉRtNA,  duègne,  caractères. 


"  Cette  année,  dit  Camille  Mellinet,  dans  La  Musique  à  Xnntes, 
M""  Lalande  commençait  dans  notre  ville  cette  brillante  réputation  qu'elle 
s'est  acquise  depuis  dans  la  patrie  de  Rossini,  et  nous  applaudissions  la 
petite  Alexandrmcà  ses  premiers  débuts.  Cette  Alexandrine,  enfant  intelli- 
gente, connue,  depuis,  sous  le  nom  de  M™*  Duprez,  n'a  pas  séparé  ses 
succès  de  ceux  du  célèbre  ténor,  son  mari.  » 


M"«  Lalande  avait  alors  dix  huit  ans.  Sa  voix  d'un  timbre  sonore  et 
agréable,  était  pleine  de  douceur  et  d'éclat;  mais,  elle  aussi,  elle  dénaturait 
la  musique  par  les  agréments  qu'elle  y  mettait.  Elle  était  bien  faite  pour 
suivre  la  carrière  italienne  où  le  chant  passe  avant  la  pensée  du  maître. 

Pendant  l'hiver  1818,  les  soirs  de  bals  masqués,  on  installa  des  .Monta- 
gnes Russes  dans  le  fond  de  la  salle.  Cette  innovation  fit  courir  tout  Nantes. 
En  lévrier,  entre  une  comédie  et  un  opéra,  un  certain  Mahier,  «  grotesque 
aérien  »,  dit  l'affiche,  faisait  des  exercices  d'agilité.  Il  sautait  par  dessus 
huit  chevaux  montés,  et  franchissait  trois  tables  en  faisant  le  saut  périlleux. 

En  juin,  G  ranger  vint  donner  des  représentations.  Il  avait  fait  autrefois 
partie  de  la  troupe  et  avait  laissé  les  meilleurs  souvenirs. 


100 


LE   THÉATRK    A    NANTES 


M'i*^  Leverd  et  Victor,  tous  deux  artistes  des  Français,  parurent  aussi  à 
Graslin. 

Les  trois  principaux  faits  de  cette  saison  furent  les  premières  représenta- 
tions, à  Nantes,  de  La  Clochette,  d'IIérold,  de  Walace,  de  Catel  et  du  Petit 
Chaperon  Rourje,  de  Boieldicu.  Ce  dernier  ouvrage  fut  donné  au  bénéfice 
de  M.  Jaus.serand  c  en  sa  qualité  d'acteur  ».  Le  Journal  de  Nantes  fait 
observer,  avec  raison,  qu'il  ne  comprend  pas  trop  la  différence  qui  existe 
entre  le  bénéfice  de  M.  Jausserand  acteur  et  les  recettes  de  M.  Jausserand 
directeur.  Le  Petit  Chaperon  Rouge,  avec  M''°  Lalande  et  Jausserand, 
remporta  un  succès  complet. 


* 
*  * 


SAISON       1819-1820 
JAUSSERi^  ND,  Directeur 

HuNY,  chef  d'orchestre.  —  (iAKP.iKL,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.  1Ieurt.\ux,  premier  amoureux. 
Saint- Paul,  tort  deuxième. 
Deschamps,  fort  deuxièm^e. 
Jaubkhï,  martin. 
DupoRT,  première  basse. 
Leroux,  deuxième  basse. 
Lefebvre,  laruette. 
Daleville,  trial. 

M'""  Floriny  ,     première     chanleuse    à 
roulades. 

Juliette,  première  chanteuse  sans 

roulades. 
Legerot,  première  duzazon. 
Rivière,  duègne. 
Deschamp.s.  soubrette. 
DtcoQUEiiERT,  deuxième  chanleuse. 


TR.VGÉDIE  ET  GO.MÉDIE 

MM.  lÏEURTAUx   premier  rôle. 

Génies,  jeune  premier. 

Deschamps,  deuxième  amoureux. 

(ÎALUET,  premier  comique. 

Lamarelle,  père  noble. 

Lkcouvreur,  financiers. 

Leroux,  troisième  rôle. 

Dalville,  deuxième  comique. 

Miljvut,  grandes  utilités. 
M'""  Decoqueisert.  premier  rôle. 

Glermont.  fortojeune  première. 

Legerot,  ingénuités. 

Rivière,  caractères. 

Dorsan,  première  soubrette. 

Dbsghamps  deuxième  soubrette. 


Le  public  Nantais  avait  vu,  avec  regret,  partir  M'i*  Lalande,  mais  il 
l'oublia  bien  vite  en  entendant  M™*'  Floriny,  que  le  Journal  de  Xantes,  dans 
un  article  enthousiaste,  compare  à  un  rossignol. 

Le  24  mais  1819,  Jausserand  demanda  à  la  Ville  de  porter  la  subvention 
à  25.000  francs.  Cette  augmentation  de  10.000  francs  lui  fut  refusée. 

En  juillet  1819,  les  frères  Bolirer,  célèbres  violonis'c  et  violoncelliste, 
donnèrent  à  Graslin  une  série  de  concerts.  Rarement  on  avait  vu  à  Nantes 
un  pareil  euthousiasme.  La  salle  éfait  trop  petite  pour  contenir,  à  chaque 
soirée,  la  foule  des  auditeurs. 

Le  mois  de  septembre  fut  sig  .aie  par  la  présence  de  Boieldieu.  Le  coiiipo- 
siteur,  voyageant  pour  son  agrément,  vint  a  passer  par  Nantes.  Le  directeur 


noiKLDIEU   A   NANTES  101 


ne  pouvait  laisser  échapper  une  occasion  semblable  il  retint  donc  l'auteur  du 
Petit  Chaperon- Roufje.  Boieldieu  resta  plusieurs  jours  dans  notre  ville,  et 
assista  à  chaque  répétition  de  ses  pièces,  donnant  d'excellents  conseils  à  tout 
le  monde.  On  joua  en  sa  présence  Zoraïme  et  Zalnar.  Le  public  réclama  à 
f,'rands  cris  Boieldieu,  qui  fut  traîné  sur  la  scène  par  ses  interprètes  au  milieu 
d'unanimes  applaudissements.  Jausserand  commit,  ce  8oir-là,  une  grosse 
inconvenance.  Un  nommé  Chalon,  faiseur  de  tours,  servait  avec  Boieldieu 
d'attrait  à  l'affiche. 

Pendant  le  séjour  du  futur  auteur  de  la  Dame  Blanche,  on  joua  La  Fête 
au  village  voisin,  Le  Calife  de  Bagdad,  Ma  Tante  Aurore,  La  Jeune 
femme  colère,  Le  Petit  Chaperon-Rouge.  Ce  fut,  comme  on  dirait  aujourd'hui 
un  véritable  cycle. 

Camille  Mellinet,  dans  la  Revue  du  Breton,  a  publié  sur  Boieldieu  un 
fort  intéressant  article  auquel  j'emprunte  les  détails  suivants  : 

«  C'était  à  la  répétition  de  Zoraïme  et  Zulnar.  L'ouverture  commence 
aveo  une  énergie  inaccoutumée...  Boieldieu,  l'interrompant  presque  à  son 
début,  demande  la  partition,  la  parcourt  avec  une  sorte  d'anxiété,  puis,  en 
souriant  et  poussant  un  gros  hélas  :  «  Je  m'en  défiais,  ce  sont  des  péchés  de 
jeunesse;  mais,  quand  on  devient  vieux,  on  se  corrige.  »  Et  corrigeant  sur 
la  partition,  corrigeant  sur  les  cahiers,  il  va  de  pupitre  en  pupitre,  changer 
quelques  notes  échappées  cà  une  jeune  imprévoyance,  à  un  défaut  de  science 
dont  il  s'accuse  tout  haut  avec  autant  de  bonhomie  que  de  gaité,  et  dont  il 
renouvela  plusieurs  fois  l'aveu  dans  cette  soirée. 

»  Au  deuxième  acte,  M.  Huny,  ne  pouvant  comprendre  un  passage 
d'instrumentation,  s'approcha  du  compositeur  avec  la  partition,  et  lui  dit  : 
((  Il  y  a  là  quatre  cors  que  je  n'ai  jamais  pu  faire  accorder.  —  Pour  y  obvier, 
qu'avez-vous  fait  jusqu'à  ce  jour?  répondit  Boieldieu.  —  J'en  ai  supprimé 
deux.  —  Faites  comme  par  le  passé...  »  Mais,  le  rappelant,  à  demi-voix  il 
ajouta  :  «  Vous  venez  de  m'embarrasser.  —  Comment  cela?  —  Lors(jue  je 
com|)osai  mes  premiers  opéras,  il  faut  vous  l'avouer,  je  savais  qu  ut,  mi,  sol 
fait  un  accord  parfait,  mais  j'ignorais  complètement  que  mi,  sol,  ut  en  est  le 
|)remier  renversement.  Mes  premières  fautes,  vous  le  concevez,  ne  sont  pas 
restées  sur  mes  partitions  ;  toutefois,  je  n'ai  pu  les  aller  corriger  dans  chaque 
théâtre....  Voilà  l'histoire  de  l'accord  impossible  des  quatre  cors  de 
Zoraïme.  » 

—  «  N'est-ce  pas  après  le  Calife  que  vous  reçûtes  les  conseils  de  Chéru- 
bini?  demanda  Mellinet  au  compositeur,  dans  une  conversation  qu'il  eut 
avec  lui. 

—  Oui,  et  je  n'en  perdrai  jamais  ni  le  souvenir,  ni  la  reconnaissance, 
d'autant  que  le  Calife  |iarut  dans  une  année  féconde  pour  la  musique  fran- 
<;aise,  car  elle  vit  naître  le  Délire,  Ariodant  les  Deux  Journées  :  je  n'y 
apportai  donc  pas  sans  crainte  mon  faible  contingent...  Chérubini,  me  ren- 
contrant dans  un  des  couloirs  du  théâtre,  me  prit  par  le  collet,  et  me  dit 
avec  cette  francliise  assez  rude  chez  lui  :  ((  Maliieureux,  n'es-tu  |)as  honteux 
d'avoir  de  si  beaux  succès  et  de  faire  si  j)eu  pour  les  mériter!  »  Je  restai 
stujiéfait  de  l'apostrophe  :  on  le  serait  à  moins  ;  ma  répartie  n'arriva  pas  ; 
mais,  lorsque  Chérubini  m'eut  quitté,  sentant  tout  ce  que  ses  reproches 
avaient  de  fondé,  je  ne  tardai  pas  à  me  rendre  auprès  de  lui  [K)UT  réclamer 


102  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


ses  conseils.  Il  fut  arrùté  qu'il  m'enimonerait  a  la  oampagne  de  Saint-Just. 
mon  collaborateur  en  paroles,  notamment  de  celles  du  Calife,  et  que  là  il  me 
ferait  broyer  du  noir,  ce  que  je  fis,  en  efïet,  pendant  deux  saisons.  Après 
cela,  je  sus  mon  afïaire,  mais  je  cessai  d'être  heureux  ;  car  vous  ne  vous 
figurerez  jamais  avec  quelle  facilité  je  composais  un  opéra  avant  d'en 
connaître  les  difficultés.  » 


La  dernière  répétition  à  laquelle  assista  Boieldieu,  fut  celle  du  Petit 
Chaprron-Roupe, 

"  Le  Petit  Chaperon  rassemble  des  situations  fort  scabreuses  au  théâtre 
L'actrice  (M"«  Légerot)  chargée  du  rôle  de  Rose  d'Amour,  n'en  marquait  lc< 
intentions  qu'avec  une  lourdeur,  une  niaiserie  sans  naïveté,  dont  Boieldieu 
s'impatientait  à  chaque  instant.  11  alla  jusqu'à  lui  faire  répéter  mot  à  mot. 
note  par  note,  plusieurs  scènes,  particulièrement  celle  où  Rose  d'Amour  ôte 
son  chaperon  en  présence  du  loup.  Après  plusieurs  conseils  inutiles,  ayant 
épuisé  toutes  les  formes  du  langage  pour  se  faire  comprendre,  il  s'écria  en 
prenant  assez  rudement  le  bras  de  la  pauvre  "  dugazon  »  nantaise,  que 
jusque-là  il  avait  traité  avec  une  politesse  de  bonne  compagnie  :  «  Mais 
mademoiselle,  résistez  donc...,  ne  voyez-vous  pas  que  Monseigneur  (en 
montrant  Jausscrand)...  Moi,  je  ne  sais  comment  vous  exprimer  cescboses-la 
devant  tout  le  monde...  Votre  expérience  doit  me  comprendre...  F,nfin  l'on 
veut  vous  faire  violence,  et  votre  rôle  est  celui  d'une  jeune  fille  ingénue... 
—  Eh  bien  !  monsieur,  répondit  M"'  Légerot  sans  se  déconcerter,  croyez 
vous  dc»nc  que  je  ne  le  sais  pas...  —  .le  ne  dis  pas  cela,  répondit  Boieldieu 
interdit  ;  mais  alors...  alors,  mon  duo  csi.../ichu...  Mon  cher  Huny,  oonti 
nuons.  » 

Depuis  quelques  années,  l'orchestre  du  Théâtre  avait  à  sa  tête  M.  Huny, 
excellent  musicien,  chef  d'une  autorité  habile  et  reconnue.  Boieldieu  le 
félicita  vivement  et  ses  éloges  semblent  avoir  été  vraiment  sincères. 

Boieldieu  profita  de  son  séjour  à  Nantes  pour  aller  visiter  Clisson.  Sur  la 
cheminée  de  VHôtel  du  Cheoal-Blanc,  il  écrivit  une  phrase  musicale. 
.T'ignore  si  les  propriétaires  de  l'auberge  ont  respecté  cet  autographe  original 
écrit  sur  une  portée  tracée  en  cercle  avec  la  signature  au  milieu. 

Pendant  cette  saison,  on  joua  VOfficier  enlevé,  de  Gatel,  et  Mustapha,  de 
Mazas,  représenté  pour  la  première  fois  en  France.  Le  célèbre  violoniste 
Lafond  se  fit  entendre  au  Grand-Théâtre  dans  plusieurs  concerts. 

Jausserand  se  retira  au  bout  de  l'année.  Il  n'avait  fait  aucun  Wnéfice 
mais,  du  moins,  il  ne  laissait  pas  de  dettes.  Le  Théâtre,  sous  sa  direction, 
était  pourtant  très  suivi.  Le  nombre  des  abonnés  s'élerait  à  3n.  Ce  chiffre 
paraîtrait,  sans  doute,  incroyable  à  un  directeur  d'aujourd'hui.  A  Nantes,  en 
effet,  il  n'y  a  presque  plus  d'abonnés. 


cccx;v<S5^:S^î^^5i^ 


II 

DIRECTIONS   :   LÉGER.  —  BOUSIQUES.    — 
JAUBERT  et  CLERMONT 

1820  —  1829 

J/ii"  Allan-Punchard.  —  Af"»  Danyvetnont.  —  Les  Noces  de  Figaro.  —  SfHrrit 
\.v  Rarbier  de  Si-ville.  —  M.   et   Mm»  Roche.  —   A/"*  Duchesnuis. 
A/-»  Hichiii-d'MittiK  —  La  Dame  Blanche.  —  Robin-ilt>9-Dois. 
Fernand  (Portez  —  Bataillt'au  Théâtre.  —  Hégnier. 


A  ville  se  trouvait  fort  embarrassée  pour  rembourser  à  la  caisse 
iramortissenicnt  l'emprunt  qu'elle  avait  fait  pour  reconstruire 
la  salle.  Les  intérêts  s'accumulaient  et  la  situation  financière 
empêchait  l'administration  de  se  libérer. 
Le  28  avril  1820,  le  Conseil  émit  un  vœu  tendant  à  faire  décharger  la 
ville  de  cet  emprunt  et  à  laisser  au  gouvernement  la  salle  en  rembourse- 
ment de  la  créance.  Le  Gouvernement  refusa.  Dans  sa  séance  du  12  décem- 
bre 1820,  le  Conseil  rédigea  une  adresse  au  ministre.  Après  avoir  longue- 
ment exposé  la  situation  financière  de  la  ville,  celte  adresse  terminait 
ainsi  : 

«  Le  Gouvernement  ferait  donc  à  la  fois  une  chose  juste  et  généreuse,  de 
faire  remise  des  400,000  francs  et  des  intérêts  en  question,  a  une  ville  qui, 
loin  en  effet  d'avoir  profité  de  cet  emprunt,  en  est  devenue  plus  surchargée 
par  les  conditions  onéreuses  qu'on  lui  a  imposées  en  faveur  de  l'entreprise 
théâtrale  et  qui  est  dans  l'impuissance  de  s'acquitter  jamais  d'un  capital 
aussi  énorme.  » 

L'Etat  finit  par  se  laisser  loucher  et,  en  182^},  il  accorda  à  la  ville  de 
Nantes  un  délai  de  vingt  ans  pour  le  remboursement  de  la  dette  ;  il  lui  était 
fait  remise  des  intérêts. 

La  succession  de  Jausserand  fut  briguée  par   le  sieur  Léger,  siuiiiulaui 
pompeusement  homme  de  lettres  et  l'un  des  fondateurs  du  théâtre  da  Vau 
deville  à  Paris.  Il  était  surtout  connu  conmie  chansonnier,    L'Adminisira 
tien  municipale  nomma  Léger  directeur  pour  sept  ans. 


104 


LR   TMKATRE    A    NANTES 


SAISON      1820-1821 


LSQSH,    Homme    de 

Martin,  dicf  dorcheatre. 
OPÉRA 

MM.  Coi.LON.  première  haute- contre. 

IIeurtaux,    première  liaute-conlre. 

CniiouRfi,  ilenxième  amoureux. 

(luATEAuroitT,  troisième  amoureux. 

JAUiiiiRT,  marlid. 

Laiitigues,  première  liasse  taille. 

BKRciiiiiONNKAU .     (leuxièmu     basse 
taille. 

Lekebvre,  laruettc. 

IIervet,  trial. 

IhijuiKH,  basse. 
M^'s  Fr.oRiNY,  chanteuse  fi  roulades. 

Ciioi.ET,  chanteuse  sans  rouladrs. 

Lkukkot,  du^azon, 

KLORCLUAN./leuxiènu'  cliantfuse. 

CoLLON,  duègne. 


Lettres,   Directeur 

—  (:aL';i>a,  rt'j^isseur. 


f;OMÉDIE  ET  TRAGÉDIE 


MM. 


Dai.ks,  premier  rol«. 
Fi.oiiEST,  jeune  premier. 
CiiATKAUKORT,  truidiéme  amoureux. 
Lamareillk,  père  noble. 
ARNAti>.  financiers. 
RiouiER,  raisonneur. 
l'.iLi.E.s,  premier  comique. 
JIervet,  deuxième  comique. 
M"'s   Dorsan,  mère  noble. 

JiiE.N.vA,  jeune  première. 
l>oi;sAX,  soubrette. 
Goi.LON,  caractères. 
Lavset.  conflilcntes. 
«liiATEAUKORT,  ingènuiti'S. 


Le  prix  des  abonnements  était  ainsi  fixé  : 

130  francs  ;  Dames  :    90  fr.  —  Au  mois  :    Hommes  :   20  fr. 


A  l'année  :   Hommes 
Dames  :  12  fr. 

Loges  à  l'année  :   4  places,  600  francs  ;   5  places,  7G0 
—  'i  places.  ôGO  francs  ;  â  places  700  ;  G  places,  800. 


G  places,  900.  —  Baignoires, 


La  première  direction  de  Léger  ne  fut  pas  brillante.  Ce  directeur  innova 
les  billets  de  famille.  Ces  billets  se  délivraient  par  paqutît  de  25.  Avec 
deux  de  ces  coupons  on  pouvait  aller  aux  premières.  Ils  coûtaient  l  franc. 

Les  principales  nouveautés  de  cette  année  furent  la  Marie  Stuart,  de 
Lebrun,  et  les  Voitures  Versées,  de  Boicldieu.  Lavigne, de  l'Opéra,  .M"'  Pe- 
tit, Saint-Eugène  el  Colson,  des  Français,  vinrent  en  représentations. 

Un  fait  assez  curieux  eut  lieu  les  5  et  G  mai  1820.  Le  théâtre  fut  obligé  de 
faire  relâche  pour  cause  d'indisposition  des  principaux  acteurs  de  l'opéra  ol 
de  kl  comédie. 


*  * 


SAISON     1821-1822 

LÉGER,    Directeur 

Pépin,  chef  d'orchestre.  —  Gw-cina,  régii»seur. 


OPÉRA  ET  COMÉDIE 
MM.   BoL/uiUEs,  première  liauto-contro. 
Dbu.ssk,    première     haute-contre. 
Colon,  riiles  annexés. 
VoiRRT,  deuxième  liaute-contre. 
Cn.vrEAUFORT,  auiouroux. 


MM.Lartihues.  première  basse  tnille, 
HcniET,  deuxième  basse  taille. 
Uec.i.erc,  troisième  basse  taille. 
Carrk.  troisième  ténor, 
Lekeiivrk,  laruotte, 
Dkvili.e,  Irial. 


DIRECTION    LÉGER 


lûô 


Sèvres,  chanteuse  à  roulades. 

•Iaxnard,  clinntruse   sans  ronl.Kles. 

Hou/ir.ijKS,  diigazon. 

Saint  Jamks,  druiiënie  dupnzun. 

Colon,  jeunes  rùles. 

CiiATKALKon  r, deuxième  amoureuse. 

(  IfJi.ux,  duègne. 

J)onsAN,  souhri'lli-. 

DiJH.ArnKr.  dcuxii-ini'  iIiu'I'h..  . 


DANSE 

Nt.  lîiiExoN    maître  de  ballet. 
M-'f    CiuTiLi.uN,  premi'T'- danseus» 
(»ut)ABi>,  premier»'  danseuse, 
C.oRHY,  première  danseuse 
Soi-!30S>,  priini<"re  danseu.se. 
[{avbnot,  liemi-caractère. 
Petite  SoissoN,  les  amours. 
P.'tite  l'.AVENOT,  les  amours. 


l'no  souscription  avait  clé  faite  «cite  année-là  pour  soutenir  le  Théâtre. 
J'ille  s'élevait  à  18. ()0()  francs.  Les  auditeurs  ('•tairtit  don»  on  droit  d'exiger 
beaucoup. 

Les  débuts  furent  assez  mouvementés. 

Le  public  manifestait  hautement  son  mécontentement.  Souvent  il  faisait 
\  <nir  à  grands  cris  Léger  sur  la  sc6ne  et  l'accueillait  par  des  bordées  de 
-illlets. 

Delisses.  M""'  St^vres  et  Jannard,  silllés  à  outrance,  furent  remplacés 
par  Gamet  et  M"»<='*  Allan  l'onchard  et  Dangremont.  Ces  deux  cantatrices 
vaient  une  réelle  valeur. 

M"''  Allan-Ponehard  possédait,  d  après  le  Journal  de  Xnnirs,  une  V'>i\ 
pleine,  étendut\  ne\ibl(\  une  méthode  correcte,  une  intonation  sûre,  un  jeu 
spirituel  et  rempli  d'intelligence.  C'est  une  des  meilleures  chanteuses  <|ui  .se 
soient  fait  applaudir  à  Nantes. 

M'"*'  Dangremont,  qui  sortiit  de  l'i  ipéra,  était  douce  dune  lirillante 
facilité  ;  elle  pariage^i  avec  M"^"  l'onchard    les   faveurs  du  public. 

Le  fait  musical  le  plus  important  de  cette  saison  fut  la  représentation,  le 
17  janvier  1822,  des  Nocch  de  Fiffaro. 

Le  chef-d'œuvre  de  Mozart,  interprété  à  la  perfection,  fut  accueilli  avec 
enthousiasme.  M'""  Ponchard  chanta  tout  le  rôle  tle  la  comtesse  avec  une 
expression  ravissante  et  un  goût  exquis.  Castil-Blaze  qtii  avait  traduit  le 
livret  pour  la  se^ne  française,  en  apprenant  que  M""'  Ponchard  allait 
chanter  les  Xocen,  dit  qu'elle  en  était  digne,  M""  Dangremont  (Suzanne), 
Houzigue(Chérubin),  MNL  Bouzigue  (le  comte).  Carré  (Figaro),  complétaient 
un  excellent  ensemble. 

Iai  Maître  do  ('hapc'.lc  [ni  aussi  représenté  cette  année  (.'>  luars  182i). 
(irand  sticcès  pour  M"""  Ponchard,  qui  interpréti  d'une  façon  adorable  le 
rôle  de  Gertrude. 

Le  compositeur  Auber  lit  son  apparition  à  la  salle  Graslin  ^ous  cette 
direction  ;  on  joua  de  ce  compositeur  fécond  :  r.mma.  Pendant  une  trop 
longue  série  d'années  les  ouvrages  du  futur  directeur  du  Conservatoire  de 
Musi(|ue  allaient  régner  en  maîtres. 


2? 


106 


LE  THEATRE   A    NANTES 


SAISON      1822-1823 

LÉGER,    Directeur 
CHARLE8,  réffisHeur. 


OPÉRA 

MM.  Coukin-Floricour,  preniii-re    liauti- 
coiitre. 

UousiouE,  EUeviou 
<  'iiATEAUKORT,  deuxièmc  haute-contre. 
SoLiÉ,  Martin. 
Lefkbvre,  laruette. 
X...,  première  basse  taille 
CuGNiKR,  deuxième  ba.s8e  taille. 
DupRAT,  rùles  de  tenue. 
MoNTOASsiN,  trial. 
M""s  Po>;r.nARn,  première  chanteu.se. 
Lécuykh,  forte  dugazcn. 
BousuiUE,  dugazon. 
MoNTCA.ssiN,  dugazon. 
(Iarnier,  deuxième  dugazon. 
Danois,  duègne. 


TRAGÉDIE  ET  COMÉDIE 

MM.    Deshordes,  premier  nMe. 
Mathis,  jeun»-  premier. 
Vai.muhe,  père  noble. 
(jiaiu.es,  liuancier. 
Dui'RAT,  troisième  nMe. 
I  Ihateaijkort.  deuxième  amoureuse 
Salpêtre,  deuxième  comique. 

M""   Roy,  premier  rAie, 

Lecuyer,  premier  rôle 

Callact,  jeune  première. 

f 'hatraufort,  deuxième  amoureuse. 

Danois,  caractère?. 

Chal'dier,  mère  noble. 

DoRSAN,  soubrette. 


La  section  dramatique  de  cette  troupe  était  fort  bonne.  11  faut  citer   De.*; 
bordes  et  M™«  Roy,  douée  de  beaucoup  de  qualités  et  d'une  beauté   remar- 
quable. ((  En  regardant  M"'«  Roy,  dit  le  Journal  de  Nantes,  la  critique  est 
forcée  de  se  taire.  » 

Quanta  l'opéra,  à  part  trois  ou  quatre  artistes,  l'ensemble  en  était  déplo- 
rable. 

Léger  était  d'ailleurs  à  bout  de  ressources  ;  son  incapacité  précipita  encore 
sa  chute.  Il  fit  faillite  à  la  fin  do  1822.  Les  artistes  se  réunirent  alors  en 
société. 

En  août  1823,  Nourrit  vint  à  Nantes.  Il  y  chantii  au  milieu  du  plus  vif 
enthousiasme  et  d'ovations  sans  fin  :  Œdipe  à  Colonne,  La  Vestale,  Stra- 
tonice,  Les  Prétendus  et  le  Denin  du  Village 

En  septembre,  M  François  Benoist,  grand  prix  de  Rome,  qui  tenait  a 
cett(î  époque  la  place  d'organiste  à  Saint-Pierre,  fit  jouer  un  op«va  Léonore 
et  Fclix. 


«   Le  poème,  dit  Mellinet.  olîrait  peu  d'intérêt  dramatique,  mai.*:  la  parti 
tinn  était  délicieuse  dans  ses  détails.  » 

Le  21  du  môme  mois,  à  l'occasion  du  passagede  la  duchesse d'Angoulônic 
on  joua  une  pièce  de  MM.  Corlieu  et  Le  Romain  intitulée  :  Le  Pont  d'An- 
f/onlcme. 


LE    BARDIER    DE    séviLLF 


107 


Le  Théâtre  Graslin  eut  en  représentations  M™«  Colson,  des  Français  ; 
Dericourt,  Baptiste  de  l'Opéra  Comique,  et  enfin  Gavaudan,  le  fameux 
Gavaudan,  qui  n'était  plus  que  l'ombre  de  lui-même. 

Vers  le  milieu  d'oclobro,  M™''  Poncbard,  qui  ne  faisait  pas  partie  de  la 
société  des  artistes,  quitta  Nantes  en  renonçant  à  ses  appointements.  Le 
public  qui  l'adorait  se  montra  fort  blessé  de  ce  départ. 

En  janvier,  les  sociétair.^s  abandonnèrent  la  partie  et  le  Théâtre  forma  ses 
porft's,  au  grand  dé>e>poir  des  abonnés.  Il  ne  ilevait  les  rouvrir  que  trois 
mois  après. 


La  direction  fut  alors  demandée  par  Housigues,  chanteur  de  grand  mérite, 
lie  Conseilla  lui  accorda  pour  cinq  ans.  Les  15.0)3  francs  de  subvention 
étaient  maintenus  par  le  ministre. 


SAISON      1823-1824 
BOUSIOXJES ,    Directeur 


Delà  NOUE,  chef  d'Drchfstre. 


OI»hH\ 

MM.    I.KHoux,  |treiniiTt»  haute-contn>: 

HocsiouKs.  KMoviou  ; 

I)oRvii,LK,  ilruxièmc  haule-conli»;  ; 

Dakius,  Martin  ; 

Lalande.  première  ba«sf-Uiillc  ; 
_^      nKni)OUi.KT.  flenxit'iiii"    liass.'  inillo  : 

I.F.KÈvRK,  larufHf  ; 

Humas,  trial  ; 

FuiiRAcn,  troisième  basse. 
M""»*   I)k.lanoi;k,  pn-mière  ehanteusi'  ; 

MKur.iF.R.  diinaziin  ; 

IloLSKiUKS,  jfUiie  (lu^a/itii  ; 

Lkhoux.  tleuxième  jeune  duga/.on  : 

liAi'KYHiKRK, première  cliantcutfesari.s 
roiihidos  ; 

I)\N(ii9,diiègni'  ; 

Rey.  duègne. 


Colson.  régisseur. 

TRAGÉDIE  ETGOMf:DIK 

MM.    (!oi.soN.  premier  rôle; 

Meucik,  jeune  pn-niier  ; 

Donvn.LE,  deuxième  jeune  premier; 

l.(:0N.  père  noble  ; 

<  'iiARLE.s.  financiers  ; 

Di:PBAT.  tri)i.sième  rôle  ; 

DoyEKGUK,  premier  comique  ; 

Dumas,  deuxième  romique. 
M-'s    Lami,  premier  r<>le  : 

«Iallau,  jeune  première  : 

Lapeyrikre.  deuxième  r«>le  : 

Bou.sii-.uEs.  jeune  amoureusc  ; 

Leroux,  jeune  amoureuse  ; 

Danols.  caraolères: 

Hky,  mère  noble; 

DoRSAN.  soubrolle. 


Cette  troupe,  sans  être  bien  remarquable,  po.ssédait  un  ensemble  hono- 
rable. 

Le  5  juin  IS'Si,  le  Barbier  de  Sécille,  de  Rossini,  fut  joué  pour  la  pre- 
mière fois.  M"»"  Delanouc  interpréta  bien  le  rôle  de  Rosine. 

t.  Cette  musique  spirituelle,  comme  la  prose  de  Beaumarchais,  fut  peu 
comprise,  nous  apprend  Cannlle  Mellinet.  On  semblait  avoir  peur  de  se 
compromettre,  parce  que  la  nouveauté  de.>  effets  rendait  déliant  envers  le 
'  omjwsiteur  italien.  » 


108 


I.K   TIIKATRK    A    NANTES 


La  musique  ilu  Barbier  pas  comprise!  cela  nous  parait  fort  aujourd'hui. 
Pourtant,  rien  de  plus  vrai.  Combien  d'œuvres  qui  semblent,  maintenant. 
d'une  <lar(é  éclatante  ont  étô  déelaréos,  |)iimitiveineiit,  .tbsurdes  et  incom- 
préhensibles! 

Citons  parmi  les  autres  nouveautés  principales  Le  Solitaire,  une  élu<u- 
bration  de  M.  le  chevalier  do  Caraffa,  dont  le  succrs  fut  dû  aux  trois  déco- 
rations nouvelles  et  notamment  au  torrent  du  Mont-Sauvage.  •  Cet  opéra. 
dit  le  Journal  de  Nantes,  fournit  de  fructueuses  recettes  grâce  au  peintre  et 
a\i  niacijiniste.  »  Quant  à  la  musique,  il  n'en  parle  pas  et  fait  bien.  Valrrie. 
r Ecole  des  Vieillards,  enfin  Feildin//,  comédie  eu  un  acte  et  en  vers  de 
notre  compatriote  Menncchet,  furent  représentés  cette  année. 

M""  Georges  vint  jouer  Mcrope,  Phèdre,  Ipfiiffénie,  Macbeth,  Jiritanni- 
rus,  Marie  Sluart,  Médée,  Les  Macchabées. 

M"*»  Fay,  de  l'Opéra,  M.  et  M"o  Fay,  Vigier,  Michelot,  Perlct,  se  firent 
aussi  applaudir  pendant  cette  saison. 


SAISON      1824-1825 
BOTJSIGUES,    Directeur 

Dknanouk,  ch<-r  (l'orchcslri'.  —  Cuaiii.es,  régisseur. 


OPÉRA 
MM.  BousiGUES.  jircmicic  liaulf-contrc. 
(ioYuN.  pn'mièic  liauli'-conlrf. 
Bahbk.  (Ifuxii'iuc  hauto-contii'. 
Faionkt,  Martin. 
Delauxav,  promiorc  hassi-laillf. 
Gaui>oxn,  deuxicmc  bas.sc-taillo. 

Djeuhelette  ,      Iroisiomc      basse - 

taille. 
Lkkeuvrk.  larui'lli', 
Emery,  trial. 
Valette,  grande  ulililc. 

M"'"s  Delanoue,   prcmièrt"     cliaiilrusr    à 

roulade. 
BoiisKiUEs.  preiuièri'  cliauleuse  sans 

roulades. 
LoTH.  dupazon. 
BoijsuiuEs.  jeune  dugazon. 
Fi.KURiET.  di'uxiènie  jeune  dii^iazon. 
Danc.is,  duègne, 
(ioYDN,  hetzy. 


Huit  c'hanteuiti  de  chœurs. 
I)i.\  clianleiisi'S  de  chfeurs. 

Tll.\(;ÉDIE  ET  COMÉDIK 
M^f .  Main'viei.le.  premier  r.>le. 

Matis,  jeune  premier. 

Bahré,  second  amoureux. 

Stephani.  père  noble. 

Ito/AX,  premier  comiqu'-. 

Charles,  linanciers. 

PoM.rN.  raisonneur. 

Kmery.  cleuxième  comique. 

Lkkkiivre,  paysans. 
M""->i   Lehranh.  premier  n'de. 

Matis.  jiuno  première. 

(JAitRiEU,!;,  jeune  ppim.  i.v 

lîOYoN,  ingénuité. 

FlEURIET.  deuxième  aiiiijui' 
Daxc.is,  caractères. 
DoRSAN.  soubrette. 
(îovoN.  mère  nobli>. 


La  troupe  de  luinicdio  réunie  par  Housigucs  j>uur  lanncc  présrntf  «mh 
remarqu:d)le.  Le  premier  rôle,  M.  Mainvielle,  ét;iit  non  seulemetit  un 
artiste  excellent  mais  un  homme  des  plus  estimables  et  des  plus  estimés.  Le 


M"*    ROCHE  —  m"*  DUCHESNOIS  109 


premier  comique,  M.  Rozaii,  avait  aussi  beaucoup  de  valeur  ;  depuis 
Arnaud,  qui  avait  laissé,  dans  cel  emploi,  d'excellents  souvenirs,  on  n'en 
ivait  pas  rencontré  de  meilleur.  N'oublions  pas  M"«  Legrand,  qui,  1  année 
suivante,  devait  épouser  M. Roche.  Elle  et  .son  mari  restèrent  de  longues 
limées  à  Nantes.  Cette  artiste»,  l'une  des  meilleures  comédiennes  de  province 
possédait  un  réel  talent  et  une  vive  intelligence;  les  amateurs  de  notre  ville 
l'avaient  en  haute  estime.  Pendant  vingt  ans,  elle  demeura  à  Nantes,  et  .son 
succès  ne  se  démentit  p;is  un  seul  instant. 

Le  Journal  de  Nantes  écrivit  un  jour  en  parlant  de  M™"  Legrand- 
Roche  : 

(«  qu'il  ne  connaissait  pas  une  comédienne.  Mars  exceptée,  avec  qui  elle 
ne  pouvait  subir  une  comparaison  à  son  avantage.  » 

Le  14  octobre  1824,  La  Gazxa  Ladra  fut  accueillie  assez  favorablement. 
Pourtant  le  critique  du  Journal  de  Nantes  écrivit  : 

«  que  ses  sensations  étaient  si  confuses  en  .sortant,  qu'il  renonce  à 
exprimer  son  opinion  sur  cette  production  tant  vantée.  » 

On  joua  d'Auber  :  La  Neige,  Le  Concert  à  la  Cour  et  Léocadie. 

Pendant  toute  la  maladie  de  Louis  XVIII,  le  théâtre  fit  relâche  par  ordre 
et,  après  .sa  mort,  resta  fermé  pendant  huit  jours. 

M'"*  Duchesnois  vint  en  juillet  1824.  Elle  jjarut  dans  Phèdre,  Jeanne 
d'Arc,  Andromaque,  Iphigénie,  Marie- Stuart ,  Pierre  de  Portugal, 
Mérope,  Hamlet,  Abnfar. 

Camille  Mcllinet  a  publié  sur  M"*  Duchesnois  un  article  dans  la  Reçue 
du  Breton.  J'en  extrait  les  lignes  suivantes  où  la  célèbre  artiste  parle  d'elle 
assez  curieusement. 

«  Je  ne  me  sens  pas  née  pour  la  scène  . .  Des  pressentiments  de  terreur 
m'y  poursuivent. .  .J'ai  des  croyances  autres  que  celles  de  mes  camaradss... 
Ils  sont  incrédules,  je  suis  superstitieuse,  je  dirais  presque  dévole. . .  Vous 
riez,  vous  aussi  vous  avez  la  moquerie  qu'on  me  témoigne  au  théâtre  quand 
je  parle  de  ces  choses-là  :  je  ne  répéterai  donc  pas  ce  mot  qui  m'est  échappé  ; 
mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai  (jue  de  vagues  inquiétudes  m''  :  '.  .  . 

Je  me  surprends  parfois  en  prière  comme  dans  une  sort**  d  .   (!• 

Sainte-Thérèse.  .  .  La  nuit  je  me  réveille  en  sursaut  avec  des  visiuua. .  .  Je 
reviens  sur  mon  passé,  et  l'avenir  que  je  rêve  n'est  plus  de  cp  monde.  . .» 


Huet,  de  Feyileiu,  (im  avait  jadis  fait  parti. •  <u-  i.i  iroupe  de  Grasiin, 
revint  donner  quelques  rcpré.sentations.  On  le  trouva  bien  vieilli.  Enfin 
Lavigne,  Dabadie,  M"*  Leverd,  complétèrent  la  série  des  artistes  de  pas- 
sage. 


LE  THÉÂTRE  A    NANTES 


nu 


SAISON     1825-1826 


BOUSiaUES,  Directeur 

MoniA,  cliif  (l'orchf.stif.  — Rdlamj,  régiast-ur. 


OI'KI'.A 


MM.   l' .     Bou.sKiir.s.     pniniiii'     liaul(;-       M.M 

COIltlT. 

(ioYON,  |)i'i'mi<.'n'  liaiiU'-coiiln-.  I 

lIippoi.YTK,  douxièmi.'  hautccontri.'. 

Fuic.XKT,  Martin. 

Baptisti:,  (li'iixièmc  bassf-tailli-. 

Dl'chaumi:.  di'uxirmf  l)ass('-taillo. 

RocRoix,  basso-laillc  vn  tousgi'nres. 

Liu'EitvHE,  larui'Ui'. 

AsTRLc,  triai. 

lIoijssARD,  Iroisiènii'  basse. 

Mf:RiEL,  troisième  bassf. 

Mmos   Lecouvukuh,  première  chanteuse    à 

roulades. 
P.  Bousic.uEs,  première    chanteuse 

sans  roulades. 
Mutée,  dugazon. 
(1.  BousKiuES,  jeune  duj^azon. 
Kleuriot.  deuxième  amoureuse. 
Louis,  duègne. 
Paré,  deuxième  amoureuse. 
GoYON,  Belsy. 


TR.AGÉDIE  ET  COMÉDir: 

Mainvielle,  premiiT  rôle. 
RocuE  lils,  jeune  premier. 
HiPPui.YTE,  deuxième  amoureux. 
Bai.k,  père  noble. 
Bkkthaut,  premier  comique. 
Louis,  financiers. 
Pou.iK,  raisonneurs. 
RocRoix,  financiers. 
AsTRUG,  deuxième  comique. 
Lefeuvre,  paysans. 

M"""    Legraxd,  premier  rôle. 

Fauvel-Léûn,  jeune  première. 

d'IIéricourt,  ingénue. 

G.  Bousigues,  jeune  première. 

AsTRUC,  soubrette. 

Louis,  caractères 

GoYON,  ingénuité. 

Fleuriot,  deuxième  amoureuse . 

GoYON.^ère  nublc. 

Paré,  deuxième  amoureuse. 


Cette  année-là  Bousigues  inaugura  un  nouveau  système  :  l'exploitation, 
concurremment  et  avec  la  même  troupe,  des  théâtres  de  Nantes  et  d'Angers. 
La  municipalité  lui  en  avait  accordé  l'autorisation.  Le  service  des  bateaux 
à  vapeur,  qui  venait  d'être  installé,  rendait  fort  commodes  les  commu- 
nications entre  les  deux  villes  et  permettait  de  varier,  assez  souvent,  le  réper- 
toire. 

La  campagne  ouvrit  par  un  prologue  en  vers  qui  lut  fort  applaudi  ;  je  nai 
pas  retrouvé  le  nom  de  son  auteur.  Bousigues  s'avanya  sur  la  scène  et 
adressa  un  petit  discours  au  public,  l'assurant  qu'il  ferait  tous  ses  efforts 
pour  le  contenter. 

Les  troupes  d'opéra  et  de  comédie  étaient  fort  homogènes.  Outre  Bousi- 
gues, dont  le  talent  de  haute-contre  avait  beaucoup  de  partisans  nous  retrou- 
vons dans  ce  groupe  M""-'  Delanoue,  l'une  des  favorites  du  public,  l'année 
précédente;  — elle  vint  remplacer  M™^" Lecouvrenr,  —  et  M""  Richard-Mu- 
téo,  délicieuse  dugazon,  qui  fut  bientôt  l'enfant  gâtée  des  spectateurs.  C'était 
une  comédienne  aimable,  enjouée,  toujours  en  scène;  chanteuse  agréable, 
quoique  sans  grande  niéthodo,  elle  supploaità  ce  défaut  par  un  goût  naturel. 


ROCHE —  LA  DAMB  BLANCHE  111 


Dans  la  comédie,  nous  remarquons  Roche,  jeune  premier,  mari  de 
M™"  Legrand.  Sous  l'excollente  direction  de  sa  femme,  il  fit  de  rapides 
progrès  et  no  tarda  pas  à  partager  avec  elle  la  faveur  du  public  qui  l'applaudit 
pendant  trente-deux  ans. 

\Ime  Ponchard  revint  à  Nantes  en  scptcmljrc  182.").  A  .sa  première  repré- 
sentation elle  reçut  un  accueil  assez  froid.  On  lui  en  voulait  de  la  fugue 
lu'ellc  avait  faite  au  courant  d'une  des  .saisons  précédentes,  mais  son  mer- 
\(,Mlleux  talent  no  tarda  pas  à  rompre  la  glace.  Elle  remporta  dans  le  liarbier 
un  trioniplie  splcndide. 

u  Avant  d'avoir  entendu  M""^'  Ponchard  dans  ce  rôle,  dit  le  Journal  de 
Nantea,  on  ne  laconnai.ssait  pas  complètement  à  Nantes.  >• 

Le  20  septembre,  eut  lieu  la  première  représentation  de  Rohin-dru-bni». 
C'est  le  Frei/srhùts  que  Castil  Blaze  avait  arrangé  sous  ce  titre,  i^e  clief- 
d'oeuvrede  Webcr,  mal  interprété,  n'eut  pas,  do  prime  abord,  le  succès  qu'il 
obtint  ensuite. 

Fernand  Corioz,  au  contraire,  qu'on  représenta  le  11  février  18*2(1,  conquit 
iuimédiatement  la  faveur  du  public.  L'opéra  de  Spontini  était  bien  monté. 
Ses  princijKiux  interprètes  étaient  ^I^L  Bousigues  Baptiste,  Faignet, 
M'"^  P.  Bousigues. 

Le  11  mars  182G  est  une  date  célèbre  dans  les  fastes  de  notre  Théâtre.  Ce 
jour  là,  en  effet,  la  Dame  lilnnche.  remarquablement  chantée  par  Bousi- 
ii;ues.  M"""  Bousigues  et  Uicl'.ard-Mutée,  obint  l'un  dos  plus  grands  succès 
qu'on  ait  encore  vus  à  Nantes.  Ceux  de  Cnndrillnn,  de  In  Vrstale  et  de 
Joseph  étaient  dépassés. 

Une  pièce  qui  attira  aussi  beaucoup  do  public,  pendant  cette  saison,  fut  la 
Fille  de  VF.cilé,  mélodrame  de  Pixérécourt.  Un  eiïel  de  neige,  une  inonda- 
tion, enfin  un  combatau  .sabre  firent,  pendant  de  longues  soirées,  les  délices 
des  spectateurs. /oc/ro  ou  le  Singe  du  Brésil  fut,  aussi,  une  des  nouveautés. 

Artistes  en  représentation  :  Ligier,  Bernard-Léon,  et  M""  Dupont. 


Bousigues,  après  un  an  d'essai,  abandonna  le  système  d'exploitation 
il'Angers  et  de  Nantes.  Les  abonnés  se  plaignaient  de  ce  que  le  répertoire 
so  trouvait  parfois  entravé.  Le  directeur  ayant  à  s'occuper  de  deux  théâtres 
ne  pouvait,  en  ollet.  donner  au  priniipal  tous  les  soins  nécessaires. 

Le  Conseil  municipal  vota,  pour  cette  campagne,  la  subvention  de  15.(iCK_)fr. 
mais  en  rechignant,  comme  toujours  : 

<(  Il  est  inouï,  est-il  dit  dans  la  dclibi'ration,  que  la  ville  soit  |)rivee  de  la 
lisposition  de  sa  propriété,  obligée  d'en  al)andonner  la  jouissance  &ins 
lier,   do  payer  au   gouvernement,  chaque  année,    pendant    vingt    ans. 


112 


LE   THEATRE    A    NANTES 


29.000  francs,  de  p.iycr  les  impôts,  l'entretien  de  la  salle,  et  de  donner 
encore,  malgré  ell(!,  irj.OOU  francs  à  un  directeur,  parce  qu'il  n'a  pu  soutenir 
son  entreprise  théâtrale,  m 


SAISON       1826-1827 
BOUSIGUES,    Directeur 

MoiiiA,  Chef  d'orchestre.  —  Roland  Régisseur. 


OPÉRA 

MM     KoDici-,  pninière  liauti' contro. 

C.HARi.KS,  driixii'me  haulo-contie 

Oi.iviKR,  deuxième  umoiiroux. 

Bazin,  haute-contre. 

Martin,  Martin. 

Lartiouks,  première  basse. 

RosANiiEAU,  deuxième  ba.sse 

Maliaro,  deuxième  basse. 

Krnottk,  truisième  basse. 

Lekkuvre,  laruette. 

AsTRuc.  triai. 
M"""    l'uNciiAiU).  [première  clianteuse. 

Maliahd,  i)remière  chanteuse. 

P.  BousKîUES.  forte  dugazon. 

IIerminik,  première  dugazon. 

G.  BousiGUES,   deuxième  dugazon. 

Brunet,  duègne. 

Chœurs  :  1.')  hommes,  12  femmes. 


COMÉDIE 

MM.  Mainvielle,  premier  rôle. 

Roche,  fils,  jeune  premier. 

Charles,  deuxième  amoureux. 

Honoré,  deuxième  amoureux. 

Reichestein,  deuxième  amoureux. 

Flammerion.  père  noble. 

Charles,  financiers. 

DoLiGNY,  premier  comique. 

AsTRUc,  premier  comique. 

ToiDoczB,  troisième  rôle. 

Lekebvre.  paysans. 

Roc.ROY,  manteaux. 
M""'    Legrani),  premier  rùle. 

Lf-.oN.  mère  noble. 

Winigues,  jeune  première. 

G    BocsiGUEs,  ingénuités. 

Fleijriet,  amoureuse. 

AsTRi;c,  soubrette. 

liRUNET,  caractère. 

Lejeune,  confidente. 


Les  abonnements  furent  augmentés  et  fixés  à  : 

A  rannée  :  Hommes  180  fr.  ;  Dames  110  fr.  —  Au  mois  :  Hommes  30  fr.  :  Dames  20  fr. 
Loges  h  l'année  :  1res  loges  et  baignoires  à  4  places,   880  fr.  ;  à  5  places,  1.015  fr.  ; 
i\  <■>  places,  l-ioO  fr. 

En  revanche,  le  nombre  des   représentations  de  rabonuement  fut  porté 
de  20  à  21. 

M'i"  Mars  revint  dans  le  courant  de  juin.  Elle  joua  :  Le  Misanthrope,  Le.<< 
Faus.ses  Con/idences,  Tartuffe,  Valérie,  L'Ecole  des  Vieillards,  Le  Jeu  de 
r  Amour  et  du  Hasard,  La  L'aille  d'Honneur,  Edouard  en  Ecosse,  La  Prin 
cesse  des  Ursins,  Le  Philosophe  Marié,  La  Coquette  corrigée,  L'Intrigue 
et  l'Amour,  La  Nièce  supposée,  Misanthropie  et  Repentir,  La  Jeunesse 
d'Henri  IV,  La  Comédienne,  Le  Secret  du  Ménage,  La  Jeune  Fetnme 
colère.  Les  Trois  Sultanes,  Le  Manteau,  Le  Mariage  de  Figaro. 

Pour  les  représentations  de  M""^  Mars,  le  prix  des  places  était  fixé  comme 

suit  : 

Fauteuils  et  parquets  :  5  fr.  —  Secondes  ;  îJ  fr.  —  Troisièmes  et  Parterre  :  1  fr.  50.  — 
Oiiatrièmes  :  1  fr.  -  Loges  grillées  :  2  fr.  50. 


AUGUSTE  NOUKBIT 


TROUBLES 


113 


Ligier  vint  aussi,  pondant  cette  saison,  ainsi  que  M'i*  Dachesnois. 

Ea  fait  de  nouveautés,  on  monta  la  Marie,  d'Hérold. 

La  situation  de  Bousiguea  empirait  chaque  jour.  Ses  frais  étaient  beaucoup 
trop  considérables.  L»;  9  janvier  il  fut  mis  en  faillite.  Après  quelques  jours 
de  fermeture,  le  Théâtre  rouvrit  ses  portes.  Les  artistes  s'étaient,  pour  la  plu- 
part, mis  en  société  sous  la  gérance  de  Mainvielle,  Iloland  et  Charles.  Le 
ballet  fut  congédié  comme  trop  dispendieux.  Le  Conseil  municipal,  touché 
de  la  situation  précaire  des  artistes,  vota  un  supplément  de  subvention  de 
4.000  francs. 

M""  P.  Bousigues,  dont  le  charmant  talent  était  très  aimé  à  Nantes,  partit 
pour  Paris  où  l'appelait  un  engagement  à  l'Opéra-Comique. 

La  baison  se  termina  cabin-calia. 


•  « 


La  campagne  1827-1828  s'ouvrit  sous   la  direction  de   NLM.  Jaubert  et 
Clormonl. 

SAISON     1827-1828 

JAUBERT    et    CLERMONT,    Directeurs 

Dblanoub,  chef  d'orchestre.  —  Charles,  rô^'iss.-ur. 


OPÉRA 

MM.  Auguste  Nourrit,  premier  ténor. 
t=AiNT  Anqk.  forte  deuxième  iiaule- 

contrc. 
Belkurt,  deuxième  haute-contre. 
Payet,  Martin. 

Dahancourt,  première  basse-taille . 
Dblaunay,  première  bas3c-ta.ille . 
HoNORft,  (h'uxièmu  basae-ta.iUe. 
Lefèvre.  larueUc. 
AsTRuo,  trial. 

Mm..   Delanoub.  prominrc  chanlfosc. 

Saint-.^nhc,  première  chanteuse  sans 

roulades. 
Richard,  ilogazon. 
Ledet,  deuxième  dugazon. 
Flburiet.  troisièm*;  amoureuse. 


Bbrger  Delaunav,  m^re  dugazon. 
CocHÈzE,  duèpne. 

COMÉDIK  ET  TRAGÉDIE 

MM.   Mainvielle.  premier  nMe. 

RoGUE,  jeune  premier. 

Fi.KiRiET,  troisième  amoureux. 

MicuKLAND.  père  noble. 

Charles,  flnanci<>rs. 

Fastelot,  premier  comique, 

AsTRC":.  deuxième  CDmique. 

ToL'noizB.  troisième  rôle. 

Lkkêtre, paysans. 
M—    Lr.dRAKP,  premier  n^le. 

Pastei.ot,  jeune  première. 

Fleuriet,  deuxième  amoureuse. 

.\8TRtTr,  soubrette. 

LACHArsB.  mère  noble. 


Cette  année,  le  nombre  des  représentations  pour  les  abonnés  fut  réduit 
à  22  par  mois. 

La  troupe  d'opéra  n'élait  pas  bien  fameuse.  Auguste  Nourrit,  l*'  ténor, 
i  tiiit  le  frère  du  céjébre  Adolphe.  Sans  avoir  l'inimense  talent  du  créateur 
d'Eléazar,  de  la^utre,  il  posséilait  aussi  de  belles  qualités  de  chanteur. 

Le  2  juillet  1827,  la  salle  Graslin  (ut  le  théâtre  d'un  véritable  combat. 
Belfort,  qui  jouait  dans  Joseph  le  réle  de  Siméon,  fut  accueilli  par  les  lilflcts 


114 


LE   THÉÂTRE  A   NANTES 


du  parterre.  Les  tçaleries  supérieure»  applaudirent  à  outrance.  Les  sifflets 
redoublèrent.  Alors  les  partisans  de  l'artiste  descendirent,  envahirent  le  par- 
terre, et  se  ruèrent  sur  les  siffleuri.  De  nombreux  coups  furent  échangés  et 
les  assaillants  finirent  par  ôtre  repoussés. 

((  La  police  usa  de  modération  et  fit  bien,  dit  le  Breion,  car  si  l'on  avait 
employé  la  force,  les  esprits  étaient  tellement  surexcités  qu'on  aurait  eu 
peut-être  à  déplorer  quelque  malheur.  » 

Nourrit  père  vint  jouer,  dans  le  m(''me  mois,  Œdipe  à  Colonne,  La  Vos- 
taie,  Camille,  Siraionice,  Les  Prétendus,  Richard. 

Une  jeune  fille  de  14  ans,  M"'-  Thuillier,  douée  d'une  voix  adorable,  sf* 
fit  entendre  dans  le  grand  air  du  Barbier  et  dans  plusieurs  vaudevilles. 

Le  fameux  mélodrame,  Trente  ans  ou  la  vie  d'un  joueur,  fut  joué  pour  la 
première  fois  le  9  octobre  1827.  Le  succès  fut  considérable.  Mais  à  la  troi- 
sième représentation,  le  parterre  cassa  le  jugement  des  troisièmes  et  des 
quatrièmes  et  l'œuvre  de  Victor  Ducange  fut  sifflée. 

Le  27  novembre,  Othello,  de  Rossini,  fut  remarquablement  chanté  par 
Auguste  Nourrit  et  M""*  Delanoue.  Fiorella  fut  aussi  jouée  pendant  cette 
saison. 

Les  artistes  en  représentation  furent  :  Armand,  Monrose,  des  Fran(:ais, 
Honoré,  Lcpeintre,  des  Variétés. 

Sous  cette  direction,  le  nombre  des  entrées  gratuites  s'élevait  à  18. 

* 

*  * 

SAISON     1828-1829 
JAUBERT    et    CLERMONT,    Directeurs 

Delanoue,  ehef  d'orchestre.  —  Roland,  régisseur. 


I 


OPÉRA 
MM.  TiifeopniLE,  premier  ténor. 

Gabbiel.    forte     deuxième    haute  - 
contre. 

Louis,  forte  deuxième  haute-contre, 

Welsch,  jNIartin. 

PoTET,  prcmièri'  basse-failli'. 

(îoNDouiN,  deuxième  basse-taille. 

Welsch  fils,  troisième  basse-taille. 

Lefebvre,  larucllo. 

ASTRUC,  trial. 
Mmfs  Delanoue,  première  chanteuse. 

Saint-Anc.k,  chanteuse  sans  roulades 

Descuanel,  dugazon. 

Dentrëuont,  jeune  ditgazon. 

Fleuriot,  troisième  dugazon. 

C.olson.  mère  dugazon. 

Coghèse,  duègne. 


COMÉDIE  ET  TRAGÉDIE 

MM.  Adrien,  premier  rôle. 
Roche,  jeune  premier. 
Rousseau,  deuxième  amoureux. 
TouDOuzE,  père  noble.  v 

^IiCHOT,  linanciers. 
Régnier,  premier  comique. 
AsTRUc,  deuxième  comique. 
FouavuD,  troisième  rôle. 
Lefebvre,  paysans. 

Miu"   Roche,  premier  nMe. 
Bui-.Y,  jeune  première. 
Fleuriot,  deuxième  amoureuse. 
AsTRuc,  soubretlc. 
GocuKSE,  mère  iinblf. 


RÉGNIER  115 

Dans  la  troupe  de  comédie,  nous  remarquons  un  nom  qui,  à  celte  époque, 
n'avait  aucune  notoriété,  mais  qui  devait  devenir  célèbre  un  jour  :  celui  de 
Régnier,  le  futur  acteur  des  Français.  Régnier  avait  alors  20  ans.  Il  avait  à 
peine  l'habitude  de  la  scène  et,  souvent,  il  ne  savait  que  faire  de  ses  bras. 
Mais  il  était  doué  d'une  vive  intelligence  et,  d'instinct,  comprenait  déjà 
romment  on  crée  un  rôle.  M"'«  Legrand- Roche  et  Mainvielle  donnèrent  au 
jeune  Régnier  d'excellents  conseils  ;  il  fit  de  rapides  progrès  et  gagna  vite 
la  faveur  du  public.  Il  resta  trois  à  Nantes  et  quitta  notre  ville  pour  entrer 
;ui  Palais-Royal. 

Parmi  les  artistes  de  la  troupe  d'opéra,  Potct,  une  basse  excellente,  et 
Welsch,  baryton  de  talent,  méritent  une  mention  spéciale.  Le  ténor  Théo- 
phile possédait  une  superbe  voix,  au  timbre  éclatant,  mais  l'art  du  ohant  lui 
faisait  défaut. 

Le  29,  à  l'occasion  du  séjour  de  la  duchesse  do  Berry,  on  exécuta  une 
cantate  dont  la  musique  était  due  à  M.  Mansui. 

Dans  le  courant  de  juillet,  Jaubert  se  retira  et  passa  la  main  à  Wclich. 

Les  nouveautés  de  cette  saison  furent  :  Le  Comte  Onj,  MazanicUo  et 
Guillaume  Tell,  de  Grétry. 

M '•' Georges  fut  revue  avec  plaisir  dans  Mérope,  la  Nouvelle  Jeanne 
(l'Arc,  Sémiramis,  les  Macchabées,  Médèe, 

Les  artistes  suivants  vinrent  en  représentation  :  Lepeintre,  Désiré,  Gon- 
tier,  Lafeuillade,  M™"  Boulanger,  Delaistre. 


r 


III 


DIRECTIONS  :  WELSCH.  —  NANTEUIL.  —  CHARLES. 

ROCHE  ET  DUMONTHIER.   —   BLOT.   —  BIZOT. 

POURCELT  DE   BARON.   —   VALEMBERT. 

1829-1836 

Nicolo-Isouard.  —    La  Muette.  —  Anecdotes.  —  M"'  Camoin.  —   Fra    Diavolo.  — 

Zampa.  —  Le  Pré-aux-Clercs.  —  Bisot.  —  Robert-le-DiaUe. 

M°"  Bamoreau-Cinti.  —    Marie  Dnrval, 


ETTE  année  le  Conseil  municipal  finit  par  se  montrer  raison- 
nable. Dans  un  moment  de  bon  sens  artistique,  il  se  décida 
à  inscrire  au  budget  une  somme  de  30.000  francs  pour 
l'exploitation  théâtrale, 

«  vu  que  le  budget  de  l'entreprise  théâtrale,  mûrement  examiné,  présente 
un  déficit  d'au  moins  15,000  fr.  p;ir  an,  malgré  la  subvention  d'égale  som- 
me; qu'une  fois  admis  que  Nantes  ne  peut  demeurer  sans  spectacle,  et  que 
si  le  théâtre  était  fermé,  il  en  résulterait  les  inconvénients  les  plus  graves 
pour  l'ordre  public  et  la  tranquillité  de  cette  cité  commerçante,  on  ne  peut 
refuser  à  l'entreprise  théâtrale  les  secours  nécessaires  à  son  existence.  » 

Voici  le  tableau  de  la  troupe  réunie  par  M.  Welsch.  En  face  du  nom  de 
chaque  artiste  se  trouve  le  chiffre  de  ses  appointements  mensuels  que  j'ai 
retrouvé. 

SAISON      1829-1830 

VTKLSCH,    Directeur 

FouR>fERA,  chef  d'orchestre.  —  Briard,  régisseur. 

OPKRA 

MM.  RoDEL.  premier  ténor.  LOOO  fr. 

NicoLO  IsouARD, première  haute-con- 
tre. 450  fr 

Gh*pki.le.    deuxième  haute-contro. 
416  fr. 

Darhont,  Martin.  920  fr. 

Lemonnier,  première  basse.  541   fr. 

GoNDOUi.v,  ba><8e-taiile.  317  fr. 

Palianti,  troisième  basse,  100  fr. 


Lefèvre,  laruelte. 
.\sTBi'c,  triaL 

M""  NiooLo-IsouARD,  première  chanteuse, 
2.200  fr. 

Bréarp,  forte  chanteuse.  500  fr. 

DK'-.hanel.  du;jazon,  300  fr. 

Dantremont,  jeune  dugazon. 

Depré,  troisième  amoureuse. 

Castel,  duègne. 


94 


118 


LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


COMÉDIE  ET  TltACÉDlE 

MM.  Mainvielle,  premier  rMo,  500  fr. 
ItocHK,  jeune  rùle,  300  fr. 
FfcLix,  troisième  amoureux,  14ô  fr. 
TouDoLZK,  p/;re  noble,  300  fr. 
lOYSKNLKUKi'SEh.troisièin»'  rôlt!  2iJ0  fr. 
C.HARLKS,  firiaucifr,  'iM  fr. 
Hkgnieb,  premier  comique,  250  fr. 


AsTBor:,  dciKJ*me  comique,  300  fr. 
I.KFKVHE,  paysan,  250  fr. 
Lkorano-Rochb. premier  rôle  ôOOfr. 
BtHY,  jeune  première,  yOO  fr. 
DANTRfcMONT,  deuxième  amoureu£e, 

250  fr. 
iJupHÉ,  troisième  amoureuse,  200  fr. 
AsTBtc,  soubrette,  280  fr. 
Ca.stel,  mère  aoble, 225  fr. 


Voici  maintenant  quels  étaient  les  appointements  de  l'orchestre.  J'ai  trouré 
utile  de  donner  ces  chiffres  afin  qu'on  puisse  les  coiiiparer  avec  ceux  d'au- 
jourd'hui. 

ORCHESTRE 


FouRNERA  ,     premier     chef    d'orcliestrc  , 

208  fr. 
BuLTis,  deuxième  chef  d'orchestre,  150  fr. 

RiijiAiiD,    troisième     chef     d'orchestre, 

Si  fr, 
Ghis  jt'une,  premier  violon-solo,  161  fr. 
Duc.HEMiN,  premier  violon,  70  fr. 
Lefedvre  fils,  premier  violon,  83  fr. 
Carilks,  premier  violon,  50  fr. 
Lucas  fils,  premier  violon  60  fr. 
Jauberd,  deuxième  violon,  45  fr. 
Manceau,  deuxième  violon,  41  fr. 
Lucas  père,  ulto,  55  fr. 
Melunet,  violoncelle-solo,  83  fr. 
Testé,  violoncelle,  83  fr- 


Gnis  aîné,  violoncelle,  100  fr. 
HuART,  violoncelle,  100  fr. 
André  père,  contre-basse,  66  fr. 
Burdeau,  contre-basse,  6C  fr. 
HuGOT,  première  clarinette,  100  fr. 
Ghduet,  di'uxième  clarint'ttf,  18  fr. 
DussEUiL,  premit-'r  hautbois,  ICO  fr. 
Lekebvre  fils,  deuxième  hautbois, 
Leduon,  première  basse,  83  fr. 
Flanuri,  deuxième  basse,  45  fr, 
Pelliory,  première  flûte,  90  fr. 
Reinghard,  deuxième  tlùte,  70  fr. 
Pelliory  aîné,  premier  cor,  8;3  fr. 
ANDRf:  fils,  deuxième  cor,  70  fr. 
Pelliory  jeune,  timbalier,  30  fr. 


50  fr. 


La  haute-contre  Nicolas-Isouard  était  le  frère  du  compositeur  de  ce  nom  ; 
c'était  un  charmant  chanteur;  malheureusement  sa  femme  n'ayant  pasréus. 
si,  il  résilia  son  engagement.  Ces  deux  artistes  furent  remplacés  par  Heur- 
taux  et  M"*  Lemoule. 

Le  baryton  Darmont  fut  remplacé  par  Poignet. 

Quelques  mots  sur  W^^  Lemoule.  C'était  une  artiste  délicieuse  qui  avait  une 
voix  ravissante.  Elle  suscita  dans  la  vieille  rengaine  des  Prétendus  un 
enthousiasme  indescriptible.  De  plus,  elle  était  d'une  complaisance  à  toute 
épreuve  ;  on  ne  s'adressait  jamais  eu  vain  à  elle. 

Los  journaux  et  Welsch  n'étaient  pas  très  bien  ensemble.  Maugin  vit  cou- 
perses  entrées  parce  qu'il  avait  critiqué  la  direction.  Malgré  raugment;itiûn 
de  la  subvention.  Welsch  ne  tint  pas  longtemps.  Le  8  juin  1829,  il  donna  sa 
démission  sous  prétexte  que  son  bailleur  de  fonds  ne  voulait  pas  lui  fournir 
d'argent.  Les  artistes  ic  réunirent  en  société,  sous  la  direction  de  Main- 
vielle. 

La  Muette  de  Portici  fut  montée  avec  beaucoup  de  luxe.  La  première 
représentation  ont  lieu  le  17  décembre  1829.  Los  interprètes  étaient  Mesda- 


ANECDOTE    —    TAPAGE  119 


mes  Lemoulp  et  Dochanel,  MM.  Rodel,  Lemonnier,  Chapelle,  Heurtaux. 
L'ouvrage,  qui  était  donné  dans  son  entier  et  non  pas  tronqué  comme 
il  le  fut  ensuite,  plut  beaucoup  au  public. 

L'Eruption  du  VVsare,  eut,  à  elle  seule,  autant  de  succès  que  louio  la 
musique  de  M.  Aubcr. 

On  joua  aussi  pendant  cette  saison  le  Siège  de  Corinthe,  le  Dilettante 
d'Aoiffnon,  Paniéla,  Marina  Faliero  et  l'Ecole  des  jeunes  f/ens,  comédie 
en  cinq  actes  de  notre  concitoyen  Anselme  Fleury,  qui,  plus  tard,  devait 
devenir  député  de  l'Empire.  Régnier  créa  un  rôle  dans  cette  pièce. 

Une  aventure  assez  drôle  arriva  un  soir  au  chanteur  Rodel,  qui  n'était  pas 
toujours  très  bien  accueilli  des  spectateurs.  A  une  représentation  de  la  Ves- 
tale, où  de  nombreux  sifileUs  à  son  adresse  se  faisaient  entendre,  il  quitta 
brusquement  la  scène,  monta  dans  sa  loge  et  se  déshabilla.  Le  commis- 
saire de  police  survint  et  l'invita  à  descendre  ;  mais  l'artiste,  irrité,  refusa 
d'obéir  et  insulta  le  commissaire.  On  fut  obligé  de  baisser  le  rideau.  Le 
public,  fort  mécontent,  s'en  alla.  Le  commissaire  posta  des  agents  a  i;i porte 
pour  arrêter  Rodel  lorsqu'il  sortirait.  Averti  par  l'un  de  ses  camarades,  le 
chanteur  emprunta  un  costume  de  femme  à  une  choriste,  et,  à  l'aide 
de  ce  déguisement,  il  passa  bravement  sous  le  nez  des  représentants  de 
l'autorité. 

Mais  le  lendemain,  le  tapage  recommença.  Le  public  exigeait  que  Rodel 
vînt  sur  la  scène  f:tire  des  excuses.  Le  régisseur  prévint  les  spectateurs  que 
l'iirtisto,  n'étant  point  au  théâtre,  ne  pouvait  répondre  à  cette  injonction. 
Mais  le  bruit  redoubla  et  prit  des  proportions  formidables.  M"*  Lemoule, 
qui  était  en  scène,  s'évanouit.  La  gendarmerie  arriva,  entra  sous  le  péristyle 
et  fît  évacuer  la  salle. 

Rodel  était  d'ailleurs  coutumier  du  fait.  Sifllé  une  autre  fois  dans  le 
Barbier,  il  quitta  la  scène  en  disant  au  public  :  «  Mesêieura,fai  l'honneur 
de  vous  saluer.  »  Mais  cotte  fois  il  revint. 

Les  frères  Bohrer  donnèrent  encore  des  représentations  à  Nantes  pendant 
cette  campagne.  Ils  remportèrent  leur  succès  habituel. 

Sous  cette  direction  on  joua,  dans  la  même  soirée,  la  Vestale  et 
Tancrède. 

Celte  année-là,  on  plaça  au  dessus  des  colonnes  do  la  façade  du  Théâtre 
les  statues  repré.sentant  les  Muses,  dues  au  ciseau  de  M.  Robinol-Ber- 
trand. 


Aprè,s  d'assez  longs  pourparlers,  la  direiction  du  théâtre  fut  confiée 
a  M.  Nanteuil,  se  disant  homme  de  lettres,  tout  comme  Léger.  Ce 
directeur  fui  ncMjimé  pour  trois  ans  ;  la  subvention  ét^iit  maintenue  à 
:U>,000  francs. 


120 


LE   THEATRE   A    NANTES 


SAISON    1830-1831 

NANTEUIL,  Directeur 
Dbi.anoue,  chef  d'orchestre.  —  X...,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.   Théophile,  elleviou. 

CiiAHEM.E,  deuxième  haute-contre. 

Ai.KBKi),  les  Philippe  et  rjavaudan. 

Dacosta,  Martin. 

Delaunay,  première  basse-taille. 

DuMO.NTHiKR,  dcuxlème  basse-taille. 

LftoN,  trial. 

Lekkvre,  laruette. 

Palianti,  troisième  basse. 
M"'»    Camoin,  première  chanteuse. 

Léon  ,    première    chanteuse  ,    sans 

roulades. 
Madinier,  dugazon. 
Dkpoix,  deuxième  duga/on. 
MoucHOT,  deuxième  dugazon. 
CoGHEZE,  duègne. 


COMÉDIE  ET  TRAGÉDIE 

MM.   MàiNviELLK,  premier  rôle. 

RooHE,  jeune  premier. 

Isidore,  deuxième  amoureux. 

ToLDOLJZE,  raisf^nneure. 

Charles,  financiers. 

Reonier,  premier  coraiquo. 

Léon,  deuxième  comiqu-'. 

Lakkite,  deuxième  comique. 

Mai  pas,  rôles  de  convenances. 
M"'s   Roche,  premier  rfile. 

BuRY.  jeune  première. 

Mouchot,  deuxième  amoureuse. 

VocHEY.  première  soubrette. 

CocHEZE.  cai-actéres. 

Mouturier,  caractères. 


Pendant  la  fermeture,  on  avait  entièrement  réparé  la  salle.  Les  peintures 
avaient  été  confiées  à  Philastre  et  Cambon.  Les  frais  .s'élevèrent  à  17,000 
francs  pour  les  peintures  ;  on  restaura  pour  4,100  francs  de  décors  et  le 
changement  de  velours  des  loges  coûta  1,400  francs.  On  posa  dans  le  vesti- 
bule, lesstatues  de  Molière  et  de  Corneille,  de  Molchneth.  Je  découpe  dans 
Le  Breton,  la  description  suivante  de  la  salle  nouvellement  restaurée  : 

«  L'œil,  en  entrant,  se  porte  vers  les  premières  galeries  ;  cette  couleur 
grise,  ces  rares  parcelles  d'or,  paraissent  d'abord  contraster  d'une  manière 
étrange  avec  le  ton  biillantdes  loges  et  des  secondes  galeries  ;  mais  remar- 
quez que  cette  simplicité  (^st  là  vraiment  un  ell'et  de  r;irt,  un  moy^n  de  faire 
ressortir  avec  éclat  l'or  qui  brille  au  second  plan  ;  cette  simplicité  dispariit 
pour  peu  que  vous  examiniez  lesgracieu.xdéuiils  jetés  sur  ce  fon^l  gris.  Ces 
cariatides  qui  portent  îles  guirlandes  de  fleurs,  ressortant  merveilleuscmonî. 
elles  font  relief  de  mémo  ([ue  le.>  fresques  de  Michel-Ange  et,  comme  pour 
rompre  l'uniformité  et  raccorder  d'une  manière  adroite  cette  galerie  avec 
l'ensemble,  le  peintre  a  placé  de  distance  en  distance  des  figures  grotes 
ques  pleines  d'une  expression  bizarre,  et  il  a  semé  au  hasard  un  peu  de  cet 
or  prodigué  sur  le  devant  des  loges. 

»  Cette  partie,  reflétée  par  la  lumière  du  lustre,  offre  un  coup  d'œil  éblouis 
sant.  Cette  richesse  se  retrouve  aux  secondes  galeries,  placées  au  centre  du 
foyi>r  de  lumière.  Sur  un  fond  orange,  se  détachent  des  ornements  légers  do 
diverses  couleurs,  et,  au  milieu,  des  plaques  d'or  entourent  des  tètes  fémi 
nines,  dont  les  traiis  charmants  forment  un  déli<ieux  contraste  avec  les 
figures  grotesques  des  premières.  Les  nouvelles  loges,  placées  au  fond  de  la 
deuxième  galerie,  sont  peintes  en  rouge  foncé.  Le  devant  des  troisièmes  et 
des  quatrièmes  loges  est  delà  même  couleur  que  les  deuxièmes,  mais   ici 


0^"   CA.MFIN    —    FRA    DIAVOLO  121 


l'or  disparait,  il  n'y  a  plus  d'abord  que  de  l'élégance  et  ensuite  de  la  sim- 
plicité. 

))  Nous  arrivons  au  plafond,  c'e«t  là  surtout  qu'il  faut  admirer,  car  le 
peintre  a  su,  à  la  fois,  réunir  la  rich<vss  '■  <'t  l'élégmce  à  la  grtice  et  à  la  légè- 
reté Seize  cornparlirni'nis,  divisés  par  de  larges  ba-juettes  et  des  ornements 
d'or,  et  dont  une  giniland<i  forme  la  bxse,  vont  se  réunir  en  se  rétrécissant 
par  degré,  pour  fain;  finir  la  voûte  à  une  rosace  en  or  qui  domine  le  lustre. 
Huit  bacchmtes.ressorianl  sur  un  fond  plus  sombre,  semblent  tourner  autour 
du  dômn  éclatant.  Ces  figurc>  riantes,  expressives,  ces  corps  charmanls,  et 
pour  ainsi  dire  aériens,  dont  un  voile  légîr  couvre  sans  les  cacher,  les  for- 
mes enchanteresses,  ont  queUjuo  chose  de  séduisant,  et,  loin  de  jeter  de  la 
lourdeur  dans  la  voûte,  elles  lui  donnent  de  la  gràco  et  de  la  vie.  "U 

»  Les  deux  colonnes  d'avant  scène  sont  blanches  avec  de  légères  canneluco^x^ 
d'or;  le  fronton  blanc  de  nn'^miî  et  ciselé  d'or,  supporte  les  armes  di'  Nintas  ; 

une  bande  découpée  desctMMl  sur  h;  manteau    d'Arle<juin !  ;• 

d'améliorations  ont  été  introduites  dans  la  salle  :    les  galeries  se  j  ^-ftl 

maintenant  jusqu'aux  colonnes,  cequiest,  en  effet,  beaucoup  plus)ag|^^><p  ^j, 
les  nouvelles  loges  de  secondes  et  l'amphithéâtre  des  qualrièraos  nui  a   rem- 
placé les  loges  grillées,  permettront  d'admettre  un  bien  plus  grllndf'  n'rimtti'é" 
de  spectateurs.  »  "  •  ^1»  .I'H.I  mi..'| 

Mi'«  Camoin  qui  succédait  à  M"«  I^omoule  avait  fort  à  faire.  Cependant 
les  admirateurs  de  cctte'dViWj|^^é''fWCW  forcés  de  sift)i'f"l«'«eliëMàe' «te-  la 
voix  splendide  de  la  noWféHë'\*èW»èh  fjJ«iMl>fV.M«|  fiioilxniUr.uh  i^-.r,,' 

Le  reste  de  la  troupe  d'ôftéf.i  0t;W  r^Vf^zimédibcr*»."'*  "'•  »-•  •i'Iuimh  f.ii..ii-.  ) 

Les  débuts  furent  défav^3t^bl(5«'ft'^1^î'.  'Dâf^osta;  'Deltîiinai'  'Ot^à  .  Nfo^dkJ' 

mes  Léon  et  Madinier.  Ces  hrtl9fti*s'ffirtntyoèffplak^s'Çnî  MM'^'Chnnwiri'^rG 

et  fils,  —  toute  la  famille  Cdttiwirt'aft'^WUVff  dlw^lféimlte'à  Nantei'j  ^;M<î8^« 

dames  Leroux  et  Lémery.   -  tu  i:-.l.r. M.  •.    r-.i-u  ,,.••■.  |    ,-..,..,1  tH«i,  |  i  ,,  ,i,,ii 

La  grande  nouveauté  de  eètt^tfittiâôn'fUf'/'Va^^Mrolte 'fl4J^4^éc«ttte*^le:i0t."■ 
Succès.  Les  interprètes  de  l'opéra  cher  aux  amateurs  de  rengaines 
étaient  M'"»  Camoin  et  Lémefy.'wSV.  ThKi|)rt'il'J,^biPîn pelle,  Léon,  Dumon- 
thier.  Le  Hre.tnn  trouva  que  (<4fcltirl>"Ai*i?ti«iavail  rcni)o*trtî»-'ptrIoiB/dfk«3u- 
rousos  inspirations,  mais  que  L'ûJj..reco4maiisaul  \\i,Jiii*tiui'.  qui  surcharge  de 
broderies  et  de  roulades  upi  (morceau  insignifiant  p^MPiiui  donner  une 
couleur.  Cette  juste  appréciation  r>^)|,p<^rtc  pas  de  signainrevaiaiis "i'ai i  toiil/ 


lieu  de  croire  qu'elle  émane  de  "NL  d. 


Boii^ïnéK"^x-mn(ï  i^rii'  d'é'Rime, 


Elle  me  rappelle  une  anecdote  .que  Charles  Gounod  me  raft<wjia^'U^^4pjjr  sur 


Auber.  ^^,. 


'tliiKliiriil'i    •MantJ  (•inliii  «Kl    .HftMMil«t 


«  L  auteur  du  Domino  Soir  avait    l'hahi^^e^  .<le  faire  ses 
drôle  lie  mani»'re.  Il  portait  tniJjKurs  dans  sa  poche  un  carnet,,......:    >....... 

neux.  Lorsqu'il  lui  venait  une  idé.-  miisicale.  il  l'inscrivai^.,  lyÇ  pafpft  se 
remplissait  assez  vite,  Auber'édrivaHt  but  ce  qui  lui  passai  par  la  tét(*r  Lq. 
carnet  plein,  le  musicien  allalf 'donner  à  la  porui  de  l'hAlel  de.),^  rue  Pigalle, 
où  demeurait  le  fabricant  d'opféras,  breveté  S.  (i.  D.  G.  Eugèaû  ScrjU*.  et 
lui  commandait  un  livret  Le  livret  fourni,  Auber  collait  Uimufîiqutf  .aux 
paroles,  faisait  par  ci  pir  là  quelques  raccords,  et  portant  .sa,  partiii.àjj  chez 
un  diiectour.  Puis  il  achetait  un  nouveau  carnet,  et  recoa»iu«àii  ;^i4  son  petit 
manège.  »  .,..,. 


132  I.K    niKATRE    A    MANTKS 


Etonnez-vous  après  cela  de  la  valeur  de  certaines  œuvres  de  cet  aimable 
S(  optique,  qui  no  sut  jamais  respecter  son  art. 

Le  4  janvier  1901,  M.  Nanteuil  envoya  sa  démission  au  maire,  démission 
motivée  p  t  son  impossibilité  de  continuer  la  campagne,  ses  pertes  étant 
trop  considérables.  Le  Tiiéâtre  ferma  ses  portes  pendant  quelques  jours. 
Il  rouvrit  le  9  janvier  avec  les  artistes  en  société  sous  la  gérance  de  Muin- 
vielle,  dont  on  avait  appris  à  connaître  l'honnêteté  et  le  dévouement. 

Pondant  cette  campagne,  on  voit  que  la  France  est  entrée  dans  une  ère 
nouvelle.  En  effet,  le  thédtre  joue  librement  des  pièces  telles  que  Les  Victi- 
niés  Cloîtrées,  Le  Jésuite,  Voltaire  chez  les  Capucins. 

'Èf^  mars  eut  lieu  la  représentation  d'un  opéra  en  un  acte,  composé  exprè-s 
pWMfi^tre  théâtre  :  Le  Sergent  Jirutus,  paroles  d'Emile  Souvestre,  musique 
dé 'î^^ftftlo.  Une  cantate  des  mêmes  autenrs,  écrite  en  l'hounTier  des  Polo- 

"%^/ifiHfi%H^°"P  ^^  succès. 

Ponchard.  de  l'OpéraComique,  vint  à  Nantes  en  1830. 

încbuoqoO    .tiu;!  •■A  '"I/^    i.   m.., 

cC^udaotkl^usîuçi. directeur  jae  *eç>péfleiitairt,fwmB  la  campagne  1831-1832. 
Les  insuccès  des  directions  précédentes  déwiWflge&ient  îous  les  prétendants. 
Certains  membres  du  Ço^^jeili l.|i»yopp&èi?e»it  imtoî«  de  supprimer  l'allocation 
tbé&tndt,  Aom  lerpréîfeïte  cm'.ftti«un  .directeur  nîavait  pu  se  maintenir  et  que, 
sb'i^iijiiia^fidônjlîtilt' Ti«^^  rk4';el«>/sefl  H'en  icairnt  pas  plus  mal.  Le  Conseil 
n-aoMpte  paf$)oettt|)roim»iit(ioA^V.9e/fi<Mïteftta(  seulement  de  réduire  lasubven- 
tion  à  à  15.000  francs.  Les  artistes  se  décidèrent  alors  à  se  mettre  en  société 
sofW;)Hla.<imi*M8t»&ti<îi)i^<le.«ôts,4â^l«Hrft<caiBîarades  les  plus  estimés. 

éiOfiicgnoi    ob    8-irjf)}r.fn);   y.uv,    'loil)    i/r'mo' 

-lOltMAatebS^!^-  itmCïOHtÈ:/ 1  IïTTMOT^TïIIER,    .A-dmlnlstrateurs 

ob  .'.-•Il  il)iij?.  if^4LÂMè'Crls?;<ih^^  i'èt«c»WlHé.' ^''bHKMK.-is,  r.-giaseur. 

i)iu;   T>ntiob    i(9i>flfi)iq   tfixiilifp^ii-.ni    «nooiofriTR^GÉDIE  ET  COMÉDIE     " 


JÎLOT,  Philipl»!  et  Gavaudan. 

DunuAH,  prcmioro  basso  chantaiito. 
pUMONTHiiiR,  iireiuii're  l)asse-taillo.,. 

9"'^'KvirA'^ft?tftiâi^?.y'ii)asfi  mèr'-'^ 


(îocuÈZE,  juTiniorc  ductino. 


%l^]  hociiK,  jeune  premier. 
Il  .1/lÎENÉ,  deuxième  amoureux. 
.,     ,  Touuou/.K,  raisonneurs. 

Charles,  financiers. 

Saint-Franc,  père  noble. 

.  :        Laut.mann.  premier  comique. 

I      ,,,  Edouard,  deuxième  comique. 
1  II  '    I"  ..... 

.1  DuPRAT,  grande  utilité. 

tMrVriRoGHE,  premiers  rôles. 

ii(  Demati,  jeune  première. 
.    ,     .   -VociiKY,  soubrette. 
,  I    :    r^loucHOT,  deuxième  amoureuse. 


viiofi  iWouTUHiEH,  deuxième  caractère. 


ZAMPA.  —  LE  PRÉ  AUX  CLERCS  123 

Cette  ann<^c  fut  terne  et  désastreuse  au  point  de  vue  financier.  Zampa  fut 
monté  assez  médiocrement.  Les  artistes  réunis  représenitTent  aussi  Antony, 
Les  Chouans  et  VIncendiaire  ou  la  Cure  et  rArcIieoèchê,  drame  dont  les 
allusions  politiques  firent  le  succès.  L'anniversaire  des  journées  de  juillet 
fut  célébré  au  Grand-Théâtre  par  une  pièce  de  circonstance  intitulée  :  Le 
30  juillet  1831  ou  Renn»:s,  Nantes,  Angers.  Cet  à  propos  suscita  un  grand 
enthousiasme. 

Le  16  janvier  1832,  à  l'occasion  de  l'annlTersaire  de  Molière,  le  Uiéàtrc 
représenta  une  charmante  saynète  de  M.  Ludovie  Chapplain  :  Molière  à 
Nantes  qui  lut  fort  applaudie. 

•  • 

Il  ne  se  présenta  pas  davantage  de  directeur  pour  la  campagne  suivante. 
On  était  alors  en  plein  choléra  et  les  circonstances  n'étaient  guère  encoura- 
geantes pour  un  entrepreneur.  Les  artistes  demeurèrent  en  société  sous  la 
gérance  de  M.  Blot. 

SAISON     1832-1833 
BLOT,    Directeur-Gérant 

Lekkbvre,  chef  d'orchestre.  —  Bbemen.s,  régisseur. 

COMÉDIE  ET  TRAGÉDIE 


OPÉRA 
MM.  RoDKi-,  premier  ténor. 

Bi.oT.  Philippe  et  (javaudan. 

MoLiNiEH,  Martin 

DuRUEc,  première  basse-t$ùlle . 

La.noê,  deuxième  haute-contre. 

DuMoNTiiiER.  deuxième  ba^se-taillc. 

Rkné,  troisiùmo  liaute-contre. 

Lekèvre,  iaruette. 

DfccouRTY,  Iriiil. 

Pai.ianti,  Iroisième  basse. 
M""*    Leuuui.e,  première  chuntuuec 

UouoiiKz,   première  cliantouiie   sans 
roulades. 

JussR,  dugazon. 

Fervillb,  deuxième  dugozun. 

CocitÈZE,  dut'-gne. 


MM.  RocKE.  jeuno  i)remior. 

Ren&,  dcnxiÀme  amoureux. 
TocDouzE,  raisonneurs. 
Ciurles,  financiers. 
SA.rNT-FRA>-c,  père  noble. 
LuxENis,  premier  comique. 
DfecouHTY,  denxièjne  eotnique. 
DupRAT,  (grande  ntUilé. 

M-"    Roche,  premier  rôle. 

Dematty,  jeune  première. 
Mfxval,  soubrette. 
Fer  VILLE,  deuxième  amoureuse. 
CocH&zE,  caractères. 


M^io  Lemoule  revint  à  Nantes  cette  année.  Elle  fil  sa  rentrée  au  milieu  de 
trépignements  d'cnthousia'înic. 

La  troupe  était  assez  bonne. 

Le  Pre-aux-Clercs,  joué  avec  succès  le  10  février  1833,  fut  l'occasion 
d'un  nouveau  triomphe  pour  M'^'  Lemoule.  Los  autres  interprètes  étaient 
MM.  Rodol,  Blot.  Dticourly.  M»»*  Bouchez. 

Le  Philtre,  les  4  sergents  de  la  Rochelle,  Lucrèce  Borgia  ^^  la  concep- 
tion la  plus  extraordinaire  qui  ait  paruo  jusqu'ici  u,  dit  le  Breton,  enfin  La 


124 


LE    THÉÂTRE    A    NAN-TES 


Tour  de  Nesles  furent  aussi  représentés.  Dans  ces  drames,  M'*  Roche  joua 
les  rôles  de  Lucrèce  et  de  Marguerite  de  Bourgogne  avec  un  lalt-nt  tout  à 
fait  supérieur.  Son  mari  lui  donna  parfaitement  la  réplique. 

Le  27  octobre  1832,  un  petit  incident  se  passa  au  théâtre.  On  jouait 
Napoléon  à  Schœnhrilnn.  Au  moment  où  l'empereur  prononçait  ces  paroles  : 
«  le  duc  d'Orléans  V  ali  !  du  moins  celui-là  n'a  jamais  porté  les  armes  contre 
la  France  I  »  d'assez  nombreux  coups  de  sifflets,  sortis  des  lèvres  des  parti- 
sans de  la  «  royauté  légitime  »,  se  firent  entendre. 


La  campagne  suivante  s'ouvrit  encore  sous  la  gérance  de  M.  Blot.  Mais 

tous  les  artistes  ne  faisaient  pas  partie  de  la  société.  Les  indépendants  ne  se 

montrèrent  pas  contents  de  Blot  et,  finalement,  celui-ci  fut  forcé  de  démis- 

«ionner.  M.  Léon  Bizot  fut  choisi  par  ses  camarades  pour  le  remplacer.  La 

subvention  avait  été  maintenue  à  15,000  fr.,  sur  le  considérant  : 

«  qu'un  spectacle  est  utile  dans  la  ville  ;  que  le  bénéfice  de  l'huile  qui  y 
est  consommée  produit  environ  2.000  fr.  à  l'octroi  ;  qu'il  produit  au  Bureau 
de  bienfaisance  une  somme  d'environ  4.000  fr.,  et  que  le  personnel  de  cet 
établissement  est  de  150  individus  tenant  leur  existence  du  Théâtre.  » 


SAISON      1833-1834 
BIZOT,  Directeur-Gérant 

Lefebvre,  chef  d'orchestre.  —  Bremens,  régisseur. 


OPÉRA 
MM.   Bizot,  premier  ténor. 

Blot,  Philippe. 

Delgourt,  Martin. 

Despré,  deuxième  basse-chantanfe. 

Saint-Ange,  deuxième  ténor. 

Rey,  deuxième  basse. 

RiGÉ,  deuxième  haute-contre. 

Legey,  laruetie. 

Décourty,  trial. 

Gastelli,  troisième  basse. 
M»"  Blot,  première  chanteuse. 

Roux,  première  chanteuse  sans  rou- 
lades. 

Pellier,  dugazon. 

Ferville,  deuxième  dugazou. 

Beroeron,  troisième  dugazon. 

CocHÉzE,  duègne. 


COMÉDIE  ET  VAUDEVILLE 
MM.  Roche,  jeune  premier. 
Toudouze.  premier  rôle. 
Blot.  deuxième  premier  rôle. 
Sa.i.\t  Franc,  père  noble. 
Saint-Ange,  jeune  premier. 
Lejey,  premier  comique. 
Decourty,  deuxième  comique. 
RiGEY,  deuxième  amoureux. 
M""  Roche,  premier  rôle. 

Saint-Ange,  jeune  première. 
Glairançon,  première  soubrette 
Pellier.  Dèjazet. 
Ferville,  première  amoureuse. 
Cochkze,  caractères. 
Ferville,  mère  noble. 
Bergeron,  troisième  amourea;?e. 


Donnons  une  mention  spéciale  dans  la  troupe  d'opéra  à  M.  Léon  Bizot, 
réritable  artiste,  excellent  musicien  et  chanteur  consommé,  à  M*"' Bizot, 
douée  d'une  voix  fraîche,  enfin  à  M"'  Roux. 

Ld  grande  nouveauté  de  cette  saison  i\x\  Robert-le  Diable,  (21  nor.  J833). 


KOBIiRT-LK-UlAULfc; 


12; 


L'opcru  de  McytTbeer  fut  monte  avec  un  soin  tout  particulier.  L'orchestre 
(ut  sensiblement  augmenté.  La  mise  en  scène  était  très  bien  réglée  et  les 
décors  furent  déclarés  superbes,  notamment  ceux  du  cloître  et  de  la  calbé- 
dnile,  —  pauvre  cathédrale,  dans  quel  état  honteux  elle  est  aujourd'liui  !  ! 
lînfin  rien  ne  manquait,  dit  le  lirelon,  si  et;  n'e.^t  un  t;im-lain  au  moment 
du  bris  du  rameau,  liizot  était  excellent  dans  Robert;  M™"*  Houx  et  Bizot, 
MM.  Lemonnier  et  Saiiu-Ange  eomplébiicnt  un  remarquable  ensemble.  Le 
succès  de  la  nouvelle  partition  lut  immense.  Pendant  24  représentations  la 
foule  ne  cessa  d'afllucr  au  Théâtre,  pour  venir  écouter  cette  musique  qui 
nous  parait  bien  vieille  aujourd'hui,  sauf  en  deux  ou  trois  parties,  et  qui 
alors  ouvrait  à  l'Art  une  nouvelle  voie. 

Les  autres  pièces  principales  qui  furent  montées  cette  année  sont  les  sui- 
vantes :  Les  enfants  d'Kdouard,  Tliérësa,  Bertrand  et  Raton,  Le  pr'ince 
d'I'Jdimbourff,  do  NL  Caralfa,  Angèle  et  enfin  Marguerite  d'Anjou,  une 
des  premières  partitions  d(<  Meyerbeer. 

M"'"  Pradher,  de  l'Opéra-Comique,  M"*  Ponchard  et  Lepeintre  vinrent 
en  représentations. 


«  • 


La  municipalité  trouva,  enfin,  un  directeur  pour  la  campagne  1884-1835, 
M.  Pourcelt  de  Baron.  Cet  industriel  donnant  «  les  assurances  les  plus 
positives  sur  la  bonne  formation  d'un  excellent  opéra,  d'un  bon  vaudeville 
et  de  la  couiédie,  »  le  Conseil,  sur  la  proposition  du  maire,  vota  une  subven- 
tion de  20.000  fr. 


SAISON    1834-1835 
FOURCELT    DE    BARON,    Directeur 

FKaKV-KAV,  chef  d'orchojslre.  —  X...,  rci^isbeur 


OPÉRA 

ywi.  iii/.oT.  premier  t'nor. 

Lk  1'i:tit,  dt'uxiomi-  lénor. 

Xavjf.h,  troisH'ino  tt-iior. 

Ki.KiRY,  baryton. 

Wai.tkh,  iirt'ini<'re  l)**s«. 

Waknikb.  dt^iiiièiiie  baHtic. 

CiRANiiKH,  laïuolte. 

Pkbiciion,  tiial, 
Mra's  FKRnY-FAY,  première  i-hantuu>«'. 

Bizot,  pn-mièn*  ohanteuso. 

Klrury,  pr»»nii<^r»'  «Uii^rzoii. 

Hkhvkv,  detixioiiie  ilitgafon. 

I.wvKNOAi.,  dfuxièiue  dugazoïi. 

rEHiciioN,  Iroisii'ine  dugaznn. 

CtONTiuEM,  duè^no. 


COMÉDIE  ET  DU  AME 

MM.  Lbmonnikr,  pruiiiitT  r<'>le. 

Roche.  deuxj«'mi>  ndo. 
Mkumkk,  jeune  premier. 
Xavikh,  deuxième  amoureux. 
Sai.nt-Frano,  pÏTô  MOlde. 
1'1lHi<:ho.n,  deuxièuu*  coutiqu«. 
Graxc.kk.  grim''. 
DcpRAT.  troisième  rùlo. 

M"'»  IlocHE,  premier  rùle. 
Matis.  jeune  premier»». 
Lovcnda:.,  H4>ubrwtt«. 
Hervcy.  Ueuxifuifl  aiDoiiroii'te. 
PtHiOHON,  troisième  ainomeiise. 
fiuCKKHiUR,  premiers  rar:u  (.res. 
BAKMNrt.  d«aiiAmei*  cHracl«^r*«. 
Marijm,  troiaivuM  aiuottr«UM- 


25 


12G 


LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


Celtfi  diroclioii  ne  devwii  pa.s  (iun-r  luiigL<.-iiij^>.  Lr  >ii*ur  Pourcclt  de  Baron 
était  un  vulgaire /a/.s(?/<r  qui  avait  essayé  de  jeter  la  poudre  aux  yeux  du 
public  sans  y- réussir.  Au  mois  de  juillet,  il  envoya  au  maire  sa  démission, 
et  les  artistes  se  virent,  encore  une  fois,  obligés  de  se  rcnicitre  en  sociét^i.  Ce 
syst(''me  ne  dura  pas  et  le  théâtre  ferma.  L'Administration  municipale, 
pendant  ce  temps,  demandait  à  grands  cris  un  directeur.  Elle  finit  par  en 
trouver  un  en  la  personne  de  M.  Valembert,  qui,  nommé  pour  trois  ans. 
réunit  la  troupe  suivante,  et  ouvrit  le  théâtre  le  12  septembre, 

FIN     DE    LA    SAISON     1834-1835 

VAJLEMBERT,    Directeur 

IIuNY.  clief  d'orchchtro,  —  JIurïaux,  régissiur 


opi':r.\ 

MM.  GRANrj-.iEA.N,  fori  ténor. 

Lahruyère.  ténor  It^ger. 

GuÊiiiN.  deuxième  ti'-nor  léger. 

PETrr  Waltkr,  basse  nolde. 

AVarnieh,  ileuxii'me  basse  nol)le. 

Fleury,  baryton. 

Périchon,  Irial. 

(Irangkr,  laruolte. 

Bkr<;krono,  troisième  l)asse. 
M""*    Lémery,  première  chanteuse. 

SciiiuwANECK,  forte  chanteuse. 

Fleury.  première  duga/.on. 

l^ÉRii^iioN,  deuxième  dugazon. 

(ioNTHUoR,  duègne. 


C.OMFDIE  IHI-VME 
MM.   HicjuniR,  premier  rôle. 

Graxh-Jkax,  premier  rôle. 

RocuK,  jeune  premier. 

Mkunibu,  deuxième  amoureux. 

Xavier,  Iroisièmf  amoureux. 

LuxEUiL,  premier  comiqai>. 

PÉRn:itox.  deuxième  comique, 

Saist-Fra.nc.  père  noble. 

IIURTAUX.  troisième  rôle, 
M""s    r.ur.ME,  premier  rôlf. 

Wextrei..  coquette. 

Mati.s.  jcnne  première. 

Sauiay.  pr  mière  soubrette. 

(ioNTHiEH,  mèrt'  noble. 

CocHÈZE,  caractère. 


A  partir  de  cette  année,  les  anciennes  dénominations  des  emplois  furent 
supprimées  dans  les  tableaux  de  troupe  et  remplacées  par  les  vocables  actuels 
beaucoup  plus  logiques. 

Cette  troupe  n'oH'i-iit  aucun  artiste  vraiment  remarquable  et  digne  d'être 
signalé. 

En  fait  de  pièces  nouvelles,  M,  Valembert  monta  Le  Chalet,  L'Iiatienne 
àAl[/er,Le  Âfuletier,  Marie  Tudor,  Catherine  Jlotcard. 

Artistes  en  représentations  :  Damoreau,  Lepcintre  et  Perlet, 


*  * 


Lorsqu'il  s'agit  de  voter  la  subvention  pour  la  nouvelle  campagne,  les 
discussions  recommencèrent  de  plus  belle  au  Conseil  municipal,  lùifin. 
après  de  longs  débats,  une  indemnité  de  25,000  fr.  fut  votée  sous  la  con- 
dition qu'il  y  aurait  un  théâtre  de  Variétés.  Le  directeur  était  libre  de  ne  pas 
accepter  cette  concurrence,  mais  alors  il  ne  recevrait  que  20,(KX)  francs, 
M.  Valembert  préféra  la  seconde  subvention. 


LESBROS. 


M"""  DAMOREAU  CINTI.   —  ACCIDENT 


127 


SAISON       1835-1836 
VALiEMBERT,    Directeur 

lli  -  , .  cli.-f  (r.irchoatre.  —  Iliurvix,  p'giss.'ur 


OPKIt.V 
MM   J.Ai'iyiJi:.  premier  toiior. 

CiuÉRiN.  deuxième  ténor. 

Xavikr.  troisiômt'  ténor. 

I'aykn,  prt'niit're   basso    chantante. 

(ioNDuLix,  «leuxiénu!  basse  chantante. 

Lk.siuios,  baryton. 

CiiAUiil^'.itY,  ténor  comique. 

(iitANCKR.  tcnor  j^riine. 

Bkhheroxo,  troisième  liasse. 
M'"'8Cai.a(;i.t,  piemier  sojirano. 

MoiNKT,  fort  .soprano. 

('.II \uiiKit Y,  premier  soprano  comique. 

Li;maiue,   premier  soprano  dopera 
Comique. 

Vai.kntink,  dcuxiènie    soprano. 

Fanxy.  troisième  soprano. 

GocHÈZK,  duègne. 


'      COMÉDIE  I)RA^!K 

\\M.    Dkorui.ly,  premier  rûle. 
Hoi'.iiK.  j»'une  premier. 
Xavieh.  deuxième  amoureux. 
THin\Ri).  |)reniier  c<^imique. 
•  iHAMnf^iuY.  deuxième  comique. 
C.HMd.Ks,  tinanciers. 
HuhiAi  x.  troisième  rôle. 
Hlrtki.,  jîrande  utilité. 

M"'»   RocHK.  premiiT  r<Me. 

Fresson,  jeune  premier  n'de. 
MoisKT,  jeune  premier  rùle. 
Valkx  riXK,  jeune  premier  rôle 
Saulay,  soubrette. 
DuRAM»,  mère  noble. 


Les  fl<M)Uts  furent  assez  longs.  Lo  iciior  l.;ipi<iue,  .siillc  drs  le  premier 
soir,  fui  successivement  remplacé  par  M.\I.  Teiss«Te,  Couturier  et  finale- 
mont  par  Gellas.  Le  public,  cette  année-là  d'ailleurs,  semblait  n'être  pas 
très  bien  disposé.  M^'^Callault,  qui  avait  pourtant  été  fort  bien  accueillie, 
n'eut  pas  le  courage  de  continuer  .ses  débuts  et  préféra  résilier.  Elle  fut  rem- 
placée par  M"'  Minori'l,  qui  possédait  une  voix  splendide,  mais  qui  ignorait 
à  |)eu  près  complètement  l'art  du  chant.  Parmi  les  autres  artistes  de  cette 
troupe,  il  faut  citer  Lesbros,  baryton,  doué  d'un  superbe  organe,  et  Payen, 
<'\cellente  basse. 

M"»*  Damoreau-Cinti  vint  chanter /?o6fr^  ;  elle  suscita  un  enthousiasme 
indescriptible.  Pendant  ses  représentations,  la  foule  assiégeait  le  Théâtre.  En 
octobre,  Marie  Dorval  fut  applaudie  à  son  tour.  Klle  joua  Chatterton, 
Anr/r/e,  Antoni/,  Clntildr,  Sept  Heures,  Jeanne  Vnubernier,  Angelo, 
Trente  ans  ou  la  Vie  d'un  joueur.  Mrnst  se  fit  entendre  aussi  avec  un 
immense  succès.  Les  autres  artistes  en  représentation  furent  :  Lafond,  Lhé- 
rie,  Henry  Monnier,  Philippe,  M""  Garcia- Vestris,  M.  et  M"»"  Allan. 

L'Eclair,  Chatterton,  Antfelo,  Lestocq,  Le  Pirate,  Le  Serment,  paru 
rent,  cette  année  là,  pour  la  première  fois  sur  l'affiche. 

A  l'une  des  représentations  de  Robert,  données  par  Lafonil,  un  accident 
qui  aurait  pu  devenir  grave  arriva  au  dernier  acte.  Payen  (Bertrara) entraîna 
avec  lui,  dans  un  mouvement  mal  combiné,  Lafond  et  M™«  Moinet  sur  la 


128 


LE   THI^IATRE   A    NANTES 


frappe.  Celle-ci  s'ouvrit  brusquoment  ;  Lafond  disparut  à  moitié  ot  put  se 
retenir  au  plancher  ;  Paycn  tomba  sans  se  faire  de  mal,  M'"-  Moinet  fut 
renversa'  la  tùte  dans  lo  vide.  On  accourut  au  secours  des  artisti's;  la  chan- 
teuse fut  emportée  évanouie  et  la  représentation  ne  put  être  terminée. 

D.iiis  le  courant  d'octobre,  M.  Valembert  donna  sa  démission  pour  la 
campagne  suivaiiU-.  .TiKfinVi  la  fin  <)<•  li  <n.,...  .-n  /•mu.  ji  Ht  face  a  ses 
0  nj^agements. 


fT:}:^^^  '  -^mm 


IV 


DIRECTIONS  :  PONCHARD.   —  ROUX.  —  LEMONNIER 
LAFEUILLADE   —  PRAT.    —  LAFFITTE. 

ia36i8n 

yfTIiUlou  —  Ileurtaur — Guillaume»  Tell  —   r>>sbro!»  —  Emeutes  —  J.a.Iiiiv»'— 

/[prnani  —  Les  llu^riienoU  —  llVrme/«n  —  Lncie  «le  Lami-rmonr  — 

M"  PrévQxt-Colon  —  I,a  Favorite  —  Ilenttani^- 

Léon  —  Ln  Fille  du  Hégiiiient  —  Noriiia 

Ilmn-r    —    M"'   Mnrrjut'Von    —    IstnQi'l   — 

Ai'i'C'fnfi"! 

^•/^jf  H  (liiiTicur  chois:  |»;ir  la  iiiiitiici|>alité  pour  la  sai^o»»  183<;-1S37, 

y^foçfA    f>il  M.  Poncliard,  imisicion  d'un  <«Mtniii  int'rite.  La  subvention 

'^À'iS   ("îtait  (le  2."i.0(X)  fr.,  mais  le  directeur  était  forf<^  d'exploiter  \o 

t=g^'- ^ 'X^3^   théâtre    dos   Variétés.    La  troupe  réunie  offrait  un   excellent 

ensemble.    Les  dêltuts  se  passèrent  snn<  .>n,.,>inl.r..  :  ;i  i,\    ont  pa.s  tino  ^ou!«» 

ehute.  Voici  la  liste  des  artistes: 


SAISON      1836-1837 
PONCHARD,    Directeur 


HUNV.   .•l,..f  .l\,ivl,.  vil-. 


\ 


r.  '.Mv ^'-iir. 


opi^:ha 

MM.  r.i7oT,  pn-mier  tt'iior. 

Ci[i:vAi.iKi\,  premier  U'-nor. 
<  '.iiKMKi.sER.(leu\itS(iio  toii'.tr. 
MouvAiiET.  trnisii-mi'  t<'iior. 
Mkubtaix,  pn'miî>ro  basso-chant. 
HRK.rots,  prcmiôp'  basse. 
Ia:siino3,  baryton. 
Urodki.lk.  tèuorrnmique. 
tiRAMiKR.  li'iior  grim»'. 
I.AviiCAT.  troisième  basse. 

M"'  •    Tirii.i.KN,  premii-TO  sopnmo. 
Hi/or,  proinit-re  aoprino. 
Mii.i.Eit.  IraTesti»'». 
KuK.TON,  deuxième  soprano. 
I  .KVY.  deuxième  «Oprano. 
t  .uKVALiK.n,  deuxième  soprano. 
Durand,  coutralto. 


.AM.ET 

MM.  Acmt.i.K.  maître-premier  danseur. 
Adoi.11! 

.M""  Fann\    i  .  ■•  danneu»»' 

<  .i.<>rii.DK,  deuxième  danseuse. 

Huit  fi'Mi  r  :intis 


'MKDIi:  DR.VMK 


MM.  1 


•M-  rùle. 
'l  iint'urs. 

Ai.K\is. jeièii.-  premier 
Pot  VKnîT.  d.Mixi.'iiif  amoup-ux. 
III. 

rromiiju»". 
!'>iu)NnRi.,  pn»mier  romique. 
\  At.LF.T.  deuxième  oomicfur. 
Vn.vtolk,  troisième  riMe. 


i:}() 


LE  TIIKATKK   A    NANTES 


Mines  VENZKr..  ipkiiip  r  mlr. 
J'7'.MX,  jfiino  première 
Levy,  (loiixif'ini!  rôle. 
Anaïh,  troisirmii  ainonnmBe. 
Ciii;vALii:n,  troisième  amourcii-jc 


M'""    lîiunuN,  «li-uxi.mi-  n-le. 
MixvAL.  soubrette. 
Durand,  mère  noble. 
ilof.iik/.K,  iiH-Te  noble. 


J'ai  déjà  parlé  de  quclquos-uns  des  chanteurs  ci-dessus.  Il  faut  donner 
au.ssi  une  mention  toute  spéciale  à  M"'"  Thillon,  dont  la  voi.K  était  d'uni* 
pureté  délicieuse  ;  à  M"'»  Miller,  et  enfin  à  M""  Heurtau.v  uik'  hassechan- 
tante  roinarqual)le  qui  vocalisait  avec  une  charmante  facilité. 

C'est  à  la  direction  Ponchard  que  l'on  doit  la  mise  à  la  seine  de  Guii 
laume  7e// (8  juillet  I8.3G).  Les  aniateursnantaisdésiraient  vivement  applau- 
dir l'opéra  deRossini.  11  fut  très  favorablement  accueilli,  mai.s  son  succès  fut 
join  d'égaler  celui  de  Ii*oherl-/c  Diable.  Lesbros  fut  superbe  dans  Guillaume, 
MM.  Bizot  et  Ileurlaux,  M™'''*  Thillon  et  Bizot  le  secondèrent  dignement. 
Huny  avait  apporté  tous  ses  soins  à  l'exécution  de  cette  œuvre,  et  .sous  son 
énergique  direction,  les  musiciens  firent  merveille.  Malheureusemept,  le 
lendemain  de  la  première  de  Guillaume,  M.  Huny  partait  pour  Marseille, 
où  il  venait  d'étie  nommé  chef  d'orchestre.  11  laissa  à  Nantes  d'unanimes 
regrets. 

Le  Cheval  de  Bronze  fut  apssi  une  des  nouveautés  de  la  saison  ;  le  succès 
de  cette  chinoiserie  plus  ou  moins  musicale  fut  immense.  Le  Postillon  de 
Lonf/Juniean.  (hiatuve  III,  qui  fut  splendidement  monté,  —  la  musique 
étant  impuis.sante  à  soutenir  l'œuvre,  il  fallait  trouver  un  moyen  pour  attirer 
le  public,  —  Le  Dieu  et  la  Baijadùre,  le  Revenant,  la  Nonne  sanglante.  Les 
Sept  enfants  de  Lara,  Kean,  Une  famille  au  temps  de  Luther,  furent  les 
principales  pièces  jouées  sous  la  première  direction  Ponchard. 

Le  violoniste  Haillot,  M'"''  Pradher,  M.  et  M""^  Allan,  Bocage,  Lepeintre, 
et  Ué\  ial,  vinrent  donner  des  représentations. 

* 

■Xi    * 

l\)nchard  conserva  la  direction  l'année  suivante.  La  municipalité  rédui- 
sit les  charges  de  la  direction.  L'obligation  de  jouer  aux  Variétés  ne  fut  plus 
que  facultative,  et  l'opéra  ne  fut  exigé  qu'à  partir  du  quatrième  mois. 


SAISON      1837-1838 
FONCHA-KD.    Directeur 

Thillon,  clief  dorcbostri'.  —  Charlks,  régisseur. 


OPI^îA 

M.M.    'l'EHnA,  fcrl  téiiof. 

LEMAinK,  ténor  lijj;or. 
Gu.^^TAvi:,  deuxième  ténor, 
Papui:t,  b;irytoii. 


MM.    I.KMOXNier,  première  basse. 
(  Iamkt,  deuxième  basse. 
Pkuhon.  ténor  comi<iue. 
Vallkk,  deuxième  ténor  comii|uc° 
Granokr,  ténor  grimo. 
Lkoi'old,  troisième  bas.se. 


KMEUTE  —   LA  JUIVE  —   HERNANI 


] .{ l 


M'""*  'J'iiiLLQN.  i»rc'iiii<'re  soprano. 

LEME8I.K,  première  soprano  sérieux. 
Knix  soprano  conii(|uç.  • 

Lausth,  stiprann  ci)ini<[iif. 
J)LRANi),  contralto. 

DRAMK  it  CO.\l£UIi: 

M. M.    Roche.  j<'unf  premier. 
TocDOi;/.K,premifr  nM»'. 
Ai.Kxis,  jeune  premier. 
Lacoste,  deuxième  amoureux. 


J^HARLKs.  financii-rs. 
(iRANOK.n,  grime. 
lti:.>Ê,  premier  <  .mr.i'i.  . 
Vali-et.   dcOT  e. 

Lkoi'Old,  troiiii-  im-   ■  .^i.oque. 
M»»»    Roche,  pn'niier  rôle. 
Félix,  jeune  première. 
Saui.mkr.  d*>)<xièm«'  amoureuse. 
A^•^■  iiourcuse, 

Co'  I  — . 

Durand,  mère  noble. 


La   troupe  de  coméilie,  cette  annëe  lu,  était,  en  général,  fort    mauvai-c 
I/opéra  était  su  pport:ible.  En  .somme  la  saison  fut  dos  plus  médio<res. 

Le  dimanche  10  décembre  1837,  on  avait  affiché  l'Ambassadrice  et  la 
MiirtU;  ((  avec  un  nouerait  donoucmont .  »  L'attrait  de  <o  lon^  spectacle 
avait  attiré  beaucoup  de  monde.  Mais  quelle  ne  fut  pas  la  surpii.se  de>  >pec- 
tateucs  de  voir,  à  la  fin  du  4'  acte  de  la  Muette,  les  musiciens  plier  bagages, 
la  rampe  s'éteindre,  et  le  lustre  commencer  à  baisser.  On  se  demande  si 
t'est  là  le  nouveau  dévouement  promis,  et  les  murmures  éclatent.  Bientôt  la 
salle  est  en  émoi.  Les  pri)je<tiles  pleuvent  de  toutes  parts;  [Xîtits  bancs, 
chaises,  strapontins  volent  dans  l'orchestre  et,  lancés  avec  adresse,  défoncent 
les  timbales  et  les  basses  ;  on  brise  le  lustre  du  vestibule,  on  casse  aussi  les 
reverbcresdu  péristyle.  La  police,  impuissante  à  mainteiu'r  la  foule,  fut  for- 
cée d'aller  chercher  une  brigade  de  gendarmerie  qui  mit  plus  d'une  demi- 
heure  à  faire  évacuer  la  salle.  Le  lendemain  l'administration  municip;ile 
s'émut  du  méconh'utement  général.  Le  maire  fit  appeler  le  directeur,  le 
tança  vertement  et  le  menaça  de  supprimer  la  subvention  s'il  ne  faisait  pas 
ses  efforts  pour  contenter  le  public. 

Le  fait  le  plus  important  de  cette  piteuse  .saison  fut  la  représent;ition  do  la 
Juicf  (7  mars  1H3H).  La  soirée  commença  sous  les  plus  mauvais  auspices.  Le 
lever  du  riileau  était  annoncé  pour  G  h. 1/4.  et  l'opéra  ne  commença  qu'après 
7  heures  au  milieu  d'un  tapage  éjwuvan table,  NLnis  l'attrait  ilu  s|K'Clacle 
calma  bient«>t  les  esprils  irrités,  Ln  yu/re  remporta  un  triomphe  complet. 
M"*  Lemoide  qui  se  trouvait  en  représentatiQD  à  Nantes,  chanta  merveilleu- 
sement Kachel.  Le  cardinal  était  fort  bien  représenté  par  Lemocnier-  Les 
autres- rôles  étaient  passablement  tenus  par  MM.  Terra,  Lemaire,  M""  Lo- 
meslo. 

Ifcrn^ni  fut  joué  cette  année.  Immense  succès  pour  l'œuvre  et  les  deii.v 
principaux  interprètes,  M.  et  M'""  Roche.  Parmi  les  autre?  nouveautés, 
citons:  VAmbassafln'rrAe  Domino  A'o/r  qui  cxeiui,  parait  il,  un  long  ennui, 
—  tout  comme  aujourd'hui  —  et  la  Double  Fchelle,  la  premier"  i' ■•  ■«  <rin! 
jeune  musicien,  bien  inconnu  alors,  du  nom  d'Arabroise  Thoma 
M"»»  Fay,  Bouffé,  Ligier,  Odry,  vinrent  en  représentations. 


13;^ 


L1-.     lllfcATHK    A    .NANTliS 


Uiif  iioiivillc  duocliou  l'uiicliard  rtait  imposhible.  La  mairie  choit>ii 
comme  diiecttHir,  M.  Roux,  mari  do  la  crôatrico  du  rôle  d'AIic»'  do  Ifohfrt . 
à  Nantes. 

La  sitln  iiiiiuii  (iriiiciii.i.  h\i-(,"  a  :ir>,0(/(»  iruics  ;  d*.'  plus,  la  viiit*  |>i<'n;i)l  .1 
sa  charge  le  pai<'im'nt  do  IV-clairage,  jusqu'à  concurrence  de  <j.<KX)  francs, 
celui  d'un  décor,  jusqu'à  1,200  francs  et  donnait  encore  une  indemnité  d<- 
200  flancs  au  directeur,  pour  clia(|ue  décor  repeint,  jusqu'à  concurrence  d»- 
1,200  francs.  Pendant  l'été,  le  vaudeville  était  seul  exigé.  Le  nouveau  dire, 
leur  profita  de  cette  faculté  qui  lui  était  laissée,  d'où  mécontentement  du 
public,  habitué  à  avoir  une  troupe  complète  toute  l'aunnée.  Le  soir  de  l'ou- 
verture, le  tapage  dura,  sans  discontinuer,  de  sept  heures  à  onze  heures.  L.- 
directeur  céda  etannon(,a  qu'il  donnerait  une  troupe  de  comédie  complète. 
Le  tapage  se  calma,  mais  pour  recommencer  les  jours  suivants.  On  voulait 
l'opéra.  La  mairie  ferma  le  Théâtre  pendant  (juelque.s  jours  ;  enfin  un  arran- 
gement surveim  avec  la  municipalité,  qui  augmenta  de  4,500  francs  la  sub- 
vention, permit  à  M.  Roux  de  donner  une  troupe  complète  et  d'ouvrir  défi- 
nitivement Grasiin. 


SAISON     1838-1839 
ROUX.    Directeur 

Hicni;.  chef  d'orclieslrc,  —  l-'ior.  n-gisseur. 


OPÊI\A 
MM.  WicRMKLEN.  fort  ténor. 

AlAnuc,  d<mxinnic'  fort  lénor. 
.Iocrd'iikuil,  ^lartiii. 
Pmji.vkrt,  première  liasse. 
^loNTHKtiii.,  trial. 
(JKANOKR,  laruelle. 
M'""  ÏEssEiRK,  chauteuse  légère. 
Rocx,  falcon. 
Mî[.i.i:r,  (lugazon. 
HoNoRiNK,  iiiére  dugazoïi. 
Hkiinard,  dnè},'iir. 
I.iMN.  deuxième  chanlriisr. 

I3ALLKT 

MM.  Toussaint,  premier  danseur. 

L\UREN(;oN,  deuxième  danseur. 
M"-  UofSKKi.ET,  première  danseuse. 

JjAURt.N^^.v,  Jeuxième  dunseuse. 


r.OMÉDIE 
MM.  TouDouzE,  premier  rùle. 
HocuK,  jeune  premier. 
(ii;RMAiN,  deuxiime  jeiiue  premier 
Mdhkac,  i>remi«T  amoureux. 
«'.irAKLKS,  liiianciere. 
KiGAUK,  deuxièmes  rôles. 
(iRANciKH.  grimes. 
Gkrmain.  père  noble. 
Valmont.  premier  comique. 
MoNTRKcn..  deuxième  comiipie. 
M  "    liocuiù,  premier  r<jle. 

Hi:aui>oin,  jeune  première. 
Miller,  pi-emK'n^  amoureuse. 
litLiioNT,  jeune  amoureuse. 
.'^AiiiNE,  coquette. 
Valmont,  soubrette. 
<;tuxMAiN,  mère  noble. 
(locHèzE,  grime. 


Le  nouveau  directeur  montra  peu  d'activité,  et  bientùt  il  se  trouva  dans 
l'impo.ssibilité  de  faire  face  à  ses  eug.igciucnUs.  Les  artistes  se  couslituèreot 
en  Société,  mai^  iraidcrenl  à  leur  Il'(c  NL  Uoux. 


1  Af. 


Los  llinjunn<tts,  promis  depuis  longtemps,  furent  enfin  jouOs  le  21  murs 
isliî).  L'e  elief  d'œuxTe  de  M«-yt;rln'er  fut  représenté  avec  le  !•'  tableau 
dn  .V  acte,  que  l'on  coupe  aujouri^*liui.  Iv  t<^nor  Wermelen  fil  un  exc«'ll  it 
Raoul.  Dans  le  duo,  il  eut  dc:;  moinenis  dignes  d'un  çrand  artiste.  M- 
Roux  chanta  bien  Valentine.  Les  autres  interprèles  étaient  M™""  Tesseirc  et 
Miller;  MM.  SlAnge  et  Jourdeuil.  Le  nouvel  opéra  remporta  un  vif  suc- 
cès, mais  les  premiers  soirs  le  public,  dérouté,  resta  fort  indécis.  Camille 
Mellinet,  un  connaisseur  pourtant,  écrivit  le  lendemain  de  la  représentation  : 

Nous  sommes  sortis  «tourdis,  sans  avoir  rien  retenu,  rien  compris.  C'est 
une  sortf^  de  fantasmagorie  accompagné;'  d'un  grand  bruit  qui  nous  a  la; 
ennuyés  et  fatigués.  »  Cette  œuvre,  qui  parait  si  claire  à  présent  et  <jii  -n 
lance  toujours  à  la  U'^te  des  partisans  de  la  musique  niodi'rne,  ne  fut  pas  plu> 

luprise,  de  prime  abord,  [)ar  les  spectateurs  d'autrefois,  qu'une  partition 
de  Wagner  ou  de  Saint-Saëns  par  les  speeLiteurs  d'aujourd'hui.  Si 
nos  p<''rcs  ne  se  décourageaient  pas.  Ils  revenaient  enlt;ndro  el  li 
par  s'enthousiiismer  pour  l'ouvrage  (|ui  les  avait  tant  ennuyés  lo  premier  soir. 

Ou  joua  aussi  pendant  cette  campagn<'  Manon  Ddorme.  Hutf-Blany  Anne 
(If  Hott'f/n. 

M'i"  (îeorgcs  vint  jouer  Marie  Tudor,  Lucrcce  Borgia,  Afrropr,  la  Tour 

Xcsle,  et  Frédéric  Lemaitrc  se  vit  acclamer  dans  Richard  Darlinr/ton. 

<  nhcllo,    l'Auhrrf/e   «les   Adrets,  Robert  Marair<\   M"""   Dorval,   Dérivis, 

Lhérie,  Lepeiiitre  el  I*hili[)pe  furent  les  autres  artistes  en    rcpréscntiitions. 

Deux  journaux  île  théâtre  se  fondèrent  pendant  cette  saison  :  Veri-Vert  et 
la  Corbeille.  Ce  dernier  éU.iit  fort  bien  rédigé  par  V.  Maugin.  La  Mairie 
autorisa  ces  feuilles  à  se  vendre  dans  la  salle  sous  les  conditions  suivante^  : 
1"  Les  vendeurs  devaient  être  munis  d'une  plaque  portant  le  nom  du  journal  ; 

Ils  ne  pouvaient  vendre  que  pendant  les  entr'actes;  3"  Le  titre  du  journal 
i>ouvaitseul  être  crié.  Cette  autorisation  ne  t;irda  pas  à  être  supprimée.  Le 
directeur  ayant  retiré  ses  eiiT-'-^;  •  i  >  r-,. ,•/„.;///>  i ,  \';ii,.  interdit  la  ^  ••'!''■»  •}•• 
tout  journal  dans  le  Théâtre. 

L'.\dministration  s'occupa  aus.si,  celte  année-la,  îles  entrées  dans  les  cou- 
lisses. On  sait,  qu'à  Nantes,  la  Mairie  s'est  constamment  montrée  à  ce  ■  • 
d'une  i»égueulerie  par  trop  ridicule.  Quelques  auteurs  sV-tant  vu  refuser  r«  i:  ■ 
Il  scène,  réclamèrent.  Le  maire  écrivit  dans  plusieurs  villes  pour  connaître 
1  "S  usages.  Lyon,  Marseille.  Borde.iuv,  Lille,  répondirent,  que  chez  eux, 
l'ireille  prohibition  n'existait  pas.  Mais  ;\  Nantes,  les  choses  sont  encore 
lins  le  même  él;it.  Cette  question  des  entrées  au  foyer  ou  sur  la  scène  n'est 
pas  encore  réglée,  et  j'ai  vu  un  rédacteur  d'un  des  plus  grands  journaux 
(le  Paris,  se  voir  bruLiIement  refuser  l'accès  des  <  '  -.  un  soir  de 
l)reMuère  représentalion,  alors  (|u"il  voulait  parlera  la  .ii  ami. 

Il  est  nécessaire  qu'il  y  ait  une  surveillance  pour  les  entrévs,  mai> 
mt-il/<iu'elle  soit  faite  avec  discernement. 


134 


LU  THÉÂTRE  A   NANTES 


M.  Lomonnier,  une  basse  qui  avait  laissé  do  bons  souvenirs  à  Nantes, 
{)!  it  la  direction  pour  la  campagne  suivante.  Il  était  associé  avec  deux  de 
SOS  artistes,  MM.  Bizot  et  Oudinot.  La  Ville  nomma  M.  Leinonnier  direc- 
teur pour  trois  ann''''t*  et  \"t;i.  ;\pvo<.  <jii<'|<|ii<'<  rli/fi<iili<'-;  un.-  <ii5»v.'ntion  de 
de  50.000  francs. 


SAISON      1839-1840 

LEMONNIER,    Directeur 

Hette,  chef  d'orchestre.  —  X...,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.  Aduien,  fort  ténor. 

BizoT,  i)reinier  ténor  li'sger. 
Oudinot.  ténor. 
Lkqaignkur,  deuxirmo  ténor. 
Nkhkt,  troisième  ténor. 
BiccQUET,  bîu  ylon. 
(ÎAP.BET,  deuxième  bas.se. 
Lemonnier,  deuxième  basse. 
Paris,  basse  comique. 
Briano,  deuxième  ba.sse. 
])ucHATKAU,  ténor  comique. 
M°"«  Provost-Golon.  première  chanteuse. 
Bizot,  iiremièr»^  chanteuse. 
OmviC';,  du^azon. 
Nerkt,  deuxième  chanleuse. 
Delroux,  deuxiomo  du<i;azon. 
Adrien,  troisième  dugazon. 
Kess,  forli'  chanteuse. 
Saint- Fut  M  IN,  duègne. 


DANSE 

MM.  Laorençon.    maître,   premier   dan- 
seur comique. 
Pktipas,  premier  danseur. 
DccHATEAU.  deuxième  danseur. 
M""  Ferdinand,  première  danseuse. 
Laurençon,  deuxième  danseuse. 
Ferdinand,  deuxième  danseuse. 

COMÉDIE 

MM.  Roche,  j<'une  premier. 
TouDouzE,  père  noble. 
(iHoTTE.  deuxième  amoureux. 
Baron,  financiers. 
Henri,  premier  comique. 
LuiLDET,  deuxième  comiiiuc. 
M""  Roche,  premier  rôle. 
.Mi-„\ARi>,  jeune  premier. 
Martin,  deuxième  amoureu.se. 
Leoaigneur,  soubrette. 
CocnÈZE,  duègne. 


OiidiiKit,  le  jour  do  l'ouverture,  prononça,  selon  la  i-outunie,  un  speech 
aux  spectnfi'iirs.  I.e  sien,  foii  hieii  tourne,  fit  un  excellent  elîet  sur  le 
public. 

La  troupe  était  bonne.  M"^'  Prévost-Colon  a  lai.ssé  d'excellents  souvenir^ 
:i  Nantes.  Malheureusement,  le  répertoire  fut  assez  restreint.  Le  fort  ténor 
connaissait  seulement  la  Juive,  GuilUiume  et  la  Muette  ç\  il  ét.n't  forcé  d'ap 
prendre  an  fur  et  ;i  mesure  clKUiue  opéra. 

Lucie  (il'  Lamermaor  lit  son  apparition  le  '2\  octobre  18^'J.  L  opéra  de 
Donizelli  fut  chanté  avec  succès  par  M'""  Prévost-Colon  ;  MM.  .\drien. 
Bec(iuel  (M  L(>gaigneur.  Les  autres  nouveautés  principales  furent  Mademoi- 
aelle  de-  Jielle-Ile  et  VEan  merveilleuse. 

M'""  Lebrun,  de  r(^péra,  et  les  sieurs  Millanolo  se  firent  \^ntendre  à 
Graslin. 


LAFECJILLADE  —  KEltMANN  LKON 


Viô 


Cetti;  année-là,  pour  attirer  le  monde  au  Théâtr«r  lu  direction  imagina  de 
tlonner  â  (iliaque  spectateur,  avec  son  <oupon  d'entrée,  un  billet  de  tombola. 
Les  lotij  consistaient  en  fort  jolis  paravents. 


Lcmonnier,  je  l'ai  dit  déjà,  avait  été  nommé  pour  trois  années;  mais  au 
bout  de  sa  première  campagne  il  n-nonça  à  son  privilège  sous  prétexte  que 
la  Mairie  refii>.,iit  de  lui  lai^^ver  fermer  le  Tliéi'itre  pendant  mai.  juin  et 
juillet. 

L'Admiiiisiralion  fut  donc  forcée  de  se  mettre  en  quête  d'un  directeur. 
Elle  choisit  M.  Lafeuillade  qui  a  laissé  à  Nantes  l«'s  souvenirs  d'un  homme 
de  la  plus  haut»;  honorabilité.  La  subvention  était  maintenue  à  îi<),(X)()  fnincs 
mais  à  condition  d'avoir  pendant  onze  mois  une  trouj>e  complète  en  tous  les 
genres.  Cette  obligation  ét;iit  fort  dure,  aussi  M.  Lafeuillade  ne  put-il  tenir 
<es  engagenients  qu'au  prix  <!•'<  l'I"^  l.mnlv;  s.nrifie.-^. 


SAISON      1840-1841 

LAJFEUrULAXJE ,    Directeur 

IIassklmans,  chif d'tm'heslre.  —  Bkutin,  rr(fi.ss.'ur. 


OPiAW 

MM.    I.AKK.UII.I.ADE,  f(»rt  tonor. 

GKLI.A8.  tf^nur  lèj,"  '■ 

Oldinot,  t/>iior. 

STf.PHANK,  deuxioni''  tt'imi-. 

Constant,  tnjisième  ti'nor. 

l)i:nvii.LiKus.  Iiarytoii. 

IIkiirmanx-Léon,  deuxième  bassf 

LAviLMEn,  basso-comique. 

I'arib,  laniotte. 

iiK  Planc.k,  trojsiènie  bassr. 

HLAXr.UARn.  toimr  comiqu»'. 

DeciuTKAO.  ténor  comique 
M  -8  Ci;si»KLL.  première  chanti-uiw>. 

Saint-(^iiahi.ks.  forti-  clianteure. 

Oi.ivifc.  da^nzon. 

(jONSTAxe.K.  di-uxiùmo  tiuiPizon. 

Vii.K.u.  troisième  dii>;&/.on. 

Saint-Fiumin.  din'>;n<'. 

ilKs.>4,  mèro  dugazon. 


D.VNSK 


MM. 


PtrriTpAs,  premii-r  danseur. 

Tki.i.k    (Cotistiinl).   deuxième   dan- 

s»>ur. 
Di'cuATKAi',  danseur  comique. 
M-»«  F>;hi»isaxi),  première  danseuse. 

P.   Kkiu»inaxi>,  deuxième  danseuse». 


COMÉDIK 


MM. 


Itoc.HK.  jeune  premier. 
Constant.  d«*uxi«''m«'  amoureux 
Toi  OUI  ZK,  deuxième  rôl<-. 
CiiAHt.Ks,  financiers. 
Kkhmnano.  iȏn'  nobit . 
IIksri,  premier  t'oniiquo. 
Gni.LET,  deuxième  comique. 
M"'«    KocuK,  premier  rôle. 

|)i.i  r.<*i  X.  iii 

Nki  vii.LK.  «ouurette. 

Coe.iiàZK,  duègne. 


11  faut  remarquer  dans  celle  troupe  le  nom  d'Herrmann-Léon,  une  basse 
'  \relleute,  cnioreà  l'aurore  de  sa  carrière  qu'il  devait  terminer  brillamment 
;i  rOpéra-Comique.  Citons  aussi  Lafeuillade,  ténor  de  grand  mérite. 


130 


l,K    IIIKATRK    A    NANTES 


Il  y  eut  plusieurs  chutes  dans  la  troupt;.  M"'*Cund(ll  échoua  ;  NP^Bultell 
lui  succéda,  mais  cette  artiste  tombi  malade  et  fut  remplacée  par 
M'"«  Diichanipy.  MM.  Gellas  et  Dervilliers,  cchoucrenteux  aussi  ;  ils  eurent 
connue  successeurs  doux  bons  <lianteurs,  MM.  Damoreau  et  Âl^adie. 

Le  18  mars  1841,  il  y  eut  une  grande  panique  dans  la  salle.  Une  violente 
explosion  de  gaz  s'était  produite  «lan^  !<'  ma'/i-ifi  '!••  ■■..<tiiriii<.  Il  ii'v  iMit 
aucun  accidenta  déplorer. 

La  Favorite  fut  jouée  pour  la  première  fois  le  13  avril  1811 .  L'opcra  de 
Doni/etti,  très  bien  monté,  remporta  un  succès  unanime.  L'interprétation 
confiétiàMM.  Lafeuillade,  Ilcrrmann  L(''on,  Al^adie  et  :i  M'"*^  Ducliampy 
était  ir reprochai  tic. 

On  joua  aussi  pendant  cette  saison  :  les  Preiiiii-roa  Armes  di-  Jtic/w/uu, 
-1nncf/c  yyo/e//n,  avec  les  récitatifs,  le  Verre  ff'n/ii  et  ).i  Dinut,-  Sii:tiî,r.i' 
uU  Opéra  bieh  oublié,  de  Monpou. 

liouflé  vint  donner  une  série  de  représentations. 

Les  habitués  et  les  abonnés  du  Thr'âtre,  satisfaits  de  raduniii-traiion 
Lafeuillade,  se  réunirent  pour  faire  une  souscription  de  20  (XX)  francs  des- 
tinée à  venir  en  aiilc  au  directeur;  les  souscripteurs  mettaient  seulement 
comme  condition  à  leur  concours,  que  la  Ville  se  chargerait  de  tous  les 
frais  d'éclairage.  Lo  Conseil  ninnieiii.il  i-efiivi  ft  l:i  s<.u'^.iii.;i.iii  ii':il„iiiiii 
pas. 


Malgré  ses  pertes,  Lafeuillade  demanda  encore  la  direction  pour  l'année 
suivante.  Les  artistes  s'associèrent  avec  lui  pour  un  cinquième  de  leurs 
appointements.  Le  Conseil  qui  avait  refusé  de  |)ayer  l'éclairage,  consentit  a 
une  augmentation  de  subvention.  La  somme  de  60.000  francs  fut  inscrite  au 

budget  delà  ville  pour  le  Théâtre, 


SAISON     184-1-1842 


H.  AFEUITiL  A.DE,    Directeur 

Ha8s(-,i.m\ns,  chfîf  d'orchestre;  —  Bkrtix,  ro^issrur. 


MM.   I,ArK.iii.i.\iir.,  fort  toiior. 
iiiaiTON,  ténor  léger. 
OrDiNOT,  ti'uor. 
LKOAic.NKrn,  (Iciixièino  tt'uur. 
PoiiKviN,  pn>mii'i'o  hassf. 
Baupon.  Itai^sp  coiniqut'. 
Paiiis.  liirut'ttfi. 
^Ikinikii,  trial. 
i>K  Pi.ANCK.  troisir-rne  l>asso. 


M"«s  DrcaïAMi'Y.  prcmiiro  clmnleu.sft. 
S\iNr-(".UARi.i;s.  forlo  rhaiitiMisc. 

t  ir.NoT,  (1 11)^2011. 

l.vvoeAT,  deuxième  forte  ciiantoiisc 

l'itKssKNT,  d(»uxi<"'nu>  dugazoïi. 

l'omxKT.  dui'>gin. 
D.\NSE 
M .       PiniTPAs.  prfmi»'r  tlaiist'ur. 
M""x   KiatniNAM».  pivn»i»'re  dansiMisf. 

I\    Ki:uMXAM>.  d«U.\V*'iiU»  dnnsnuso' 


1.  INCIUENT   SAINT  CHARLES 


i:r7 


CU.MKDJK 

MM.   HorrrK.  premier  n>I<'. 
Waiilk.  jfHiif  pn-iiiirr. 
Toi  norzK.  ptr.'  iio)i|i-. 
F'KliHKAi.'.  liii:itici<iM. 
l,tjXKriii„  pr<;riiior  omiqo't. 
Aum.pui:,  <lcuxi<°-mo  unioiin-ux. 


M.      (jin.i.ri.  •!»  uxi.  iiif  coini'iii» 
M*'»   V,nruv.  pi-i'Uii<-r  rôl'-. 

I  .  jeunr  proniière. 

I  '1  ingi'-iiiiili'-M. 

•  ;iiA«AMi.   «niibrott'-. 

I    1  i>    Ml    /l        (In       rlr. 


Cette  Iroupr  était  <'n  géjK'nl,  o\(< •Honte.  La  basse  I*oitcvin,  qui  possédait 
une  voix  magnifique  était  le  père  de  M.  Poitevin,  basse  chatttatite,  qui 
(levait  dev<'nir,  en  1888,  directeur  du  TbéîUre  <iraslin;  le  lënor  léger  H^Mton 
était  le  petit  fils  de  l'auteur  de  Montano  rt  StëiiJmnie. 

M''"  Saint-Charles  avait  été  réengagée  par  le  directeur,  qui  avait  eédé  à 
•rtaines  inlluenei-s.  La  plus  grande  partie  des  abonnés  était   fort   ii 
)ntre  elle  et  la  sitllait  outrageiisenienl  pendantque  le  parterre  applaudi^-. ..i 
i  outrance.  Un  soir  que  la  niallicureuse  était  encore  plus  sllllée  que  d'habi- 
tude, on  vil  un  abonné,  M.  Abatte,  sauter  sur  la  sc<"'ne,  offrir  son  bras  à  la 
lianteuse  et  l'accompagner  g:ilauimcnt,  au   dehors.    Loin  de  calmer   les 
-piits,  cette  aventure  no  fit  ([ue  les   irriter.  Le  tapage  augmenta  i-ncore  les 
jours   suivants,    d'autant    plus    que    la    muniei|K»lité    avait    fait    déclarer 

\I Saint  Charles  admise,  jug»'ant  que  les  applaudisMîmenLs  étaient  su|)é 

rieurs  en  nombre  aux  silIlets.L»' maire  de  Nantes  re(;ut  à  ce  propos  une  I*  r-- 
(|ue  je  crois  devoir  publier  pour  montrer  combien,  à  celte  épf>que,  lescl. 
ilii  TlnVitre  passionnaient  les  esprits. 

'    Monsieui'. 

»  l'uisqUc  V(jus  ave/  a.sse/  peu  <le  justice  pour  doimer  f;aiu  d»-  «  anse  à  un 
parterre  entièremenl  composé  do  gens  salariés  par  l'Administration  sur  une 
opposition  dirigi'e  par  une  masse  d'abonnés,  vous  serez,  rrsponsable  jusque 
devant  l(îs  Iriluniaux,  s'il  le  faut,  de  l'opposition  cohtinuejlo  que  va  éprouver 
M""  Saint-Charle.s,  cha<|ue  fois  qu'elbî   reparaîtra.   Malgré  l'injonction  do 
vos  commissaires,  nous  sillleronsaux  prenii«'res  sans  voidoir  sortir,  a  moins 
(jiu'  vous  n'ayez  l'impriulrnce  de  nous  en  faire  arracher  de  force  par  les  gi^n- 
larilieset  les  soldats.  Nous  vous  prouverons  que  nous  avons  avons  la  majo- 
iié,  à  moins  que  lo  directeur  ne  donne,  tous  les  jours  où  l'actrice  en   <|ues- 
tion  doit  jou(>r,  l.""»U  billets  de  clacjueurs.  Nous  ne  souffrirons  pas  que  <  •  t- 
|ieste  <|ui  infeste  les  ihéAtreS  de  Paris,  fasse   la  loi  che/   nous  «pii    pi'. 
(■.O.(itM)  francs  do  subvention  au  directeur  du  Théâtre.  Non 
une  enquête  sur  la    manière  dont  est  exécuté  le  cahier  d. 
l)ar  le  Conseil   munitipal  au  directeur,  et  si  on  nous  pou^>e  a  UhiI,  h 
\(Mis  prouvtTous  q»u>  l'obligation   faiu^  au  directrin-s  de  fournir   des  an  -;   . 
•nant  de  villes  d'une  importaneo  au  m(»ins  /'iril''  à  <'ellf  ilo  Nantes,  n'a  pas 
t('*  exéfutée  cette  année  pour  un  seul  des  nouvoaux  acteurs.  Evilez  dos  eol- 
lisiouj»,  M.  le  Maire,  un  grand  nombre  de  jeunes  gens  et  d'hoiunu»s  sérieux 
et  marquants  ont  bj.Anié  votre   décision   d'hier   soir,  lui  consci»Mi<e,   que 
deviendra  le  droit  dti  public  qui  paie?  Esl-il  possible  de  refuser  un   acteur 
Ni  une  protestation  aussi  énergique  que  celle  d'hier  ne  sullii   p,as.  La' 
passer  la  justice  des  alK>miés  ou    bien    fernu-/.  le  'riiéatre  plutôt  que 
Liisser  dirii;er  par  les  maii<eu\  res  degens  p;iyés  à  la  .soin'e. 

In  .\b«.»nnk. 


l.'{8  LH   THKaTKK    a    NANTES 


Devant  une  tello  o|)position,  M'"*'  Saint-Charlos  finit  par  résilier. 

Le  12  octobre  1811,  \-ù.  Filli:  du  Réfjiment  fit  son  apparition  à  Nantes.  Le 
critique  tlu  lireton  se  montra  fort  sévèro  pour  cet  opéra-comique  de 
l'auteur  de  la  Facàriie  «  vraie  parade  musicale,  <k-rit-il,  qui  pour  mieux 
nous  transporter  à  la  pensée  des  baraques  ambulantes,  n'a  pas  oublié  !•• 
tambour  ni  la  grosse  caisse.  C'est  une  macédoine  lyrique  sans  aucun  carai 
tore.  »  La  Fille  du  Réfjimcnt,  c'est  certain,  n'a  pas  grande  valeur,  mais  il 
est  étonnant  qu'à  cette  époque,  où  la  musique  itnllienne  était  si  en  faveur,  il 
se  soit  trouvé  quelqu'un  pour  la  traiter  avec  un  tel  mépris. 

La  première  représentation  de  Norma  eut  lieu  le  2')  janvier  1812.  L'opéra 
de  Bellini,  malgré  une  interprétation  véritablement  supérieure,  n'ol)tint  qu'un 
succès  modéré.  M™"  Ducluunpy  fut  superbe  dans  Norma,  et  M.  Lafeuillad.- 
excellent  dans  PoUion. 

Le  Guittarero  et  Robert  Deverc.ux  virent  aussi  le  jour  cette  année-là. 
Poncliard,  Marié,  M""»  Ducrest,  M»""  Ernst,  qui,  dans  Robert-le-Diable, 
exécuta,  à  l'étonneraent  général,  le  tour  de   force  de  chanter  Alice  et  Isa 
belle,  vinrent  donner  des  représentations.  Enfin,  M""  Vigano  cl  Tamburini 
se  firent  entendre  dans  un  grand  concert.  Orgie  de  macaroni  ! 


Pour  la  campagne  suivante,  le  Conseil  municipal  refusa  d'accorder  une 
subvention  en  numéraire.  La  Ville  prenait  seulement  à  sa  charge  les  frais  de 
gaz  ot  les  appointements  des  machinistes,  du  peintre  décorateur  et  du  con- 
cierge. Malgré  cela,  il  se  trouva  un  directeur,  Prat,  pour  prendre  le  Théâtre 
dans  de  pareilles  conditions.  Il  est  vrai  qu'aucun  genre  ne  lui  était 
imposé  par  le  cahier  des  charges  et  il  en  profita  pour  ne  donner  qu'une  troupe 
de  comédie.  De  là  mécontentement  exprimé  dans  le  public,  non  seulement 
contre  Prat.  mais  aussi  contre  la  municipalité. 

Le  jour  de  l'ouverture,  une  véritable  émeute  éclata  dans  la  salle.  De 
toutes  parts  on  demandait  le  rétablissement  de  la  subvention.  Le  tapage 
dura  sans  discontiluier  pendant  quatre  heures.  Les  spectateurs  furieux 
cassèrent  les  pupitres  el  brisèrent  les  portes.  La  police  impuissant»'  dut 
avoir  recours  à  l'infanterie  qui  pénétra  dans  la  salle  au  roulement  du 
tiimbour  et  parvint  à  la  faire  évacuer.  Pendant  plusieurs  jours,  les  repré- 
sentations furent  des  plus  agitées.  Les  artistes  étaient  impitoyablement 
refusés.  Finalement  le  Théâtre  ferma  au  mois  d'août. 

Le  Cons(Ml  municipal  .se  décida  alors  à  voter  une  allocation  de  lO.OOt) 
francs  au  directeur.  Le  chiffre  était  encore  insuHisant,  aussi  dans  la  séance 
du  7  septembre  1812,  nos  édiles,  revenus  à  des  sentiments  plus  sensés 
et  craignant  le  retour  de  nouvelles  manifest;itions,  accordèrent  enfin  une 
subvention  de  10. (KK)  francs. 


HUNEK  —  M'"**  Mrtu..i.hii..;'.   —  i^M.xti. 


i.;,t 


SAISON    184  2-1843 
PRAT,    Directeur 

Il  A--1.1.M  \>>,    Cht'f  tl  Oiclustli-.   —    BhUllN,    I.  ^'1-3.  ur 


()IM':i'.A 

MM,  IIi  NKit.  premier  b'-itof. 
IlKNJinrr,  ti'-nor  l^'^^^:\■. 
Âi.KRMK.  dtMixièmf  ténor  léger. 
Saint-Anok,  deuxièine  ténor  ié({«'r. 
Ml'czKRAY.  baryton. 
Mathiki;,  dc'uxiénif  basse  chantante. 
I*(trKH.  basse. 

Saint-Ho^iain,  deuxième  basse. 
Lautmaxn,  trial. 
Pauis,  laructU'. 
JiiiASc.Kii.  grimt^^. 
Anxiii'n.  deuxième  amoureux. 
Dkim-anoiik.  premier  comique. 
Hkutin,  deuiièmo  comique. 
M""  Ror.HK.  premier  rôle. 
Pktit.  jeune  première. 
MAnnuKnox,  soprano  sérieux. 
RoY,  soprano  lrg<>r. 


Sandemon,  du(îa/on. 
Imhkjtt,  df'MTièmi-  rlianteuse. 
I'"ui'  ne. 

Dam  '  .me  dugazon. 

C(mr:i>iK 

MM.  R<i<-.»K.  premier  nMe. 
Wabi.k.  jeune  premier. 
ToUDoiZK,  p<re  noble. 
Dei.AMAKK.  ûnanrirrs. 
Laltmàsx.  premier  comique. 
Pahis.  paysan. 
(iiLANOKK.  grimes. 
Wabi.k.  premier  nMe. 
^t"'*  PoiRiF.B.  grande  roquette. 
Caiu.ot.  soubrette. 
LiP.oswK.  ini/énuiti'. 
KoIONKT,  duè^îuo. 


Cette  troupo,  rôuiiio  assez  tard,  olFrait  d'a.ssez  bons  éléments.  Le  ténor 
Iluiior,  notamment,  a  laissé  d'excellents  souvenirs  dans   la  mémoire  «les 
(lilrltanfi   iiant;iis.    Doué   d'une    voix  solide,  cet  artiste   se  faisait    surtout 
nMuar(|uer  par  sou  grand  styU'.  La  ./«/ce  était  son  triomphe.  M'"*Margueron 
était,  elle  aussi,  une  chanteuse  (U\  valeur.  Les  soirées,  pendant   le  reste  de 
la  campagne,  demeurèrent  très  mouvementées.  Jamais  le   public   ne  s'était 
montré  aussi  tapageur.  Le  répertoire  était  très  restreint,  de  là  le  méconten- 
tement général.  En  outre  des  susceptibilités  et  des  vanités  froissées  avaient 
mis  la  dissension  entre  les  artistes  et  Graslin  se  voyait  transformé  en  une 
véritable  pétaudière.  Les  représentations  continuant  à  être  troublées,  l'auto- 
rité résolut  de  frnpperun  grand  <oup.  Par  arrêté  du  24  novembre  1842,  F 
préfet,  M.  Chaper,  prononça  la  fermeture  du  Théâtre.  La  leçon   porta   sej, 
fruits  et,  quand  au  bout  de  quinze  jours,  la  première  scî'uo  deNant»»s  rouvri 
ses  iH>rles.  les  spectateurs  ét;iient  «bncnus  plus  «ahne.s.  Mais  il  était  dit  qu^,* 
celle  saison    ne  (inirnit  pas.  Au  eommen«  cmcnl  «l'avril.  Pral  >•'  relira  cl  n 
garda  «|Me  nominalement    le   litre  de  directeur.  Les  artistes  se  mirent   e„ 
société,  mais  une  foule  d'inléréis  opposés  empêchèrent  l'affaire  de  man-her 
et  Graslin  ferma  délinilivement  ses  portes  le  18  avril. 

Parmi  les  choristes  du  Théâtre  m»  trouvait,  cet  te  année-là.  un  jeune  homme 
do  seize  ans  et  demi,  arrivé  sans  res.sources  à  Nantes,  où  il  avait  vécu  quel. 
que  temps  avec  les  sous  qu'il  ramasssait  en  chan  tant  dans   Ic^  c;ifés.  Pral 


110 


r<'inai(|ii;i  sa  jolie  voix  de  ehanteiir  anibulmit  et  l'cngiigoa  comme  choriM 
Doit.'  d'iMie  vive  iiitellignnce  et  d'imo  ferme  volonU!!  d'arriver,  il  fil  des  pro- 
grès iMpiil"-,  et  un  soir  il  chanta  au  pied-levé  et  a  la  satisfaction  générale 
le  rôio  d<'  Max  dans  le  Clinl-t.  Ce  choriste,  inconnu  alors,  devait  s'élever, 
peu  à  peu,  par  son  talent  au  premier  rang  des  chanUJurs  de  l'éiwque,  c'était 
Ismaël,  le  futur  eréa'eur  à  Paris  de  Hifjolatto. 

La  saison  1812  18i:{  avait  été  des  moins  intéressantes.  En  fait  de  nouve.iu 
tt'vs.  Prat  ne  donna  que  Nizia  de  Grenade,  mauvais  arrangement  de  Jincri-n- 
/Ini-f/ia  (h'  Donizetli.   La   basse  Renault,  de   l'Op^Ma-Comique,  fut   le    seul 
artiNto  en  représcnlalinii. 


l,;i  eiiiniMijuc  IHIIM-Sll  .>uiMiii    m.u-  la  direcli 
veiition  èUiit  maintenue  à  40.()<K)  francs. 


La 


SAISON       1843-1844 


LAFFITE,    Directeur 
IlASsrxMANS,  chef  d'orchcslrc.  —  Vautr»',  rrRissèur. 


OPKr.A 

MM.    lliNKii.  preniior  li'nfn-. 
UdNAMY.  léiior  léger, 
l-'i.r.uiiv,  (louxirme  ténor  lt''«,'or. 
IMcAV.D,  deuxirinc  ténor  léj^or. 
ViiiNi:r,irr,  Martin. 
Ai.PUONSK.  trial. 
P.uus.  laructtr. 
Fi.vc.u.vT.  baryton. 
l't.vNQri:,  premii'ro  bu.ssp. 
l''AMJi:irr.  iloiixii''mo  basso. 
B.vcuKi.ii;u,  Iroisii'mo  b^s.sc. 
M'""  Fi.Euin-Doi.i.Y, prcmit'ri'  cli«atcu.sc. 
Hov.  premitri-  clv.inteu.so  légère. 
S.viNi-EiiMr..  proniii'-ro  dn^ja/on. 
l'Aiiiiini',  deuxit'mo  diiga/.on. 
Rknaid.  nit;re  'dugazoïi. 

linl  l.ANtiK.   dUi"'K"<^'- 

li.Vl.I.KT 

MM.    I.KnN.  iireiiiier  maître. 

(iiu'.Nii.ii,  ]iromicr  danseur. 
HiiNdiii;.  dodxit-me  danseur. 
ISr.^iicr.  dan.sour  comiquo. 


M""'  BAr.HKi.oT.  preinji'ro  dan.sciise. 
Rii.r.nv.  deuxième  dansfiisf. 

«:<)MÉDIE 

MM.  RooHK,  premier  rôle. 

IIaumant.  jeune  premier. 
MniiKAf.  premier  amoiinux. 
l'i.Ki  Hv.  premier  amour-us. 
Hazin,  premier  amuun-ux. 
Lkmoxnikr,  financiers. 
I'ai.iikkt,  père  noide. 
Vm.NKROT.  deuxième   premier  r<')U- 
Hauoui.  premier  comique. 
Ai.i'iioNsi:.  deuxième  comique. 
(iHA.NtiKu,  grimes. 
UocMoKT.  troisième  rôle. 

M RicxAun,  pronvier  rôle. 

Rai.i.ai  ni.  ji'une  première. 
SAiNT-KnMi:.  pn-mière  ani' 
liKKicvuK.  deuxième  aiuou: 
l'i  Kitui  i>.  soulirelte. 
!;■'(  ni;,  mère  noble. 
I?ii  I  \N<.i:.  d\iègnt\ 
'  ■."  iir.'i:.  ;:rimes. 


Lallilc  lie  niaïKpiait  pas  il'intelligeuco,  mais  il  ignorait  eomplêteiuent  lo^ 
ressources  do  Nantes.  Sa  troupe  était  dispeiuliouso,  surtout  sous  le  rapport 
do  la  chorégraphie.  11  éprouva,  pendant  l'été,  des  pertes  considérables.  Un 


HUNER   —    IIEL'RTALX 


111 


beau  m.iliii  il  (iiit  la  (lili;<t,'nce,  laisvint  le  Tli«'i\tre  on  plein  ciiiiKiriM-.  «mi 
r'-fait  à  la  fin  d'août  et  les  moi»  favorables  arrivaient  à  grands  pas.  I*ar 
iiTÔté  préfectoral,  lu  régisseur  Vautrin  fut  nommé  directeur.  Les  principaux 
Il  listes  de  l'opéra  avaient  formé  une  société  sous  sa  gérance. 


FIN     DE     LA     SAISON     1843-1844 
VAUTRTNT,    Directeur 

Massei.m  vN'^,  cli«'f  irorclifs'.r»'.  —  l!<»i  kki:,  rl•gls^«'llr . 


M\l.   Ili  NKH.  fort  ténor 
KoasK,  tc'iior  li'utT. 
(il  ti.i.KHiN.  di'uxii'mo  ti-nnr  Ic^ri . 
An<u,kiik.  troisii-mo  lémir  léjjer. 
H  II  RTAi'x.  baryton 
<i\iii)KT.  première  basRe. 
l'Ai.iiKKT.  basse comiqui'. 
ItKi'f..  trial. 
l'ARirt,  laruclle. 
M-""  L\MY.  forte  chantouso. 

Bouks,  proinii'-re  clianteuse  It't^iTe. 
IloiKOK.  ilu'/nzon. 
I-'alhkut.  dfUXK'mi-  dnt^a/on. 
Sain  r-RoMAis.  mt're  du^a/on. 
Lai  iu:nt.  dm''«ne. 

CHŒURS 
W  lionunes,  M  fenitH'S. 


M" 


COMf:i)IE 

UormE,  premit-r  r<ib-. 
MoXTVAi,.  jeune  premier. 
MiiiiEAf,  prtmier  amounux 
(ii.ii.i.KMiN.  prt'niier  ainour<^u\. 
^  :iinouri-ii\. 

II<m:.muki,  lrui»ii-iiie  rùlf. 
F^autmann.  premier  <:oiiiiqu<-. 
l>EM/uT,  deuxième  comique.   , 
Pauis.  grimes. 
GriBBRT.  premier  rôle. 
MK.tMifc.  jeune  promiëre. 
IlKiiûKH.  preinièro  amourcu»'-. 
HuUKUK.  première  anv>ur' 
l-'\LUKHT.  deuxièmi-  aiiinu. 
!.K.iu>rx.  soubrette. 
Il'iniiK.  mère  noble. 
Saist-Romain,  grande  ro<|uetle. 


Cette  troupe  était  exoellento.  Le  public  revit  Iluner  ave»-   un   vif  plaisir. 

I  Iriirtaux  que.  jadis,  nous  avions  connu  basse,  nous  revint  comme  baryton  ; 
laiis  ce  nouvel  emploi,  il  demeura  artiste  de  goût  et  clianteur  habile.  Du 
i»lé  des  femmes.  M""'^  T  -luw  .1  Ilni<'->;  lui'rlti'nt  dVîn'  vi\'ii:ilé.'«.  tout  parti- 
al ièrement. 

Le  9  juillet  1843,  un  luyau  de  gaz  se  rompit  ;  la  salle  se  trouva  corapl/»te- 
iiient  plongée  dans  l'obscurité.  Une  vivo  panique  s'empara  des  spectateurs. 

II  n'y  eut  pas  d'accidents. 

Le  11  août  de  la  mémo  année,  un  splendide  bal  fut  donné  à  la  salle  Gras- 
lin,  en  l'honneur  du  duc  et  de  la  duchesse  de  Nemours,  de  passage  à  Nantes. 

Pendant  cette  campagne,  on  joua  une  fois  dans  la  même  soirée  la  Juire 
lia  7  of/r  c/«?  iVcs/e.  On  coiumença  à  cinq  heures.  La  chronique  locale  du 
temps  ne  dit  pas  à  quelle  heure  finit  celte  représentation  monstre.  En  jan- 
vier I81L  le  Siabot  Mater,  de  Rossini,  fut  exéeuté  pour  la  proinière  fois  à 
Nantes.  Iluner,  Hi-iiitiux  et  M  "^  Horès  iMternrc'-t/Tent  àlaixTf''.  ii'>n  l'œuvre 
lu  maître  italien. 


142  LE  THÉÂTRE    A    NANTES 


Vautrin  donna  aussi  deux  grandes  nouveautés,  les  Marbjrn  (23  février 
1814),  (lui  olAinrent  un  succùs  immense,  grâre  à  Huner  et  à  M"«  Lamy,  et 
Dun  Pasquak  (IG  février  1844).  M'"'  Lamy  remporta,  dans  re  dernier 
ouvrage,  un  double  triomphe  de  chanteuse  et  de  comédienne. 

La  Pari  du  Diable,  Lucrèce,  de  Ponsard,  les  Munt^re  de  J'un.^,  ...r-  i.i 
joués  aussi  pendant  cette  saison  au  courant  cU'  laquelle  Ligier  vint  en  repré 
sentation. 


DIRECTIONS  :  TIL.LY,  —  LEMONNIER.  --  TALIER, 

LEMONNIER. 

1844  —  1851 


)itiu}i     lir    1(1    salle.      -     Jtlli/.    —    imt.    —    iîott,      —     linrhel.    —    Calcina. 

Klisa    Masson.    —    Cliarles    VI.    —    Liatt.   —   Untuc.    —   Chullel. 

La  reine  «le  Chypre.  —  Emeutes.  —  l)t\jazet.  —  Esjnnnsxe. 

Duprez.  —  Flnchat.  —  .V"'  Blars.  —  Af  "•  Victoria. 

if"'  \'uiron,  —  Le  Son({e  d'une  Nuil  d'Kt»*. 

Charles  Bataille. 


;  l  A  Ville  eut  beaucoup  de  peine  à  trouver  un  directeur.  La  sub 
J,>-  jij'V(<^    vontion,  pourtant,  avait  été  votée.  Enfin,  M.  Tilly  olitint  le 


•i\     privilège.    Il    pn'scnta    la    tmiipc    siiivanlc    au    iucri'inciit    du 


r^g^'^-.NL^M    public. 


SAISON     1844-1843 
TILLY,    Directeur 

.>■•!. 11.,  chef  d'orehi'slro.  —  1''oli:hki.  ri/iss.  ur. 
OPÉRA  COMÉDIE 


MM     Mahiin,  fort  ténor. 

LAHBiYKnK,  t^nor  l«'*ger. 

IWxzk,  deuxiome  ténor  lét^or. 

KoucHKT,  fortHCOond. 

K^iii.K.  trnibième  ténor. 

J{<>MMV,  baryton. 

Tii.i.Y,  liaryton  «ropéra-comiqur 

PoppK,  lia8Si*-nobl'\ 

Kai.iiku  I .  Ituvsf-contre. 

Di  iiois,  Iroisi.ine  ba8!<o. 

IlKN(;.  trial. 
M   ^   I)Rui  ARP,  forlo  i-hantfuso. 

\.^Li>Y,  première  chanteuse. 

No«i>KT.  duga/on. 

FALHK.nr,  deuxième  dugnzon. 

Dui.AtNW,  d(iè(;ne. 

l'".o*i.N,  deuxiome  duègne. 


MM     ItocHE.  premier  nMe. 
Kmii.1:,  jeune  premier. 
lluuzÊ.  deuxième  r<Me. 
Fauciikt,  raisonneur». 
FAi.HEitT.  financiers. 
(ÎDT.  premier  comi<pi<«. 
Hknk.  (lem 
Pauis.  d<'i.  V 

Maii.Êos,  Coitvittauceit. 
M—'  IlEsTxtuT.  jeune  premièn». 
Ihma,  (frand  premier  r<Me. 
TiM.Y.  sombrette. 
Kai.bekt.  in(;énnites. 
Famin.  troisième  amoureuse. 
Driainay.  duèj^ne. 
('ucHiczi:,  caractères. 


III  LK   THKATRK    A    NAMKS 

IjCs  abonnements  furent  diminués  et  fixés  comme  il  suit  : 

A  i.'ANNf.K  :  Baignoires  et  loges  à  4  placf s,  MX)  fr.  ;  liaigiunrv»  et  loyies  à  5  placcK. 
1  (XHl  francs  ;  UaiKi>"ii''"<  ot  logos  à  <J  plac«'S,  l/-i(X)  fr.  ;  Purqin-t  et  preiiiières.  200  fr.  : 
PIjiics  lihros.  —  Hommes,  U'O  fr.   :  Dames,  1<X)  fr. 

.Vi;  Miiis  :  lloiiimes,  JW  fr.  :  I)amf8.'.^5  fr. 

Le  Théâtre  ne  put  ou\  rir  que  le  10  novembre.  De.s  réparations  à  la  salle 
avaient  été  jugées  nécessaires.  On  fit  un  remaniement  des  places  et  l'on  par- 
vint à  en  gagner  un  certain  nombre. 

Un  amphithéâtre  fut  installé  aux  secondes  et  l'on  construisit,  dans  le  cou- 
loir (les  fauteuils,  deux  petits  escaliers  pour  y  conduire.  Cette  installation 
était  défectueuse,  éar  elle  rétrécissait  le  corridor.  La  première  galerie,  enii»- 
rcineiit  remise  à  neuf,  se  composait  de  trois  rangées  de  chaises-gondoles  en 
velours  et  à  haut  dossier.  En  avant  des  loges  de  face,  huit  causeuses  mi- 
.saillantes,  ini-engagées  dans  les  loges,  procuraient  des  places  très  agréables 
par  leur  isolement.  Six  loges  rai  découvertes  avaientété  faites  aux  se'"ondes. 
La  troisième  galerie  fut  légèrement  augmentée.  Le  piédestal  des  colonnes 
d'avant-scène,  qui  était  carré,  fut  rendu  octogonal.  Toule  la  décoration  de 
la  salle  était  dans  le  style  Louis  Xlll.  A  chaque  galerie,  des  médaillons 
r.'|)résentaient  le  visage  des  principales  célébrités  dramatiques.  L'n  crirtou- 
che  portait  les  noms  de  chaque  sujet.  Le  plafond  figurait  un  porti<|ue 
Renaissance  appuyé  sur  un  riche  soubassement.  Seize  grands  médaillons 
lenfcrniaient  divers  sujets  ayant  rapport  à  la  Comédie,  au  Drame. à  la  Tragé- 
die, à  rOpéra,  à  la  Danse...  Au  centre  de  la  fri.se  d'avant  scène  se  trouvaient 
les  aimes  de  France  enlacées  dans  de  riches  rinceaux.  Une  bannière  dr 
velours  tricolore,  retombant  sur  la  corniche,  complétait  les  armes  natio 
nales.  Le  rideau  repré.sentait  une  large  portière  entr'ouverte  avec  un  rideau 
cramoisi.  Les  retroussis  étaient  doublés  d'hermine  blanche  mouchetée  d'her- 
mine de  Bretagne.  Derrière  cette  portière  on  voyait  deux  génies  distribuai, 
d'une  main,  des  couronnes  et  supportant  d»;  l'autre  les  armes  de  la  Ville.  Le 
foyer  subit,  lui  :i,ussi,  un  remaniement  complet.  On  y  plai.a  six  grands  pan 
ncaux  représentant  les  scènes  i)rincipales  des  chefs-d'œuvre  de  Molière. 
Le  buste  de  Graslin,  par  Ménard,  fut  posé  sur  la  cheminée.  Les  portraits 
en  médaille  de  Crucy  et  du  maire  lliciiard  de  la  Pervencbère  furent  mis 
aussi  dans  ce  nouveau  foyer...  Enfin,  dernier  détail,  très  prosaïque,  le< 
cabinets  d'aisance,  qui  étiiient  dans  un  état  déplorable,  furent  reconstruits 
et  rendus  inodores.  Les  plans  do  cette  restauration  furent  faits  par  M.Driol 
let,  arcliitecle  de  la  \'ille.  Les  décorations  furent  confiées  à  MM.  Philastrc 
et  Cambon, 

On  inaugura,  cette  amiéelà,  un  nouveau  système  de  scrutin.  Los  artiste- 
étaient  soumis  à  trois  débuts.  Les  abonnés  et  le  parterre  étaient  .seuls  appelé^a 
voter.  A  l'entrée,  ladite  catégorie  de  spectateurs  recevaient  un  numéro  d'or 


SOLIK    —    GOT    —    TILI.Y 

-Ire.  Pendant  un  cntr'acte,  il  était  publiquement  procédé  au  tirage  de  80 
numéros  Les  personnes  qui  s'r-n  trouvaient  possesseurs  se  réuiussait-nt.  à 
un  jour  indi(|U»',  sous  la  présidence  du  maire  où  d'un  adjoint,  et  votaient  a 
la  majorité  des  sulfrages  exprimés.  Pondant  les  débuts,  toute  manifestation 
(juelconque  d'improbation  et  d'approbation  était  absolument  interdite  sous 
peine  do  poursuites.  Ce  mode  di*  déliuts  donna  d'assez.bons  résultats. 

La  iroupc  réunio  offrait  un  «'xcellfiil  ensemble.  Tilly  était  un  charmant 
baryton  d'opéra-comique  ;  Martin,  M"''*  Drouard  et  Naldy  étaient  des  artis- 
tes de  réelle  valeur.  Le  scrutin  (ut  défavorable  à  MM  Kruzé  et  Eniil»', 
qui  furent  remplacés  par  MNL  Bourdais  et  Ludovir.  Ce  dernier  devint,  d«' 
longues  années  plus  tard,  sur  ses  vieux  jours,  soulllcur  au  iliéàtr»?  Graslin. 
l'arnii  les  artistes  de  la  comédie,  nous  trouvons  Got,  alors  à  l'aurore  de 
cette  carrière  <|ui  devait  ctro  si  brillante.  Le  futur  sociét;iire  de  la  Comédie- 
Fran(;aisc  remporta  de  vifs  succès  [)endant  son  court  passage  sur  notre  scène 

Tilly  amena  à  Nantes  le  chef  d'orchestre  Charles  Solié,  qui  devait  restci 
Umgtemps  dans  notre  ville,  où  il  sut,  par  son  amabilité  et  son  inti'l 
ligence,  se  créer  une  situation  exceptionnelle.  C'était  un  habile  chef  ;  sa 
science  musicale  ne  répondait  point  à  ses  prétentions,  mais  au  point  de  vue 
ilii  bâton,  il  était  excelb'nt.  Il  savait  manier  son  orchestre  et  l'entraîner. Très 
consciencieux,  il  apportait  un  soin  tout  particulier  aux  exécutions  des  (»|)éras 
et,  grâce  à  lui,  nos  armées  chorales  et  instrumentales  firent  de  réels  u,  ,>■■,:■<. 
Nantes  a  gardé  de  lui  lemeilleur  souvenir  comme  chef  d'orchestr-  . 

Les  Demoiselles  de  Saint-Ci/r,  admir.iblemenl  jouées  par  Got,  Hoche, 
j^jmcs  R,>stou  et  Tilly  ;  Don  Ci-aar  de  Damn,  le  Maria  la  f'anifKiffne,  les 
Sept  C/nUedUj'  du  Diable,  furent  les  princi|ules  nouveautés  d«'  l'année 
lliéùtrale  nantaise.  Levassor  se  fil  entendre  à  Graslin  ainsi  que  liaehcl  qui 
vint  en  juin.  L'illustre  tragédienne  suscitai  des  transjwrts  d'enthousiasme. 
Après  la  première  leprésentation,  les  artistes  «|u  Théâtre  lui  donjièrent  une 
st-rénade  sous  les  fenêtres  de  l'IIAtel  de  France.  Chaque  soir  la  police  fai- 

lit  la  haie  sur  son  passage.  Elle  joua  Horace,  Andromar/ue,  Phèdre. 
l*ol;ieucle,  Marie  Sticirt,  Iphigcnie,  Jiaja;et.  Pour  ces  représentations.  I«' 
prix  des  places  fut  doublé. 

Cette  année  mourut,  âgé  de  82  ans,  le  vieil  artiste  Calcina.  Il  était 
\enuà  Nantes  en  ITT^*,  comnic  danseur,  et  n'avait  p.is  quitté  (iraslin 
depuis  cette  épo(|ue.  Il  était  devenu  chef  d«'S  comparses,  puis  bibliothécaire. 
Son  nez,  véritalile  lubereule,  aux  dimensions  extraordinaires,  l'avait  rendu 

'lèbre  dans  le  public.  C'ét;ut  un  excellent  homme.  11  fut  très  regretté. 


TiIIn  conserva    la    dircfiion.  La  subvention  était  toujours  de    li»,<;(Mi   li.. 
iiint  H, ();)()  étaient  alîci'tés  à  la  confe»  lu»n  di'  ii.iiivt':m\  déeor^  ft  à  It  rfxt.iu 


I  t^î 


LE   THEATRE    A    NANTES 


ration  des  anciens.  I.a  saison  ouvrait  en  mai  avec  la  comédie  ;  l'opéra  ne 
connnoiicail (lu'en  soptenibn'. 

Le  prix  du  parterre  fut  aui,Muenté  cette  année.  De  1  fr.  TA)  il  fut   nuri/-  :i 
2  fr.  Il  est  vrai  que  des  dossiers  avaient  été  placés  aux  banqueUes. 


SAISON     1845-1846 

TILLY,    Directeur 

SoLiÉ,  ("lii-r  .l'oL-li.'^ii-.',  —  '['..1  I...1  /i     r''-"i<- 


opi":ra 

MM.  (iiRAii',  premier  t/'iior. 
('oHNEi.iH.  tf-nor  It'-gcr. 
S\ti.LAHO,  tliuxiènie  léiiur  l"t,'ir. 
Prudent,  troisiiMiie  Iraor  Irger. 
Rennkvii.le.  trial. 
Paris,  laruettc. 
.luuHDAi.v.  baryton. 
TiM.Y,  J)aryton  d'opi'r.'i  comiiiuf . 
Pinir,  Ijassc-comiquc. 
Makiilkhitte.  troisième  basse. 

M"'""  Mas.'^ijx,  forte  chanteuse. 
(^oHNELis.  soprano. 
Peth'.  première  flugazdii. 
Rolland,  deuxième  liugazon. 
Saillard,  troisième  tlugazon. 
JoiiEY.  duègne. 

CtKEUR 

is  li.immi's.  18  ftMiiiiM"^. 


Ji.\iJ,K  1 
.\dhien.  premier  danseur  et  maître. 
T.   l'iiii  s-^ET.  première  danseus. 
\.  lloi  ^>Er.  deuxième  dansens" 

COMfeDlE 
MM.    liocuE.  premier  rôle. 

Tm  Doi  /E,  père  ni'ble. 

Mknrose.  jeune  premit-r. 

('.Di.oMBEY.  deuxième  amoureux. 

."^AiLLAHD.  jeune  premier. 

lÎHET,  financiers. 

I.É^>i'oi.D.  premier  comique. 

Renxevii.ue,  deuxième  comii|ii 

l'AHis,  grimiïs. 
'  ;         Hai.i.y.  premier  nMe. 

l'.i.AUf.Y.  jeune  première. 

lÎHoLX,  ingénuités. 

PErrr,  amoureuses. 

TiLLV.  soubrette. 

Saii-laud.  deuxième  soubrette. 

JoBEY.  mère  nobl<-. 

TiiÉNAHD,  caractères. 


La  seconde  direction  Tilly  est  restée  célèbre  dans  la  mémoire  de  tous  lo> 
dilcttatiti  nantius. 

En  effet,  ce  fut  pendant  cette  saison  qu'Eli.sa  Masson  parut  à  Graslin. 
Elisa  Masson  !  que  ce  nom  remue  de  souvenirs  dans  la  mémoire  des  vieux 
habitués  du  rirand-TliéiUre  !  J'en  ai  connu  un  qui  s'attendrissait  chaque  fois 
([u'il  reiitemlait  prononcer  devant  lui.  Consacrqns  donc  quelques  lignes 
spéciales  à  cette  chanteuse  dont  Nantes  ralfola  jadis  et  qui,  certes,  méritai^ 
cet  engouenioiit. 

La  (igure  belle  et  pleine  de  noblesse,  les  cheveux  noirs,  les  yeux  brillants, 
de  manières  distinguées,  telle  était  Elisa  Masson.  La  chanteuse  n'était  pas 
parfaite,  mais  la  somme  des  qualités  était  bien  supérieure  à  celle  des  défauts. 
La  voix  fraîche  et  étendue  était  pleine  de  puissance  dramatique,  les  notes 
graves  el  celles  du  médium  étaient  superbes  et  pleines  de  rondeur  ;  par 
contre,  le  registre  élevé  était  un  peu  grêle  et  la  respiration  uu  peu  courte. 


ELISA  MA9S0N  —  CHARLES  VI  |4' 


Douée  d'une  vive  intpHigeir^e,  passionn»^  pour  les  choses  artistiques,  nobles 
et  grandes.  Elisa  Masson  était  un»  comédienne  de  preiuicr  ordre.  Le  jeu, 
le  geste,  l'altitude,  la  voix,  tout  en  elle  savait  traduire  les  divers  sentiment» 
d'un  personnage.  Elle  s'identifiait  à  ses  rôles  d'une  façon  remarquable. 
Keçueà  runaiiimité,  elle  fit,  pendantdeux  campagnes.  I  '  '  -  du  Théâtre. 
Son  grand  triomphe  était /,« /''aro/vV^".  A  chaque  repi  m,  le  public 

'  iilhousiasraé  lui  faisait  bisser  la  phrase  :  O  bonheur!  c'est  mon  rèoe  perdu. 
En  1847,  M""-"  .\Iasson  vit  s'ouvrir  devant  elle  les  portes  de  l'Opéra.  Elle  y 
fit  de  forts  bc<iux  débuts;  mais,  malgré  tout  son  talent,  elle  ne  parvint  pas  à 
remplacer  la  S  tolz.  En  1848,  elle  <ré;i  à  l'Académie  de  musique,  avec  un 
talent  de  premier  ordre,  le  rôle  de  la  reine  dans  Jeanne  la  Folle,  un  mauvais 
opéra  do  Clapissou.  Peu  après  elle  quitta  l'Opéra  et  se  mit  alors  à  voyager. 
Elle  alla  donner  des  représenl;itions  jusqu'en  Amérique.  Presque  chaque 
année,  après  «on  départ  de  Graslin,  elle  revenait  jouer  à  Nantes,  où  elle  se 

nsidérait  comme  chez  elle.  Elle  se  montra  toujours  rcconnais.sante  à  notre 
\  ille  d'avoir  été  la  première  à  la  sacrer  grande  artiste.  Elle  mourut  en  ISTT 
d'une  triste  maladie  :  un  cancer  au  sein  .  Comme  la  cigale,  «die  avait  toujours 
.hanté  sans  songer  à  rien  mettre  de  côté,  et  ce  fut  un  de  ses  vieux  amis  de 
Nantes  qui  paya  ses  modestes  fnnériilles.  Cette  artiste  n'a  pas  laissé  un 
nom  à  Paris  mais,  à  Nantes,  où  elle  suscita  tant  d'enthousiasme,  on  a  gardé 
et  l'on  gardera  fidèlement  la  mémoire  de  celle  qui  fut  Elisa  .Mas-^oii. 

La  troupe  réunie  pour  desservir  le  Théâtre,  pendant  la  saison  1815-184G. 
était  bonne.  Le  ténor  Giraud  tomba  et  fut  remplacé  par  Mouchelet.  Le 
'iiryton  Jourdain  était  un  artiste  de  valeur.  Signalons  aussi  M""*  Cornélis. 

La  première  représentation  de  (7<ffr/es  lY  eut  lieu  le  2<i  mars  18  U».  Le 
succès  fut  complet.  Elisa  Masson  triompha  dans  Odette,  qu'elle  chanta  et 
joua  d'une  façon  admirable.  Les  autres  interprètes  :  Mouchelet,  Jourdain, 
M""  Cornélis.  contribuèrent,  pour  une  large  part,  a  l'excellente  interpréUition 
(le  l'œuvre  d'IIalévy.  Les  décors  neufs  furent  trouvés  tK'S  beaux.  Ih  coûte- 
nt 4.00()  francs. 

On  exécutai  aussi  avec  succès  le  Désert,  de  Félicien  David.  Les  Troift 
Mousquetaires,  le  /?or  d'Ycvtot,  Marie  Jeanne  ou  la  Femme  du  l'ruple  se 
jouèrent,  pour  la  première  fois,  pendant  cette  saison. 

Le  17  décembre  1845,  Liszt  donna  à  Graslin  un  grand  concert.  Voici  quel 
était  son  programme  :  1®  Ouverture  de  Guillaume  7e// (piano solo)  ;  2"  Fan- 
taisie sur  Robert  ;  .'î"  Variations  sur  un  motif  des  Puritains  ;  4"  /r-  - 

la  calse,  de  Weber  ;  5"  Fête  rillageoise;^'^ (ialop  chromât i(/ue.  ï. 
ianiste  remporta  un  su perlxî  triomphe.  Il  fut  couvert  de  fleurs  et  de  cou 
'iines. 

Poultier  fut  acclamé,  cette  annce-la.  dans  la  Juice.  Levassor.   Lafond. 
Ihalberg,  M""'*  DorusGras  et  Rossi-Cassia  parurent  aussi  à  Graslin. 


148 


LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


Tilly,  qui  av;iit  su  so  concilier,  comme  artiste  et  conirae  homme  ])rivi 
'cstiini'  et  11  -^\  nioatliie  de  tous,  fut  renommé  directeur. 


SAISON     1846-1847 
TILLY,    Directeur 

Sidji-..  clicf  (roiiliestre.  —  Iîelnie,  régisseur. 


0PJ':RA 

MM  .   Di  i.KC.  fiirl  léiior. 

N'icRNiiuiL.  Iriior  légei-. 

Dehrinay,  deuxiônic  ténor  léger, 

Dassocl,  massol.  ■ 

IJoHVAL,  barytfii. 

Mathieu,  basse  noble. 

BoRSAY,  basse  comique. 

I-'honchet,  troisième  liasse 

lîEi.ME.  Irial. 

Lamarre,  laruetle.      s 
M"""    Masson,  forte  chanleusi'. 

Descot.  sopiaiio  léger. 

Sanuemon.' soprano  coniique. 

SA(iK,  deuxième  soprano. 

Vamk.  deuxième  forte  chanteuse. 

lîÂLLËT 

Imm.odeau,  maître  de  danse. 
11.  Balotii,  i)remière  danseuse. 
L.  Baloth,  deuxième  danseuse. 


COMl^DIE 

MM .  Roche,  premier  rôle. 
BiNEï,  jeune  premier. 
Gii.ATELAix,  deuxième  amoureux. 
Saoe,  deuxième  amoureux. 
Tam-ier,  père  nolde. 
OzANNE.  financiers. 
Frosne.  premier  comique. 
Victor,  premier  comique. 
Denizot,  deuxième  comique. 
«       Lucien,  utilités. 

M™"    Yadé:,  premier  rôle. 

Delaroche.  jeune  première. 
Roux,  ingénuités. 
Sandeuon,  déja/.et. 
Saoe,  deuxième  amoureuse. 
TiLi.Y.  soubrettes. 
*  .JoREY,  more  ))oble. 
TiiKNARD.  caractères. 


La  troupe  offrait  un  excellent  ensemble.  Le  baryton  Dorval  échoua  seul. 
11  fut  remplacé  par  un  nommé  Saint  Charles,  qui  tomba,  lui  aussi,  et  enfin 
par  Chollet.  Le  ténor  Duluc,  Chollet,  M^*''  Masson  formaient  un  trio  de  pre- 
mier ordre.  Il  est  rare  de  trouver  réunis  en  provijice  trois  artistes  de  oette 
valeur. 

La  Jx^eine  tic  Ch/jpre  (27  décembre  1816),  avec  trois  interprètes  pareils,  ne 
pouvait  que  remporter  un  grand  succès.  Cet  opéra  fut  remarquablement 
monté.  Les  décors  neufs  coûtèrent  5.183  fr.  93. 

On  joua  aussi  la  Closcrie  des  Genêts  et  Bélificiire,  de  Doni/etti. 

3jiie  Kargueil  et  Ravel  vinrent  en  représentations.  Un  incident  signala 
TiuK'  des  soirées  de  ee  dernier.  <I^'acteur  Ozanne  ayant  manqué  de  mémoire, 
fut  sifflé.  Il  se  tourna  alors  vers  le  parterre  et  dit  d'un  ton  moqueur  :  «  Vous 
vous  fâchez,  Messieurs  ».  Immédiatement  la  salle  demanda  des  excuses. 
((  Des  excuses  !  jamais  1  »  s'écria  l'artiste,  qui  quitta  aussitôt  la  scène.  Pen- 
dant trois  quarts  d'heure  le  spe(*tacle  fut  interrompu.  On  fut  obligé  de  lire 


KLISA    MASSON 


14'.  t 


le  FÔlu  abuiidoHué.  Traduit  un  correctionnelle,  Ozaiine  fut  condamné  à  uju; 
amende.  Voyant  sa  situation  compromise,  il  se  décida  à  faire  au  public  des 
excuses  par  la  voix  des  journaux.  On  ne  lui  tint  pas  rigueur.  Il  avait,  il  est 
vrai,  un  certain  talent. 

M^'"  Ma.sson  fit  ses  adieux  dans  la /'aco/v^r.  La  reprt3sentation  fut  superbe. 
L'artiste  aimée  disparaissait  littéralement  sous  les  Heurs.  La  salle,  vérita- 
blement en  délire,  trissa  le  duo  du  quatrième  acte,  où  Duluc  se  montrait  à 
la  hauteur  de  sa  belle  partenaire. 

Celto  saison  vit  la  naissance  d'un  nouveau  journal  de  théâtre  :  le  Furet. 

Ses  prédécesseurs  la  Corbeille  et  Vert-Vert  étaient  déjà  morts  depuis 
,quel<|uc  temps. 


•  « 


Pour  la  campagne  1847-J8-18,  la  municipalité  fil  appel  a  M.  Lemonnier, 
([ui  avait  dirigé  Graslin  pend.mt  une  année.  Le  montant  de  la  subvention 
était,  eoiiinit'  Irs  années  précédentes,  de  10. oriC)  francs. 

SAISON      1847-1848 
IjEMONNXER  ,    Directeur 

Sid.iÉ,  chef  d'orchcsli-f.  —  Lîertix,  régisseur. 


OPÉUA 

M  M  .  Bbhtaut,  fort  ténor. 

I'ljet,  ténor  léj^cr. 

Boi!HD\is,  iK-uxii-nif  t«iior  léger. 

Kduiiaiu>,  troisiùnie  It'iiur  léger. 

UuUANvii.Li:.  li'iKir  comique. 

I.KsuHus,  barylou. 

MAriiiEi  .  preiniôro  bassf. 

lIdNunfi.  basse  comi<iu<'. 

OZANNE,  laruettf. 
M""'    Aru.v.  grande  prennère  chanteuse. 

PiiKvtisT,  protnièrt'  chanteuse  légère. 

VADi^:.  (it'uxiènie  chanteuse  légèro. 

Mathii;»  .  |tii  iiiièii'  ihiga/on. 

li<>t;KDAis,  dciixiém'-  diiga/<>n. 

JoBEY,  duègne. 

■      '  10  choristes. 


GOMÉDli: 

MM.   lîuouE,  premier  rùle. 
Sandhk.  jeune  premitr. 
MofHor,  jeune  premier. 
MAXtitN,  premier  coiiiiiiue. 
l'ùKAi  LT,  pire  noble. 
Vadé.  troisième  amoureux. 
Maii.kun.  convenances. 

M"'"    UEi.KAY.  premier  rôle. 

MoKsiAM,  Jeune  première. 
(iEOROiNA,  première  soubrctt* 
Pkraui.t,  CO(JUelle. 
TlIKNAltb,  duègne. 
I.KMouLB,  convenance^. 


De  nomhieux  ténors  furent,  cette  aimée,  vietiines  des  rigueurs  du  scrutin, 
liertaut  fut  suceessivement  remplacé  par  TuUi,  Delavarde,  (iarras.  Ti.ssevro. 
Enfin,  le  1*'  mars.  Valgalier,  un  artiste  de  talent,  fut  admis  presque  à  l'una- 
nimité. Il  était  temps  :  plusieurs  émeutes  avaient  déjà  éclaté  au  Théâtre.  Le 
lyj  oclobrCj  la  Mairie  s'était  fâchée  ;  le  Théâtre  fit  relâche  dcu.\  jours  de  suilo, 
par  ordre,  ft  h'  niair«i  pi'('vint  le  directeur  que  si.  le  18,  il   n'avait  p;j>  d<' 


98 


150  LE  théâtre:  a  naNtes 


ténor,  la  subvention  lui  serait  retirée.  Les  abonnés,  eux  aussi,  se  montraient 
fort  irrités.  Le  malheureux  Lemonnier  n'en  pouvait  mais.  Il  réunit  au  foyer 
les  habitués  du  Théâtre  et  leur  prouva,  correspondance  en  main,  qu'il  faisait 
le  possible  pour  trouver  ce  rara  nris  qui  s'appelle  un  ténor.  La  troupe, 
d'ailleurs,  était  fort  bonne.  On  revit  avec  plaisir  le  baryton  Lesbros,  dont  la 
voix  avait  encore  pris  de  l'ampleur.  Pnget  était  charmant  dans  l'emploi  de 
ténor  léger.  M»"'  Mathieu,  une  excellente  dugazon,  oX  M^"  Prévost,  étaient, 
pour  l'opéra,  de  réels  éléments  de  succès. 

Le  2  janvier  1848,  avant  le  sixième  tableau  du  Chevalier  de  Maison- 
Rouge,  Roche  lut  un  article  du  Sémaphore  de  Marseille,  annon<;ant 
l'arrivée  d'Abd-ei-Kader  à  Toulon.  Un  vif  enthousiasme  éclata  dans  toute 
la  salle,  et  de  nombreux  cris  de  Vice  le  Roi!  se  firent  entendre. 

La  situation  financière  de  l'entreprise  était  loin  d'être  brillante.  Le  20  mars, 
Lemonnier  abdiqua  et  les  artistes  se  mirent  en  république,  sous  la  prési- 
dence de  Roche.  Le  parterre,  de  2  francs  fut  abaissé  à  1  fr.  50,  et  l'on 
décida  de  jouer  pendant  tout  l'été. 

En  mai,  plusieurs  artistes  appelés  ailleurs  par  d'autres  engagements, 
furent  forcés  de  partir.  Lesbros  fut  remplacé  par  Desterberg,  un  baryton  à  la 
voix  très  fraîche. 

Pendant  les  journées  de  juin,  Graslin  ferma  ses  portes. 

Les  nouveautés  de  cette  saison  furent  :  Les  Mousquetaires  de  la  Reine. 
Le  Chevalier  de  Maison-Rouge,  Le  Fils  du  Diable,  Lame  en  peine  de 
Flotow,  Ne  touches  pas  à  la  Reine,  enfin  Gastilheza  de  Maillard,  qui  excita 
un  fou  rire  général. 

Au  mois  d'août  1847,  Déjazet  vint  donner  une  série  de  dix-Jiuit  représen- 
tations. La  charmante  comédienne  était  adorée  à  Nantes,  et  la  salle  ne 
désemplissait  pas.  Levassor,  Baroilhet,  Numa,  Neuville,  Bouffé,  Hoffmann, 
M"'«^  Sauvage,  Mondutaigny  et  Julienne  se  firent  aussi  applaudir  sur  la 
scène  de  Nantes. 

Les  loreltes  —  c'était  le  nom  des  horizontales  de  l'époque  —  attirèrent, 
par  leur  tenue  au  Théâtre,  l'attention  do  la  Municipalité.  Le  maire  ordonna 
aux  commissaires  de  police  de  surveiller  attentivement  les  couloirs  du 
parquet,  a  devenus  un  lieu  de  véritable  scandale.  Les  filles  y  font  la  bourse 
avec  les  jeunes  gens,  —  l'honorable  M.  Colombel  aurait  mieux  fait  de  dire  : 
des  jeunes  gens,  —  pendant  les  entr'actes,  et  c'est  là  qu'on  va  traiter  de 
l'heure  et  des  conditions  du  rendez-vous.  »  Je  suis  forcé  de  constater  ([u'â 
l'heure  actuelle,  les  choses  se  passent  encore  de  même. 


La  subvention  fut  abais.séo  à  )i8,0<X)  francs  l'année  suivante,  et  la  <lirHcu<Hi 
confiée  a  un  certain  Tallicr. 


IIAYDÉE  —  JÉRUSALEM   —   DUPREZ 


151 


SAISON      1848-1849 
TAXiXER,    Directeur 

SoLiÉ,  chef  d'orchestre.  —  IJf.rtin-,  r.-Risaeur. 


OPÉHA 

MM.  EspiXASSK,  fort  tônor. 

Scott,  ténor  Ii-rit. 

Pktit-Delamakri;.  maasol. 

Vii.ijv,  baryton. 

VA.I.I.ÊK,  première  basse. 

Lacroix,  bas8e-c»)mique. 

OzANNB,  laruette. 

Belnie,  trial. 
M""  ScoTT-MoRKF.,  forte  chanteuse. 

DEr.iixic,  chanteuse  It'gère. 

Vauk,  deuxième  chanlt-uso. 

Obertal.  première  dugazon. 
.rwiALVET,  deuxième  dup^azon. 

Vadé,  t^oi8i^me  dugazon. 

JouRY,  duègne. 

DANSE 

Prévost,  première  danseuse. 
CliACVET,  di.'uxiémo  dansfusc. 


COMÉDIE 

MM.  Ror.HE,  premier  rùle. 

Tai.ier.  pore  noble. 

Sandhk,  jeum-  premier. 

Xavier,  — 

Wani'a.  — 

Jules,  troisièm<-  amoureux. 

MoRix.  troisième  rùle. 

DoLiGXY,  premier  comique. 

OzANNE,  financiers. 

Sainval,  premitT  comique. 

AiMKK,  deuxième  ••oinique. 

Dexizot,  deuxième  romique. 

Mai  LKON,  convenances. 
M»",VADft,  premier  rùle. 

Devélia.  jeune  première. 

Broux,  ingénuités. 

Georgina,  soubrette. 

C.  Vadè.  ingénuités. 

CHArvET.  deuxième  amoureuse. 

.ToiiEV.  duègne. 


Le  nieillour  artist(^  de  cette  troupe  était  le  ténor  Espinas.se.  Les  notes 
élevées  de  ce  chanteur  étaient  peut-être  un  peu  faibles,  mais  il  avait  un 
médium  superbe.  Il  possédait  beaucoup  d'expression  et  do  sentiment  et  était 
twcellent  acteur.  Malheureusement,  il  n'avait  été  engagé  qu'en  représentation  ; 
il  fut  forcé  de  partir  en  février.  Huner  vint  le  remplacer  et  fut  revu  avec  plaisir. 

M"'  Seott  ne  réussit  pas  et  fit  place  à  M"«  Koska,  une  jeune  débutante 
(jui  promettait  beaucoup.  La  chanteuse  légère,  M'i®  Delille,  était  doué'C  d'une 
très  jolie  voix  secondée  par  un  talent  sûr  de  lui-m<îme. 

Haydée  fut  jouée  le  4  mars  1849,  et,  malgré  une  interprt'tation  assez 
médiocre,  remporta  un  certain  succès.  La  ville  entra  pour  L300  francs  dans 
la  confection  des  décors  neufs.  Le  Vald' Andorre,  représenté  le  28  août, 
fut  accueilli  avec  une  extrême  froideur.  Le  même  mois,  une  pièce  bourrée 
d'allusions  politiques  :  La  Foire  aux  Idées,  que  la  situation  rendait  d'autant 
plus  briîlantes,  fut  accueillie  par  de  vifs  siHlets  et  de  bruyants  applaudis.se- 
ments.  Le  lendemain  de  la  représent;ition,  le  Maire  lit  afficher  une  procla- 
mation dans  laquelle  il  recommandait  le  calme  à  ses  concitoyens.  Le  soir 
de  la  seconde,  un  piquet  d'infanterie  se  tint  en  permanence  sous  le  péristyle, 
mais  tout  se  passa  tranquillement. 

Le  21  juin  1849,  on  joua  Jérusalem  de  Verdi.  Duprez,  alors  en 
tournée,  fit  le  succès  de  cette  pièce,  dont  les  autres  rôles  étaient  teaus  jiar 


IW 


LK  TlIl'^ATRE   A    NANTK8 


di'S  t'ii'vos  du  côU'hrQ  t6nor,  <|ui  joua  aussi  /.a  Juive,  La  l'acorite  «-t  Le 
Jinrhier.  Le  rôle  de  Rosine  (;tait  chanté  par  une  toute  jeune  fille,  qui 
donnait  drjà  plus  que  do  brill.iiitcs  promesses:  M"'  Miolan.  La  future 
cTr'atrice  d(;  Marguerite  chanta  aussi,  toujours  avec  Duprez,  Lucie  de 
Lfimermmoor. 

A  une  représentation  d'Ot/iel/o,  M"  Delille,  qui  n'avait  pas  eu  le  temps 
d'apprendre  son  rôle,  fut  autorisée  par  la  Municipalité  à  ehanter  partition  en 
mains.  Domange  remplissait  le  rôle  d'Othello,  où  il  «o  nion»'-ri  .(ItniriM-- 
comme  chanteur  et  comme  comédien. 

Au  mois  de  juillet,  les  musiciens  n'étant  pas  payés,  refusèrent  de  jouer. 
C'était  nu  montent  des  représentations  de  Duprez  et  de  M'"  Miolan.  Tallier 
donna  sa  démission.  Mais  un  arrangement  se  fit  avec  les  artistes,  ot  Duprez 
put  achever  ses  représentations 

An  mois  d'août,  Rachel  vint  jouer  P/èi-flrr,  Audromaque  et  Le  Moinc/m  d»- 
Leshie.  Dans  le  courant  de  cette  saison .  l'Alboni  se  fit  entendre  dans  un  concert . 
M""^"  Persiani,  Térésa  Millanollo,  Julian,  Elisa  Masson,  les  ténors  Domanpe 
et  Bettini  vinrent  en  représentations. 


Lemonnier  fut  nommé  de  nouveau  directeur,  pour  la  eampagno  1810  18.V>, 
des  artistes  réunis  en  société.  La  subvention  de:i8.<HX)  francs  était  affe<tée 
au  paiement  partiel  des  premiers  sujets  de  l'opéra  et  des  artistes  de  l'orchestre. 
au  traitement  de  différents  employés,  aux  frais  de  chaufîage  et  à  la  moitié  de 
ceux  d'éclairage. 

SAISON     1849-1850 

LEMONNIER      IDirecteur-Qérant 


Scti.ift,  rlnf  il'nrriii'stre. 

MM.  Chknf.i',  fort  ténor. 

La-oet,  telle »r  U'i^ov. 

Borc.iiKiî,  dcllxi^mt>  ti'nor. 

Kaynai.,  harvtoii. 

Ii0i:\A63Kun,  premiért'  bassf. 

Lacroix,  dciixit'im'  liasse. 

Saint-Ai.be,  Irial. 

Cramoisvn.  lanit'ttt>. 
M"'«»  Lac.kt,  forte  chanleiiso. 

l'iorziccKS.  clianleuse  légère. 

l'.SMK.  ilugazon. 

Pi:i.i.KRiN.   deiixiiMiu'  tliiga/on. 

.liiiiKv.  (luppni-. 

DANSE 
Prnvosr.  première  danseuse. 
('.Al  Kl  i.E.  deuxièino  danseuse. 


_  cni  ,.i  ri     iviTisseur  général. 

C'.OMÉDIE 

MM.  Roche,  promier  rôle. 

Lbmonxif.1i.  père  nobl<'. 

Andiik.  jeune  premier. 

S\M)i'f:.  premier  amoureux. 

.VnniiN.  deuxième  amoureux. 

MoniN.  troisième  rôle. 

0/\nm:,  tinaiiciers. 

,\nnék,  comique. 

X^viKH.  convonanees. 
^jn...  DiKoaai':.  grand  premier  rôle. 

DKSr.RANUKS.  jeune  première, 

BoNNAiîi).  ingénuités. 

OKoiic.iNA,  souhretle. 

DAMiHtiMONT.  tr«ve.sUs. 

BirUER.  deuï.ièi\ui  j^pjoni.  ti> 

Tnr.NAur»,  duèjîno. 


FLACHAT  —  M*^  BLAÊS 


153 


Los  d<''but8  furent  tr/'s  mouvonient«''s.  Le  fort  u'-nor  tomba  et  fut  reuijji  i, . 
par  Oll.ird.  M""  Bousif^ues,  une  ancienne  connaissanfo,  fut  rerue,  mais  dans 
la  ><iiitn  trouva  souvent  une  vive  opposition  parmi  les  auditeurs.  Les  deux 
meilleurs  artistes  de  la  troupe  d'opéra  étaient  le  ténor  léger  Laget  et  le 
harinon  Rayrial. 

La  saison  fut  assez  terne.  Kn  fait  de  pièces,  nonvelles  pour  Nantes,  on 
jou.'i  J.P  Caïd,  Marin  Padilln,  de  Doni/etti,  François  le  Champi,  fiahrietle, 
Charlotte  Corday.  Le  Juif  Errant,  La  liir/ie  nur  ftoig. 

Artistes  en  représent;ition  :  Anna  Thillon,  la  <n'atrice  des  Diamants  dp  la 
Couronne,  et  ancienne  pensionnaire  de  (iraslin.  M"  San,  Julienne, 
Widmann  et  48  danseuses  viennoises  qui  firent  courir  tout  Nantes. 


Lomonnier  conserva  la  jrérance  de  la  Société  des  arti>N's  «jm.  fjri.e  à  ce 
moyen  d'exploitation,   touchaient  des  appointements   fort  minimes.    Les 
charges  de  l'entreprise  furent  allégées.  Le  ThéAtre  n'ouvrit  que  le  15  juillc 
avec  la  comédie.  L'opéra  ne  commençait  que  le  2  novembre. 


SAISON     1850-1851 
LEMONNIER,    Directeur-Gérant 

SoiiK.  ch*f  d"orc!ji«tre.  —  Uu^rik.  r^j^iHiu-iir. 


«  >pr:R  \ 

MM.  IlKi.t.oT,  fort  ti-nor. 
l'oNAMY.  ««"-nor  i/'gPI-. 
l'KTiT,  douxiôine  lonor. 
Mari. MOT,  premit'-ro  bai>8<\ 
lUviKRic,  baryton. 
Nr.sMK.  dcnxl<'ni«»  bassiv 
iJKnviixe.  trial. 
CuAMoiriAN.  laruettfl. 
HictiAHi).  tr<>isi^int'  t/'iior. 
M""  IIai.dek,  fi)rt<' fliantougt'. 

I.oiROs,  premioro  chtintoiiHK. 
Lr.Bi'iNASSB.  dUk^a^oii. 
Pkixktit.  tUMixit'tne  duu'azun. 

(ÎKNKV0I8K,  dUt'Jjnt'. 

Vnius,  du^^rii*». 


coMr:nii: 

-MM.  RomiK.  pri-inier  r.-l.-. 
Kaim.k.  j.-un^  prpiui.^r. 
Mknê.  fort  sMoiid. 
<iuiu.KMiN,  deiixif-nte  am^nmix. 
lIos^ARp.  Unanciors. 
Sairvai..  promipr  comi<|ii.' 
Xavikh.  cunveiiAiiro.s. 
M""  Di'K0.s.sK,  iiromier  rAlo. 
Victoria.  jeuRf  preniKTO. 
.lui.iK.  jiMinp  promitTi'. 
l>KnviLLK.  dcuxli^me  amour«*n«<' 
Thknox.  duéfno. 
Daoûstk.  iitilitt'.s. 


La  troupe  présentée  Atait  assez  faible,  maii  les  ili^buls  se  chargèrent  de  In 
rendre  meilleure.  Le  ténor,  le  baryton,  la  forte  chanteuse  et  la  duge^on 
échouèrt»nt.  Après  quatre  essais  infructueux  on  trouva  d;»n.<«  Hanche  un  bon 
ténor.  Un  baryton  remarquable,  Flachat.  vint  remplacer  Rivière.  .M l^*  Blaé;*, 
une  duga4ton  flne  et  enjouée,  qui  devint  bientôt  l'enfant  gMtiW^  de<)  NanlaÏ!*, 


\rA  ,  U:   TIIKATRE   A    NANTES 


et  M*""  Paola,  unocliant(!U.se  incxpériiiK^ntée,  mais  douée  d'une  voix  superbe, 
succédèrent  à  M™'"*  Lespinasso  et  Halder.  Enfin,  M""»  Voiron,  une  vocalistt* 
des  plus  brillantes,  apportait  l'appoint  de  son  talent  dans  la  troupe  ainsi 
reconstituée. 

Dans  le  personnel  de  la  comédie,  un  nom  doit  attirer  notre  attention  :  celui 
de  M"*  Victoria,  qui  tint  plusieurs  années,  avec  un  réel  talent,  l'emploi  df* 
jeune  première.  Cette  artiste  était  très  appréciée. 

Mais  cette  reconstitution  ne  s'était  pas  accomplie  sans  peine  et  sans 
tapage.  Le  12  octobre,  le  maire,  mécontent  de  Lemonnier,  qui  ne  se  pres- 
sait pas  de  compléter  sa  troupe,  le  fit  révoquer  par  le  Préfet.  On  nomma  à 
sa  place  le  régisseur  Guérin.  Lemonnier  réclama  auprès  du  ministre,  disant 
qu'il  était  dans  les  délais  pour  remplacer  les  artistes  tombés  et  que,  n'étant 
qu'administrateur,  la  Ville  avait  fixé  un  maximum  d'appointements  qu'il  ne 
pouvait  dépasser.  Lemonnier  protesta  vainement,  et  la  càmpapne  s'ar-heva 
sous  la  direction  de  (nièriii. 

Le  Songe  d'une  Nuit  d'Eté,  joué  le  15  mars  1851,  ne  remporta  qu'un 
succès  relatif.  L'interprétation  de  cet  opéra  était  pourtant  tout  à  fait  supé- 
rieure. M^'«  Voiron  roucoula  d'une  façon  merveilleuse  le  rôle  d'Elisabeth. 
Bonamy  était  très  bien  dans  Shakespeare.  M"*  Blaës  et  Marchot  étaient 
parfaits,  eux  aussi. 

Quelque  temps  après  notre  illustre  concitoyen  Battaille  joua  l'opéra  de 
Thomas  et  y  remporta  un  immense  triomphe.  C'était  la  première  fois  qu'il 
venait,  comme  chanteur,  dans  sa  ville  natale.  Il  fut  heureux  et  fier  du  succès 
qu'on  lui  fit.  Nantes  donna  un  démenti  au  proverbe  :  Nul  n'est  prophète 
dans  sonpaj/s. 

Je  ne  puis  laisser  passer  le  nom  de  Ch.  Battaille  sans  consacrer  à  cet  émi- 
nent  artiste,  l'une  des  gloires  de  la  scène  française,  quelques  lignes  dans  cet 
ouvrage  qui  contient  l'histoire  du  Thé;ïtre  de  la  ville  où  il  a  vu  le  jcur. 
Battaille  naquit  en  1822.  Son  père  était  un  médecin  accoucheur  très  estimé. 
Tout  jeune,  son  fils  fut  destiné  à  lui  succéder.  Le  futur  créateur  de  Pierre 
le  Grand  commença  donc  l'élude  de  la  médecine.  Il  fut  reçu  interne  au  con- 
cours de  Nantes  et  passa  ses  quatre  premiers  examens  du  doctoral.  Bon 
nombre  de  nos  concitoyens,  qui  connurent  Battaille  à  cette  époque,  conser- 
vèrent avec  lui  les  meilleurs  rapports.  Mais  la  médecine  n'était  pas  l'afifaire 
du  jeune  homme.  Le  théâtre  l'attirait  irrésistiblement.  Il  entra  donc  au 
Conservatoire  pour  en  sortir  avec  tous  les  prix.  Mais  je  n'ai  point  l'intention 
de  retracer  ici  en  détails  la  carrière  glorieuse  de  Battaille.  Elle  est  assez 
connue.  Battaille  fut,  dans  toute  l'acception  du  mot,  un  grand  artiste. 
Son  éducation  le  mettait  bien  au-dessus  de  la  généralité  des  gens  de  son 
métier,  aussi,  à  la  chute  de  l'Empire,  fut-il  appelé  à  remplir  les  fonctions 
de  sous-préfet  à  Ancenis.  Dans  ce  nouvel  emploi,  (|n'il  tint  avec  un  tact  et 
luie  h.ihileté  r;ii'e-<,  il  prouv.i   «jne  ceux   i|ni  ;ivai<'iit    pou><sé   (le><    tTi<    à    --a 


CHARLES   BATTAILLE  1<>' 

ff 

nomination  avaient  eu  tort.  Ecrivain  distingué,  il  présenta  plusieurs  écrits 
théoriques  à  l'Académie  des  Sciences,  qui  leur  fit  le  meilleur  accueil. 
Charles  Battaillc  mourut  en  1872.  Nantes  peut  être  fière  de  compter  parmi 
ses  enfants  cet  homme  de  cœur,  cet  incomparable  artiste. 

Deux  Nantais,  au  début  de  leur  carrière,  firent  jouer  à  Graslin  deux 
petites  pièces  qui  remportèrent  un  vif  succès  :  Hignard,  Lex  Fiancés  lire- 
tons,  et  Jules  Verne,  Les  J'aiiles  rompues,  une  délicieuse  comédie  qui  ne 
laissait  point  pressentir  l'auteur  des  Voi/ar/es  extraordinaires.  La  Chanteuse 
voilée,  (iiralda.  Les  Moniénérjrins,  La  Jeûneuse  des  Mousquetaires,  Monte- 
Cristo,  La  Fille  bien  gardée,  enfin  le  Courrier  de  Lyon,  dans  lequel  Roche 
joua  d'une  façon  remarquable  le  double  rôle  de  Dubosc  et  de  Lesurques, 
furent  les  autres  nouveautés  de  cette  saison.  On  eutaussi  roccasion  d'applau- 
dir les  artistes  suivants  en  représentation  :  M""  Masson,  le  ténor  Dulaurens, 
alors  au  Conservatoire,  Ernsl,  Thalberg,  Lepeintre,  Bardon,  Kelun,  Lafer- 
rière,  Fcrville,  enfin  M'"'  Monténégro,  une  chanteuse  italienne  de  talent, 
qui  vint  chanter  Xorma  à  la  fin  de  la  saison. 


VI 


DIRECTIONS  :   GUERIN.  —CLEMENT.  —  DEFRENNE. 

ROLAND 

1851-1807 


Mélingne.  —   L^tasaeur.  —    M"    Ilillen.  —  Racket.  —    Duprat.   —  M"   Cambier. 

A/"'    Lassenne.  —  î.es   Noci's    d'»   Jenrinetle.  —  I-e   Piophè  e.  —   ScnutaU.    — 

Caubet.  —  A/"'  Geiâmart.  —  U/'<)n>'er.  —  Mois**.  —  L'Kt'.ile   du 

\*ni(l  —  /    xllioni  —  (l'iine  il'int'ilaïui.  —  Ap)ini,itftii,iits 

Je  t'urchcstre. 

^(  A'/fil'^  municipaliif,  salisfaiJe  dt^  M    (j'iénii,  le  con«5crva  a    li   tétc 

iC  lu.    j    (IcGraslin.  La  subvtniion    priiniiivcnu'nt  fixée  à  35. U(X)  francs. 

V    fiif  au-nn'iitéo  de  li>.00()  franis  à  la  suite  tien  événements  du 

^  V;   2   décembre,   qui    firoDl   traverser   à   tous    les   théâtres    une 


crise 


ésante. 


SAISON      1851  -  1852 
QUÈRIN,    Directeur 

SoLtt.  chef  d'orclioâtre.  —  X...,  rt-gisseur. 


OPÉRA 

MM.   DiiLUC,  fort  tonor. 

Altairvc,  ténor  I«^gcr. 

Leorand,  df  uxiè:ne  ténor  léger. 

Met/lk'i,  massol. 

OawALD,  baiyion. 

Ma»u:hut,  premiprebassf  chan?anlc. 

Lkport.  promière  basdc-com.que. 

Marchand.  lBru»'ti>>. 

Belnik,  trial. 
M"*«  Paoi.a.  forte  chnntoïKo 

VoiHoM,  eh>n:(>ii!io  lè/èrc 

FABtRr.  m>rc  «lu^azon. 

Bu^Ks.  dui^azon. 

Gauthut,  doiixièiuo  dugazon. 

Joasy,  duôgne. 


COMÉDIE 

MM.   l<i>rHi;.  premier  rôle. 
Faille.  j*une  premier. 
Lekurt.  financiers. 
Dev^lx.  financiers. 
Fabfkt,  fort  eune  premier. 
l'iciivRO,  tioi*i"ine  rôle. 
Dr.HviLLK.  premier  com  qae. 
Année,  diuxiè-ne  comique. 
Mairs.  grande*»  utilités. 
Vi-"  Maillet,  premiir  mie. 
Vir.To»'iA,  jounc  première 
Kabert.  coq  ell  •. 
Gautrot.  iii><eiiuilcs 
B«»LU'is.  Riiulintle. 
JuLiEM.  deuxième  amoareuae. 
JulUY.  duèfiMw 


i:>H  LE   THÉATKt;    A    MANTES 

Les  débuts  ne  rnarcli^ireiit  pas  tout  seul.  Le  ténor  Duluc,  1res  rippréciti- 
jatli>  à  Naiites,  ne  trouva  pas  grâce  devant  le  scrutin  La  généralité  du 
public  lui  n-  .lit  fait  cependant  le  meilleur  accueil.  Il  fut  remplacé  par 
Laborde.  M"'  I*aola,  applaudie  pourtmt  Tannée  précédente,  eut  le 
mémo  sort  que  Duliio.  M'"*"*  Cault  et  (iueudy  lui  succédèrent  sans  succé^. 
Knfiii  M"'«  Stransky  fut  admise.  M"'"  Voiron,  dont  le  délicieux  organ<- 
pur,  souple  et  velouté,  se  prêtait  si  bien  aux  fioritures  du  <hant  léger. 
M"'  Blnës,  le  ténor  léger  Altairac  (|ui  était  excellent,  le  baryton  Oswald 
et  la  basse  Marchot,  formaient  une  belle  réunion  d'artistes. 

La  saison,  malgré  cela,  fut  languissante.  La  situation  politique  détournait 
du  Théâtre  tous  les  esprits. 

Guérin  fît  ime  heureuse  incursion  dans  le  vieux  répcrtoirt".  Un  rtriitt-ndit 
avec  un  vif  plaisir  :  Ip  Petit  Chaperon  Nouge,  de  Boïeldieu,  (iuli^tan,  d»' 
Dalayrac,  le  Tableau  parlant,  de  Grétry,  enfin  Aline,  reine  de  Golronde. 
de  Rorton,  opéra  par  lequel  le  Grand  Théâtre  avait  fait  sa  réouverture 
en  181  :{. 

En  fait  de  nouveautés,  le  Théâtre  représentii  :  La  Porte  du  Jirésil,lf8  Por 
cherons,  la  Dame  aux  Camélias,  M""  de  la  Seiglière,  la  Poupée  de  Kureiw 
berfi,  la  P>'tite  Fadette,  le  Chapeau  de  Paille  d'Italie,  lienoenuto  Cellini, 
Salrator  h'osa.  Ces  doux  dernières  pièces  suscilèient  une  grande  cmlovité. 
car  elles  furent  jouées  avec  le  concours  de  Mélingue  qui  les  avait 
créées  à  Paris.  Le  célèbre  acteur  remporta  un  très  grand  suc^ès.  A  la 
dernière  de  Benvenuto  on  tira  une  tombola  composée  de  six  statuette- 
d'Hébà.  On  sait  que  Mélingue,  doué  d'un  beau  talent  Je  sculpteur, 
modelait  en  quelques  minutes  une  statue  dans  le  drame  de  Bfnrenuto 
Cellini.  Ce  tour  de  force  contribua  grandement  au  succès  du  drame  de  Paul 
Meurice. 

Levasseur  se  fit  entendre  et  applaudir  à  outrance  dans  Robert,  la  Juive  et 
/e.s  Hur/aenot^.  Les  autres  artistes  en  représentation  furent  Hermann-Léon. 
Vigier,  Grassot,  Arnal  et  M"'  Duprez. 

Le  15  août  1852,  une  représentation  de  gala  fut  donnée  en  l'honneur  du 
prince  Jérôme  Slapoléon,  président  du  Sénat  La  salle  était  comble  et 
montra  beauconj)  d'enthousiasme.  La  foule  insouciantt^  avait  déjà  oul)lié  les 
massacres  de  Décembre. 

On  répara,  cette  année-là,  la  façade  principale  du  Grand-Théâtre  et  les 
retours  sur  les  rvies  Corneille  et  Molière.  Les  dépenses  de  cette  restauration 
s'élevèrentà  10,000  francs. 


Le  Conseil  municipal  m;*intint  la  subvention  a  ;{5.000  Irancs.  et -Guéri  n 
conserva  la  direction. 


SOIRÉES    ORAGEUSES. 


i:/) 


SAISON     1852-1853 


OUÉRIN .    Directeur 


SoLife.  ch'f  iJ'ortlii-.sti' 


r '(ÇiastMjr 


OPKRA 

MM.  DcMRUBK.  fort  tùnor 
FiAHSiNE,  lêiior  l»'-^»r. 
I.KTTKAYB,  «l»'UXi«'rn«^  If-nni    1"V 

l'RuuviKii,  première  b)UM<i> 
Vani.aih.  burylon. 
Hkhhy.  deuxiriiic  hasnr 
I  '.iiAMiif:nY,  trial. 

l'EKltMN,    IurUrlt«> 

M'"*    C.KAMiiON,  forte  chaiiteiiHiv 
/ui.ftMA,  rhaiiteiiHe  li'jffu,'. 
iliiotMET,  prenii^re  ilu^a/on. 
Kkuciiaho,  ih'iizi"""'  .iii.'-i  ..>! 
.loBEY.  (IiièRne. 


«'.OMEim-: 

MM.    RocHK,  pr«'ini»T  rnl»-. 
Faheht,  jeune  |>reiiii»'r 
Lkulajic,  fort  rtecon'l. 
l>F.vAi!x.  linancicrri. 

I.RMAIRK,  Coinii|Ue 

Tony,  convi-n;iiiceH. 

M»*»   Vai.emy,  premier  rnle. 

VicToHu   jeutic  premi'ie 
IIaoios,  iiigèiiuilé. 

Hl.iiNDKI..   ilIg/'IMliti'-. 

l<H<i<;iiAR(>.  <i>>uxieme  Niii>>>iriMih>'. 

lU-i.i.Y      .....1.,.  U- 


Les  (U'^buts  déciin«*reni  cette  trou|)e.  Les  soirées  furent  trè>  ongeuses,  le> 
^l)ectateurs  nesiiniiienl  |)as,  —  l'arrêté  de  la  mairie  interdisait  l'usage  des 
clefs,  —  mais  iN  riai'Mil,  causaient  a  haut»'  voix  et  frappaient  des  pieds.  Le 
25  octobre,  le  prcfet  prit  l'arrélé  sui\ant  : 

AHTirr.E  PHKMIKH.  —  Lc 'IMédtre  de  Naiii>--  <>i  in  m.- j.ru\  i-->ir.'iii-iii. 

Art.  2  —  M.  (iu»Vin.  directeur,  est  mis  en  demeure  de  prociVicr.  dans  le 
plus  bref  délai  possible,  a  la  formation  d'une  nom  e||f  troupe  en  tous  genres. 
Les  artistes  |)r«''(édeinmerit  engagi's  ne  seront  admis  ;i  Lire  partie  de  l.i 
nouvelle  trou])e  qu'après  avoir  reçu  ras>entinu'ni  pn-alable  de  l'autorité. 

.\n\.  M.  -  M  11"  \î:nt..  ,!.•  \  iMi.'<  >•<<  .  Il  11.-.'.  ,|..  l'oxéculion  du  présent 
.11  )■>'■{>•. 

...    l'réfpi 

B.  »B    .\lENTwt  K. 

Guérin  s'empressa  de  reconstituer  une  nouvelle  trou|)e,  et  leTbéAtre  rou- 
\  rit  le  (>  novembre. 

MM.  Lapiene,  fort  leuor  ;    lious(|uel.    ténor  l»''ger  ;    Flaehat,  baryton  ; 
llécbers.  basse  :  Saint-Denis,  bisse  <baniante.  —  Karl,  premier  comique. 
M'"'"'  Hillen,  chanteuse  lég6re  ;  de  Courseilles,  dugazon;  Choimet.  deuxiè 
me  dugazon,  furent  immédiatement re<;us 

M^'  Hillen  éUiit  une  ravissante  ehanleuv,>  lé^'én*.  Elle  a  laissé  a 
Nantes  d'inoublial>les  souv<'nirs.  Flacbal,  tléja  connu,  retrou\.t  t.»m  son 
succès.   Lcij  autres  artistes  étaient  d'une  bonne  moyenne. 

Si  fêtai»  Hoi.  i|ui  remporUi   un  succès  des  plus  vifs  ;  Halath^r,  Oiartf. 

'l'Emile  Augier.  le  /'■••"  '-tUfan/.  la  '' '■  'o-..;.   jy,,,,^  furent  les  non 

\eautès  de  l'année. 

Battaille  .«îc  fît  applaudir  avec  frénésie  dans  le  Val  d' Andorre  et  le  Soupe 


160 


LE" THÉÂTRE    A    NANTES 


(Viinenult  d'(^té.  RachM  vint  jouer  Adrlenne  [."courr/^urct  l^ffii/  Tartuffe. 
Flt'ury.  de  rOpér.i.  <f  N'"  ixiL-mps,  coiiipUt'"--'''  !■  -'••'>  'i--  ri.fi.f,.;  .n 
rcf)r(^s<ni.ilinn. 

M.mgin  fondi  cetle  annr'îc  le  Théâtre,  feuille  de  sp^ciasle  dont  l'existence 
fut  assiz  épliénuTe. 

•    « 

L'Adminisfration  municipale,  prise  d'un  b^au  mouvement  de  g<^néro»ilé, 
prorosa  au  Conseil  d'éleVcT  la  subvv'nlion  au  chiffre  de  50.0)»  francs.  La 
discussion  fut  vive,  mais  enfia  la  victoire  resti  au  b  m  sens.  La  subvention 
proposée  fut  votée  et  le  système  des  artistes  en  société  fut  de  nouveau  remis 
eu  vigueur. 

La  subvention  était  ainsi  affectée  : 

:21.(j00fr.  pour  assurer  aux  premiers  sujets  un  minimum  d'appointements 
convenable, 
pour  l'enintien  et  la  confection  des  décors, 
pour  l'orcliestre. 
éclairage, 
chauffage, 
appomtements  à  divers  employés. 


6.000 
8  0!I0 
4.(XiO 
2."<  U 
6.000 

50.(X)0  f"r. 

Le'lhéûtre  devait  ouvrir  le  2  mai;  il  formait  ensuite  pour  rouvrir  défini- 
tivement le  15  août.  Guérin  fut  renommé  directeur. 


SAISON     1853-1854 
GUÉRIN,    Directeur 

SoLiK,  «licl  <i  uri'lif.str  ■.  —  X...,  n-gissi-iir. 


OPERA 

MM.    PiiiLii'PK,  fort  lènor. 

BiNRAU,  iciior  léjjfr.   • 

DÉsiRft.  di'uxièino  ténor. 

Fi.\cHAT,  baryton. 

Fu.MOL.  pri-'Hiière  bas.se. 

Bkrrv.  rlpuxième  basse. 

Leo.v.  trial. 

Cn\MoidAN,  laruelle. 
M""8   Luoi'KT.  forte  rhanlen.se. 

]jA.ssenne,  iliantfii.sc  Jok^''^'- 

G»ti,TiiiiT.  doux  ème  clianteuHC. 

MARCIIANn,    (Ill'/HZOn. 

Flachat,  doux  Ànie  dugazon. 
LuQUKT,  diiè^nc. 

B,\LLET 

M.    lies,  maître  d.-  h;illot. 
M»».»    Delaiikyk.  première  danseuse. 
Dkmouchy.  deuxième  danseuse. 


CO.MKDIE 

MM     Bnr.iiE.  premier  rAIe. 

lUnHs.  jfune  premier. 

nEv\i  T.  niiaiiriers. 

Hkhry.  deuxi-mo  rôle. 

J  K.HAHi).  troisième  rôle. 

Faukmt,  premier  amoureux. 

Mabi^ic.hal.  deuxième  amoureux. 

Lf :i>N.  premier  comique. 

Maicuwo.  deuxième  comique. 

Lamueht.  convenaufcs. 
M's   I)ALLoCA,  p'omior  rôle. 

Galtrot,  co  juelle. 

.\.  Gactrot.  jeune  première. 

Gause.  deuxième  lunoureuse. 

pBOMkNT,  souLrtttt*. 


LE   PROPMÈTC 

Los  débuts  furent  défavorables  à  Philippe,  Filliol  et  Lënn,  ainsi  qu'à 
M"*  Lugjt't.  Crs  àrtisU's  furent  Toinplarés  par  Duprat,  ténor  ;  Tastc, 
Hasso  ;  Belnio,  trial,  et  M""  Cambier,  forli*  ch  inicuse. 

Ainsi  rcrn  inién.  la  troufK»  si>  trouva  «'•tri»  dtr  premier  ordre.  Diiprat  était  un 

ipcrbe  ténor  à  la  voix  ulain*,  juste.  sympiilii<{ii>?  ;  M'Cimbierélait  douée 
d'un  lr/;.s  bel  ornant' et  poss«^(|  lit,  CM   ouiri',  un   r^c\  talent  de  coniédionne  ; 
M''<^  LassiMine  avait  une  voix  di-licale  et  frùb»,  mai*^ ''''"•"'•"   ••"'^"  ît  •'•  "i 
î  Fl.ichat  ne  doivent  pas  être  oubliés  non  plus. 

Le  fçrand  événi^men»,  artistique  de  la  saison  fut  la  p^emi^^o  du  Prop/U'te 
['M  jmvie  Ifiôl).  An  diredi-  ccrfainos  pe-sonne*,  c.»l  opéra  nedevait  jamais 
être  r. 'présenté  à  Nanii-ii.  Los  d.Hi  ult<''S  de  la  miso  en  s  rne  avaient  déjà 
arréié  plusieurs  directeurs.  Guérin,  plus  courageux,  n'hésita  pas  et  inont;i 

i  ouvrage  do  Meyerbcr  ;  il  eut  raison,  <'ir  lo  succèi  fut  immense  et 
incontesté.  Quoiqui'sspcclatonrs  pourtant  si'  pl.iifçnirent  de  no  p;is  trouver 
avisez  de  morceaux  chantants  d  ins  <•  'ito  partition  !  !  !  Toujours  la  ni<*me  n-ii- 
gaine  !  Quoi  qu'il  en  soit,  li*  Prophète  enthousi.isma  lo  public  pendant 
17  représentations.  I/interpvétation  était  supérieure.  Duprat  et  M"* 
ratnbier  (Jean  et  Fidês)  méritèrent  des  éloj?es  unanimes.  M"*  Lassonne, 
Filliol,  Taste,  Flachat  et  Blini>au  chantèrent  les  autres  rôlosà  la  satisfaction 

néralc.  La  mise  en  scène  ét.iit  suporbe  et  fit  beaucoup  d'efîct.  Malheureu- 
.-icincnt,  le  lever  du  soleil  rati  I»'  premier  soir.  Les  cinq  décors  neufs  étaient 
l'œuvre  de  MM.  Crémion  et  Séehin.  Ilscoûtènut  7  !(;•>  'w.  CA.  D.nv  <.'i.f< 
costumes  nouVi*aux  furent  aussi  eonfecti<'nné^ 

Le  lundi  Jô  mai  \<A,  un  praiid  «oncert  fut  donné  au  Thr^àlre  à  roecnsion 
(le  l'ouv.Tiure  du  Miisèi»  (h>  Feltre.  n.ilLiille,  F^og.'r.  li*  violoniste  Alard. 
\'and''ii-lleuvel.  M""'"  ('alx.'l  et  Dulkcn  prêtiiient  leurs  concours  à  cette  inté- 

ssanie  cérémonie  artistique  dans   laquelle  on  exécuta,  entre  autres  mor* 

aux,  iXi^ii  compositions  duconite  de  Feltro.  Deux  critiques  |)arisieDs,  Fio- 
ii'iitino  et  Escudior,  vinnMitâ  Nantes  |xiur  celte  solennité. 

Ij'h  Soccm  de  Jeannette  (lô  novembre  1851}  remporl>rent  un     .. 
1  .'opéra  de  Massé  fut  délicieusement  interprété  par  Flachat  et  M"«  Lassenne. 

La  voix  sympathique  de  l'un,  les  trilles,  les  fioritures,  les  pammes  chro- 
matiques et  les  roulades  de  l'autn»  firent  merveille,  i>  dit  le  Breton.  On  j<)ua 
aussi  Haymond,  un  méchant  opéra  de  M.  Thomas  ;  ColinAfaillorf/,  pciil 
opéra  comique  dû  .^  la  collaboration  de  ms  concitoyens  Hipnard  et  Verne  ; 
V Honneur  et  l'Argent^  le  FiU  de/amitle^  Philiberte^  Diane  de  Ly»,  les 
J'ilU's  de  Marbre. 

Elisa  Masson  vint  jouer  deux  fois  le  ProphH^ci  produisit  dans  le  rôle  do 
Fidès  une  profonde  impression. 

Artistes  en  représoniaiion  :  Dojaz  t.  Acli.ir  !.  Lov.is.sor,  M''   LulUor,  enfin 


162  I.E    rHKATKE    A    NANTES 

l>ates  exoti(|ues,  une  dame  placi'*e  aux  secondes  de  face,  s  eliiiça  dans  la 
salle  après  avoir  compté  :  une,  doux...  Elle  tomba  sur  le  bord  de  la  galerie 
des  fauteuils  sans  se  faire  grand  mal.  Reconduite  cbez  elle,  «'Ile  n'expliqua 
pas  les  motifs  de  cet  acte  de  folie 

Un  soir  on  joua  Le  Prophète  et  L' Hoiniinir  rt  Carfjent.  Le  s|>ectaele 
commonea  à  G  heures. 

A  cotte  époque,  la  critique  musicale  se  montrait  justement  sévère.  Les 
artistes  n'étaient  pas  ménagés  lorsqu'ils  ne  le  ra^'-ritaient  pas,  et  la  presse 
leur  disait  carrément  la  vérité.  Que  diraient  les  chanteurs  d'aujourd'hui  «^i 
fous  les  journaux  se  montraient  aussi  durs  qu'autrefois  ?  Pourtant  la 
critique  dépassait  parfois  les  bornes.  Voici  un  extrait  d'un  article  de 
M.  Olivier  Merson.  paru  dans  L'Union  Bretonne.  Je  le  donne,  non  comme 
un  exemple,  mais  sim[)lcment  comme  un  cchaniillon  du  ton  (pic  (crtiiiiis 
journaux  prenaient  dans  leur  feuilleton  théâtral  : 

«  C'est  comme  cotte  hoirible  Madame  Lapie  !  Ah  !  personne  n'avait  donc 
de  clé  pour  silïlcr  coite  affreuse  Madame  Lapie!  Ce  n'est  plus  de  la  baraque, 
ce  n'est  pluô  de  la  foire,  ce  n'est  plus  de  la  farce,  que  cotte  abominable 
Madame  Lapio  !  c'est  une  difformité  comique  en  tout  point  semblable  au 
diaI)lo  t'Ixniriffo  qui  sort  d'une  tabatière  on  corne.  Kt  dire  que  ce  diable 
•'liounfré  a  montré  son  goinfre  envermillonné  et  que  le  public  n'.i  pas  eu  un 
soûl  silllot  pour  la  faire  rentrer  dans  sa  tabatière  de  corne! 

Il  Ces  chosos-la,  M.  (iiiéiin,  quand  on  les  a.  c'est  à  coup  sûr  un  malheur, 
niais  précisément  à  cause  do  cela,  il  faut  des  précautions  pour  ne  les  jjroduirp 
qu'à  bon  escient.  A  l'avenir,  regardez  donc  ;i  doux  fois  avant  d'ouvrir  la 
tabatière  de  corn(»qui  recèle  dans  ses  flancs  le  diable  ébouriffé  que  je  vous 
signale,  et  p.^r^ftniie,  vraiiM<^nt,  ne  se  [ilaindiM  de  \otr''  roscrv»-  à  cet 
t'gard.  » 

C'était  dur,  pour  no  pas  dire  plus,  surtout  s'adressantà  une  femme.  Mai>. 
sans  employer  un  style  pareil,  ne  pourrait-on  revenir,  envers  le  directeur  et 
les  artistes,  à  une  critique  sévère  tout  en  restant  juste  ?  La  presse  |X)litique. 
depuis  quelques  années,  est  vraiment  trop  douce.  On  sont  trop,  dans  se> 
articles,  un  parti  pris  do  bienveillance  quand  même.  D'un  autre  côté,  les 
spectateurs  d'aujourd'hui.  —  lîls  dégénérés  de  pères  que  des  compagnies  de 
ligne,  baïonnette  au  fusil,  étaient  obligées  de  faire  sortir  du  ThéAire,  —  ne  se 
passionnent  plus  pour  les  qui^slions  artistiques.  Aussi  qu'arrive-t-il*.^  C'e>t 
(|u'on  voit  paraître  et  rest(>r  sur  la  première  scène  de  Nantes  des  cabotins 
dont  Carcassonne  ne  voudrait  pas.  Si  la  critique  se  montrait  moiDs  indul- 
gente, cet  «'lat  (le  e)i<-><o  cesserait  bieniAl. 


LjO   directeur   nomme  pour   la  campagne  IKMIRÔ.S  fut  M.  Clément.  La 
subvention  resta  fixée  à  50.000  francs. 


NOUVEAU    MODE   DE   DEBUTS 


1«3 


SAISON     1854-1855 
CLÉMENT,    Directeur 


S<u,ifc,  chff  d"iirche«lri' 
OI'fiMA 

MM.    DK    LA    ClIAISaKK,     forl    l<-IIOI 

JuLEfi,  ténor  Ii-^er. 
Mathiku,  •leuxièni"  Imior. 
ViNcKNT.  baryluii. 
Valkt,  premitTo  biissi-. 
(.îouEi.Aour,  basse  comique. 
OuKoi  H,  d»>iixit-(ue  banso. 

BtH.NONVII.LK,   liirliettfl. 

Daihk.  trial. 
M'"'*   liKnNoxvii.i.K,  f'irlf  rhanteus.-. 
Ki<:iiKii.i>,  chanleuso  |t'gt>re. 
Dic  LA  (>iiAt;iK^-.i:,  deuxième  rliatit. 
-DciiAunv,  dugaz**!!. 
i^ivioN.  duègne 


rOMKDIK 

MM.   HociiK^  premier  rnlc 

CotLo  iiitR,  fort  jeune  |)r<-nii>-t 
Dlkour,  Irul.sjiVmo  rf>U> 
J.  liociiK,  premier  tim<nii-it\ 
Laval,  dcuxii-me  umuuroux 
MoRizK.  grandes  ulibl<-» 
Pkhhot.  Iinaiicier8. 

I)A1IIK.    tu 

MaKIIxi.  .|U* 

Mm"   I»v\ioi  itK\i  .    1  If 

Lai  HKTii.  ')>■  i  r.v 

Si\io\,  nure  nol»ie. 
Vaijcnch:.  grande  r<M|U)*ttf. 
Olympe,  jeune  prenii' tp 
.Vdobcy,  ingénuité. 
I.^VAL,  deuxième  amoiireu.'>- 
JouEY.  dui-ane. 


Un  uouvol  arrôté  concernant  his  débuts  fut  piomulgui^  au  commenceiuent 
tlo  la  saison.  En  voici  le  ri^-sunir.  Un  moisapri's  rouverliiredol;i  lanipjgne. 
Ions  les  artistes  à  emploi  étaient  soumis  à  l'éprouve  du  .scrutin.  Les  abonnés 
:i  l'annéu  votaient  seuls.  Un  bulletin  imprimé  portant  le  nom  d&s  artistes  a 
juger  était  donné  aux  votants.  Il  sulllsait  de  barrer  le  nom  pour  le  rejet.  Le 
vole,  |>er.sonncl  et  secret,  était  à  la  majorité  des  sulfrages.  Quel  que  fût  le 
nombre  des  votants,  le  scrutin  durait  une  heure,  thins  le  local  et  au  jour  fixé 
par  la  Maiiic.  Tout  artiste  tombé  devait  être  remplacé  dans  les  quinze  jours. 
Pendant  les  débuts,  toiite  manifestation  d'improbation  était  rigoureu.scmcnt 
interdite. 

Un  autre  arrêté  du  maire  préposa  une  ouvreuse  à  chaque  cabinet 
d'aisance.  La  taxe  était  fixée  à  10  centimes. 

Pour  l'ouverlure,  le  {?az  fut  installé  dans  toutes  les  |>arties  du  1  héatn». 
L'huile  ét;iit  encore  employée  sur  la  scène  et  a  l'orchcsire. 

La  troupe  présentée  par  Clément  était  mauvaise,  aussi  futelle  vite  décimée 
par  les  débuts,  qui  congédièrent  MM.  de  la  Chaussée,  Jules,  Vincent.  Gode 
laghy,  Mathieu,  Vallct,  Coulombier,  Dure;  M*""  Bernonville,  Eichfeld,  de 
la  Chaussée.  Ces  artiste-^  furent  remplacés  par  les  suivants,  dont  plusieurs 
étaient  avantageusement  connus:  MM.  Duprit,  .\nUiiomc,  lénor  léger  de 
beaucoup  de  talent;  Lyon,  Gra.it,  ('éret.  Après  trois  essais  infructueux  pour 

trouver  une  forte  chanteuse,  on  eut  recours  à  Elisa  Musson,  qui  (ut  -• 

avec  des  transports  d'allégresse  dans  sa  bonne  ville  de  Nantes. 


1G4 


LL   THEATRE   A    NANTES 


Au  romnvTnceincrit  de  la  saison,  le  comique  D;iiiv,  refusé,  causa  un  scan- 
dale f|ui  devait  se  dénouer,  d'une  manière  fâcheuse  pour  lui,  en  police  correc 
tionnelle.  Cet  individu,  trouvant  dans  le  passage  Pommeraye  un  banquier 
bien  connu,  M.  Jules  B....  le  frippa  brutulement  au  visage,  croyant  avoir 
affaire  à  M.  Olivier  Merson.  Le  comédien,  s'élant  aperçu  de  son  erreur,  se 
confondit  en  excuses,  mais  l'affaire  ne  devait  pas  en  rester  là.  M.  Merson, 
apprenant  l'incident,  se  rendit  à  la  conciergerie  du  Théâtre  et  Bt  appeler 
Daire.  «  C'est  moi,  lui  dit  il,  qui  suis  M.  Olivier  Merson.  »  Aussitôt  l'artiste 
donna  au  critique  une  chiquenaude.  Merson  riposta  par  un  vigoureux 
soufllet.  Le  soir  l'on  dut  changer  le  spectacle,  Daire  ne  pouvant  plus  repa- 
raître en  public.  La  cause  première  de  toute  cette  histoire  était  une  critique, 
cette  fois  assez  anodine,  de  M.  Olivier  Merson  sur  ^L  Daire.  La  presse 
entière  protesta  vigouicusement  contre  les  prétentions  des  cabotins. 

Cette  campagne  fut  mauvaise  au  point  de  vue  pécuniaire.  Le  16  avril  I85ô, 
Clément  se  retira.  Le  soir  on  fit  relâche.  Mais  l'oreheslre  avant  abandonné 
les  10  jours  d'appointements  qui  lui  étaient  dus,  les  artistes  ayant  promis  de 
ne  pas  faire  de  saisie  sur  les  recettes,  enfin  Elisa  Masson,  Duprat  et  Anthiome 
ayant  consenti  à  faire  la  remise  de  plusieurs  cachets,  Clément  reprit  ses 
fonctions.  Un  afficha  un  spectacle  ;  mais,  à  4  heures  du  soir,  le  direc- 
teur envoya  à  la  Maiiie  sa  déu)ission  définitive  el  fit  coller  des  bandes 
sur  les  affiches  La  campagne  n'avait  plus  que  quinze  jours  à  courir  ;  les 
artistes  la  terminèrent.  Cctie  aimée  là  il  n'y  eut  pas  d'artistes  en  représenta- 
tion et  les  uouveailtés  ne  furent  pas  des  plus  intéressantes.  On  joua  Madelon, 
de  Bazin  ;  La  Promise,  de  Clapisson  ;  Le  Billft  de  MarrjuerUe,  de  Gevaërt; 
La  Crise  ;  Le  Cœur  et  la  Dot.  Une  grande  féerie  :  Les  Merceilles  du 
Monde,  admirablement  montée  avec  le  matériel  de  Paris,  obtint  un  vif 
succès. 


La  gérance  de  la  Société,  pour  la  campagne  suivante,  fut  confiée  a 
M.  Defresne.  La  durée  de  l'année  théâtrale  était  fixée  à  onze  mois,  dont  neuf 
avec  tous  les  geufes. 


SAISON     '1855-1856 
DEFRESNE,    Directeur-G-érant 

SoLiÉ,  chef  d'orchestre.  —  X...,  régisseur. 


OPÉR.\ 

MM.    Caubet,  fort  tiînor. 

CiivLLAHT,  tt'iior  loger. 
Lemaire,  deuxième  ténor. 
RoouiER.  masâol. 


M   HTiN.  baryton. 

Bai-ethacu,  première  bas-e. 

PETir,  ba^scciiitn  ante. 

Bekrv,  deuxième  basse  chaniaot*. 

LucA!i,  trial. 

0UO1.N0T,  loruttto. 


M"    GRIBMARI» 


mi-/;nier 


IC 


Mm'»   FuiZARi),  furte  rhanteu8i>. 
l'iU/j^H.  chai.'  :     "  .• 

KAir.LK.    pKli  II 

nilUUCDUKT.    iltjiixit  liio    (lll^JZOll. 

Pahonm:.  deiixi<-iiie  cliatitciiHi*. 
l'uNcKi.ET.  niorcdugazoïi. 
JuKKV,  diii'gne. 

COMtDIi; 

MM.    lîERNKT,  premier  r.'»le 

ItociiK,  deuxtèm»  n'dc  niar(|iii-. 
ItuoLiKH,  jj'unf  pp-mier. 
DonvAi..  fort  j»-uii«.'  premier. 
llAYNiiUi.  d<'U\ii-m<'  iunouri'UN. 


MM.   Allan.  deuxième  amoureux 
Hkhry,  :; 
FANor.i  I 

Ra.  .jlJf 

<jiciiVAi'«,  lii-uvioiiie  comique. 
M'n'«   FosctLET,  premier  r'»le. 
IIaRDY,  jeune  premiiTe. 
Dkiiay,  uière  noble 
JoiiKY.  caractères. 
r.ç 

Kl  -  amoureune. 

Dci.i  iir<  [>i. 

l.vr.ir..  -6 


AnoNXKMKSTH    .\    i.'wN^K  :    Plr«<'*«H   nou  réaervées  ;   Ilurameit,   aiji»   francs  ;  idanieK. 
1('>||  fruncH.   -   1  lilH  et  lu^e»,  80  francs:  baignoires  et  orcbentre. 

:m  franc»  :  l-,  .  h. 


Celle  trou|M'  coiitoflait  qiu'lqucs  bons  artistes.  Le  ténor  Caul>ot  |><jss«\lail 
une  grande  et  b«'llc  voix  qu'il  avait  le  Uilent  de  ne  jamais  forcer.  Son 
trionjplio  était  Eléazar,  do  La  Juice.  Citons  aussi  le  ténor  léger  Challart  et 
le  baryton  M;irlin.  Il  y  eiil  plusieurs  chutes  :  celles  de  Baléiraud,  Kaynard, 
Dorval,  Koguier,  Oudinot,  M"'"  Fuizard  ol  Faigb'.  (|ui  fur.nf  i.mmi.1  i.  .'■>  m. 
Bonnesseur,  Thirard,  NardieretM"*  Bl^l^s. 

M"  Geismard  vint  comme  forte  chanteuse.  Celte  artiste  possédait  un»' 
jolie  \oix  et  un  beau  talent.  Elle  devait  faire,  plus  t^ird.  une  courte  apparition 
a  rOp«'ra.  Elle  revint  ensuite  se  fixer  à  Nantes.  Son  mari,  M.  Ecarlat,  tenait 
un  cabinet  de  lecture  situé  ruo  Voltaire.  M"  Geismard  était  fort  estimée  dans 
notre  ville. 

Régnier,  alors  dans  toute  sa  gloire,  vint  donner  îles  reprt^sentation>  >ur 
cette  scène  de  Grasiin  où  il  avait  fait  ses  premières  ;urmes.  Il  remporUi,  dans 
le  rùlc  do  Noël,  de  La  Joie  /ait  ju-ur,  un  succès  sans  précédent.  Il  j«)u;i 
aussi  Tartuffe.  A  cette  occasion,  le  maître  de  pension  Boullaui  lui  adn'.ssi 
les  vers  sui\ants  : 

.\antes  i'a  ru  commencer  la  carrière, 

l'Ule  applaudit  à  trs  heu>' 

Pensant  gu'un  /oui'  la  tr 

lirtcntirnit  de  tes  i>   s' 

l'a  nous  devais  crtir 

Qtii  nou.'  ratifitr,  nu  instant  an  bon  gont. 

Mais  rct  instont  dispuraitra  bieti  rite. 

l.e  mnurais  goût  est  aujourd'hui  partout. 

\!'^i"'i'e,  hélas!..,  pour  nous  quel  ridicule, 

de  la  tc^ne,  est  dans. . .    /••  vestibule  .'  " 

Le  11  septembre  18ô5,  pour  célébrer  la  prise  de  Sébastopol.  qu'on  venait 
d'apprendre,  l'orchestre  joua.  pon»Ianl  l'entracte  du  deuxième  acte  de  la 
Juice,  le  dod  snce  the  Queen  et  l'air  de  la  Heine  I/ortenite. 


100  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


Moïse  ohùnt,  le  .*W  of^tobre  1855,  un  brillant  succès.  L'opéra  de  Rossini 
était  bien  chanté  par  M™"  Geismard,  Caubet,  Bonnessenr  et  Martin.  Chose 
Hrange,  la  Priôre,  la  seule  page  qui  ait  survécu,  fut  le  morceau  le  moins 
,ipplaudi  de  la  soirée.  Le  2(\  mars  1850,  VKtoilc  du  Xord  parut  à  son  tour, 
pour  la  première  fois,  sur  l'affiche.  L'exécution  fut  excellente  du  côté  de 
l'orchestre  et  des  chœurs,  quant  aux  artistes,  ils  laissèrent  à  désirer.  Un 
cnrouornent  f^éiiéral  affligeait  les  chanteurs.  Les  interprètes  de  cette  a-uvre 
hybride  et  endormante  étaient  MM.  Bonnesseur,  Martin,  Challarl,  Nardicr, 
^mt'H  Roziès  et  Dubarry.  Pour  ces  deux  opéras,  des  décors  neufs  furent 
brossés  par  M.  Bernier. 

Los  spectacles  monstios  étaient  ioiiJ(hu's  a  la  mode  le  dimanche.  On 
donna  un  soir  les  Trois  Mou.sr/uef aires,  le  Chalet  et  les  Deux  Aveugles.  Le 
rideau  se  leva  à  cinq  iieures  et  demie  du  soir,  pour  ne  tomber  définitivement 
qu'à  deux  heures  moins  un  quart  du  matin. 

Les  autres  nouveautés  ofTertes  par  Defresne,  furent  le  Demi-Monde,  le 
Comte  iJermann,  la  Reine  Maryot,  le  Bijou  perdu,  le  Médecin  des  Enfants, 
VElisire  d'Amore  avec  M'"''  Persiani,  les  Compagnons  de  la  Marjolaine, 
d'IIi^'nard  et  Verne,  enfin  le  Monde,  drame  inédit  d'un  autre  de  nos  compa- 
triotes, M.  Tessier,  qui  devint  rédacteur  à  la  Lanterne  et  directeur  de  son 
supplément  littéraire.  Cette  œuvre  d'un  débutant  fut  très  applaudie  et 
l'auteur  dut  paraître  deux  fois  sur  la  scène. 

Les  nombreux  admirateurs  de  l'Alboni  eurent  le  plaisir  de  l'entendre  dans 
le  Barbier,  la  Favorite,  la  Fille  du  Régiment  et  le  Prophète.  Dans  les  rôles 
si  différents  de  ces  opéras,  la  grande  cantatrice  fut  admirable.  M™-  Persiani 
se  fit  entendre  dans  un  concert  avec  d'autres  artistes  italiens.  Sivori  et  son 
violon  magique,  ^L  et  M'n^Taigny,  du  Vaudeville,  Mélingue,  enfin  Céline 
Montahuid,  vinrent  en  représentations.  Cette  dernière,  déjà  célèbre,  n'était 
âgée  que  de  douze  ans.  Elle  joua  son  fameux  rôle  de  la  Fille  bien  gardée, 
et,  pour  la  première  fois  à  Nantes,  un  vaudeville  de  V.  Mangin  :  Cerisette 
en  prison. 

Roche  fit,  cette ,année,  ses  adieux  au  public  qui  l'applaudissait  depuis 
trente  et  un  ans  sans  se  lasser.  Il  donna  une  représentation  de  retraite  et 
M'a»  Roche,  qui  s'était  retirée  du  Tliéàtre  depuis  quelque  temps,  reparut  sur 
la  scène  une  dernière  fois.  Ces  deux  excellents  artistes  dont  la  carrière  à 
Nantes  avait  été  si  brillante  et  si  honorable,  furent  couverts  de  bouquets  et 
de  couronnes,  justes  témoignages  de  l'estime  et  de  l'afîection  générales.  Ils 
jouèrent  une  scène  en  vers  de  l'un  de  nos  compatriotes,  M.  Puységur  :  Un 
Souvenir  de  Défiance  et  Malice.  Défiance  et  Malice  est  une  petite  pièce 
dans  laquelle  Roche  avait  joué,  pour  la  première  fois,  à  Graslin  en  1825. 

Pendant  cette  saison,  la  Ville  fit  établir  deu\  calorifères  au  Théâtre.  La 
dépense  s'éleva  à  24.000  francs. 


APPOINTEMENTS   DE   l'ORCHESTRE 


167 


J'ai  retrouvé,  dans  \6s  archives  de  la  Mairie,  le  chiffre  do3appoint«iii'iii> 
(le  l'Orchestre  à  celle  époquâb  Ces  appoiiitenieiiLs  sont  intéressants  à 
connaître  : 

185G 
l>*r  moi»  i>>r   iiku. 

Dfuxii'me  haiilboi» 7l)  francs. 

PremitTO  flûte 120      — 

DeuxHino  flrtl«> 70      — 

Premier  basson  .  UXJ       — 

I >eu s U'ine  basson.  7n      — 

l'romif'r  r<»r 110      — 

I)>'iiM<nie  cor '.*i      — 

Trui«itiiu*  ror ...  /O      — 

Quatrième  cor 70      — 

Premjt'r  piston 120      — 

Dcuxi(-me  piston 60      — 

Premier   Irnmboiie 8ii 

Deuxi.-me  trombone 50 

Troisième  trombone 70      — 

Ophiclêide {jo 

Timbalier 7o 

PianisteorKaiiiste  115      — 

Tainltoiir •.;."»      


Premier  chef  d'orchestre  . . . 

450 

francs. 

Deuxième  clief  d'urcbestre.. 

140 

— 

I{«ipetit»'ur  el  premier  alto. . . 

120 

— 

Violon  solo 

120 

— 

Premier  violon 

HJO 

— 

Deuxième  violon 

m 

100 

— 

Premier  alto 

Deuxième  all< 

50 
KJO 
100 

— 

Premier  violoncelU' 

Deuxième  violoncelle 

Troisième  Tiolonc«lle 

MO 

— 

Quatrième  violoncelle _. . 

JT. 

— 

l'remirre  contrebasse 

;h 

— 

Deuxième  contrebasse 

ti5 

— 

Troisième  contrebasse 

50 

— 

Quatrième  contrebasse. . , . . . 

50 

— 

Première  clarinette 

120 
110 
l-Xt 

- 

Deuxième  clarinette 

Premier  hautbois 

l'oiir  la  premirre  fois,  la  question  de  la  gérance  du  Théâtre  par  la  Villf 

fut  posée  au  Conseil,  iorsiju'il  s'agit  du  vote  de  la  subvention.    M.  J.-B. 

(luilley,  alors  conseiller  municipal,  bien  connu  par>on  goîitpour  la  musique 

et  le  théâtre,  goût  qu'il  conserva  jusqu'à  l'âge  le  plus  avancé,  fit  un  rapport 

remarquable  qu'il  serait  troj)  long  de  citer  «-t  dans  lr<juel  il  proposait,  comme 

remède  à  la  situation  maladiveoù  se  trouvaient  tous  les  théâtres,  l'exploitation 

des  scènes  par  les  municipalités.  Cette  idée  no  re<,ut  pas  un  accueil  favorable. 

il  fut  décidé,  pourtant,  qu'il  n'y  aurait  plus  de  sociét«j  d'artistes  mais  bien  un 

directeur  responsable,  avec  OO.OO.l  francs  de  subvention.  Cette  somme  de 

UO.tKK)  francs,  destinée  à  tenter  les  directeurs,  était  absolument  illusoire.,  ar 

voici  comment  la  Ville  la  répartissait  : 

En  numéraire ."»<». 0(K)  francs. 

Loyer  gratuit  de  la  salle  estimée  à. .    .  .     ilO.UN»       — 
Partitions,  décors,  costumes  a KMKJO      — 

Tot^il IHJ.DUO  francs. 

L'allocation  llnVitrale  était  donc,  en  réalité,  la  même  que  lesautresaïuiees. 

Deux  artistes  de  la  troupe,  Demortain,  jeun»'  premier  el  Bonnesseur.  ba-^.se, 
postulèrent  la  direction.  Demortain  remi>orta,  mais  il  ne  devait  p;isdemeun»r 
longtemps  à  la  tête  du  Grand-Théâtre. 

Le  10  aoiît  18ô(j,  il  envoya  .sa  démission  a  la  Nfunici{)alité.  La  chaleur 
était  tellement  forte  que  j^ersonne  n'allait  au  Théi\lre  :  on  était  forcé  déjouer 
devant  les  banquettes.  La  Ville  se  mita  la  recherche  d'un  directeur.  Elle 


168 


LE    THEATRE    A    NANTES 


finit  par  en  trouver  un  en  la  personne  de  M.  Koland-Saiiil  Lé^'er,  qui  ne 
consentit,  d'ailleurs,  à  venir  que  eoninic  L'/'i'.mt  d'une  soîiélt'-  d'.ii  tistfs.  Le 
Théâtre  n'ouvrit  qu'en  octobre  : 

SAISON      1856-1857 
ROLAND  -  SAINT-LÉGER ,    Di  recteur-Gérant 

SoLiK,  chef  d'orchestre.  —  Kmmanuel,  régisseur. 


OPÉRA 
MM.  Toby-Masskt,  fort  lénor. 

Su.ioi.,  ténor  léger. 

Gazf.navb,  deuxième  ténor  léger. 

(J!aki.ii:r,  baryton. 

DoBBELS,  basse  noble. 

SoTTO,  basse  chantanle. 

IIaly,  troisième  basse  chantante. 

CuEVAYE,  trial. 

Bauquesne,  laruelte. 
M"""'    Henonville,  forte  chanteuse. 

Xuma-Blaini,  chanteuse  légère. 

DucLos,  dugazon. 

Robert,  deuxième  dugazon. 

.loBEY,  duègne. 

Albert,  duègne. 


COMKDIK 
MM.  Delafossk,  premier  rôle. 

E.  Roche,  jeune  premier. 

l'iETEz,  pieini.'r  amoui'eux. 

Hkauqijes.ne,  deuxième  comique. 

(]iievaye,  deuxième  C4jmique. 

Ernest,  jeune  comique. 

Rosambeau,  troisième  comique. 
M"»"    Thoy,  premier  rôle. 

Albert,  mère  noble. 

Devaux,  ingénuités. 

Ogtavie,  amoureuse. 

IIerxianck,  coqueti*. 

BoBKRT.  soubrette. 

.loBEY  duègne. 


Cette  .saison  fut  terne  et  sans  intérêt.  Il  y  eut  plusieurs  chutes  :  Carlier, 
^mcs  Renonville,  Duclos  et  Robert  durent  partir.  M.  Fernando, 
Mme  Rey-Santon,  enfin,  M"«  Blaës  à  qui  l'on  finissait  toujours  par  avoir 
recours,  vinrent  le?  remplacer.  Le  ténor  léger  Sujol  était  le  pcTC  d'André 
Sujol  que  Nantes  devait  applaudir  plus  tard,  deux  ans  de  suite,  sous  la 
direction  Paravey.  Il  possédait  les  mômes  qualités  que  son  fils  et  débuta, 
comme  lui,  dans  le  Barbier.  Il  chantait  avec  une  grande  aisance  cette  musi- 
que légère  et  vocalisait  avec  une  facilité  remarquable. 

Dans  un  article  sur  le  Théâtre  paru  en  185G,  M.  Mangin  se  plaint  du  peu 
de  variété  du  répertoire  et  du  ressasseraent  continuel  de  certains  opéras 
entre  autres  de  la  Favorite  qu'il  juge  :  «  une  musique  frippée  et  une  œuvre 
chantante  dont  la  popularité  ne  garantit  nullement  le  mérite.  »  Toucher  à  la 
Favorite  en  l'an  de  grâce  1800  !  !  !  Décidément,  Mangin  avait  toutes  les 
audaces. 

On  joua  sous  cette  direction  Jaguarita  l'Indienne,  la  Fanchonnette,  le 
Fils  de  la  Xuit,  qui  fournit  treize  représentations,  chose  extraordinaire  pour 
un  drame,  la  Joie  de  la  Maison,  et  enfin  une  pièce  du  cru  :  Hue  d'Or- 
léans X^. . .  dont  l'auteur  ne  se  fit  pas  connaître. 

Déjazet,  Grassot,  Pérez,  M'"''*  Araldi,  Ravel,  Aline  Duval,  le  pianiste 
Prudent,  Debureau,  Darcier.  Raphaël  Félix,  vinrent  donner  des  représen- 
tations. 


Théâtre   des   Variétés 

Place   du    Cirque 
(D'après  un  dessin  de  l'épO(}ue,  extrait  des  Archives  Nantaises,  de  Verger) 


?,«^?.'?fcÇ^^^1^ 


VII 

THÉÂTRE     DES    VARIÉTÉS 
(Rue  de  rArche-£è:he) 

]-••.■>  l'iliiles  'lu  lii.ihlo.  —  h,j.i^e(.  —  .\<i,ir.l .  —   J.i'jn-r    —    I  >rii>-t. 

'^J  '^cT^'n  18:M,  s'éleva,  pri's  du  pont  Sauvetout  ei  sur  i'ompiaceraeiit 
h^M'r:  *-}  d  une  ancienne  tour  de  l'enceinte  de  Nantos,  un  petit  théâtre  «lui 

OC<\L-Xi  '     prit  le  nom  de  Salle  des  Variétés.  Ce  monument,  propre  et 

/Wv  V*»  '  '^  I  ... 

iS^tvc ''■•'1  coquet,  ctiil  du  à  1  arehitecte  Chenantiiis. 

Un  certiiin  Armand  en  prit  la  direction,  mais  le  Maire  lui  refusa  l'auto- 
risation d'ouvrir  celte  set^onde  salle. 

Apri^s  bien  des  démarches,  cette  difficulté  fui  a[)laiu<' ;  mus  i»-  ninivcau 
thédtre  ne  couimcnc^a  ses  représentations  qu'eu  I80G.  L'ouverture  eut  lieu  le 
23  mai.  On  joua  un  ProloQUP  et  un  Duel  sous  Richeiieu. 

Pendant  quelque  temps,  la  foule  alllua  aux  Variétés  mais,  bientôt,  on  ne 
joua  guère,  pendant  l'hiver,  que  le  dimanche.  L'été,  les  représentations 
étaient  plus  suivies.  Il  y  avait  souvent  des  artistes  de  passage.  On  applau- 
dissait aussi  sur  cette  petite  scène  des  gymnasiarques.  des  prestidigita- 
teurs. Quelques  concerts  s'y  don)iaient  encore,  de  temps  à  ûutre,  et  do  nom- 
breux bals  y  avaient  lieu  chaque  année. 

En  1S40,  la  seconde  scène  nantaise  remporta  un  grand  succès  avec  un 
drame  fort  bien  monté  :  le  Xaufrage  de  la  MéduAc. 

En  1842.  Lemonnier  prit  la  direction  des  Variétés.  11  monta  avec  luxe 
les  Pilules  du  Diahlr,  et  appela  en  représentation  des  artistes  de  valeur  : 
Lepeintre,  Achard,  Ligier. 

Pendant   l'année  184  1.   Déja/et  et  le  conuque  \  ernel.  des  \  ancio.  vm 
rent  donner  une  série  de  soirées.  Grâce  à  ces  deux  artistes.  1 1   ■-oci.'ti-  r\r- 
gaute  qui  avait  alxindonné  les  Variétés,  se  décida  à  y  revenir 

Ce  renouveau  ne  dura  pas  et  le  petit  thé&tre  retomba  dans  le  marasme. 
Parfois  la  troupe  de  Grasiin  allait  y  jouer  quelque  gros  mélo  ou  quelque 
vaudeville  abracadabrant  qu'on  ne  jugeait  pis  digne  d'être  représe«tc  sur 
notre  première  scène. 


170 


Lli   THEATKK    A    NANTES 


Peu  à  peu  les  Variétés  abandonnèrent  le  genre  dramatique.  Le  proprié 
taire  se  eontentait  de  louer  la  salle  à  des  faiseurs  de  tours  quelconques,  à 
des  lutteurs.  Bientôt  le  cirque  Pasquier,  que  le  percement  de  la  rue  Boileau 
avait  laissé  sans  local  ,s'y  aménagea  et  les  Variétés  cessèrent  d'être  théâtre. 
Elles  devaient  être  transformées,  plus  tard,  en  magasin  de  fer.  Il  y  a  quel- 
ques années,  on  voyait  encore  lorsqu'on  passait  sur  le  pont  Saovetout,  le 
dôme  de  cette  petite  scène  s'arrondir  au  milieu  d'un  amas  de  vieilles  mai- 
sons. L'emplacement  de  cette  salle  est  occupé,  aujourd'hui  par  les  magasins 
de  crins,  laines  et  duvets,  de  M.  Maury. 


CINQUIÈME     PARTIE 
î|)8  la  ^^GesLion  du  ^Grand-  Jhéâlre  par  la  .\- ille  à  la  -Fin  du  XIX"  -^iècle 


1  857 


1  OOO 


Théâtre  Graslin.  —  Théâtre  Renaissance.  —  Théâtre  des  Variétés 


I 

GÉRANCE    DE    CHARLES  EOLIÉ.  POUR    LE    COMPTE 

DE  LA   VILLE 

I857-I8<;i 

M"'  Ilillen.  —  I.es  Dragons  de  Villars.  —  Déjnzet  rt  A/-'  lieainje.  —  A/"»  Ijnroye. 

M"'  lirièi-f  Fnui-é.  —  ytirapclli.  —  lioitrnrif.  —  liéjuij.  —  A/—  linrijhéte. 

I.e  Fanion  do  IMot-rmel.—  Charles.—  LeTrouvi^re.—  t'omte-Jiorehard. 

('(tstclmary.  —  A/—  Drsterbi-cq.  —  Knusl.  —  A/-*  Carnilho. 

litKsultats  financiers  dr  la  gdrance. 


^TV*?^/!?,  i»i  i<r;iiiiu'0  lH.")7-18r>8,rA(lininii>tralioinlioisii.conime(lirt'Cleiii*, 

M.  Vigny;  inais,d«;s  \v  mois  do  juilU'f, celui  ci  démiissionnii.  Le 

scrutin  avait  démoli  presque  toute  la  troupe  qu'il  avait  réunie 

^vii!>îpj  pour  les  mois  d'éiê.  I.;i  Municipalité   nomma   alors   l'ancien 


directeur  du  tlu'àtrc  de  Rouen,  M.  IMuniketl,  qui  se  démit  quelques  jours 
après.  On  s'adressa,  en  désespoir  de  cause,  à  Dolij;ny,  neveu  de  Talma,  qui 
avait  été  applaudi  comme  premier  comique  sous  la  direction  Bousigues. 
Mais  comme  il  demandait  une  avance  sur  la  subvention  pour  former  sa 
troupe,  les  pourparlers  engtigés  furent  bientiit  rompus. 

La  situation  commençait  à  devenir  grave  et  la  future  saison  paraissait 
bien  compromise.  La  Ville,  très  ennuyée,  demandait  à  cor  et  à  cri,  chez  tous 
les  correspondants,  un  directeur.  Celui  ci  demeurait  introuvable.  Personne 
ne   voulait   plus  so   risquer  à   venir  a  Nantes.    Les   cluiU'S  continuelles 


172 


LE   THEATRE   A    NANTES 


effrayaient  tellement  les  artistes  qu'ils  refusaient  de  faire  partie,  à  n'importe 
quelle  condition,  de  la  troupe  de  Graslin.  Les  correspondants  consultés, 
exigeaient,  pour  fournir  un  directeur,  un  remaniement  entier  du  cahier  des 
cliargf  s,  la  suppression  des  débuts,  pas  de  nombre  limite  pour  les  choris- 
tes, et  le  maintien  assuré  de  la  subvention  de  .■)O,O0O  francs.  Pendant  tous  ces 
pourparlers,  le  temps  avait  passé  et  la  fin  de  sppt«'iubre  arriva  sans  qu'une 
(lécisioneùt  étéprise. Enfin  l'Administrationse  décidait  réunir  le  Conseil  pour 
lui  exposer  la  situation  sans  issue  dans  laquelle  on  se  ^débattait.  M.  Guilley, 
le  i^arfisau  le  plus  décidé  de  la  gestion  du  Théâtre,  soutint  avec  énergie  et 
éloquence  son  projet  favori  et  fut  assez  heureux  pour  le  fa  ire  adopter.  Char- 
les Solié  fut  nommé  administrateur.  Nantes  était  la  première  ville  àessayer 
('•e  système.   Nous  verrons  tout  à  l'heure  les  résultats  (|u'il  donna. 

Restait  à  former  une  troui)e  ;  ce  n'était  pas  le  plus  facile,  vu  l'époque 
avancée  de  l'année.  Enfin,  après  bien  des  difficultés,  Solié  y  arriva,  mais  lo 
Tliéâtre  ne  fut  prêt  à  ouvrir  que  le  31  octobre. 

SAISON      1857-18SS 
Charles    SOLIÉ ,    Administrateur  -  G-érant 

Solié,  chef  d'urcliesh-e.  —  (iAUiiKHT,  régisseui-. 


0P3^RA 

MM.    l^LipiiAT,  fort  ténor. 
liioTouT,  ténor  léger. 
l>ERNAiiD,  deuxième  ténor  léger. 
(jkh.\rd,  troisième  ténor  léger. 
O.sMOND,  baryton. 
(î.\^YB.\L,  première  basse.      • 
G.4R0N,  basse  chantante. 
f.AVKnGNE,  deuxième    basse    ciiaii- 

tante. 
Yi.ON,  troi.sième  basse  cliantante. 
.JoLLY,  trial. 
(  '.oLi.iNET,  laryettc. 
M"'"  Stranski,  forte  chanteuse. 
IIii.i.EN,  chanteuse  légère. 
ViK,  jeune  chanteuse. 
GoNTHiKR,  ileuxièmo  dugazon. 
•louKY,  duègne. 


GOMKDIE 

MM.    lîoGER.  premier  rùle. 

Marceluin,  jeune  premier. 

Kraiss,  premier  amoureux. 

Maurice,  deuxième  amoureux. 

.loi.LY,  prenjier  comique. 

Tuais,  deuxième  comique. 

CoLLiNET,  coini(iue  marqué. 

Thomas,  comique  grime. 

l^uHEHT.  troisième  rùle. 
M""3    AuMONT,  grand  premier  rùle. 

Reynes,  jeune  première. 

(ioNTHiER,  ingénuité. 

Passa RiKLX,  amoureuse. 

Berger,  co(iuetle. 

HouDOis,  soubrette. 

•loHEY,  iluègue. 


Prix  i»es  Pi,m;es  :  Pieniiéros  loges,  l-'auteiiiis,  liaignoires  :  .">  fr.  Deuxième.»; 
liOges.  Stalles  :  4  fr.  T)!).  —  Pirniièies  (ialeries,  Paniuol,  Deuxièmes  de  face  :  :5  fr.  5<>. 
—  Parterre,  Deuxièmes  de  cùti'  :  '.i  fr.  —  Troisièmes  :  1  fr.  —  Quatrièmes  :  50  cent. 


I*our  que  le  senitin  fût  valible,  il  fallait  que  la  moitié  des  abonnés  votdi. 
Il  y  avait  alors  lÙO  abonnés,  mais  ils  avaient  fini  par  se  désintéresser  des 
scrutins.  Aussi,  était-ce  presque  toujours  la  Mairie  qui  prononçait  le  rejeton 
l'admission  des  artistes. 


DÉJAZET    ET    M™*    BBAUGÉ 


173 


Il  y  eut  peu  d(!  (•luîtes.  IJétout  et  Heriiurd  furent  les  seules  vieliiiics.  Ils 
furent  rem plaeé.s  par  MM.  Carré  et  Daiiglès.  La  troupe  était  coriveiial»le. 
M™"  Hillen,  que  personne  n'avait  oubliée,  retrouva  son  vif  succès  d'autre- 
fois. Rosine,  du  li a rh ie r,  éiuil  toujours  son  trioniplie.  Apn-s  sou  départ  de 
Nantes,  cette  excellente  elianteuse  fut  engagée  à  l'Opér.i. 

Le  ly  mars  \S')H  les  J)raf/ons  de  Vil/ors,  «  le  triouipli»-  ilu  cornet  a 
piston  »,  comme  les  a  appelés  spirituellement  V.  Wilder,  firent  leur  a|)pa- 
rition  sur  la  scène  de  Nantes.  Cette  platitude  musicale,  dont  le  seul  mérilu 
est  de  posséder  un  assez  joli  livret,  eut  un  vif  succès,  .M-''  llillen  remporta 
dans  le  rôle  de  Rose  Fri(|uet  un  trionjphe  de  comédienne  et  de  eantalri<i'.  Le 
ténor  léger  Carré  était  fort  bon  dans  Sylvain. 

On  reprit  /fnhin-rlfs- liais  avec  succès.  Deux  décors  nouveaux,  dont  !<• 
prix  s'éleva  à  r>,V87  fr.  12  furent  peints  à  cette  occasion. 

Cette  année,  Déjazet  vint  donner  une  représentation^dontle  produit  devait 
être  destiné  à  racheter  du  service  le  fils  de  M""  Beaugé,  la  souf lieuse  du 
Crand-TliéAtre.  Depuis  bien  longtemps,  la  charitable  et  grande  artiste  avait 
promis  son  concours  à  cette  bra\e  femme,  qui  était  très  aimée  <les  artistes. 
Déjazet  joua  Colombine  avec  un  grand  succès  et  la  re<'elte  s'éleva  à 
2,fî'.*'Jfr.  30.  Mais  le  fils  Beaugé  ayant  été  réformé  pour  cause  d'obésité,  sa 
mère  employa  l'argent  de  la  représentation  à  l'achat  d'une  petite  maison 
située  chemin  des  Dervallières.à  côté  de  l'auberge  du  /?p/>o.x  deJnlex  César. 
lin  souvenir  de  l'artiste,  M'»'  Beaugé  donna  à  sa  minuscule  maison  de 
eampagne  le  nom  dr  Villfi-Dojazet. 

La  saison  de  grand  opéra  se  termina  à  la  (in  d'avril,  uni-  r.tp.'T  >  '■.>r>'i<iiie 
et  la  comédie  continuèrent  pendant  le  mois  de  mai. 

On  joua,  pendant  cette  saison,  plusieurs  comédies  nouvelles:  la  7' '/«^/«//j/n«, 
je  Mari  à  lii'ranijKuino,  la  Question  Warr/ent,  le  Fils  nnhirel,  IMliln. 

Dataille,  Lafonlaine,  Deselée,  Lia  Félix,  les  Zouaves  d'Inkermann  vin- 
rent en  représentations. 


SAISON      1858-1859 
Charles    SOLIÉ.    Administrateur-Oerant 

Soi.iK.  rliof  iloivlipslri'.   —  «i\t  iir.nr,  ré>(is8i'iir 


MM.  Miiivi'Ki  i.i,  fort  tt'iior. 
l'.ui/VAnn.  triior  lè^w. 
MousouKT,  deuxi«'nu>  l«'iior. 
Sot'STKU.i,  Iroisii'ine  tt'-iior. 
Vincent,  baryton, 
Dkli^homiik,  jw»>nii«'>r«>  basse. 
Vixr.KNT-C.i  0.  ba.sso  •  ii:tiit.iiit< 
LivKnoNE,  deu.\ièinti  busse. 


CiiAiM  w.  troJHiènie  bu^^•^. 
('.iuRi.K><.  triol. 

«iHAKETuT,   lurtU'ttt'. 

M-"  Rki-i-om,  forlo  cliaiitouHt'. 

Hriérk-Faurê,  charil>-u84>  U'>)(érf 

DLF.ti:.  dugiiZOll. 

rKiuLiKT,  tlciixi<^m«'  <iu^a/it:i. 
Fi.Ei  UY.  deiixiome  dugaioii. 
•lOBKV.  duègue. 


SI 


174 


LK    TIIKATRE    A    NANTES 


M"'    M\i  us,  jirciiiirre  liati.seUNf. 

Bkiithot.  douxiî'iua  daiiHouM-. 

CoMftDIK 

MM.    \i:/,iAN,  premier  rôle. 

Ai.iiAi/A.  jeiHio  premiei-, 
HhKi.KT,  premier  amoureux. 
P.  A1.UAIZA.  deuxième  amoureux. 
Hi:jv\,  premier  complue. 
(^HAïu.Ks.  comi<|ue. 


KR.NtHi.  ileuiieme  comi<|ue. 
BiH^:,  trotxième  rôle. 
(iRAKKTOT,  linaucierti. 
."^oUHTKLU,  convenance;». 

M"'«   Blanchard,  premier  rôle. 
CoM.iONiiN.  jeune  première 
CiiAi'uis,  ingénuitéx. 
Ki.Ki  itY,  soulirolte. 
HEruiKn,  roquette. 
(JitAFETOT,  soubrello. 
Di.vAi-,  mère  noble. 
.JoiiEY,  iluègne. 


Il  y  eut  un  assez  grand  uoiubre  de  chutes.  Delarombe,  M"*»  Belloni. 
Maury  et  Berthot  tombèrent  et  furent  remplacés  par  M.  Périlié,  M™'"  Hilaire 
et  Beiton.  M""  Maury  resta  comme  seconde  danseuse. 

M™'  Brière-Faurô  ftait  une  chanteu.se  légère  qui  ne  manquait  pas  de 
talent.  Elle  avait  beaucoup  de  partisans  et  aussi  de^  ennemi.^  assez  nom 
breux.  Des  bravos  entremêlés  de  sifilets  ne  manquaient  jamais  de  saluer  ses 
apparitions,  L'Union  Bretonne  se  faisait  surtout  n-marquer  par  l'âpreté  de 
ses  criliquos.  Enervée,  M™«  Brière  résilia  le  2'-i  octobre.  Lors  de  sa  dernière 
représentation,  les  artistes  de  l'orchestre,  qui  l'avaient  en  haute  estime,  lui 
offrirent  une  couronne  ornée  d'une  dédicace  flatteuse,  mais  la  municii>alité 
empêcha  de  la  lui  donner  en  scène,  pour  ne  pas  contrarier  l'opinion  de  cer- 
tains habitués  de  Graslin.  Cette  interdiction  semble  avoir  été  un  véri- 
table abus  de  pouvoir.  Pourquoi  favoriser  plutôt  les  ennemis  de  M«"*  Brière 
que  ses  nombreux  partisans?  Mystère  et  coulisses. 

;^Ime  Brièrc-Fauré  fut  remplacée  par  une  artiste  qui,  comme  Elisa  Masson 
ne  sera  jamais  oubliée  à  Nantes.  Je  veux  parler  de  M"<'  Lavoye,  qui,  très 
âgée  aujourd'hui,  habite  encore  notre  ville.  M'^"  Lavoye  avait  jadis  créé 
Ifai/dee,  à  l'Opéra-Comique.  C'était  une  femme  très  distinguée,  une  chan- 
teuse de  valeur,  une  musicienne  accomplie.  A  l'époque  où  elle  vint  à  Graslin 
elle  était  sur  son  déclin  :  les  notes  élevées  de  sa  voix  étaient  un  peu 
fatiguées,  mais  le  médium  était  superbe.  Comme  actrice,  elle  était  très  cor- 
recte, mais  cependant  un  peu  froide.  M"*"  Lavoye  obtint  cli.^/  nt>u<  un  vif 
succès.  Elle  sut  bien  vite  se  faire  adorer  du  public. 

Parmi  les  artistes  d'opéra,  il  faut  citer  Mirapelli,  assez  bon  lénor  qui, 
malheureusement,  avait  le  grave  d(''faut  de  chevroter,  et  Bouvard. 

Dans  la  troupe  de  comédie,  signalons  le  nom  de  Béjuy.  Cet  excellent  et 
fin  comédien  a  laissé  à  Nantes  le  meilleur  des  souvenirs.  Il  était  très  jeune 
alors  et  ne  faisait  (jne  débuter  ;  mais  il  avait  déjà  un  réel  talent.  Il  avait  sur- 
tout étudié  Régnier.  Il  ne  pouvait  choisir  un  meilleur  modèle. 

Cette  annéeon  monta  les  Amours  du  Diable,  do  GrisaTt.  Cet  opéra  féerie 
remporta  un  succès  assez  vif.  On  avait  acheté  pour  5,000  francs  le  matériel 


A.    KT    K.    POL<«.    —    l'aLWJ.NI  1  T.'i 

fiu  théâtre  do  Lille.  Les  autres  nouvfaut»'s  furent  M(U'(ha,V Avocat  Patftin. 
la  Marie,  coméilir  de  notre  rornitovrn  M.  To.ssier,  Fanlnn  la  Tidiiif,  nifin 
Trlémfifjne  et  CoIi/iiho,  balltt  vaudeville-fantaisi»'  en  I  tablt-aux.  (J»Mte  piêo»? 
fort  drôle  ut  remplie  d'une  foule  de  bons  mots,  avait  pour  auteurs  deux  Nan- 
tais, Aug\ist<î  et  Fninroi«»  Polo  qui,  plus  lard,  devaient  fondera  Paris  le 
journal  rAV///i«/*.  Cette  l>outfonnerie  formait  le  rire  «'t  fut  très  applaudie. 

L'anniversain*  de  la  nais^anee  d»*  Molière  était,  .suivant  un  viril  uvige. 
toujours  cél<f*brée  à  (iraslin.  Celle  annét^  on  lut,  à  celle  uc«'asion,  une  pièrc 
de  vers  de  A.  l'olo.  Le  passage  suivant  fut  souligné  par  les  bravo^: 

Nou.^  ti'oul»li*>ronHJ<imaiH,  ù  po«''le  p«nsour. 

Qu'A  Nantis  tu  parus,  arti«te  voya({»»ur? 

Ta  «loir*'  &  son  aurore  èiinc-lait  à  peine. 

<"«)tait  Ion  pn'niit-r  paM  (Inns  la  brillant*-  an-n*- 

Dont  tu  sortiH  vainqueur!  F.o  marbre  a  ronwrx»', 

Comnie  un  év^'-noramt  ce  souvonir  gravé  ; 

(J'e.st  un  f<-uiIU-t  obscur  d«-  ta  Hiibliiiic  liiHloii' 

iJont  nous  nou.s  sentons  liers  <lo  garder  la  mcmoirv! 

Pendant  celte  saison,  l'Alboni  vint  jouer  la  Facorite.  Klle  se  fil  aussi 
entendre  dans  un  conci'rt. 

La  Ville  ai-(|uit  pour  (>.():?8  fran«<  I.-j  d.-. •..!•<  d-  -  1J,i.,u,,,,,i^  .uii   ,i,t..ii.. 
naient  à  une  tierce  personne. 


Les  résultats  linanciers  do  la  gérance  par  la  Ville  pour  ces  deux  saison!^ 
n'avaient  pas  été  des  plus  brillants.  Je  sais  combien  les  chiffres  sont  fasti- 
dieux, aussi  me  dispenserai  je  de  reproduire  le  rapport  tn^'s  détaillé  de 
M.  Guilley.  11  suflira  de  savoir  que,  de  l'avis  même  du  rapporteur,  promo 
leur  delà  gérance  par  la  Ville,  pendant  ees  deux  <am lignes  : 

Les  dépenses  tot-iles  avaient  été  dr  y'^W  :i'>"{  li 

Les  recettes  totales  de KJS..MS 


Pert4»  totale  sur  les  deux  campagnes  ....     l'.).*».7;{."i  fi. 

Kn  réalite,  la  perte  n'avait  été  (|ue  iCi.TX'i  fran«'S.  puisque  la  Ville  auriit 
toujours  donné,  pour  chaconedes  campagnes,  50.000  fniDcs  de  subvention  à 
un  tlirecteur  responsable.  Mais,  comme  le  faisait  remarquer  très  judieieuse- 
inent  M.  (iuillev.  tous  les  genres  avaient  été  exploités  |>endant  dix  mois  et 
l'on  avait  eu  un  kallet  complet.  L'honorable  rapporteur  eoneluait  au  main 
tien  du  système  adopté,  en  maintenant  la  cain|Kignc  à  dix  mois  dont  huit 
seulement  avec  tous  les  genres.  Do  plus,  le  ballet  était  remplacé  p;ir  un 
simple  divertissement.  Avec  ces  trois  é(*onomies  il  pens;ut  qu'i»n  •■■'■.%.  rc' 
à  balancer  la  subvention. 


\7(\ 


r.E   TIIKATRE    A    NANTES 


L'afîain;  vint  au  Conseil  inuiiicipal  le  VA  décembre  1S5H.  I^i  discussion 
fut  clja:id<';  finalcnimt  M.  Guillev  fut  vaincu.  L'Administration  parvint  a 
faire  voter  son  projet  d'une  simple  subvention  de  fjO.OOO  francs,  qui  fut, 
après  différentes  observations,  portée  à  70.000  francs.  Ce  vote  produisit 
parmi  les  artistes,  qui  s'étaient  trouvés  fort  bien  de  la  gestion  par  la  Ville, 
une  profonde  émotion.  Le  personnel  de  la  troupe  envoya  au  Maire  une 
lettre  de  regrets  qui  se  terminait  ainsi  : 

«  Si  Nantes  avait  persisté,  croyez-le  bien.  Monsieur  le  Maire,  dix  villes 
peut-être,  l'an  prochain,  eussent  suivi  son  généreux  exemple,  et  re\périen<'e 
a<=^surait  alors  la  prospérité  du  système.  Le  vole  du  Conseil  municipal,  au 
contraire,  mai(|uera  (l'un  temps  sérieux  d'arrêt  la  régénération  duTliêâtr»-; 
permettez  aux  soussignés  dédire  qu'à  tous  les  titres  ils  doivent  en  dépl<jrer 
les  fâcheuses  conséquences.  » 

Restait  à  trouver  un  directeur.  Mais,  comme  deux  ans  auparavant,  ou  ceux 
([ui  s'olFraieut  n'avaient  pas  le  cautionnement  de  10.000  francs  exigé,  ou  les 
<>nlrepreneurs  séi'ieux  demandaient  une  subvention  de  ÎJU.OOO  francs.  Dans 
ces  conditions,  et  sur  le  rapport  de  M.  Chenantais,  le  Conseil  municipal 
vota  à  l'unanimité,  dans  sa  séance  du  :20  janvier  IS-')!',  l'annulation  de  sa 
précédente  délibération  et  la  continuation  de  la  gérance  par  la  Ville.  Ce 
jour-là,  l'excellent  M.  Guillev  se  coucha  heureux. .11  triomphait  sur  toute  la 
ligne.  Les  événement^  lui  donnaient  raison  ! 


SAISON     1859-1860 
Charles    SOLIÉ,    A.dininistratev«r-Gérant 

SoLiK,  clirf  d'orchesliv.  —  Clkment,  lé^issi-iir. 


ol'ÊIHA 
MM.  Mir.Ai'Ei.i.i,  fort  tt'iior. 
Tanukau,  ténor  Ipger. 
M.vKCKi.iN,  deuxième  ténor. 
SfiusTELLi,  tioisièmc  ti'inr. 
Magnk,  baryloii. 
Pkriukt,  basse  iHOfdiult'. 
ViNGEST-CuQ',  basse  chantanlt'. 
Lavergne,  deuxième  basse. 
Vasdelen,  lioisième  basse. 
(^aiAKLES,  trial, 
(îRAKETOT,  laruelle. 

M'""    BoRiiHÈsE,  flirte  clianteu.se. 
Lav(iyk,  cliaulcuse  légère. 
V'i(;ny,  deuxième  clumteuse. 
r'.ouRTOis,  première  duga/.oii. 
Sehvikr,  deuxièmi'  duiiuzon. 
.FOUEY.  duè;/li.  . 

BAI,i,i:r 

M.    DoMiNoiK, maître  du  hall»  I,  premier 
danseur. 


M""-s    Betton,  premièie  danseuse. 

GtiiaiARD.  deuxième  danseuse. 
COMÉDIE 
M.\I.   KoL'RKiEii,  premier  r>»le. 

l^ARMKT,  jeune  premier. 

KsTÈvE,  premier  amoureux. 

A.  Roche,  deuxième  amoureux. 

UoucHET.  premier  comique. 

CnAni.Es,  jeune  comique. 

Ernest,  deuxième  comique. 

(jRAFKTOT,  grimes. 

Lavbrgnk,  linanci<*rs. 

Ltnovir.,  utilités. 
M  ""S    Bi.\Nrn\Ri>,  premier  roif. 

IjAr.met,  jeune  première. 

BoLciiKT,  iiigi-nuil.'s 

Sehvieh,  soubntle. 

Devkr.mani>,  coquette. 

VifîNY,  deuxième  coquette. 

(iRAKKTOT,  deuxième  amoureuse. 

JoBEY,  duègne. 

DuvAL,  mère  noble. 


M""    BORGMKSE.    —    LE    PARDON    HE    PLOERMEL  177 

Cette  troupe  offrait  un  assez  bon  «'iisemble.  Nous  avons  déjà  parlé  de 
M""  I^avoyc  vt  de  Mir:i[)«'lli f  il  nous  reste  à  donner  un  souvenir  a 
M'"**  Borghèse,  excellente  forte  chanteuse,  qui  arrivait  du  Théâtre  Lyrique 
où  elle  avait  cré<''  les  iJratjonn  de  Villarx.  Ses  splendides  notes  graves 
raehetaient  la  faiblesse  de  son  médiuui. 

La  basse  chant.'intc  et  le  ténor  léf;er  m-  munt  pis  leurcux  d.ms  Iimms 
débuts.  MM.  Filliol  et  Carré  U^s  rem  placèrent. 

i.e  coniraenccment  de  li  saison  fut  sans  intérêt.  Solié  s*endorniait.  !)•• 
j>lus,  sa  lésinerie  <{ui,  plus  tard,  devait  devenir  proverbiale  lorsqu'il  prit  la 
direction  à  son  compte,  se  faisait  jour  déjà.  Orasiin,  ne  sortit  de  cet  état 
lélljargi«jue  qu'a  partir  de  la  première  représentation  du  Pardon  de  Plo*'r- 
tiiel,  donné  le  2H  février  1800.  Le  succès  de  cet  opéra,  le  plus  complet,  le 
plus  homogène  de  Meyerlx'er,  fut  éclatant.  M'"^  Lavoye  eut  d'excellents 
moments  ;  elle  chanta  le  rôle  de  Dinorah  en  virtuose  accomplie.  Malhtni- 
reusement,  comme  comédienne,  elle  laissa  fort  à  désirer.  Le.  trial  Charles 
trouva  dans  Corentin  son  meilleur  rôle  ;  il  y  était  absolument  parfait.  Le 
nom  de  cet  artiste,  qui  fit  longtemps  partie  des  troupes  de  notre  Théâtre, 
restera  altiiché  à  sa  création  du  Pardon,  ix  Cîrasiin.  M.  Charles  était  dail- 
leurs  très  apprécié  dans  ses  modestes  fonctions  de  trial.  Quand  il  prit  sa 
retraite,  il  resta  à  Nantes,  où  il  demeure  encore.  C'est  le  père  de 
NL  Abd'Allah-Charles,  professeur  de  piano  au  Conservatoire  de  notre  ville. 
Le  baryton  Magne  interpréta  le  rôle  d'Hoël  d'une  facjon  assez  convenable.  — 
Les  décors  neufs  furent  peints  par  M.  Bernier.  Ils  étaient  fort  réussis  et 
coùfi'renl  r)..'î8r»  fr.  '2i).  Les  journaux  furent  unanimes  à  louer  r<euvre  de 
Meyerbeer.  Cependant  le  Phare,  par  la  plume  d'Ev.  Mangin,  reprocha  au 
compositeur  d'avoir  fait  trop  de  science,  notamment  dans  l'ouverture  !  î  !  ! 

Le  jeudi  2'.)  mars,  les  Nantais  cirent  le  non-enviable  avantage  de  faire 
connaissanee  avec  le  Trourùre,  dont  le  livn-t  énigmalique  et  la  musique 
banale  et  ortjue  barbarcst^ue  n'eurent  qu'un  succès  relatif.  M'*  Lavoy,.. 
chanta  Léonor  avec  son  talent  et  sa  placidité  habituelle.  M™'^  Borghèse 
interpréta  le  rôle  d'Azucéna  en  artiste  de  valeur.  Manriquc  et  Luna  étaient 
représentés  par  Mirapelli  «'l  Magne.  La  scène  du  Minorere.  la  meilleure 
chose  de  l'œuvre,  ne  produisit  aucun  effet.  Le  Truuct'-re  fut  monte  très 
économiquement.  On  se  moqua  du  quatrième  t;ibleau,  que  l'on  avait  encadre 
d'un  décor  Louis  XV. 

l'ne  représentation  de  la  Jniejnu  prur  lut  sigiiaii-e  par  un  incident  assez 
pénible.  BrusquiMuonf,  M"»"  Larmet  fut  prise  d'une  crise  de  larmes  ei  quitta 
la  scène.  Le  régisseur  parut  et  demanda  l'indulgence  pour  cette  artiste  qui 
avait,  la  veille,  jK'rdu  son  enfant.  De  toutes  parts  on  cria  :  <  Qu'elle  ne  joue 
pas!  0  M.  Larmet,  qui  était  dans  l.i  coulisse,  très  éraotionné  lui-même, 
entendit  mal  ce  »iue  disait  le  public  ;  il  entra  en  scène  et  adressa  à  plusieurs 


17P 


LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


Spectateurs  iiUe  àpithète  injurient''.  I,'-  l"n'1<Mn;iiti  il  fii  ■)  •-  -wn^..^  -ju  public 
par  la  voie  dos  journaux. 

Voici  la  listo  (Ips  pièces  nouvelles  qui  furent  jouées  encore  {)endaDt  cette 
oanip.if^ne  .  ta  Marâtre,  rAtelier  dp  Prague,  de  notre  concitoyen  Bour- 
^'aiiU-I)\i('0udray  ;  deux  pièces  de  vers:  le  Chàleau  rie  f'iimson  et  Cam 
hronne,  de  M.  de  Kiherpré;  le  Père  Prodigue,  le  Due  Job,  les  Piraten  de 
1(1  Saranc,  enfin  la  Croix  de  Pierre,  une  opi-rette  de  M.  Doudiès.  Cette 
œuvre  prouva  (|u'en  M.  Doudiès  le  compositeur  était  loin  d'égaler  le  flûtiste. 

Elisa  Masson,  Brasseur,  M'^»  Scrivvaneok,  vinrent  en  représentation>. 

« 
•*  ♦ 

Mais  les  ennemis  de  la  gestion  du  'VUéiiUa  j)ar  la  Ville  n'avaient  pas  désar- 
m»'.  Le  i:{  décembre  18f}0,  la  question  revint  devant  le  Conseil  municipal, 
la  Commission  des  finanres  s'étant  déclarée  contre  le  système  adopté. 
Une  ardente  et  longue  discussion  s'engigea.  Vivement  attaquée,  la  gestion 
fut  vivement  défendue,  notamment  par  M.  Dagault,  qui  finit  jwr  obtenir  un 
vote  favorable. 


SAISON     1860-1861 
Charles    SOLIÉ,    Administrateur-Ghérant 

Scii.iK,  clicf  troirhestri'.       Ci.kmknt.  régisseur. 


OI'KIÎA 

MM.   BKinii.vN'ii.  lort  li'iinr. 
W'ahnots,  tônor  li'";,'fr. 
Peouei:x,  driixif'ine  t('n'">r  légfr. 
SousTKLLi,  Iroisii'mi-  h-nor  IT'i^i-r 
Co.MTK.  baryloii. 
Pkrii.iet,  bas'«'  noblr. 

(ilASTlXMARY,  b.'l.SSi'  c'haiilaiijr . 

Ktiennk,  dcuxii'inr  basse. 
Vandelkr.s,  Inii.sii'nii'  ba.s.m-. 
(^tiARLES,  trial. 
(iol'KlN,  lariiMIr. 

M"""    Wahnot.s,  contrall.t. 
Dkstkbuecq,  falfon. 
llAYNAf  i>,  chanleiist'  légèn-. 
Courtois,  jciinc  cliantcusc 
Viu.NY,  mt'ie  (lug!i/on. 
Baciimont,  dt'uxit'iin'  ilu^azon. 

.lnHKY,    (ill^^JI>''• 


<:0MÉniK 

MM.  Fac;iot.  prt'inicr  rùl»-. 

La  VERSOS  jt-unt-  prcniit-r. 

Sautri.  premier  amoun'ux. 

Kaye.  douxiom.'  amoureux. 

Bouf.iiET.  premiiT  comiqin-. 

(luAFLES,  Ji'iiiii-  comiqui*. 

Ehnest,  deuxième  comique 

DiiVAi..  amoureux 

Sei.nv,  troisième  rôle. 

(ioKKix,  grimes. 

Ktienne.  ûnanciers. 

CoRNAOLiA.  père  uuble. 

LuDovii:,  ulilitt's. 
M"*»   .\L'HRfcK,  premier  rôlo. 

Malon,  jeune  pn-mièro. 

HouciiET.  ingénuités. 

TounotzE,  soubrette. 

])esterrboo,  jeune  coquette. 

Vuî.ny,  j\^uno  coquette. 

Bai-.iimoxt.  deuxième  amoureuse. 

Du  VAL,  duègne. 


La  troupe  d'opéra  était  bonne.  Le  ténor  léger  Warnots  fut  seul  refusé,  et 
iMiooro  injustenuMil.   Bineaii  vint  le  remplacer.  Comte-Borcbard.  qui  alla 


FAI«T  179 

plus  tarda  rO|)éra,  etCastt'Iiiiary,  étaiciil  deux  excellents  artistes.  M""  Ij.  s 
Uîrlx'cq,    parfaite    musicifuiu",   ^anteusc    de    beaucoup    dVx pression,   Pt 
M"<*  Raynaud,  étaient  aussi  fort  appréciées  du  publi< 

Par  rontre,  la  troupe  de  comédie  éuiit  assez  uiaiivai-f.  r  i«  i..t.  I.nv.  : 
Sauiri,  M"*  Aubrée   rt    Duval  toinijèrent  ;   il-»  furent  remplacés  par  \-     i 
Tournade,  Speok,  M*"**  Boulin  n  Coblenzt.  La  soubrette,  M"«Toudouze, 
•  •lait  charmante  ;  ell»*  remporta  de  vifs  succès  pendant  la  saison. 

Malgré  les  bons  éléments  qu'offrait  la  trou|M'  d'o|)éra,  les  représent-itions 
étaient  loin  d'être  parfaiU's.  Aussi  Solié  était  il  très  attaqué  par  h  l*r»»«.<e.  Il 
n'y  avait  guère  que  V Union  Jt retonne  à  prendre  sa  défen>' 

Le  principal  événement  de  la  saison  fut  la  première  r-'i 
Fautit  (version  primitive^,  le  jeudi  2H  février  1>«>I.  La  s«»ir<*e. 
sept  heures,  ne  se  termina  qu'à  une  heure.  La  réussite  de  l'opéra  detiounod 
fut  complète.  Les  morceaux  les  plus  applaudis  furent,  naturellement,  le 
(Jhœur  des  Vieillards  et  celui  des  Soldats.  Le  superl)e  prélude  pas^a  ina- 
pen.u.  Le  Jardin,  l'Eglise,  la  Prison,  n'excitèrent  pas  au  prenjier  abord  un 
grand  enthousiasme.  Le  l'/tare  de  ta  Loire  é<Tivil  que  la  mélodie  était  souvent 
absente  et  <jue  le  duo  manquait  d'élan  !  !  !  !  I  Ce  jugement  se  jwsse  de  com- 
nient-iires.  c'est  assez  de  le  reproduire.  M""  Raynaud  fît  une  charmante 
Marguerite  ;  Castclmary  (Méphisto),  rem|xirlii  un  succès  très  mérité  ;  seul, 
Hineau  se  montra  assez  médiocre.  Comme  l'écrivit  spirituellement  E.  Man- 
gin,  il  aurait  fallu  stipuler  dans  le  p,icte  que  la  voix  serait  rajeunie  comme 
le  reste.  lùm.st  était  monté  avec  b«»aucoup  de  soin.  Les  diniors  étaient  très 
l>eaux  Les  chœurs,  |>our  la  circonsuince,  avaient  été  renforcés  par  les  élèves 
(lu  Conservatoire. 

En  fait  d'autres  nouveautés,  on  donna  Quentin  Duncard  et  M.  Garât. 
11  fut  ({uestion  d'un  nouvel  opéra  de  M.  Bourgault-I)ucoudray.  La  mairie 
était  très  favorable  à  ce  projet,  mais  Solié,  qui  était  jaloux  de  tout  talent, 
parvint  à  le  faire  échouer.  M'"'  Carvalho,  alors  dans  l'éclat  «le  sa 
glinre,  se  (il  applaudir  dans  les  Xores  de  Jrannette  et  U'  liarltier.  héja/.et 
et  Delauuay  vinrent  aussi  en  représentations. 

Jetons  maintenant  un  rapide  coup  d'ji'il  sur  les  résultats  de  ces  quatre 
<  a  m  pagnes. 

La  perle  réelle  des  saison^  l^^.^TlftTjS,  ia*»8  IftTiî),  était  de  .       «.C.T.'Ci  fr. 

Celle  de  la  saison  lH.V.)lrt';0  fut  de.  1O7.0UU     » 

—  18<*.()  18i;i  fut  «le  112.000     « 


Soit. ...  :Ul.7:iô  fr. 

Dont  il  faut  retrancher  UX).000  francs  .  KIO.CXJI)     .. 


somme  qui  aurait  été.  en  tout  cas.  affectée  à  une  subvention 

pour  ces  deux  campagne^;  Jl  1.7H.'»  fr. 


\ji')  UR    THKATIM;    a    .NANTES 


Il  est  certain  qu»;  du  moiiiont  qu'on  donnait  seulenjenl  rjO.OOO  francs  de 
subv(?ntion,  l'essa  était  malheureux.  Pourtiint  je  persiste  à  croire  que  Tidé»* 
r'ncllc-inémr'  «*sf  excellente. 

Au  point  i\r  vue  artistique,  l'enscmbli'  de  ces  quatre  saisons  avait  été 
inlininieiit  supérieur  à  celui  des  campagnes  précédentes.  Cependant  il 
aurait  pu  rtrc  encon'  meilleur.  Malheureusement,  Solié  n'était  pas 
riiomiiit'  qu'il  aurait  fallu  pour  mener  à  l)ien  une  telle  entreprise,  qui  lui 
est  rtMlt'vahlc.  pour  une  houiic  part.  <\o.  son  insuccès  praticjuc 


■^^K^?.}^^^  ^^"^^n.^ 


Za''^}. 


X'^h. 


A'^.  h^i^' 


<? 


II 


DIRECTIONS     :     CHABRILLA.T.     —    JOURDAIN. 

COMMINGES   —  BERNARD.  —  COMMINGES. 

DÉFOSSEZ. 

\m\  — 1871 


/,)/(^•u^  j.    —    La  Statue.   —    M"    Tedetcn.    —    Scandale.    —    Rigoletto.   —    hlisu 

Mdsxun.  ■-  M**  Piquet-WiU.  —  M"'  Bnrbot.  —  Picut.  —  Pon$.  —  L'Africaine. 

A/"'  de    Titisy.  —  Nouvelles  Emeutet.  —  I>a  Traviata.    -   Depatsio. 

Mignon.  —  Desclnuias.  —  Anecdotes. 


ANS  sa  séance  du  7  janvier  1801,  le  Conseil  municipal,  en 
repoussant  tléfinitiveinent  le  système  de  la  gérance  par  la  Ville, 
avait  voté  pour  lo  Théâtre  une  subvention  de  80.0(J<)  francs. 
Plusieurs  membres  demandèrent  en  vain  le  chiffre  plus  raison- 
nable (le  'JO.OrtO  francs.  Le  nouveau  cahier  des  charges  exigeait  dix  mois  de 
campagne.  Le  Théâtre  devait  ouvrir  le  1'''  juillet  avec  la  lomédie,  le  1"" sep- 
tembre avec  l'opéra,  et  finir  le  30  avril.  Le  chaufTage  et  l'éclairaire  étaient 
aux  frais  du  directeur,  qui  devait  faire  par  an  pour  2.000  francs  de  décors. 
M.  Cbabrillat  fut  nommé  directeur. 


SAISON      1861-1862 

CHABRILLAT,  Directeur 
S«n,iÊ,  rhef-d'orehestre.  —  X....  régiH.seur. 


OPÊMA 

\IM.   l..\nAT,  fort  tonor. 
l>Ki>iKtt,  fort  ténor, 
l'ii.o,  ténor  l'*Ker. 

<'.OMMI!<aE}«,  (iouxiénic   iniMi 

CiiAMRAnK,  baryton. 
Pii-oi :l«t,  première  basse. 
Ho(!/&c,  h:i!«.He  cbiintaiito 
l.ioNKi.,  triai. 
Ktiknnk.  Uiruette. 
Pemàrv^ik,  deuxiéms  basse. 


«•r. 


MM.  Jbax,  IroiaiAme  ténur. 

Rouer,  troisième  baM.He. 
M-"    RocLAN'OKoT,  PhanteiiM»  légère. 

Frhrand,  contralto. 

Asiiaft,  (leuxi>>mo  ctiant(>UM«. 

KorkstI  dugaxon 

PAiïrr-.\ii.vxn.  deuxii-me  cbantAuse. 

NoKBT.  ducgne. 

BALLKT 
M-"    Caiollc,  première  dan»eus#». 
HicH&nn.  demi-caractère 


182 


LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


COMÉDIE 

MM.  Hamilton,  premier  comique. 
Lionel,  premier  comique. 
Ernest,  deuxième  comique. 
ScHAUB,  amoureux. 
Etienne,  financiers. 
Desfranc,  grime. 
Femarque,  père  noble. 
Menter,  troisième  rôle. 
Maillet,  rôle  de  genre. 
Francis,  troisième  comique. 


M"°"    Blainville,  deuxième  rôle. 
Hamilton   jeune  première. 
Nevers,  deuxième  rôle. 
Alhaiza,  jeune  première. 
Fanoldet,  ingénuités. 
TouDouzE,  soubrette. 
Mentet,  coquette. 
Maillem,  duègne. 
Darpare,  caractères. 
Roger,  deuxième  soubrette 
Lionel  deuxième  soubiette. 


Cette  saison  fut  déplorable.  La  troupe  présentée  était  des  plus  mauvaises. 
Pendant  la  saison  d'été,  la  troupe  de  comédie  jouait  sans  débuts.  Chabnllat 
avait  profité  de  cela  pour  aller  recruter  des  artistes  jusque  dans  la  troupe  de 
Riquiqui.  Mais  lorsque  les  débuts  arrivèrent,  de  nombreuses  victimes  restè- 
rent sur  le  carreau.  Parmi  elles  étaient  M-«  Boulangeot,  Ferrand,  Saint- 
Amand,  Forest,  Camille  ;  MM.  Pilo,  Picoulet,  Bouzac,  Lignel,  enfin  la 
plus  grande  partie  des  artistes  de  comédie. 

Toutes  ces  chutes  ne  s'étaient  pas  accomplies  sans  tapage  ;  de  fréquentes 
manifestations  avaient  lieu  au  théâtre.  Des  abonnés  furent  poursuivis  et 
condamnés,  ce  qui  ne  calma  pas  les  esprits.  Enfin  les  nouveaux  artistes 
dont  les  noms  suivent  furent  admis  :  M°>e«  HiUen,  Wagner,  Albert,  Labor- 
derie  ;  MM    Pascal,  Odezenne,  Tournade,  Tapiau,  Buet. 

M""  Forest,  dugazon  refusée,  continuait  toujours  à  chanter.  Dans  les  pre- 
miers jours  de  janvier,  une  nouvelle  tempête  éclata  à  son  sujet.  Certains 
spectateurs  s'interpellèrent  violemment  ;  on  crut  que  le  lendemain  il  y 
aurait  plusieurs  rencontres.  La  presse  fut  unanime  à  blâmer  Chabnllat  et  a 
engager  l'Administration  à  agir  vigoureusement.  Le  directeur  finit  par 
s'exécuter  ;  il  congédia  définitivement  MH"  Forest,  qui  fut  remplacée  par 

M'^®  Lecomte. 

Pendant  les  débuts,  deux  artistes,  Menter  et  Schaub,  se  présentèrent  un 

jour  à  la  rédaction  du  Phare.  Ils  se  plaignirent  des  critiques  qu'on  leur  . 

faisait  et  intimèrent  à  Evariste  Mangin  l'ordre  de  ne  plus  parler  du  Théâtre. 

On  devine  comment  ils  furent  reçus. 

Le  28  août  1881,  à  l'occasion  de  l'Exposition  de  Nantes,  un  grand 
concert  fut  donné  à  Graslin,  avec  le  concours  de  ^L  et  M^"'  Gueymard,  de- 
l'Opéra,  de  Vieuxtemps,  Berthelier  et  Verroust.  Au  programme  figurait 
pour  la  première  fois  l'ouverture  de  Tannhœuser.  L'exécution  fut  mau- 
vaise. Les  journaux  imprimèrent  la  rengaine  habituelle  :  «  Musique  sans 

mélodie  !  !  !  »  . 

La  Statue  fut  jouée  le  25  mars  18C2.   L'interprétation   était   confiée  a 

Mme  Hillen,  à  MM.  Pascal,  Odezanne,  Tournade.  On  fit,  pour  le  derniei 

tableau,  un  décor  neuf.  Cette  œuvre  si  intéressante,  d'un  coloris  si  particulier. 


LA    STATUE 


183 


fut  peu   comprise.    L'Union  Bretonne  seule,   apprécia  à  sa   juste  valeur 

la  partition  de  Reyer. 

Ernani,  Stradella,  les  Patte,  de  Mouche.  No.  Intimes,  les  Domestiques, 
les  Chemliers   du  Brouillard,  les  Bibelots  du  Diable,  furent  les  autres 

nouveautés"  de  cette  saison. 

Mn^eTedesco  donna  plusieurs  représentations.  Elle  chanta  avec  un  succès 
toujours  grandissant  le  Prophète,  le  Barbier,  la  Favorite,  le  irou.ère. 
Merly  vint  aussi  à  Graslin,  ainsi  que  M-  Doche,  qui  joua  la  Dame  aux 
Camélias. 


* 
•  * 


La  question  théâtrale  revint  au  Conseil  municipal  le  H^vri^^  l^-' 
Quatre  projets  étaient  en  présence  :  V  Une  subvention  de  45.000  rancs  et 
pas  de  ,rand  opéra.  Ce  projet  était  soutenu  par  l'Administration  ;  2"  Gérance 
municipale;  3>  Subvention  affectée  à  la  réparation  de  la  salle  -^lo  Subven^ 
tion  de  100.000  francs.  Le  premier  projet  fut  adopté.  Dans  la  Ville  ce  fut  un 
mécontentement  général  :  on  tenait  au  grand  opéra.  Le  19  ^^^Z^^rTrl 
revint  sur  sa  première  détermination  et  vota  une  subvention  de  8U.00U  francs. 
Quelques  remaniements  furent  faits  au  cahier  des  charges.  Le  théâtre  n  ou- 
vrit plus  que  le  i-  août  avec  la  comédie,  et  le  l^'-  octobre  ave.  tous  le. 
genres. 

SAISON      1862-1863 


JOURUAIN, 

SoLift  chef-d'orcheatre 
OPÉRA 

MM    Chambon,  fort  ténor. 
Cœiulte,  ti'nor  léger. 
Berton,  deuxième  teiio:-. 
WiLHEi.M,  baryton. 
Maymo,  basse  noble. 
HuRÉ,  basse  chantante. 
Desveaux,  deuxième  basse. 
Charles,  trial. 
CiFOLELLi,  laruette. 
M->«    E.  Masson,  contralto. 

Danneville.  falcon. 

Houvroy,  chanteuse  légère. 

l^iBEs  Duranh,  chanteuse  lf</ère. 

Viette,  deuxième  chanteuse. 

Cifolelli,  duga/.un. 

RiQiiKR,  deuxième  dugazon. 

MuRAT,  duègne. 

B.VLLEr 

M .  Victor,  maître. 
M""'    Praszini,  première  dunseU'^'^. 
("iiKwr.  deuxième  danseus» . 


Directeur 
—  X...  régisseur. 

COMEDIE 
MM.  MoNTAiov,  premier  rôle. 
DuBARBY.  jeune  premier. 
Derville,  amoureux. 
CoPF.LLY,  deuxième  amoureux. 
Pascal,  premier  comique. 
Charles,  premier  comique. 
Ernest,  deuxième  comique 
MuRAT,  père  noble. 
Achille,  tinanciers. 
Sandre,  premier  rôle. 
Ludovic,  utilités. 
M-"    SiMLANE,  jeune  premier  r>'.e 
Sandre,  jeune  premier»-. 
Riquier.  ingénuités 
Viette.  coquette. 
Ji^iuN,  soubrette 
IjAURe,  suubrette. 
Murat,  mère  noblt. 
;  Achille,  duègne. 

C.iFOi.ELLi.  amoureuses. 
R.'MAlNVll  II;. 


184 


LE    TIIEATftK    A    NANTES 


Cette  saison  no  fut  p.is  meilleure  que  la  pnl'cédente.  La  troupe  était 
médiocre.  Jourdain  ne  pensait  qu'à  économiser. 

Chutes  :  M"»"  Rouvroy  ;  Chambon,  Maymo,  Wilhelm,  Montaigu.  Ces 
artistes  furent  remplacés  par  M"'*  Bibès;  Vivien,  Geslin,  Jouard,  Thierry. 

Elisa  Masson  revint,  et  fut,  comme  à  son  habitude,  très  acclamée.  Pour- 
tant, elle  commençait  à  décliner.  Mais  elle  était  tellement  aimée  qu'on  lui 
pardonnait  sans  peine  ses  faiblesses. 

Le  ténor  léger  Cœuilte  était  assez  bon.  Rappelons  aussi  le  nom  de  la 
gentille  et  excellente  M"^'  Simiane. 

Pendant  les  débuts  le  tapage  recommença.  La  Mairie  prohiba  sévèrement 
les  sifflets.  Mais  les  abonnés  tournèrent  la  difficulté.  Ils  achetèrent  une  cer- 
taine quantité  de  ces  petits  chiens  placés  sur  une  caisse  à  air  et  qui  aboient 
par  la  pression.  Ils  mettaient  la  boîte  sous  leurs  souliers  et  protestaient 
ainsi  à  la  barbe  de  la  police.  Cette  invention  d'écolier  obtint  un  vif  succès. 

A  l'occasion  de  la  naissance  de  Molière,  on  joua  un  à-propos  diî  à  la 
plume  d'un  artiste  de  la  troupe  qui  ne  manquait  pas  de  valeur,  M.  Marcel 
Briol  :  Molière  à  Nantes.  Le  Fils  de  Gihoyer,  qu'on  représenta,  eut  assez 
peu  de  succès.  Contrairement  à  ce  qui  se  passait  dans  toutes  les  autres  villes, 
aucune  manifestation  n'eut  lieu  dans  la  salle.  Rigoletto,  ignoblement  inter- 
prété, tomba  aplat.  La  direction  voulut  remettre  le  Juif  Errant  à  la  scène, 
mais  la  préfecture  mit  son  veto. 

On  joua  aussi  Orphée  aux  Enfers;  la  Bohémienne,  de  Balfe;  le  Médecin 
malgré  lui,  de  Gounod;  Fleur  de  Genêt,  opérette  de  M.  Doudiès,  que  son 
premier  insuccès  n'avait  pas  découragé  ;  le  Bossu,  la  Chatte  merveilleuse, 
le  Pied  de  Mouton,  la  Bouquetière  des  Innocents,  enfin  les  Ganaches,  qui 
furent  siffles  à  outrance. 


* 
*  * 


Les  destinées  de  la  campagne  1863-1864,  furent  confiées  aux  mains  de 
M.  Comminges,  qu'on  prétendait  n'être  que  le  prote-nom  de  Solié. 

SAISON     1863-1864 

COMMINGES,  Driecteur 

SoLiÉ,  chef  d'orclu'slrc.  —  Phii.ii'I'ON,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.    IIarvin,  fort  ténor. 
Arnaud,  ténor  léger. 
ScRiBOT,  deuxième  ténor  léjjer. 
Vanaud,  baryton. 
Marion,  basée  noble. 
Jambt,   basse  chantante. 
Jouard,  deuxième  basse  chantante. 


MM.  Charles,  trial. 

Ahouier,  laruette. 
Mraes  SuisRA-SouLÉ,  conlralto. 

Pbadal,  falcon. 

Pic.QUET-WiLL,  chanteuse  lé^îèn 

Robert,  dugazon. 

Durarry.  deuxième  chanteuse. 

Rir.QuiER,  deuxième  dugaron. 

Saint-Anok.  duègne. 


M"'-  l'Kgunn'-wiCL 


is:, 


liAI.LLT 
M.    CoiiEN.  iiiîiMrt'  do  ball«'l. 
>(iiKs  OsuoNi..  jirfmi'rf'  danstus»-. 
r)ARi,nii;/.  (Jeiixitfine  'l.inscii> 

<.OMl'':i)IK 

\IM.  'liifiHv,  pr.micr  iV.|.\ 
l*Ai  !..  joufn'  prcmifi. 
louARi).  pi-re  iinblf. 
Sasurk,  l^^isièlll<'  iiM 
( '.oi'Ki.i.Y.  aiiioureii\ 

,  •, ...  -TliilU'-. 


M  ^  i       (    H  »  !■  I  ^  «;     i-iuii  i(|ii. 
1 .1'.  •»  r.>  i  .    '  i»:.i  \  i»-;ii" 

"LoDovic.  u!inl>-8. 
Mm?»  SiMiAM-'  î»r>nii' 

•  Ik^I  !V     jiillll-   [ 


liKILLKV.  S^Mllip'lt 
i..Kl>IUM>.  r<>,|i|i  II. 
KvkTaKIi. 

I^  ••■■- 


ll\rii;ii;i-i 


L.'i  saison  ir«''té  fut  «It's  plus  lu.Tuvaises.  On  vit  certaines  pit»c«'s  jout'os  par 
(Irs  fiffurant.s.  Les  protestations  reconiuiencèrent. 

DaiKs  la  troupe  d'opéra,  trois  artistes  vaj^*ni  l.i  iMin.-  n  i  w  .Mgnau-s  : 
M""  Piequet-W  ill,  une  ehanleu.'«e  légère  qui  voo.ijjsait  avee  beaucoup  (!•• 
lient,  le  ténor  léger  Arnaud  et  la  basse  Jane 

Ilarvin,  Scribot,  Marion  et  la  contralto  firent  d<>  débuts  mallit-ureux.  Ils 
■  urenl  pour  renipia'-im  s<.|vi'  Tn-i.'  îl.ini-'/.-c.iv  ,>t  \f"  \ii,iiK..it  .,i.;  .v  ,.t 
idis  été  à  l'Opéra. 

Dans  le  courant  de  l'année,  M"*-  l'radal  résilia.  L  u"  chanteuse  «'prouvée, 
M"'=  Charuy,  lifi  succéda. 

A  une  représentation  de  I.n  Tircus»-  de  fartes,  donnée  par  Marie  Lau- 
rent, il  y  eut  une  .scène  scaudaleu.se  qui  se  termina  par  un  rire  général. 
M"""  Bourffeois  ayant  été  légèrement  cbutée,  se  tourna  vers  le  public  et 
l'appela  •(  Tas  de  crétins  !  »>  .Aussitôt un  é(>ouvantable tapage  éilata.  Le  mari 
le  l'artiste  entre  alors  en  scène,  le  chapeau  sur  la  tète,  prend  sa  femme  |)ar 
Il  main  et  l'emmène,  salué  par  les  hurlements  des  spectateurs.  Oh  demande 
a  grands  cris  le  régisseur;  celui  ci  ne  vient  pas  :  il  parait  qu'il  n'est  pas  lu. 
<  >n  bais.se  le  rideau.  Le  bruit  ne  fait  qu'augmenter.  Alors  i»  artiste,  Théry, 
<•  dévoue  et  s'avance  sur  la  scène.  Mais  il  est  sans  gant^.'oh  n'ë'Vèut^plis 
l'entendre.  Le  rideau  tombe  de  nouveau,  puis  se  reilèvç../t'héry  parait 
soigneusement  ganté,  explique  que  le  régisseur  est  malade  ekpUe  d'excuser 
M""  Bourg 'ois,  cmi  s'est  char^'ée  du  rôle  par  complaisance.  "  ''  " 

—  Bon  !  Mais  pourquoi  M""  Bourgeois  nous  a  t-elle.appej[ès. crétins*.* 

—  Il  m'est  impossible  de  répondre  à  cette  question,  répond  Théry  en 
souriant. 

—  Pourquoi  M.  Bourgeois  est-il  venu  chercher  ew«j.èno  M-??  Booxgeoi s? 

—  Je  l'ignore. 

-r-  Eulin,  que  signifient  ces  Tendez- vous  1'  '         '.  :,  .*  : 

:A  ces  derniers  mots,  un  fou  rire  général  y,  ...  ptiWie.  qui-furtiemôt 

tiésarmé,  et  la  représentation  s'acheva  sans  encombre. 

"Oe'môme  qnë  les  deux  saisons  précédenK's,  la  campague  lSti3^I8<^l  (ut 


3d 


186 


LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


cl«'!plorable.  Comminges  manquait  absolument  d'expéri'ijct-.  L»,-  public, 
(Irgoûlé,  abandonnait  d»'  plus  en  plus  le  Th<^àlre. 

Le  r.»  mai  eut  lieu  un  grand  festival  Meyerbeer.  Le  programme  était 
composé  des  plus  beaux  actes  de  son  répertoire.  Le  buste  du  compositeur 
fut  couronné  sur  la  scène,  au  milieu  d'un  enthousiasme  général.  Parmi  les 
nombreu.ses  couronnes,  on  en  remarquait  une.  véritablement  superbe,  donnée 
par  le  Cercle  des  Beaux-Arts.  Klle  fut  envoyée  à  la  veuve  du  maestro. 

En  fait  de  nouveautés,  il  fallut  se  contenter  de  La  Reine  Topaze.  C'était 
maigre  ! 

Marie  Sax,  Merly,  Judith,  Marie  Laurent,  Berthelier,  vinrent  donner  des 
représentations. 

M.  Comminges  était  protégé  par  certaines  personnes  très  intluente.s. 
Aussi,  malgré  l'incapacité  dont  il  avait  fait  preuve  pendant  les  campagnes 
1863-18G1,  il  fut  maintenu  dans  ses  fonctions. 


SAISON      1864-1865 
OOMMTNQSS ,    Directeur 

Ch.  toLifc,  chef  d'orchestre.  —  Théry,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.  MA.ZZURINI,  fort  ténor. 

P'abre.  ténor  léger. 

Dur.o.s,  deuxième  ténor  léger. 

Ben-Aben,  baryton. 

CouKTOi.s,  basse  noble. 

.Tamet,  basse  chantante. 

Bkrry.  basse  boufle. 

Charles,  trial. 

Arquier.  laruelte. 

(iiNifcs,  troisième  ténor. 

Bartoux,  troisième  bas-se. 
M"'"    Dk  Joly,  première  chanteuse  légère. 

Marianni.  falcon. 

•Masson,  contralto. 

Rosa  Myrtel.  chanteuse  légère. 

Ckbe,  dugazon. 

Berthilue,  deuxième  dugazon. 

Sai«t-.\nok,  duègne. 

BALLET 

MM.  Acuert,  maître. 

Lifo,  deuxième  danëear. 


M™"   F1L0.MÉXA.  première  danseuse. 
Lcpo,  deuxième  danseuse. 

COMÉDIE 

M.M.  Théry,  premier  rôle. 

Manstein,  jeune  premier. 

Bellotti,  premier  amoureux. 

Berry,  père  noble. 

Lanqlais,  troisième  rôle. 

TosY  Rolland,  premier  itMe. 

GouRDOX,  premier  comique. 

CH.VRLES,  comique. 

NoouïT,  comique. 

Lldovic,  utilités. 
M""   Tisserand,  grand  premier  rùlt». 

Marnier,   grandes  coquettes. 

Bkrthilde.  jeune  premier  rùle. 

Debrunet,  fortes  ingénuités. 

Bèdlel.  première  soubrette. 

Leoal,  deuxième  soubrette. 

Antonio,  jeune  coquette. 

SaintAnoe,  duègne. 

ROMAINVILLX,   utilités. 


Cette  campagne  fut  loin  de  relever  le  niveau  de  notre  ThéAtre.  La  troupe, 
cependant,  était  assez  bonne,  mais  Comminges  ne  savait  nullement  la  faire 
valoir. 

M"»"  de  Joly,  Cêbe,  échouèrent.  M""  Gasc  et  Authier  leur  succédèrent. 


RESTAURATION    DE    LA    SALLE 


187 


Irois  contralti  tombèrent  successivement  et,  parmi  elles,  la  pau%re  Kli««a 
Masson,  de  plus  en   plus   fatiguée,  et  qui  n'était  plus  que  l'ombre  d'elle 
même.  Enfin,  M"*Gonzalês  fut  reçue. 

Comme  nouveautés,  Comrainges  donna  La  Somnambule,  La  Belle  HéLènr 
et  Lea  Vieux  Garçons. 

Artistes  en  iepré.sentaiion  :  I)éja/et.  M*  W'ertiraberg,  M"*  Schriwancck. 


Le  Grand  Théâtre  n'ouvrit  pas  pendant  la  saison  l&)b-\H6t).  Des  réparation"» 
urgentes  avaient  été  jugées  nécessaires,  et  un  crédit  de  125  <MiO  frano>  y  fui 
spécialement  atfeeté.  La  salle  restaurée  était  peinte  en  blanc,  en  or  et  en 
rouge.  Klle  était  un  peu  trop  surchargé*'  d'ornenienf*^.  Les  bcilcons  des  pre 
inières  et  des  secondes,  refaits  à  neuf,  affectaient  la  forme  élégante  d'une 
corbeille  renversée.  Ils  éfciient  tn's  joliment  ornés  d'enfants  jouant  ave<- 
des  cymbales  et  des  flûtes. 

Amédée  Ménard  avait  sculpté  le>c;iri.'iiities  (ie^  av.ini-sceiics,  i»"pi»'s»-n(aiii 
les  arts  scéniques.  Les  fauteuils  furent  agrandis  ;  mais,  par  contre,  on  fut 
obligé  de  diminuer  les  loges,  où  l'on  se  trouva,  alors,  un  peu  à  l'étroit.  Cambon 
peignit  un  nouveau  rideau,  qui  représentait  une  tenture  de  soie  rouge  a 
crépines  d'or  relevée  dérouvrant  une  doublure  blanche.  Le  plancher  de  l;i 
-cène  fut  reconstruit  à  neuf.  Mais  on  oublia  de  ré|)arer  et  de  nettoyer  les 
loges  et  les  foyers  des  artistes,  qui  étaient  dans  un  état  déplorable.  Six  décors 
nouveaux  furent  brossés:  une  forêt,  un  palais  gothique,  une  salle  basse,  le 
premier  acte  de  Ln  Jiiirp  ef  deux  snlnns. 


La  subvention  fut  maintenue  à  80.<X>)  francs  et  M.  Commingc  renommé 
une  troisième  fois  directeur. 


SAISON      1866-1867 
COMMrNOE:S .    Directeur 

SoLifc,  chef  durrht'Htrr.  —  K<>tx,  rf(?is.-,«ur. 


OPÊHA 
MM    F'i.oT.  fort  ténor. 

Justin  Nkk,  fcnor  l-gn. 
loLnDAX,  dpuiit'ni*"  ténor. 
LKOK.R4r,  bnryton. 
Pons.  bass»>  ooble. 
DuPLN,  h*nw  chant.-ioto. 
Brlt.èrk.  deuxième  hztutt. 
Dl'plan.  tnal. 
Julien,  laraettc. 
M"'  Baj«bot,  rJianteqee  légère. 


M""    RozKz,  fatron. 

<;.»sTAN.  contralto. 

I  i-in  NfcK.  duj^zon. 

l;    .m:koy.    deuutnie  chaut.  ïifgét 

Matiiildc.  deuxième  dotrazou. 

Fhétot-Colos,  du>-gniv 

BALLET 

M.  Pau.,  maître. 
M'""   BoLTAOcrr.  pr«inier<i  in^ou^*» 
Patx,  dwnitec  dan><  u«c 


188 


Li;    IIIKATKi:    A    NANlh* 


M.M  ,IipnKs^iTr,,  premier  rii'  . 
Mi>iii:\i:,  jdiiii;  premier. 
ItiMiiAt'i.V,  proiiiii^r  uiii'iinciix. 
•.  JoANNy.  jeuiH!  Iroisièmp  riM'-. 
Jj.ymP.,  p'-re  nohlo. 
Osi'KiîMANN.  Iroisièmo  rùlr. 
(  îiJERi-.np.r/  tleiixi<»ino\irtioui  iii\ . 
lir;.iiJY,  pn-micr  c>mi<|iii-. 
BiiUDiEic.  i)r«rniiT  <'oiiiif|iu'. 


Mj'i.'  ni^'-' (Il  r     prf^miT  rôle. 

S  ne  prctiiK-i  ' 

1.! 

'I  HMIAUI-T.  in^é^uitOK. 
Fi.Kui'.Y.  KOiibn>tUe. 
IJL'I'I.an,  (leusièiiii.'  hOiibleUf. 
]{û::Diiii:.  aniuureuâu. 
lienuANKE,  coq'ietle. 


l:o TlioAtre  Grasliii  ik»  fut  pn-t  à  ouvrir  <(uc  le  l"""  ni:ii  I80<)    L.. 
(luvirit    (liinr  jusfiu'aii   .".  mai  1867,   pour  /compenser  l'année  perdue.  Un 
n()iiv(!l    article   avait"  Oïtc   introduit  (lan><  lo  c'iliier  des  eharges,  arlfcle  par 
lequi'l  lo  Maire  avait  1»,»  dfoit  de  suspendre  le  verscinont  (k^  It  sidni-riiidu  -i 
lui  iirtiste  refusé  n'était  pas  remplacé  dans  les  quinze  jours. 

Cctli'  fois  ci,  Cummin^'es  avait  réuni  une  excellente  troupe.  M"  Barboi 
(•tait  Une  oliahteuse  légère  de  grand  talent  ;  le  ténor  Picot  possédait  une  voix 
su;)erbL'  ;  Pons,  tout  jeune  et  bien  incxj)érimenté'.  t-tait  nt'anmoin>  fort  bon; 
Justiii  Née  était"  doué  dun  joli  organe  et  M'"^"  Justin  Née  4tait  une  aimable 
dugnzon,  enfin  B('Jiiy,  l'excc'lleht' Béjuyj  faisait  de  nouveau  partie  delà 
troupe  de  comédie.  Diipin  tomba  et  fut  remplacé  par  Marcliot,  basse  chan- 
tante de  bi'aiicoiipd'accjuit.  On  eut  a  déplorer  la  |)erte  de  M'"  Legris.  jeune 
première,  qui  mo'urut  en  couches. 

//,4/>7"c«m<?'fut  jouée,  pour  la  |)renuérc  foi.-",  au  l>énétice  de  Sûiié,  le  jeudi 
2H  septembre  18G7.  Picot,  Pons.  M"'  Barboi,  et  llozez  inlerprélèreni  avec 
lalcnt  l'œuvre  posthume  de  Meyorbeer.  Léderac  très  enroué,  ne  donna  pas 
à  Nélusko  le  relief  nécessaire.  La  mise  en  scène  fut  géiiéraleinent  trouvée 
insuffisante  Ce  nouvel  opéra  réussit  sans  conteste,  mais  ne  senible  p:is  avoir 
pourtant  excité  grand  enthousiasme.  Il  n'en  fut  pas  de  même  tie  Ix'nhitui  à 
lionccvnux.  Cette  piètre  partition  eut  un  immense  succès.  Picot  était  r<Mnar- 
(|uable  dans  le  rùle  de  lîoland. 

N«»lre  compatri'ote  M"'^''dP   TaiM.d.'    l'Opéra  (M "•"   Krani.-ois)  (|U..  i 

jeune,  avait  remporté  de  grands  suceè»  à  .Nantes,  où  elleuvait  été  la  c;uiui- 
trice  choyée  d<<s  Hcaux  .\rls.  vint  jouer  les  Hiiffuenots,  Rof/ert  clVAjri 
raine.  Otle  artiste,  qui  po>séilait  une  voix  très  fraîche  et  très  étendue,  était 
aussi  une  excellente  eomédieime  Les  ni)mbr.vax  àmis  qu'elle  avait  laiss«'s  a 
.Nantis  l'acôueillirént  avec  enthousiasme  et  1  i  couvrirent  de  bouquets. 

Le  préfet  ayant, levé,  celte  .année,   l'interdictien  <|ui  |x>sail  sur  le  réper 
toir(>  dt>  V.  Hugo,  Herninii  fut  repris  en  grande  pomi)e  avec  M"»''  Judi-th,  <lc 
la  Comédie  Frant^aisé.    Cette   artiste    joua  aussi    VI/an'it«'(   de    Dumas   et 
^I(Ulricp^aycc  j^^^WAi^^tfe...de  .V.  jQiV'ières.  Le  jeune  conn>9§UQnr-v^lors  a 
l'aurore  de  «Hii:^Pîèïe,t.viifa-did'iger  l'exéeution.  M'U'i Jwdilh  yr^^neere  «ne* 


DÉJAZET    —    M"*    BAr?cé 


IHO 


rom«''die   inédito  in«'vliN'  <1«»    notre   coin  patriote   M.  de    Vieiliechézc      ' 
f'npricfi  d'Ocidi'. 

D'ins  lo  «ourani  d»*  jnillri,  Drja/.rt  vint  donner  une  représentation  des 
J'ci-mirres  armex  de  Hirhelieu,  an  Ix^néficc  de  M"'  Baagé.  qui  quittait  le 
inni  du  soudU'ur  occu[K'  par  elle  depuis  1H31.  Une  curieuse  représentation 
iVOthelht  eut  lieu  en  drcerabre.  Le  rôle  du  maure  était  tenu  par  le  tragédien 
noir  AIdrige.  (Jr.ind  succiVs.  Got  so  fil  jpplaudir  dans  la  ('onfftffinn.  IMu 
sieurs  auditions  du  DàkoH  furent  données  à  CirasIin. 

L<'  autn-s  nou\raut«''s  funMit  :  (irinf/oire,  où  Brjuy  <lail  p.irlail  ;  l»* 
\'o!ict<jr  en  C/i i ne.  l.i  Famille  lienoiton.  Pcnit-d'Ani'.  /înrhr Ulrm-,  \'t,s 
hnnx  VillngeoiH,  Maison  Xeure,  la  Grande  Duchessr. 

Celle  année  là,  les  bals  niasciués  furent  interdits.  Le  prétexte  donne  rt.ut 
la  «lainle  d»'  voir  les  nias'|ues  salir  la  sali»*  lu'uve. 


L;i  Niib\iiitioii  ;iyant  rté   rabaissée  à  7(K(J<K)  francs,  Coniminges  ne  redc 
manda  pas  la  direction,  (|ui  fut  confi(''e  à  M.  Bernard. 

SAISON      1867-1868 
BBRNARD,    Directeur 

.   l,..f    .r..,  .   1,.   .1,  ..       _     ll.v.,..       i.,.i^<..iir 


Ol'flMA 

M\|      I.WP.NK,   f..|-t  Iriior. 

ni.r.M.  lônor  lo<ivi\ 
DKKKiiKi.,  ilciixiéinf  tt'iior  léx<r. 
'riiiKBY,  Imrylon. 
Dk.iiion.  bnss»'  iiolilo. 
DissARiiurs,  basse  chaiilaril*-. 
AniiiY.   dtMixiètnc  Imssi'  chantuiil< 
Mkhan,  luriiotto. 
i'.iiAi)i.i>.  ti  iiil. 
Mi''<  lUniior.  «Iianliiisc  li-i^iir. 
(ïoniAi  it.  chan(au8i'  lèitèir. 
li.Aur.  fatcon. 
ViNc.KST,  l'ontrallo. 

*ÎKUN,  lUtKUZQII 

1>AHMAM>.  (ItMIXièlIte  tlu^lUOII. 

Hkssy,  ((«•uxi6iue  duRiizon. 
.loixY,ilii'>>rn»'. 

lUl.l.KT 
M.  «iHiÊTKNs.  maîlrt  . 
\Ir..-.  BouYAfiiKT,  pitiiiK'^ri'  «lan.si'itsi 
Dei.as.  tlfuxicni'     laiiHeuso. 


coMhPII. 

MM.   I,nx«ipn^,  pn^miiT  nMe. 
HnKiKi.  jtMiiii»  iiremior. 
I>Ai;ssv,  dt-tixii-mc  ii>le. 
Vai.i.v,  nMedfi  Renro. 
TAii.i.KKtn,  jeune  pn-nin-r. 
DtiviKNNK,  amoun^ux. 
l*'At:iiÈKr.,  pÏTe  noMo. 
llfjuv.  premier  comique. 
I>H'i.vx.  pri-niicr  coiiiii)uc. 
*°.iivRi.K8.  pn-raifT  r.'mMiip, 

(iKFMAlN,    • 

H<'i  ni'  .  <1 

HiiiiKn.  itijxtfiiic  cuniitfiif. 

F.ri>«»\i.,  lUililos 

1  »Ai  ssY.  pn-mter  f'ir. 

1>ii>ii:r.  jeune  premièri-. 

PoTKT  Dklort.  fortes  iugvnuit*-r<. 

Dahmant:  in3{<-niiit.<'«- 

lU^i\,  soubn'U»'. 

Marki.i.»:.  r 

Joi.i.Y.  du- 

T 


190 


LE   THEATRE    A    NANTK8 


Les  artistes  suivants  échouèrent  dans  leurs  débuts:  MM.  Lavigne. 
Derioux  ;  M"*'  Vincent  et  Geslin.  MM.  Sylva  et  Lamarche,  M*'»  Peyretet 
Estagel  les  remplacèrent.  Sauf  M"«  Barbot,  cette  troupe  n'offrait  aucun 
artiste  particulièrement  remarquible,  cependant  elle  était  très  homogène  et 
très  convenable.  La  comédie  était  fort  'jcnne. 

La  direction  ayant  supprimé,  dans  les  Huguenots,  le  tableau  du  bal,  une 
émeute  éclata  au  Théâtre.  Il  fallut  rétablir  la  scène  coupée. 

Première  de  la  Traciata  (21  décembre  1807).  Grand  succès.  M™*  Barbot 
chanta  Violetta  avec  un  talent  des  plus  remarquables.  Le**  autres  rôles 
étaient  tenus  par  Plum  et  Thierry. 

Une  charmante  comédie  en  un  acte  de  notre  spirituel  concitoyen  M.  Paul 
Chauvet  :  La  Proie  et  l'Ombre,  fut  représentée  au  bénéfice  des  pauvres. 
De  nombreux  et  légitimes  applaudissements  accueillirent  cette  œuvre. 

Plusieurs  concerts,  entre  autres  ceux  de  Carlotta  Patti  et  de  Sivori, 
curent  lieu  au  Grand  Théâtre. 

Pour  l'anniversaire  de  Molière,  on  joua  Don  Juan,  pour  la  première  fois. 
Excellente  interprétation.  Béjuy  remporta  un  nouveau  triomphe. 

Nouveautés  :  le  Docteur  Crispin,  la  Vie  parisienne,  Paul  Forestier. 
Rhotomago. 

Artistes  en  représentation  :  Michof,  Levassor,  Depassio,  Dulaurens.  Delà 
branche,  Brasseur,  M™'!*  Harris  et  Thérésa. 

Bernard  fut  renommé  mais,  au  beau  milieu  d'août,  il  mit  la  clef  sou«  la 
porte,  laissant  la  municipalité  dans  un  cruel  embarras.  Enfin  Campo  Casso 
et  Coraminges  se  présentèrent.  Ce  dernier  l'emporta.  La  snbvention  fut 
rétablie  à  80.000  francs. 

SAISON      1868-1869 
COMMINGES.    Directeur 

SoLiÉ,  chef  d'orchestre .  —  Sandre,  régisseur. 


OPÉRA 

MM.    Tatxon,  fort  tônor. 
liRi'NEAu,  Irnor  It'ger. 
WiDMAN,  deuxiô^me  ténor  h^gor. 
Dei'assio,  basse  noble. 
DussARoi!E.'<,  basse  chantante. 
TapiéBrune',  baryton. 
Waltkr,  deuxième  basse. 
Maugaro,  trial. 
Laverone,  laruettc. 
M»'  Laporte,  falcon. 


M""  Prévost,  chanteuse  légère. 
Etienne,  contralto. 
Eloy,  dugazon. 
Taic.ciam,  deuxième  clianleuse. 
llfci.ÉNE,  deuxième  dugazon. 
Laoier.  duègne. 

BALLET 

M.  DoMENOiE,  maître. 
M""  BoLZAOUET, première  danseusa. 
GAR>nER,  deuxième  danseuse. 


MI3N0M 


191 


COMÉDIK 
MM.  Simon.  |>renii«-r  rôle. 

Metiikuil,  jeune  premier. 
SoRKi,,  jeunt-  premier. 
(îARNiKit,  itmoiiretix. 
SANDBfc.  pèif  iiohle. 
.\nMANij,  premier  cumique. 


MM.   Michel,  d^uxi^-me  comi-jui-. 
Lldovii;,  utilités. 

M-"  IloTTEREAt,  premier  njle. 

Marcel,  premier  rùle  jeune 
Carrl'Kl,  jeune  premier  rôle. 
Basta.  Soubrette. 
DarmaM),  ingénuitt-s. 


Les  débuts  furent  défavorables  à  MM.  Talion,  Bruneau,  Tapié-Brune, 
Widmer  ;  M"»''  Laporle ,  Etienne,  Eloy.  Leurs  successeurs  furent 
.MM.  Fromant,  Lechevalier,  Voisin,  Mareuini  ;  M"^  Bédora,  Faivre, 
Rorghèse.  La  basse  Depassio  était  excellente. 

La  saison  fut  terne  et  très  peu  suivie.  La  troupe  italienne  attirait, 
ilors,  tout  le  public  à  la  Renais.sance. 

Le  15  janvier,  Graslin  ferma  ses  portes.  La  troupe  n'était  pas  payée  et 
Coniminges  était  absent.  Deux  personnes  chargées  de  le  représenter  propo 
sèrent  aux  artistes  de  les  solder  moitié  en  argent,  moitié  en  billets.  Ceux  ci 
n'acceptèrent  pas.  Comminges  fut  déclaré  en  faillite  et  les  artistes  •>»• 
réunirent  en  société,  pour  la  fin  de  la  campagne,  sous  l'administration  da 
Solié. 

Mignon,  fut  joué  pour  la  première  fois  le  15  avril  1869.  Ce  banal  opéra- 
comique  cher  aux  petites  pernsionnaires,  remporta  un  succès  complet. 

Les  autres  nouveautés  furent:  les  Faux  Ménagea,  Siraphine^  Fleurde' 
Thé. 

Céline  Montaland,  le  ténor  Massy  et  la  troupe  japonaise  du  Taîcoun 
vinrent  donner  des  représentations. 


La  question  de  la  subvention  revint  de  [nouveau  au  Conseil  municipal 
dans  la  session  du  mois  de  mars  186i).  La  discussion  fut  longue 
MNL  Guilley,  Doré,  Halgan  et  Brousseï  prirent  successivement  la  parole. 
Différents  projets  furent  soumis  au  Conseil  :  1°  La  gestion  par  la  Ville.  — 
2*  Une  subvention  de  80.000  francs.  —  3«  Une  subvention  de  100.000  francs 
accordée  à  MM.  Touchais  propriétaires  de  la  Renaissance,  pour  l'exploita- 
tion des  deux  théâtres.  —  4*'  Une  subvention  de  10.000  francs  sans 
genre  imposé.  Aucun  de  ces  systèmes  ne  fut  adopté.  Le  Conseil  décida  : 

((  que  le  Théâtre  serait  donné  à  un  directeur  ou  à  une  association  d'artistes 
sans  qu'aucun  gonro  leur  soit  imposé,  sans  autre  cahier  dcb  charges  que 
celui  nécessaire  pour  la  conservation  de  l'immeuble  et  des  valeurs  munici- 
pales qui  leur  seront  remises  et  sans  autres  restrictions  que  celles  qui  tou- 
chent à  l'ordre  et  aux  bonnes  mœurs.  » 

Enfin  les  ennemis  do  la  subvention  avaient  remporté  la  victoire.  La  sup- 
pression du  subside  théâtral  entraînait  fatalement  celle  de  l'Opéra.  Nantes, 


192 


LK  THEATRE   A    NANTES 


pendant  |)lusieurs   anm-cs.  all;ii(    IoiuImt   au   rang  <i'<   villes   i\>-   uiù^H-wu^ 
onlro. 

La  direction  fut  confiée  à  M.  Défossez,  homme  honorahlf  ei  habile  qui, 
avec  los  ressources  restn-intCN  dont  il  disposait,  fit  son  possibl»^  pinir  t-onlcn- 
ter  le  pul)lic. 

SAISON      1869-1870 

DÉFOSSEZ ,    Di  recteur 

I-AMiiERï    cIh  f  (l'i)ic|ip>lif.  —  l'"i-(:iiKB:  f"  KifcSfUr. 


COMKDIE   KT    OPKRKTTK 

MM.  Lamiikui',  premier  rùlo. 

CospK,  jeune  proiiiii-r. 

PoNTii  s,  rôle  de  fjciire. 

SANiini;,  père  noble. 

Montai.,    troisième    r"I'',   chuii 
r()pérelf(î. 

(^iiKVALiEii,  coiMiqiie.i'liaiilaiit  1' 

rette. 
Coi.OMnix,  amoureux, ihaiilaiit  1' 

retle. 
(iHANDViLi.K,  téuor  d'opert'lle. 
Armand,  premier  comique. 
ScnMiTT,    premier  comique. 


tant 
i.p/- 


( '.iKoi.i.Ki.i.i.  (ieuxit-me  amoiireiix. 
l"ij.sso.\!iiRONV,  troisième  e  )ini(|ui-, 
Luuovk:,  ulilitv.s. 
1>i:s(;lal/.vs,  chanteuse  dDio'i-'i  ■ 
lîiajiiAn,  premier  r»le. 
[-•révieux,  jeune  premièie. 
.Jai-.oi'S,  ingénuités. 
Desiardi.ns.  amoureuse. 
.1.  Duiiois,  clianteus  •  ij'opéretle. 
Dairray.  soubrette  d'opéietle. 
Dki.ormk,  soubrette 
Hamk,  duègne,  chantant  l'opérelt»-. 
Dur.HE.MiN,  duè^îiie.   chunlant    l'opé- 
rette. 


L'ctoile  de  cette  troupe  était  M'"'^'  Desclauzas.Avec  elle  l'opêrelte  régna  t*n 
maîtresse  à  Graslin.  Le  pemier  rôle,  M.  Laniliert.  était  exi-ellent.  Citons 
aussi  Armand  et  M""*»  Prévieux. 

Une  très  belle  représentation  de  Rigolctto  fut  donnée  avec  le  concours  de 
la  Krauss,  de  Nicolini  et  de  Strozzi. 

Le  Petit  Faust,  les  Brif/ands,  la  J'i'rii-hole,  Genecicrc  de  Brabant. 
Froufrou,  la  Sorcière  furent  les  nouveautés  de  cette  saison.  Febvre  et 
Brindeau  vinrent  en  représentations. 

A  la  dernière  représentation,  le  régisseur  adressa  des  adieux  publics  à 
Défossez  et  lui  remit  une  couronne  aux  applaudisseme.Us  de  toute  la  salle. 


Pris  de  remords,  le  Conseil,  dans  sa  séance  du  10  février  1870,  vota  une 
subvention  de  8i).O00  francs.  Tous  les  genres  dramatiques  devaient  6tre 
exploités  pendant  la  campagne.  L'opéra-comique  n'était  exigé  que  pendant 
.sept  mois  et  le  grand  opéra  était  facultatif.  Enfin,  le  directeur,  pendant  la 
saison  lyrique,  devait  donner  tous  les  mois  un  concert  populaire  à  prix 
réduits. 

Cetie  subvention  no  fut  i>a->  employée.  LaGui-rre  survint,  l'endant  TAnuf.' 


ROUEK 


iy3 


'l'erribb'  on  ne  songea  guèreau  Théâtre,  des  préoccupations  trop  graves  occu- 
j)ant  tous  les  esprits, 

Pendant  l'été,  avant  la  déclaration  de  la  guerre,  Solié  avait  formé  une 
petite  troupe  de  comédie.  Certains  des  artistes  <|ui  en  faisaient  partie 
demeurëreiit  à  Nantes  et  jouèrent,  d»*  temps  en  temps,  à  (iraslin. 

Au  mois  d'ottobrc,  à  une  conférence  organisée  au    Wncfice   des    Franc:» 
Tireurs,  le  baryton  Strozzi  <*bant2i  la  Marseillaise  et  éleclrisa  la  salle. 

Dans  le  courant  de  mars  1H71,  le  ténor  Roger  donna  deux  concerts  avec 
le  concours  de  Sirozzi  et  de  M""  Albini,  En  avril,  il  en  organisa  plusieurs 
autres  avec  M'°'  Pradal.  de  la  Monnaie,  de  Bruxelles. 


III 


DIRECTIONS:  DEFCSSEZ.   -  FERRY.  —  DE  THOLOZE. 
FRESPECH.   LONGPRÉ  ET  FRANCIS. 

'     ]  87 1-1870 


Juitin  Boyer.  —  Rougt*.  —  litiÇfr.  —  Mm»  linlbi.  —  A/"'  Vergt^r.  -  Jourdan. 

Ricquier-Delaunny.  —  Cécile  M>*zrray.        Roméo  ot  Juliette 

La  Fille  de  Madaoi)-  Angot.  —  D^jnzet 


L  lie  pouvait  être  question  de  subvention.  La  Ville,  vu  les  tristes 

circonstances,  avait  trop  de  charges  par  ailleurs.  Personne  ne 

n^crimina.  Cette  fois  la  nécossili'  faisait  loi.   La  municipalité 

fit  a|)pol  à  NL  Défossez  et  lui  confia  le  Théâtre. 

Du  !"■  décembre  au  i"^  août,  Défossez  donna  de  l'opéra  comique.  \  parlir 

du  mois  de  septembre,  une  troupe  de  comédie  et  d'opérette  desservit  seule 

Graslin. 


SAISON      1871-1872 

DÉFOSSEZ,    Directeur 

Bermkr.  chef  d'orchestre.  —  Dkbrinay,  régisseur. 


OPÉRA  COMIQUK 

MM.  «iiiLLOT,  ténor  I<'«;,'or. 

I>ELAiiociiK,  deuxième   tiMior  l»'tj<"r, 

BioNON.  Iroifiéme  ténor  léger. 

Rou<iÉ.  Itnrylon. 

.Iiistin  BoVKR,  basse  ehanlanU*. 

(iARHiRi.,  di>u\ii'mi-  ba^se  rh.intnntr. 

Kkkkt,  trial. 

LfcoN,  laniftt'-. 

M""   Ralri,    promièri'    cliantcusc  logirr. 
Vkroer,  dugazon. 
Drcdau.i.e,  deuxième  dugnznn. 
AnootUichtin.  duègac. 


f.OMftDIK  ET  OPfcRKTTK 

MM.   HnrPsiKR. premier  rôlf. 

Mallet,  grand  deuxi'^me  lui»- 

Chavanne.  jcun^  premier. 

Pho»««»er.  péro  noble. 

I  >ARLiN.  rai^on^eu^s.  chantant  l'op*» 
relie. 

Vernecil.  amoureux,  rhanlanl    IVi 
pèn-lle. 

LivRY.  rôle   de  genre,  chantant  V*'- 

Fa  VUE.  grand  deuxiAino  rom:que. 
tîLf.Bin,  ténor  d  .>|..r.U»'. 

tiRiuoiTAL,  jtMinf  prcuii*-r  comique. 
chantaBl  1  0|M^rettc. 


vx> 


LE   TMKATRi:    A    NANTt> 


MM.  Joseph  Lkun,  comiiiue  iiiar<|ut'. 

Armand,  coiiiii(iip  niarqui-,  cliantant 

l'opérette. 
RoDot.PFiE,  cojiiiquc   nianiin',  rliaii- 

tant  l'opérette. 
Larochk,  deiixioTiie  coiiiiqiii-. 

M' AMf:i.ii;-FoNTi,  pnmiore  chaiitrusp. 

^fALARDD'HiK,  jcurif  dcuxirmc  roll'. 


M">e>  DiiVKRs,  graiid  iircniicr  rôle. 

IIems,  (leiixif-nie  jeune  preniiért*. 
liLANCHf:,  jeune  première,  opéretto  . 
Mai-,  deuxième  amoureu.se.  opérpttt-. 
.Màu,<,  soubrette. 
Boi  Hdiy.ic,  (\\\i'<ine. 


Le  pri.\  des  ubonnements  était  fi.xé  ainsi  : 

A  l'année:  Places  n>servées:  28(J  fr.  —  Places  libie.s;  Homme.s:  17ôfr.:  Dames:  liO  fr 
.\.u  iriois  :  Places    lôservôe.';,  'i")  fr.    —     Pliices    libif.s  :   Hommes  :  '-ib  fr.  ;    Dames  : 
î>5  fr. 

Cette  eoLirte  sai>on  d'opéra-coiuiqiic  fut  excellente.  Justin  Boyer  basse, 
doué  d'une  voix  ravissante,  était  très  apprécié,  Guillot  et  Rougé  étaient  deux 
bons  artistes;  M"»  Balbi  avait  une  valeur  réelle,  enfin  Mi'^'  Verger  étaitune 
charmante  dugazon. 

Roger  .se  fit  entendre  darjs  Lucie  et  la  i'acorite,  en  compagnie  de  Laura 
Harris  et  de  Tombesi.  dont  je  parlerai  plus  tard  au  chapitre  du  Théâtre  de 
la  Renaissance. 

Le  Premier  Jour  du  BonJieur  et  VOmhre  lurent  les  nouveautés  de  la 
saison  d'Opéra. 

Dans  la  troupe  de  comédie,  il  faut  retenir  le  nom  du  jeune  premier.  Cha- 
vanne,  et  du  comique  fîribouval,  parfaits  tous  les  deux. 

En  février,  les  sous-officiers  du  28''  de  ligne  organisèrent  un  concert-spec- 
tacle au  bénéfice  de  la  libération  du  Territoire.  Ils  jouèrent  les  Saltimban- 
ques et  la  Chambre  à  deux  lits. 

Pendant  les  bals  masqués,  des  boutiques  furent  installées  dans  la  salle. 
Chacune  portait  le  nom  d'une  des  villes  annexées.  Les  actrices,  en  costume 
alsacien,  y  vendaient  divers  objets  au  profit  de  l'œuvre  du  rachat  de  la 
France. 

Pendant  les  mois  de  juin  et  juillet  1872,  Défossez,  dont  on  ne  .^aurait  trop 
louer  le  zèle  et  la  bonne  administration,  forma  une  nouvelle  troupe  lyri 
que.  En  voici  le  tableau  : 


SAISON       D'ÉTÉ       1872 
DÉFOSSEZ,    Directeur 

lÎKiiNMtit.  chef  d'orchestre.  —  Rodôi.phk,  régisseur. 


MM.   .loiRKAN,  ténor  léger. 

QiMNKL,  deuzième  ténor  \("^vy . 
Hic.QiiEH  Del.m  .NA.Y.  barvton. 
pRftoAL,  baryton. 
•I.  BovER,  basse  chantante. 
Verk,  deuxième  basse  chanlaiil> 
LF.>fAiRE,  laruette. 


M .       HoDoi.piiK.  triai. 

M""*  IIasselmans,  chanteuse  b>"'r*' 

Cécile  MfczKRAY,  dugazon. 

Vergken.  falcon. 

Barbot,  contralto. 

Verocen,  dugazon. 

Bertix.  duègne. 


ILSTIN    ItOYER 


fiyiLK    MKZERAY    —    ROMKO    ET   JULfETTE 


107 


('(,'ttc  troupe  ftiit  p:iri,iit".  Justin  Boyer  fut  revu  avec  un  vif  plaisir. 
Jourdan,  ténor  (le  grand  stylo  et  Itic(|iiier-Delaunay,  bon  chanteur  et  bon 
comédien,  formaient  avec  Boycr  un  trio  d'artistes  hors  pair.  Cécile  Mézeray 
était  une  duga/on  charmante  ;  sa  voix  était  un  peu  faible,  mais  jolie  et  sou- 
j)le.  Kilo  reni[)orta  dans  Mif/non  de  vifs  succès.  NI"*  lïasselmans,  une  can- 
tatrice de  talent,  ne  doit  pas,  non  pluïi,  être  oubliée. 

("est  à  iJéfossez  que  l'on  doit  la  niisr  à  la  scène  de  Roméo  et  Juliette 
(15  juin  1872).  Jourdan  et  M^^"  II;i>«selinans  furent  absolument  parfaits.  Les 
antres  rôles  ('taient  très  bien  tenu>  par  Cécile  Mézeray,  Boyer,  Hicquier- 
Delaunay  et  Brégal.  L'dHivre  fut  très  applaudie.  E.  Garnier,  dans  son  feuil- 
leton du  P/ittre,  se  montra  sévère  pourTiounofl.  Il  trouva  que  l'éeole  à  laquelle 
appartenait  l'auteur  de  Faust,  n'est  pas  celle  le  l'inspiration  et  jugea  la 
ballade  de  la /i'^//»e  i]/(t,6  um;  composition  founneiilt'»'  ci  ur'ft'nli.Misc.  Ce 
jugement  étonne  de  la  part  de  Garnier. 

Nouveautés  :  Jenn-b'-Duç,  opéra  comique  inédit,  musique  de  M.  Tae- 
Lœn.  paroles  de  M.  Biu-eau,  ('/iristinn>\  Mnxirell. 

.\rtiste9en  représentation:  Ismaél,  (ialli-Marié,  M''*»  Priola.  M™*  Hou— 
seil.  M'""  Favart,  Bressint,  Brasseur. 

M.  Défossez  a  laissé  à  Nantes  les  meillinirs  souvenirs.  C'était  un  homme 
d'une  honoral)ilité  parfaite.  Sa  dir<'Ction  fut  excellente  souston<  les  rapport-. 

•  * 

Delossez  (leinamiait  le  rétablissement  delà  subvention.  On  discuta  lon- 
guement la  ([uestion  au  Conseil  municipal,  mais  on  était  très  embarrassé 
pour  trouver  dans  le  budget  unesomme  disponible  de  50  à  60,000  francs. 
On  décida  de  laisser  les  choses  en  l'état.  La  direction  fut  donnée  à  un 
M.  Ferry,  (pii  ne  demandait  rien,  (pie  le  paiement  du  gaz. 


SAISON 

FERRY, 

Smit/.,  chef  d'oiclitsii-i 


()i'i^:HACOMinri-: 

MM.   NovELLi.  ténor  lègiT. 

Vii.i.EKROY,  baryton. 

Si  KEAC,  b.issi'. 

l>ir.ri\TKAi',  denxiémo  lias^r 
M»"'   S.MiTZ,  premit'ro  oliiuiteuse. 

Ui.oLNT,  jeuno  rhantoasr. 

<  '.AVf:-HivENt;z,  liiitrazoïi. 

COMfiDlK 

MM.   UooEH,  piviuicr  rùlf. 

Chevalier,  rôle  de  nenr»-. 
SvNnnv:,  troisièin*^  r<Me. 


1872-1873 
Directeur 

•  —  Samihk,  rijiisMfiir. 

MM.  (ioNTR.vN.  jeune  prfn)i»T. 

WKHiiAMMK,  amonrtMix. 

Mol  RnKii.i.E,  roniii]u.'. 

Uoi)OLi'iiK,jîrimos. 

Lrnovii  ,  raisoiUH'in-». 
M"""    Valentin,  preniior  r>l''. 

C.arle,  jeune  premier. 

.\ymk,  tjrande  coquetio. 

(2HEVRIER,  ingêntiitos. 

N'oRviLi-E,  amoureutii-. 

Mak;»,  soubrette. 

\l.K\ANDRINf:.    (lut^fie. 
I>K  Wvns,  deuxi'  tro  n>lc. 


198 


LE  THÉÂTRE  A   NANTES 


Cotto  saison  fut  sans  aucun  intérùl.  En  fait  intéressant,  je  ne  vois  rien  a 
.signaler  qu'une  reprise  du  Peiil  Chaperon  Rouye,  do  Boieldieu.  Novelii  et 
M"'  Cavé-RIvenez  ne  manquaient  pas  d'un  certain  t^ilent. 

A  la  fin  do  décembre,  par  -^uite  des  inondations,  le  gaz  manqua  c6mpk*t»'- 
nient  dans  Nantes,  l'usine  était  envahi»'  par  les  .•.•mx.  Le  TliéAtre  dût 
fermer  ses  portes  pendant  plusieurs  jours. 

h' Union  Bretonne^  ayant  critiqué  la  direction  qui  laissait  les  femmes  de 
HKPurs  légères  s'étaler  aux  fauteuils,  se  vit  retirer  ses  entrées.  Le  Phare. 
protesta  éncrgujuement  et  déclara  (|ue,  lui  aussi,  paierait  ses  places. 

Dans  le  courant  de  mars,  les  artistes  impayés,  firent  mettre  le  directeur  «n 
faillite  et  continuèrent  l'exploitation  en  société. 

La  Femme  de'Claude,  la  Périchole,  Héloïae  et  Abeilard.  li  (jm-up  du. 
Chat,  furent  les  nouveautés  de  cette  piteuse  saison. 

Coquelin,  Agar,  Laferrière,  Montaubry,  Coraly  Geoffroy,  .\I'"«  Devoyod. 
Borthclicr,  Acliard,  M"'=  Schriwanek,  vinrent  on  représentations. 


La  subvention  ne  fut  pas  encore  rétablie  pour  l'année  suivante. 
La  direction  passa  aux  mains  de  M.  de  Tholozé. 


SAISON     1873-1874 
DE    THOLOZÉ,    Directeur 

nEHNiiii,  clit'f  d'nicht'stie.  —  LiiLis,  i-é}»isspur. 


Ol'KHA-COMinUE 

MM.    Séhan,  ténor  lé>{or. 

RuNr)EAti,  baryton. 

MoNTi,  has.se. 
Mm,.   Papin,  chanteuscléj^'cre. 

Lauhkndkau,  diipazon. 

COMKDIK 

MM.   CiiuRTois.  premier  rôle. 
l'"REsi'Er.H   jeune  premier. 
Jacohef.,  amoureux. 
VtiYZ,  père  nol)lc. 
lU)niN  i>E  CoNCHK.s.  Irnisiémi'  rùlc 
(^>i  iiuNY,  amoureux. 


MM.   HioNoN.  amoureux. 

IvAni.,  premier  comique. 

l'oYARD,  comique 

Hi.ANCiiET,  jeune  comique. 

LcDovir.,  convenances, 
M'""  DKi.AVArx,  premier  n'ile. 

.MnNMBP,  jeune  premier. 

LfoN,  iiigéuuiir-s. 

CiLi-EN.  t^rande  coquette. 

Dkfiw.  soubrrtte. 

De  Vai-  Moma,  soubrette. 

VuTOiuNE.  mère  nobbv 

l'HKspEt  M,  anifiureusi'. 

du  iiTiiis.  deuxième  soubrette 


La  petite  troupe  d'opéra-coiui(|iio  ne  joua  (iii't'n  j;in\  ier.  Nous  voyons  y 
figurer  le  nom  du  ténor  Séran,  dont  nous  aurons  à  i)arlor  plus  tard,  t^etto 
saison  fut  lui  peu  moins  terne  que  la  précédente. 

La  Fille  de  M'^  Angot  fut  jouée,  pour  la  première,  fois  le  IM  septembre 
1874.  La  charmante  opérette  de  Lecoq  était  remarquablement  interprétée 
par  M'"'^"  Ugaldc  et  Vanghell,  MM.  (Jaruierct  r,au.ssins,  engagés  spéciale. 


LA    PILLE   DE   MADAME  ANGOT 


109 


meiit.  Le  succès  fut  immense  et,  pondant  plusieurs  années,  ne  se  démentit 
pas. 

Une  panique  eut  lieu  a  Graslin  lo  2G  janvier  1874.  Une  fuite  de  gaz 
V-tant  produite  à  l'orchestre,  les  pompiers  arrivèrent  et,  pour  la  décou- 
rir, furent  ohligés  de  dt'-molir  le  box  de  gauche,  où  se  tenait,  d'habitude,  un 
vieil  abonné  du  Théâtre,  bien  connu  du  public.  M.  Mérot  du  lîarré.  A  cette 
vue,  un  grand  nombre  île  spei  Uil«'urs  s'enfuirent  épouvantés,  mais  le  mal  fut 
vite  réparé  et  la  représentation  continua. 

On  joua,  cette  année  là.  une  gninde  revue  locale,  qui  avait  pour  auteur  le 
troisième  rôle  de  la  tronjH',  M.  Kobin  de  Couches  Tout  Saules  //  ita»xera  et 
Trentemoult  aussi,  où  figuraient  de  nombreuses  physionomies  nantaise, 
entre  autres  celles  de  M"»»  Amadou,  eut  assez  de  succès. 

Artistes  en  représ«întation  :  Agar,  Brasseur  et  les  Chanteurs  Béarnais. 

Nouveautés  :  les  Ccnl  Vitin/rs.  Va  Ch(i(tf  lilanrh,-. 


Les  artistes  seréuniredt  en  société  j)our  l'exploitation  de  la  nouvelle  cam- 
I)agiie  sous  la  gérance  de  trois  des  leurs,  MM.  Frespcch,I^ngpréet  Francis. 
La  subvention  ne  fut  pas  rétablie,  par  contre  les  débuts  le  furent.  Tous  les 
abtinnés  étaient  ap|)elés  à  voter.  Les  artistes  devaient  faire  trois  débuts  ;  l'ad- 
mission était  prononcée  à  la  majorité  des  voix.  Les  artistes  faisant  déjà 
partie  de  la  troupe,  l'année  précéilcnte.  ('■Liit'iit  ^oiimiv.i  un.'  simple  renlnV. 


SAISON 

FRESPECH,    LONOPRÉ, 

Uernier,  chef.  - 

OPP.RETTK 

.\IM.   DBt.AVKJNK.  ténor. 

Dkmzki.,  ténor  di*  K«'nre. 

FnEspKcH,  ti'iior  <li'  K«*nr«'' 
M-"  (trfcRiNuT.  preniior»'  chant«*u8(>. 

DuRTAi..  prtMiiièrc  chunteuse. 

MAsr.xHTf..»».  (Ictixi<>iiu>  clianlcusi'. 

Wii.i.iu,  ohantiMisc  de  genre. 

1)1  M*V.   dilt'-jfnr. 

•  MÈDIE 

MM.  LuNùPiu:.  promier  r<lli'. 

DiT.RKSNOia.  premier  rôle  jeune. 
FnEsrKc.u,  joune  premier. 
I.iNKVAL.  amoiiroux. 


1874-1876 

FRANCIS,    Adnxinlstrateurs 

MoREAL,  ngi.sseur. 

MM.    Mi'Ri-:*!  .  yvr>'  !i    l.i-  . 
I*Ki  Lf.  Iroisi.'ni''  r.'.l.  . 
I"ran<.is,  pr\'iiiior  c<>ini<ju>'. 
NIai.I-kvili.k.  r<)mii|ti'-  jînnie. 
ItKYArx,  deuxième  comique  grime. 
LriHjvn:.  utiiit<'-fl. 

M—'   Marty,  premier  rùli'. 

De  I.AVAix.  premier  r.i- 
r.iKoLKU.i,  jcuiif  pn-nitr»' 


l'KMi.l.K  i  .   lii.  U'   UuLie. 

<iii  itiitT,  i-i>.ni.'Ite. 
W'ii  i.M.  -   ,ii  :    ;;    . 


Delavigne  et  M"^' Guérinot  tombt'rent.  Ils  lureiu  rLinj)ia(  c-  pur  \  erueuil 
it  M™"  Lvonnel. 


•r^iÀ)  LE   THÉATHE    A    NANTES 


Le  30  octobre  une  roprésentalioli  eut  lieu  au  bénéfice  de  Déjazet,  qui. 
malgré  son  grand  âge,  —  elle  avait  alors  70  ans,  —  avait  conservé  tout  son 
talent  et  tout  son  esprit.  Elle  se  fit  applaudir  dans  M.  Garai.  L'excellente 
artiste,  qui  était  adorée  à  Nantes,  fut  couverte  de  bouquets.  Pendant  l'inter- 
mède, des  stances  de  notre  confrère  \l.  L<''on  Séché  furent  lues  en  son  hon- 
neur. Les  vers  suivants  furent  particulièrenn'nl  a|)plaudis  ; 

Le  siècln  tout  entier  a  passt-  dans  t,i  vie 
Tu  vécus  tant  (jue  rien  ne  U-  fait  plus  envie, 

En  dehors  des  êtres  aimos. 
Riclie  et  pauvre  à  la  fois,  tn  J)ns  dans  tous  les  mtivs, 
VA  Dieu  seul  avec  loi  sait  coinliien  «If  mis»  r(\s 

Tn  soulageas  N-s  yeux  fermas. 

Notre  compatriote,  M.  Gaston  Serpette,  vint  cuiuliiirc  la  première  d'une  de 
ses  oeuvres  :  \w  Branche  CaHsce,  Plusieurs  palmes  lui  furent  offertes. 

La  troupe  des  Italiens  de  Paris  donna  quelques  représentîitions  somno- 
lentes pendant  le  mois  de  février. 

En  fait  de  nouveautés  on  joua  :  la  Jolie  Pai/sanw,  la  Timbale  (T Argent, 
Giroflée- G irojta,  la  Petite  Marquise,  il/'"«  U Archiduc,  les  Deux  Orpheli 
nés  et  la  Fée  aux  Miettes. 

Brasseur  ;  M'"**  Favart.  Léonide  Leblanc,  Âgar, vinrent  en  représentations. 


-^^y 


6) 

3 
U 

a 

*•> 
o 

a 

(0 

t3 


■'■-,i. 


I 


<s]^ 


IV 


DIRECTIONS  :   COULON.   —  BELLEYAUT. 
COULON.  —  LEMOIQNE. 

iH7ri-iH»i. 


C7(.  liujînn.  —  Tottrnif'.  —  Pons.  —  Dmiphin.  —  i'arolitte  M^zrray.  —  J#"«  Serfttr 

Rt'inr    Mt'zeriiy.    —     A/n»^     I.ao'n/ibr  Duitrrz.    —    tiuillf^toi.    —     Maupas. 

W'arot.    —    Haiiilet.    —    'Ireninulet.    —    l'inin.   —    Fi'lirir    Arnamt. 

A/"'    de  Mollt'ns.   —  .ihw  Rfyi/inni.    —   l'anl   el    Vir;^iiiie. 

Aida. —  Cartin'n. —  Deri'inis. —  AT"»'  l>crt'im.s-D4'vri>'3i. 

Delnhranche.  —  (oralif  «ieoffro;/.  —  Dtthou- 

chft.  —   I.f'S  ClorheH    «!<•    (^orncvillf. 

Mnnifestatiuns     politii/ tf  > . 

l:-'j>''rntionstln  <h-'»rf 

TheiUrr 


^vn  E  foutes  |)arts  on  ri'clamait  le  rt'Uiblisseiiu'nt  de  la  subvention. 
Les  journaux  menaient,  ilans  ce  but,  une  vive  «-aiupa^iu*. 
^  L'Administration  comprit  qu'on  ne  ])Ouv^t  dillérer  plus  long- 
temps. Une  Commission  fut  nomm^  pour  étudier  la  question 
«Ml  même  temps  que  i-elle  de  l'achat  du  ThMtrc  de  la  rtenaiss;ui<e.  Dans  sa 
séance  du  li  mars  187.'),  le  Conseil  adopta,  à  la  presque  unanimité,  les 
conclusions  du  rapport.  La  Ville  pn>nait  à  sa  charge  le  paiement  de 
l'oreheslre,  des  «huiurs  et  du  gaz.  jusqu'à  concurrence  de  85. '»<)(»  frincs.  La 
«•ampagn»'  d'hiver  était  fixée  à  huit  mois,  de  scptembn»  à  avril.  La  campagne 
d'été  ne  devait  durer  que  deux  mois.  Le  din't'teur  pouvait  dis|>oser  de  la 
Renais.sance,  sauf  pendant  les  deux  mois  du  cirque,  moyennant  un  droit  de 
T)  °/"  ^l'i'  l'i  recette.  Un  nouvo^iu  mo«le  île  débuts  fut  adopté.  Etaient  ap|><>lés 
à  juger  les  arti.stes:  les  al»onnés  a  l'année  »n  mif  Comini^siun  dr  \a\\:\ 
membres  nommés  par  le  Maire. 

La  Ville  choisit  pour  directeur  M.  Coulon,  qui  venait  d".\nver%,  où  il 
était  très  appr<''iié.  Il  fut  nommé  pour  sept  ans.  ave»-  facilité  de  n*siliation 
des  deux  parts  axant  le  ir>  févri«'r.  .Vvec  la  direction  Coulon,  le  Grand- 
Tbéàtre  entra  dans  une  période  brillante  et  féconde,  dont  les  Nantais  se 
souviendront  longtemps. 


•'(!•> 


LK  TKHATKK    A    NANTKS 


SAISON      1875-1876 

COTJLON,    Directeur 

«'.II.  iJu/iAi:.  cliif «ronlii-sln'.  —  S<u»TT.  ivjfiiiHeur. 


ol'l.liA 

MM.     ToiiiMf:,  fort  Irimr. 
l''<<i<NT,  tt'iior  léjfi  T. 
Tkii.i.kt,  dcu\ièiii<t  li'uor  l«:;,'f'r. 
|{i:n-Aiik.n,  baryton, 
J'oNs,  basso-imlilc. 
D\i;i'iiiN,  hassr  fliatilaiil'-. 

<'.OI.IN,  iil. 

(^HARI.KS,    tliitl. 

Houi.KGi;,  larin'tte. 

M «Caroline   Mk/khw,   i»iiiiiiiif  .-lian- 

trii.se  li''j{i'rt'. 

I''un.M-Biuoi.,  cliatileiise  li-gi'-ii . 
«loi.i.iN,  falcon. 

ISA.I.KA,  COtltialtO. 

I'aHKNt,  tlii;;azori. 
l)KllEH,  dll|,'a/.otl. 

IIk.vvi  i,r,  diiè;iii»'. 

liALLKT 

M »     (iiKKiiA,  iiiaîlrcss"' (le  li.iUet. 

]•].  Vr:ii<i\Ni,  |)ii'iiii('rr  (lanscuse. 
N.  Vi:iuiANi,(leuxiùme  duiisuusi-. 


CuMfiDIK 

MM.    Di.i'AV.  premiifr  rôle. 

MhrKf-.Mi:,  [(reDiHT  roli*. 
Ihuiirii.  ji-un«  pre[ui<*r. 
MoNiÀiuxAf-..  j«uue  ^trfuiitv . 
Marmiunon,  amoureux. 
I.ont.I'hP..  deuMÛiue  rolo. 
l>Ki.OHOix,  troisième  rôle. 
l)oi  AT,  premi'T  coiuiijiii>. 
lioi.iAT.  comiqufc. 

I.ALHKNT,       i«l. 
(lACMl ,  id. 

I'kki.kxi,  jeuiK-  ainonr«'U\. 

W'-"--    Smith,  jeum-  jin-mion-. 
Mahtv,  pivmier  nd*-. 
.Sltiha,  jeune  |>n-iniiTf. 
l'Hui  AT,  soubrette. 
.Iai.mki,  iii}î«'iiuilés. 
Uhani  iKZ,  ^'randcs  coqui-lti'S. 
l'iiKspKr.d.  ileuxii-me  .soubn.-tlf 
<  lATKr..  amourcusi". 
J><M  KAT.  <l»«'^'n<  . 


IMUN  iiEs  i"i.Ai  Es  :  Fanti'Uils  et  lojfrs  de  face,  5  fr.  —  Fauteuils  et  loyrn  de  ctMi*.  \  f i . 
—  l'auteuil.s  d'orciiHStrfi  et  baignoires.  4  fr.  —  Parqucl  et  deuxi)'>nii>s  do  face,  M  fr.  — 

l'a.lnrr  ri  dciixii'inc.-;  ili' i-i.|c    2  fr,   —   Ti-.iisiriiit'S,   1   •'•    —  i  hi:«irit''i)M  ■-    .''iti  r.iiliiiit>. 

.\I.  <;i);irlt's  hu/i.iii  put.  (.T'Ue  amn-c  hi,  ijosii-ibiun  du  jnipitri-  u<'  cin-i 
<r(»rciu'sti't\  qu'il  oc('ii|>a  pcndaiH  quinze  ans.  Cotait  un  oxcelloiit  niu.><:cion. 
lin  liaiiiioiiisiiî  des  plus  di>tiiigii(^s.  Il  ne  tarda  pas  à  ôtre  appriM-ié  à  sa  juste 
val(Mir.  (jMiaiid  Edouard  (Janiier  donna  sa  ilëmi.-^sion  do  professeur  d'haï- 
luonic  au  ConM-rratoire,  il  fui  appelr  à  lui  sucréder. 

\)ui'lques  mots.  niaintcnaïK.  sur  le-s  excellents  artistes  de  cette  troupe. 

Touinié  a  lai.ssé,  parmi  nous,  un  souvenir  difficile  à  effacer.  Joli  garçon, 
bon  acteur,  il  possédait  unu  belle  voi.v  de  ténor,  facile,  bien  posée.  Fil<d'ua 
modeste  chanteur  du  Tht^àtre  de  Toulouse,  il  fit  d'abord  partie  du  Théâtre 
du  (^apitoie,  couime  violoncelliste.  S'étanI  découvert  une  voix,  il  aborda  la 
carrière  lyrique.  Coulon  l'avait  amené  d'Anvers,  où  il  avait  eu  beaucoup  de 
suçotas.  A  Nantes,  il  remporbi  de  véritables  triomphes.  Ses  meilleurs  rôles 
éiaient  Robert.  Kaoul  et  l-'eruand.  l,a  basse  ehautante  Dauphin  était,  lui 
aus->i.  un  ivsci'llcnl  artiste,  sou^  le  double  rapport  tlu  chai»^  el  du  jeu. 
Vous,    <|ue    l'on    connaissait  déjà  ei   dont    la   voix  avait   encore  j.'agné  en 


LKS    SŒURS    MÉZERAY    —   TOIJIlNIÉ   —    DAL'IMfIN    —    |i»Vs  *j(Y.i 

/ 

itii|>l<'iir,  p.irta;{(>a  p«-iMl:iiit  l:i  c.impgiio  lu  faveur  du  publia*  avec  %(i»  caïua- 
i.»d«'s  Tournii-  <'l  U.iupliin. 

(les  troJM  arii^b's  furent  n^us  à  runaiiiiniu'*,  nioiiis  un»*  \oix  :  œllo 'l'un 
iliDriiié^iiithuux  qui,  ]xir  principe,  vouiil  toujoum  non. 

CaroliiM'    Mi'<eia>    pt»^M\luit  Ue  noinJnt'U.ses  i(u.ilit('<(,  mai-  sa  vop 
f  itigUix*.  'lùilc  irul>tiiii  quu  (luux  \uix  au  iriuiiu,  l'ae  ctiulr  au>si  uuiiij .  . 

lail  injUiiU*.  l.Q  lendemain  de  son  4's:lie<:,  elle  romporta,  dans  Ln  Jmc^\  un 
vrai  irioniphe;  mais  !:>  |>ulilie  prob'sta  vainement  et  le  voie  fut  inainl<'nu. 
M"'   fui  r«inpla«vc  par  M"  Sevc!s(e.  une  ohanieu.se  aeoom  plie,  tl  -     '     . 

iiite   la  picniludr  de  ^i*i\   lalciii.   !.)■  r<M<*  de  Violeiti  lui  «-lail  |mi 
im-nt   favorable.  l)aiis  i<    r.niiant  d<-  l.i   -aisun,  ello  lit  une  incursion  dan» 
r'i])eretle  et  rliant»i  Clairette  de  /.<«  l'dlc  (/«  Ma'fame  Anfjnr. 

M"'"  Collin  ('clioua,  ainsi  que  &;i  reniplai.aiile  M»«  Devjlle.  l..i  -i..  ■  ■:>-.■, u 
•  k*  ces  deux  arlist«'s  fut  rocucrtiie  par  la  iruiMènu' de:»  sœurs  Mé/er.iv,  lît'im-. 
<  "••uiit  iMie  vraie  famille  d'artistes  *\w  celle  des  Mé/era) .  I.e  p<»rt'  était  «"licf 
d'orrliestre  à  Bordeaux  ;  irojs  des  lilleséiairnt  «hanU'Usi'.sdetileni,  —  f'.' 
linit  même  par  ùlro  cnjjugée  à  rOpéru<oniique,  —  une  quatriènir  i  : . 
iiirpiste  et  fit  plus  tard  partie  de  notre  orehesire.  I.a  jolie  voix  do  Rrine 
MéZ(!ruy  m*  tarda  iku»  a  lin  ooiiqut^rir  toui»  les  «uirr;i|(es.  Comme  femme,  elle 
lail  fort  séduisante.  Dans  Afii/non,  (ju'ellc  joua  en  dehors  do  son  r(^|)ort«iin,', 
Ile  a  laisM-  d'<'xcellents  suu\enirs. 

M""   lialka  et  Hen  Ab<;n  lomhj'roni  v\  furent  reiuplaeés  p.tr  M™"  Thi^oni 
I  Uougé,  déjà  avantageusement  connu. 

DaiK)  lacutnuliu,  uitouN  M.  [)rpa\  et  M     .^niitli. 

Au  mois  de  mur»,  'l'ournit)  (Uni  tombe  malade,  fui  remplace  (Mir  un 
nommo  Donuii,  i|ui  débuta  dunii  UmUaume  Tell,  ('etiiriikk^  eiiiit  lellemem 

andaleux,  que,  sur  Tordre  «le  la  Munieipalilt',  on  remplaça,  apn«s  le  pre- 
iiiier  acte,  iiuitinunu'  Tt^U  par  Mif/non, 

A  tuie  repr<*s(  nialion  des  I/ut/nettolH^  Vous  selanl  tronvt^  indis|M>sc  p<'ii- 
•laiit  li>  j)reniier  a«te,  Coulon.  qui  jadis  avait  <^t<^  hassi».  je  suppléa. 

l'n  eummencemeni  d'incendie,  «jui  pouvait  devenir  grave.  >e  produisit  un 
Noir.  à  l'acte  de  la  tente  du  Profifi^ir.  La  lamp<'  d'esprit  do  vin  • '"  •  tr  la 
table  fut  renversée.   L'aloool  prit  feu  et  une  tlamme  a^seg  é.  a  le 

décor.  Pons  essaya  en  vain  de  l'éteindre  ave<>  ion  chapeau  ;  des  oh  »  istes 
vinrent  à  son  aide  et  l'on  parvint,  après  un  certain  moment,  à  écarter  tout 
danger.  Il  y  eut.  dan»  la  salle,  un  moment  de  vive  émotion.  Tou»  lue  esprits 
(lient  encore  sOUs  le  coup  de  l'inct^ndiedu  ThéAlre  de  Koum),  qui  venait 
d'avoir  lieu. 

.\  partir  de  cette  année.  *»ii  i  "up.i  m  imiiniMni-m.  iitin*  >.» «  /.  .  n- 

lalileau   du   bJil.    haiinl   fut   loué  pour  la  premn-n?  fois  nvet!  ,   ^  (ifs, 

Jus(iu*à  eelto  époque,  la  vcirsion  opera-comi4uc  .ivail  été  consek-véc.  Une 


204  LE  THÉÂTRE  A   NANTES 


reprise  de  Moine,  bien  interprété  pourtant  jiar  'l'o\irnié.  Rongé,  Pon«  et 
Keino  Mézeray,  n'eut  pas  un  tr^s  grand  succès. 

Pendant  ces  dernières  années,  deux  journaux  de  Théâtre  s'étaient  fondée  • 
La  Lorgnotlc,  rédigé  par  M.  Léon  Séché,  et  A^''«^-'S-7V<e«^re,  rédigé  par 
M.  Brisson,  aujourd'hui  directeur  des  Annales  Politiques  et  Littéraires.  Ces 
deux  journaux  ne  devaient  avoir  que  peu  de  numéros.  Pendant  la  (;ampa^Mie 
1875-lH7(î,  une  autre  feuille  musicale,  Nanten-Li/rif/ne,  fit  son  apparition. 
Ell(!  était  née  plus  vial)le  que  les  précédentes  et  elle  parut  pendant  une 
vingtaine  d'années. 

V Etrangère,  La  Reine  Indifio,  La  l'i-tUe  Mariée,  furent  les  nouveautés 
de  la  saison. 

TouRNÉK.  —  La  Fille  de  Roland.  —  Bra.sseur,  Lassouche,  Daubray, 
M""  Théo,  Agar,  Bloch,  de  Belloca,  Scriwaneck  et  Emile  Ambre  vinrent 
donner  des  représenfcitions. 

Pendant  mai  et  juin,  une  troupe  d'opérette,  avec  Zulnia  Bouffard  et  le  ténor 
Puget,  se  fit  applaudir  à  Graslin. 

•f  * 

M.  Coulon  ne  conserva  pas  la  direction  l'année  suivante.  Il  fut  remplacé 
par  M.  Bellevaut. 

Comme  subvention,  la  Ville  prenait  à  sa  charge:  1*  l'éclairage,  jusqu'à 
Concurrence  de  1.400  francs  par  mois  :  2'  les  choristes  (18  hommes, 
16  femmes)  jusqu'à  concurrence  de  li.420  francs  ;  li"  l'orchestre  (41)  musi- 
ciens), jusqu'à  concurrence  de  5.405  francs.  Une  troupe  de  comédie  n'était 
pas  exigée,  ce  qui  était  un  avantage.  Si  peu  cher  (jue  coûtât  une  troupe  de 
comédie  et  de  drame,  elle  coûtait  encore  plus  qu'elle  ne  rapportait.  La  Muni 
cipalité  se  réservait  le  droit  de  disposer  de  l'orchestre  et  des  chœurs.  deu\ 
fois  par  mois,  dans  la  journée,  afin  de  donner  des  concerts  populaires. 

SAISON   1876-1877 

BELLEVAUT.    Directeur 

Bdzi.vc,  chef  d'orchestre.  —  Mebi.k,  n'-gisseur. 


>nr.    CiARNiKR,  fort  lénor. 

1)kfri.\.nt,  ténor  iloubli". 

liAiiRENT,  ténor  léger. 

B\RnK.  deuxième  ténor  léger. 

NoK,  troisiï'iiie  ténor  léger. 

CiiARi.Ks,  trial. 

tJuii.LKMor.  baryton. 

(iiiEi.YNs,  liaryloii  d'opéra-coiuiqui*. 

D.vRTKs,  basse. 

IsAAc,  basse  chantante. 

Nki;lat,  douxième  basse  chantanlo. 

BovLfcQK,  laruotte. 

PoiTRvrs*,  troi^iième  basse. 


M 1,A<  OMHK-DuriiMz.     preniiéro    i-liait- 

leuse  lo>;ère. 
liosc,  chanleuso  lèj^ère. 
1)K  Géhauux.  faloon. 
RiKF,  contralto. 
HoHKRT,  dugazon. 
NKJUJI.T,  duègne. 
Mf.ri.k.  deuxième  dii;^:i/i«n. 

b.VLLET 

.M.      CiRifcTENs,  maître. 
M""   Griêtkns,  première  danseuse. 
RosiTAiN,  deuxième  danieuse. 


oriLLKMOT    —    >*'""'  LAI.UHII&-DUPKE/    —   W  AI<'»T  '3iô 

Celle  troupe  <5uit  l»ien  inI«'Tieure  a  «elle  de  l'auij<  l'AU'  rm 

formait  pour'""    i-mv    ..  f.wi..-:  ,|«.  .. i,. ■,,;.. r -,r^ir,.  •  \;  |i.,...^.-,  .» 

(fUlllc'Utol. 

M""'   Lacombt!  iiUiil  la  umcu  «lu  Umeux  Ltuprfi  ot  «ou  éléw.  Elle  p  »i*e 
(l.iil  une  maf^uifl'i'ic   \oi\  df  ■  '.  .  "  .  ml  t't  pur. 

«l'une  jU.sU'"->i' im)i<ci:ibU'.  M.u  •  ,  flUî  éiaii 

«Tuoe  froideur  oulr.'-e.  Malgré  U>ut.  elle  (ut  réunir  a  ritusitiiuiié,  t'altoitAé 
^rinchrux  étint  nljsorit  ce  jour  l.i.  Kti  <|uitiant  Nautes.  «tk*  alla  ù  TOpéru- 
Comiqu»',  puis  à  !'<  ipcTO. 

(fuilliMiot  était  un  de^  nuMlItnus  barytons  du  proviucc.  Sa  voix  pW'ine  vi 
sonore,   (|u'il  maniait  avec  une  habileté  rare,  était  des  plus  :>ympatUiqucs. 

Très  bon  aeUMir.  il  savait,  contrairement  à  M""*  LiicomJx    ' t.' 

en  cominunicalion  avec  le  publi«-,  ([«>nl  il  de\  int  bieuli*>tr  s 

laissèrent  à  Nantes  d'aussi  bons  souvenir*. 

Les  chutes   furent   nombreuses   et   la   pc-riodc  d»'S  débul.H  mouvern 
(îarnirr.  Laurent,  Ghclyns,  DefrianI,  H<»ulV"_'"    (<...     1».,,...    \|-      •. 
(Ion.  Bose,  IlifF.  restèrent  sur  le  carreau. 

Après   une   représentation    de   liohort.    véritablement  sc«imlaleuxi  . 
MM.    Morèro.   Depotier.   M""*   Moieau  et  Le'rrrict,  ai' 
remplacer  les  viciirnes  du  scrutin,  le  maire  écrivit  au  •:  <• 

qui  se  terminait  ainsi  :  <•  Notez  que,  s'il  n'y  a  à  bref  délai  un  changement 
dans  l'éiat  des  choses,  je  fermerai  les  Théiitres.  (^'etUî  menace  ne  seni  fws 
plus  vaine  que  les  précédentes.  »»  Knfin  furent  reçus  MNLCarrière,  furt 
ténor;  M.iés,  ténor  double:  ("aubet.  ténor  léger  ;  Tapiau,  basse  :  Froni> . 
liasse  chanumte  .  Maupas,  second»*  Ikisîh*;  M"»"  Redouté.  cliantiMisc  léj^'n*  : 
Moieau,  f;klcuu.  La  «oHlriilto  fut  plus  dillieile  s  trouver.  On  «'niiiidit  su»  - 
(•«'ssiveiiK'iU  M"*  <Ii'  (icii'f  l'<-\  lit  Dcn.iiîi.  \\'<r\.  ("fili-  «Ji-iriiir,'  mm- 
dcuïcura. 

Parmi  les  nou\eau\  ao-liâle?*.  si^taions  i.'aubet,  qui  avait  une  a:<iM-/ julie 
voix,  'rajiian,  et  enfin  Maupas,  une  seconde  Uasse  «b*  pn-:!'  r  — !re<|Mi 
ilevait  revenir  sous  la  direction  (iraviëre. 

Le  ténor  Carrière  étant  tombé  malade.  M.  Hellevaut  engagea  alors  W'aroi. 
La  voix  de  ce  ténor  n'était  certain'  :  >  parfaite,  j'J.  h» 

comiais  vin;;t  cabotius  qui  lui  sont  -   ,  i  >.  Mais  War-:  ,  ,       ,  le 

chosQ  qui  vaut  mieux  qu'un  organe  extraordinaire  :  un  t:dent  complet  et 
admirable  do  ehantonr  et  de  comédien.  Son  style  était  superbe,  sa  di«  t:<>n 
nette,  son  jeu  plein  de  chaleur  et  de  vérité.  Qui  ne  se  r:,.  ■  h  ".. 
Warot,  dans  le  Prf>]thi'te,  racontant  son  K've  aux  anabaptistes  «i  t 

sa  mère*.'**.'*  C'était  absolument  merveilleux  î  Kl  VA/ricaiwi,  et  lu  Juirr,  et  le 
quatrième  acte  des  Hnffii*»nntH'  Autant  de  nMev.  autant  de  triompher.  W.irot 
«■'(ait  un  grand  «'i  véritable  artiste.    KeliK'   aujourd'hui   du    ilu  iiie.  t 

|)r<»fk>sstHir  au  Coahcrv;ai>HK>  du  Paris.   L'honneur  ost  pour  l'ékibU;^- 


206 


LE  THEATRE   A   NANTES 


A  la    fin    de    mars    l'cngageiucnt  de  Warot  prit  fin.  Son  successeur  fut 
M.  Vitaux,  un  ténor  doué  d'une  voix  éclatante. 

Le  2  avril  ]Hll,VIIamlet  de  Monsieur  A.  Thomas  fut  représenté  avec 
succès.  M™e  Laeombc-Duprez  fut  admirable,  au  point  de  vue  du  chant,  dans 
le  rôle  d'Ophélie.  Guillemot  chanta  et  joua  avec  un  très  réel  talent  le  rôle 
d'IIaralet  qui  demeura  l'un  de  ses  meilleurs.  Le  reste  de  l'interprétation, 
confié  à  Barbe,  Fronty,  Moreau  et  à  M^o  Tapiau  était  bon.  Les  décors 
furent  très  justement  admirés. 

Un  accident  qui  n'eut  heureusement  pas  de  suites  graves  arriva,  un  soir, 
pendant  le  défilé  de  la  Juive.  Un  cheval  effrayé  se  cabra  et  tomba  dans 
l'orchestre,  au-dessous  de  la  loge  municipale.  Cheval  et  cavalier  se  rele- 
vèrent sans  grand  mal.  Les  musiciens  curent  aussi  la  chance  de  s'en  tirer  à 
bon  compte.  11  fallut  un  temps  assez  long  pour  retirer  l'animal  de  l'orchestre. 
On  n'y  arriva  pas  sans  diflicultês. 

]y[me  Dereims-Devriès  vint  en  représentation. 

Tournées  :  L'Ami  Fritz,  Bébé,  Dora,  l'Aventurière  (M'"'-  Favart).  Vllet- 
.  mann  (Marie  Laurent),  la  troupe  des  Variétés. 

An  point  de  vue  financier,  cette  campagne  fut  désastreuse.  M.  Bellevaut 
ne  put  payer  ses  artistes  et  quitta  Nantes  ruiné.  Il  devint  ensuite  régisseur 
dans  un  théâtre  de  drame  à  Paris.  Il  consacrait,  chaque  mois,  une  partie  de 
ses  appointements  à  éteindre  ses  dettes.  Tous  ses  anciens  artistes  prennent 
plaisir  à  rendre  hommage  à  sa  probité. 

M.  Coulon  obtint  de  nouveau  la  direction  pour  la  campagne  1877-1878.  La 
Ville,  tout  en  fournissant  la  même  subvention,  exigeiiit,  cette  fois-ci,  une 
troupe  de  comédie. 


SAISON     1877-1878 
CO'CTIjON,    Directeur 

BÙzi.\u,  chef  (.l'orchestre.  —  Liîiîlanc,  réjj;i^^6ui'- 


OPÉRA 

]\1M.  Doiu.\.  lort  ténor. 

Thkmoi'lkt,  ténor  h'ger. 
IjAiDiiT,  deuxième  tonor  h'i^fr. 
(iuiLi.iîMOT,  baryton. 
AuGiiU,  baryton  d'opéra  cuniiiiue. 
Pi.Ai.N,  l)asse  nobh\ 
Dangox,  basse  chantante. 
Fondant,  deuxième  basse  chantante. 
Taillard,  trial. 
liouLAND,  laruette. 


>1' 


F(>licio  Arnaud,  première  chanteuse 
légère. 


MM. 


Sarah  Lkwi.m:.  deuxième  chautrusc 

légère. 
Lkslino,  falcon. 
Hegui.vnni,  contralto. 
Falcoxnet,  dugazou. 
K.  Lewine,  deuxième  duga/on. 
Nkulat.  duègne. 

lîALLËT 

D'Alessandri,  maître . 

Isabella   Ottoi.ini,    première   dan- 
seuse, 
(iina  (^TTOLiNi.  deuxième  danseuse. 


FÉLICIE  ARNAUD  —  ALMA  RBGGIANI  —  PLAIN  —  TRÉMOOLET        2U7 


M"'»    Aymée,  premier  rôle. 
Sanon,  jt.'une  première. 
JinssANT.  pri'iiiii'r  rùle. 
Lkroux,  in^îéniiités. 
M.  Aymék,  amoureuse. 

ClIAMEBtiY,  StiUbrcUf. 

PniLii'1'E.  amoureuse. 
Troyks,  coquette. 
Chai-p.  jeune-coquetti'. 

MAHVAr,.  (lu>'J/llf. 


COMÉDIE 

MM.  Serret.  premier  rùle. 

JoissANs,  JMunr  premier. 
William,  deuxième  amoureux. 
Cari'On.  amoureux. 
Reynier,  deuxième  amoureux. 
Frumenu,  troisième  rôle. 
Voyez,  père  noble. 
Beji;y,  premier  comique. 
Behlingard.  premier  comique. 
Leroux,  comKjue. 
r>EPRiN,  comique. 
Lldovu:,  grimes. 

/ 

Cotte  troupe,  quand  les  débuts  l'eurent  épurée,  fut  oxcellentr. 

Doria  avait  une  as.sez  jolie  voix,  mais  pas  l'ombre  de  talent.  Pouii mi.  il 
fut  reçu  à  l'unanimité.  Le  scrutin  a  de  c<'s  surprises.  Trémoulet  lui  était 
bien  supérieur.  Il  possédait  un  organe  agréable  etét;iit  bon  musicion  et  bon 
comédien.  Plain  avait  une  superbe  voix  de  basse,  un  peu  pâteuse  cependant. 
Bouland,  un  laruette  fort  drôle,  se  fit  applaudir  aussi  très  justement.  A  cette 
époque,  il  venait  de  se  marier.  Sa  jeune  et  charmante  femme  se  tenait  au 
contrôle  avec  M™''  Coulon.  Persoime  ne  se  doutait,  alors,  que.  dix  ans  plus 
tard  M"»"  Bouland  fanatiserait  les  Nantais  par  son  talent  fin  et  sympa- 
thique. M"»'^  Félici(^  Arnaud  avait  une  voix  adorable  dont  elle  se  servait  avec 
un  grand  talent;  c'était,  ilc  plus,  une  ravissante  actrice.  Aima  Reggiani  a 
laissé,  elle  aussi,  d'excellents  souvenirs  parmi  nous.  Son  organe  de  contralto 
était  un  peu  faible,  mais  elle  savait  en  tirer  un  excellent  parti.  De  plus,  elle 
était  fort  jolie  femme  et  fit  tourner  bien  des  têtes.  Elle  alla  plus  tard  à 
rOpéra-Comiqu«>,  où  elle  créa,  dans  la  Xuit  de  Cléopàtre,  le  rôle  de  Chai- 
mion.  Elle  est  morte,  quelques  années  après,  en  pleine  possession  de  son 
talent,  enlevée  par  une  cruelle  maladie  de  poitrine. 

Mmes  Leslino  et  Sarah  Lewine  échouèrent.  Elles  furent  remplacées  :  la 
première,  d'abord  par  M™®  Dupuy,  |)uis  par  M"'  Reine  Mézeray,  ([ui  fut 
accueillie  avec  enthousiasme  ;  la  seconde,  par  M"*  de  Mollens.  Cette  chan- 
teuse fut  très  appréciée.  Elle  quitta  le  théâtre  quelques  aimées  plus  tard,  pour 
épouser  notre  concitoyen  M.  Pelletier.  Elle  est,  aujourd'hui,  l'un  des  profes- 
seurs de  chant  les  plus  estimés  de  Nantes. 

Le  deuxiène  ténor  Laidet,  un  Nantais,  ne  fit  pas  mentir  le  proverbe  et  fut 
remplacé  par  Ro/i-nil.  M""  Diifui  sncc'-d:!  à  W^^  V-\\r<s\\\\,^\ ,  o^^^'^  t,.iiil.i  pUc 
aussi. 

Le  ballet  de  la  Nuit  du  W'alfxurgis,  que  Gounod  avaii  ajouté  a  la 
partition  de  Faust  pour  les  représentations  de  l'Opéra,  fut  enfin  jou»'  à 
Nantes,  sous  cette  direction.  Le  corps  de  ballet,  excellemment  dirigé  par 
NL  d'Alessandri  était,  cette  année-là,  de  premier  ordre.  Les  ravissantes  sœurs 


:Î08  l.i;   TUl^ATRK    A    NANTES 

OUoliiii,  aujourd'hui  à  i'Ac:i<lémit;  nationale   de   Musique,  remporiëreni  de 
noiul)reux  et  lé;:itinie.s  succfts. 

La  seconde  dinjction  Coulon  fut  fortile  en  grandes  nouveautés.   La  pre 
niière  (jiii  nous  fut  oif-ri»-  fut  l*anL  et  W/Y/'/'ttf  (3  décembre  187."»).  Ct't  opéra. 
l^'î^'èreinniL  isoporificjue,  remporta,  néarnnoins,  un   certain    succès,   frrâce  a 
l'excellence  de  >on  inierprél-itiDn.  confi/'i-i  \f\î.  Ti/'in^^inli-t    n;i:ic'iin.  '  î.i'k, 
M""'^  Arnaud  et  Heggiani. 

Aida,  le  chef  d'œuvre  de  Técole  iliiliennc  modtînie,  fui  ^eJ>lv^en^é  le  ven 
diiîdi  :l*8  février  1878.  Mézoray  el  Reg.:,Mani  était  excellentes  dans  les  rôle-, 
d'Aïda  et  d'Aninèris.  Guillemot,  dans  .\monasro,  les  secondait  a<lmirablc- 
m  -ni.  Doria,  IMain.  Dani^on  ct.NI"'  M.Lewine  complétaient  une  bonne  ex<'cn 
tion.  N'oublions  pas  les  deux  OltoUini,  fort  jolies  sous  le  costume  é{fyi»lien. 
L'orcliestre,  sou.s  l'habile  direction  de  Buziau,  se  surpassa.  Les  décors, 
p  -inis  par  liornier,  étaient  des  plus  réussis.  L'opéra  de  Verdi  eut  un  grand 
succès.  La  Vill(>  prit  à  s:on  compte  les  décors  d'Aïda  et  de  Paid  et 
Virfjinie. 

Un  autre  chef-d'œuvre, aujourd'hui  adoré  des  Nantais,  re<.-ui,  tout  d'abord, 
un  accueil  assez  froid.  Je  veux  parler  do  Carmen,  donné  au  biMiéfice  de 
'rréinoulet,  le  '21  avril  1878.  La  première  fut  médiocre  ;  la  pièce  n'était  pas 
au  point.  Trénioulel  fit  un  excellent  Don  José  el  Mézeray  une  piquante  Car- 
mi-n,  bien  (jue  la  tessiture  du  rôle,  un  peu  basse  pour  elle,  eut  mieux 
convenu  à  He^'^iiiaiu.  M""  Arnaud  était  une  charmante  Micaëla.  Les  autres 
rôles  étaient  confiés  à  Dangon,  Bouland,  Taillard,  Sarron,  Gack,  Grondart. 
M"'^  Dufau  et  E.  Lowine. 

Les  premières  représentations  de  ces  trois  opéras  eurent  lieu  à  la  R.'iiais- 
sanee. 

Les  Cloches  de  Cornècille  (9  mai  1878),  jouées  au  bénéfice  de  Bouland, 
excellent  d;ins  le  bailli,  remportèrent  un  éclatant  succès.  Guillemot  s'était 
chargé  du  rôle  du  marquis  et  y  remporta  un  vif  succès.  Les  rôles  de  femmea 
étaient  tenus  par  M""  do  Mollens,  dont  la  nature  s'accordait  peu  avec  l'opé- 
rette, et  M""  Dufau. 

Les  autres  nouveautés  furent  Graziella,  Charlotte  Corday^  Une  rause 
célèbre,  le  Réreillon. 

A  la  suite  d'incidents  qui  curent  lieu  à  la  Renaissance  à  propos  de  Mar- 
ceau, difrércntes  manifestations,  peu  sérieuses,  eurent  lieu  au  Gr.ind-ThéA- 
tre.  M"'  Mézeiay  av;iit  refusé  de  chanter  la  Marneilla{.se  dans  ce  drame  aussi 
emmyeux  (|ue  patriotique.  Les  légitimistes  saisirent  l'occasion  aux  cheveux. 
Ils  assaillirent  M"  Mézeray  de  bouquets  blancs  ornés  de  longs  rubans 
immaculés;  les  républicains  répondirent  en  envoyant  à  M""  Regglaiii  des 
liou(iueis  aux  Couleurs  tricolores.  C'était  alors  ime  lutte  d'applaudifisements 
entre  les  deux  partis.  Pendant  quel(|ues  représentations,  ces  chfantillages 
èp;ayèrcnt  les  s^jcctateurs  inditï<Jrclïts  à  la  politique. 


i)KL.\nRANCiiÈ.  ^^  î>EnV:iMrtç.  -*«-  m'**  ueueims-devriks 


^îï) 


GiiiUoinoi  joi;a  ÎIûtnH  p»Hir  ston  Ix^îicfico.  Ct^  ttit  un  triomphe  vfehtnbk*. 
I/<'xip<*Uenl  ;irtisb^  fut  ct>u\rrt  do  palun^s  ot  do'ronronntrs. 

Un  iM<îHt«Hil  as«*or  eotint^Mf^  siguah  h  n»pr*st»nti!ioh.  1)0  vit  tool  :i  otjttp 
\wi  sp»xil'itH\r  (U»!<  tjlvitn^t^  se  H^xir  <»«  s èeriaiit  :  n  Tîrns.  tiniUi&mDt,  je 
n'ai  ijiw  ma  oa>*<]uHtt^  \  ïo  «lonfifi-  ;  li  voilh  !  h  h  il  jota  vhti  rt>utrr  chntsUr 
la  sot^Ho.  O  bixarn;  liomuia}::^  fui  tk's  plus  «rt^n^ihlc  xw  kiryton  t^ui  -i  >'^^^l 
sofvé  toujours  la  cas"queit»'  «miMousc  do  «on  humbli;  adniifAt<^urv 

Cette  saison  m  artisiiqu(>(ui  un*»  inauviii^o  wHis  \c  r.(p{>oil  (iurtnrioi'.  Oatis 
li*s  pi-emicrs  jours  do  mai»  (oulou  fui  d<^pl.ir<^on  f.illlito.  L»»»  nri<«tt*8^  réunis 
«Ml  Ri)ci«^ii'',  aolicv«'r<'nl  la  oaïupapiifi 

Lauta  li«rrixs,  <talli  Marié,  ("ouiuiiet  vinnMU  donner  df^ureph^tptmtiotts. 

'roiuiM'.'s  :  Ih'riKtrti,  les  Fonrrhnmfniuftt 


M    I.^MJuiguc  fut  iioiuuit'^  dinîitiHir  |»>n«r  la  <'am|KH<ae  suivant'. 


SAISON     1878-1879 
LEMOIONE,    Directeuf 


oi']<:iu 

MM.   (>i-:i.vi«r!ANi:HK,  foM  lé«i>r. 

l)K»KiMs,  liTior  l<'ger. 

Dk  Qi  er<a.  di'ux'n'^iiif  l«5nor  \è-^er. 

(.iijii.i  KMoT.  Iiaryii)n. 

Kn'ileric    IIoykk,    hinyl'di    il'opiru 
iomic|Mr. 

('i.Àis.  bitMtp  noble. 
B.vDUi.i,  lia.ssr  chaiitaiilo. 
Duiiusc.  ilouxiomo  l>asat)  fharilaiitr. 
DiiBorf.HMt,  Irlal. 
.Mathav,  laruotle. 
»•>    Derkimh-Devhiès,  chanteuse  lègàre. 
BRiotBxRO,  falci^n. 
Dr  Basta.  fontralto. 
1)K  M Dtt.K.NH.  chanteuse  lé^jùro. 
N'ai. ni.  iiu((a/.<)n. 
DUBOIC.MKT.  diH'gnc. 
('.(irnlio  (.ÎKOKKROY,  l'hatiteiistt  d\>|»è- 
r*»lt«'. 

M.M.I.kT 

M.  Th^dmIilk.  kiiilltn'  dnlmlhl. 
M""  PiAsc.'>Tri,  prcmit'ii'  «lanHruM-. 
Pas.sani.  d»'uxi»'nif  dant>cusc. 


«.OMKDIK 

MM.  Anftvr.  |>r«>tni«r  nsh-, 

ViK.NNK.  jfune  pr*nii*r. 
I.iNKVAi.,  jfunp  preniitT. 
Dk  Kksdkr,  amoureux. 
pRbspBRt  pèn»  nobl<>. 
(inu.sbtLi.K,  Iroisioim*  n>lc, 
I)ki'EVrk,  troisiènif  ruh-. 
Hjjly,  comiqae. 

(jKCUUHT.   lo  V 
ROLLLN,  CUli.. 

M»*«  LoRNiANi,  premier  rOle. 
MrLLKR.  Jfcune  premier». 
(^tAunu,  jeune  premier*. 
Carina.  inn 
t.KRov.  in^t 
nfeRT^t..  «ov 
Klê^kr,  co^ 
DuillIUNK.     du«);ai'** 


(Vite  tloupe  Otiit  fort  boiuU' eu  -011  chSit^mbh'.   Il  ...   ...  j..-  ..     .  ..>.;c^. 

bclubruncUu  était  uu  fort  tétior  do  valeur  ;  sa  véix  était  clairu  cl  VlbrjnlS  et 


210  LE  THÉÂTRE  A   NANTES 

il  chantait  avec  beaucoup  de  style.  Dereiras,  aussi  lui,  était  excellent.  Pour 
tant  il  étJiit  pr6f/;rable  dans  les  rôles  de  demi-caractère;  le  répertoire  d. 
ténor  léger,  proprement  dit,  lui  allait  moins  bien.  Cet  artiste  entra  plus  tard 
à  l'Opéra.  Frédéric  Boyer,  baryton  d'opéra-cpmique  de  premier  ordre,  étmt 
tombé  malade,  fut  forcé  do  partir;  il  fut  remplacé  par  Martin.  Rappelons 
aussi  le  nom  du  trial  Dubouchet,  si  fin,  si  amusant  dans  tous  ses  rôles. 

L'étoile  du  côté  des  femmes  était  M™«  Dereims-Devriès,  chanteuse  lépèn- 
d'un  talent  tout  à  fait  exceptionnel,  douée  d'une  voix  magnifique,  d'une  vir- 
tuosité hors  ligne.  Cette  admirable  cantatrice  était  malheureusement  desser- 
vie par  un  embonpoint  extrême.  Les  autres  emplois  étaient  bien  tenus 
par  des  chanteuses  qui,  sans  avoir  la  haute  valeur  de  M"®  Dereims,  ne  man- 
quaient pas,  pourtant,  d'un  certain  talent. 

Le  Petit  Duc  remporta  un  vif  succès  avec  M™*^  Coralie-Geoffrov  et 
Dubouchet. 

Un  mauvais  opéra  de  Verdi  :  les  Brir/ands,  éprouva  un  échec  mérité.  A 
hi  seconde  représentation  de  cet  opéra,  il  y  eut,  dans  la  salle,  une  viv.» 
panique.  Pour  produire  un  lever  de  soleil,  on  employait  un  certiin  mélange 
d'oxygène  et  d'hydrogène.  Par  suite  d'une  imprudence,  une  retentissante 
explosion  éclata  à  la  fin  du  premier  acte.  Le  gazior  fut  blessé,  différt'nls 
objets  furent  brisés.  On  juge  de  la  peur  des  spectateurs  plongés  dans  l'obs- 
curité. Le  gazier  aussitôt  l'explosion,  avait  par  prudence,  éteint  in^médiaie- 
ment  le  gaz.  Enfin,  on  n'eut  pas  d'autre  accident  à  déplorer;  la  salle  était 
presque  vide,  l'opéra  de  Verdi  n'ayant  attiré  personne.  Ce  soir-là  les  Bri- 
gands furent  utiles  à  quelque  chose. 

Don  Juan  fut  repris  au  bénéfice  de  Guillemot.  L'interprétation  du  chef- 
d'œuvre  de  Mozart  manquait  de  cohésion  et  ne  répondit  pas  à  l'attentt»  des 
spectateurs  . 

Qui  se  ressemble  s'assemble,  unt^  piécette  spirituelle  de  notre  concitoyen 
M.  Alfred  Guillon,  fut  jouée  plusieurs  fois  avec  succès. 

Au  point  de  vue  financier,  cette  campagne  no  fut  pas  plus  heureuse  que 
la  précédente.  Des  créanciers  récalcitrants  firent  mettre  M.  Lemoigno  en 
faillite,  le  29  mars.  C'était  l'année  de  l'Exposition,  le  public  avait  pou  suivi 
le  Théâtre  ot  la  troupe  coûtait  fort  cher. 

Tournié,  M"*  de  Stuckli  vinrent  en  représentation. 

Nouveautés  :  le  Grand  Casimir ,  la  Boite  à  Bibi,  les  Provinciales  à  Paris. 
enfin  Nous  allons  à  Paris,  revue  par  deux  Nantais.  MM.  Laurencin  ot 
Ordonneau. 

Tournées  :  Rutf-Blas,  le  Roi  s'amuse,  les  Fourchambnult^  Tancrède, 
Rodogune  (Agar),  les  Bourgeois  de  Pont-d'Arci/,  los  Lionnes  paurres,  le 
Fils  Naturel.  » 


RÉPARATION    DE    LA    SALLE  211 


Le  Théâtre  Graslin  avait  besoin  d'urgentes  réparations  et  des  améliora - 
lions  étaient  jugées  nécessaires  dans  la  salle.  Le  Conseil  municipal,  dans  sa 
scante  du  8  mars  187'J,  décida  d'aiïecter  la  subvention  théâtrale  à  ces 
travaux.    La  Renaissance  était  donnée,  sans  subvention,  a  un  directeur. 

Le  Grand-Théiitre  resta  donc  fermé  pendant  la  campagne  1870  18H0. 

L'ancienne  ciiarpente  qui  menaçait  ruine  fut  entièrement  remplacée  par 
une  charpente  en  fer.  On  remit  en  état  les  lof;es  des  artistes  qui  étaient  dans 
un  état  de  saleté  vraiment  repoussant.  On  agrandit  le  foyer  de  la  scène  et  on 
le  remeubla  à  neuf.  Les  lourdes  ciiriatides  qui  supportaient  les  avant-scènes 
lurent  supprimées  et  remplacées  par  des  colonnes  ioniennes.  Les  loges  de 
l»iemières  furent  refaites,  mais  le  lîouvel  aménagement  les  rendit  sombres 

inmc  (les  baignoires.  On  s'aperçut  de  cet  inconvénient,  mais  une  (ois  les 

ivaux  achevés.  On  décida  alors  de  les  éclairer  au  moyen  de  boules  lumi- 

•iises.  Ce  projet  no  fut  pas  njis  immédiatementàexécution  etl'on  dutalten- 
(ire  l'installation  de  la  lumière  ékctrique,  c'est-à-dire  onze  ans.  Les  loges 
nui,  dans  tous  les  tiiéâfres,  sont  les  places  les  plus  brillantes  et  les  plus  en 
vue,  furent  au  <'ontraire,  à  Nantes,  les  places  les  plus  obscures,  avec  les 
l>aignoires,  bien  entendu.  La  salle  est  peinte  en  or  et  en  xert  sur  un  fond 

I union.  Elle  est  «'Utièrement  tapissée  de  rouge.  Le  balcon  est  orné  des 
lui'daillons  des  grands  poètes  et  des  grands  musiciens  reliés  entre  eux  par 
l'S  «guirlandes,  l'n  nouve;ui  lustre,  plus  petit  que  le  précédent,  mais  j)ernïel- 

iit  de  bien  voir  le  plafond,  fut  installé  aussi.  Ce  plafond,  commandé  au  pein- 
[[<'  Mert^tux,  ne  fut  pas  pr»"t  pour  la  réouverture.  Les  fauteuils  et  les  l)anquet- 
i'  S  furent  entièrement  refaits.  Dans  le  foyer  du  public,  on  construisit  une 

leminée  monumentiilc  surmontée  du  buste  de  Gra-^lin.  Kn  face  on  plaça 
une  jolie  statuette  d'Apollon  en  bronze.  Les  murs  de  ce  foyer  furent  divisé> 

1  panne^iux,  les  uns  tendus  d'étofTe>  de  soie  avec  des  sujets  lyriques,  les 
lutres  ornés  de  glaces.  En  face  du  foyer,  du  cùté  de  la  rue  Corneille, 
on  établit  un  vitste  buffet.  Deux  nouveaux  rideaux  furent  peints  par 
l{uf)é  et  Chaperon  ,  le  premier  est  le  rideau  classique  :  draperie  rouge. 
broderie  et  frange  d'or  ;  li'  second,  représente  im  parc  avec  des  >t»tues  et 
li'S  balustres. 

Toutes  les  réparations  furent  faites  sous  les  ordres  de  l'architecte  de  la 
\'ille,  M.  Demopet.  Mlles  s'élevèrent  à  02,00()  francs.  Dans  ce  chiffre  n'est 
jias  ctunpris  le  prix  du  plafond  t|ui  coûta  10. (KM)  fr.iin-s. 


ce 


'^>>f55-?*^^'^ 


DIRECTIONS    :    GRA7IERE.    —    LAF^TI. 
GAULTIER.    —    SOLIÉ. 


Marguerite    l'utllanlCoitturicr.  —  Jléléne  (kcrrier.  — Jeanne  Foiiqiut.  —  Ser>tn. 

Cutiturier.  —  (iuillubcrt.  —  Mireillo.  —  Jean  <le  Nivelle.  —  Pbilùmou  «t  HaucU. 

ritlycucte.  —  Peilin.  —  llerardi.  —   Le  srnudale  Val.  —  Le  Hoi  de  I.ahore. 

A  tii'c  linbany.  —  Maums.  —   Verhéea.  —  Duquetne.  —  Hèrodiadc 

M"  Lacomhe- Itupret.  —  VilUfranck.  —  Euxeute.  —  LosCuatM 

d'IIotTintiriu.    —    Lakmr.     —    M.    et    M"  Simon-dirurd. 

Lahis.    —    A/T'  Espifjat.    —   Roux.    —    Manon. 

Af II' SrrAtrryrr.  —  Laurent.-'  Le  Roi  Ta  dil. 

Le  Clicvalier  Jean. 


ES  faillites  successives  des  derniers  directeurs  décidèrent 
l'Administration  à  élever  la  subvention.  Le  8  mars  1880,  1«' 
Conseil  municipal  porta  le  subside  théâtral  à  Itî^KOOO  francs. 
D'après  le  nouveau  cahier  des  chargea,  la  cum pagne  était  de 

-cpt  mois  ;  la  comédie  était  supprimée,  mais  deux  représentations  par  mois 

le  troupes  de  passage  ét:\icnt  exigées  ;  le  directeur  devait  monter  dans  la 
lison  deu.K  œuvres  nouvelles  :  un  grand  opéra  et  un  optera  comique  :  enfin, 

iiumenso  avantagi',  la  Ville  s'engageait  à  ne  pas  autoriser  la  présence  d'un 

.  irquc  sur  la  place  Bretagne,  Rien  que  cette  clause  équivalait,  au  bas  mot. 

i   une   augment;ition    de  20,(X)0  fi-anos.    Le  mode    de  débuts    restait   !«• 

uiôme  (abonnés  et  une  Commission  de  20  membres). 
M.  T,  Gravière  fut  nommé  directeur.  Ce  choix  était  des  plus  heureux. 

La  campagne  1880  1881  restera  célèbre  dans  les  fastes  du  Grand-TliéAtre. 

Ut'puis,  jamais  notre  premièn' scène  n'a  brillé  d'un  éclat  pareil,  du  moins 

situs  11'  rapport  do  \i  .Mi:iVité  des  artistes.  ' 


214 


LE   THEATRE   A    NANTES 


SAISON     1880-1881 

T.  GRAVIÈRE,  Directeur 

J.Ai;AJ'Ti;,  ri'';^issuiir  ^'cii'Jiul.  —  ]iij/.i.\i;,  clief  (.l'urilirhlrc 


MM.    Warot.  fort  tôiior. 

Skuan,  ténor  léger. 

liif.uAKD,  dciixiértif  ténor  léger. 

ClouTURiKK,  baryton. 

Ythac,  baryton  d'opéra  conii<iue. 

GuiLLABERT,  bosse  noblc. 

J.  BoYKR,  l)ass(;  chantante. 

Maupas,  deuxième  Jias.se  clunilanle. 

Barbary,  trial. 

Darthenay,  laruotte. 
]\[mcs    Vaillant-Couturier,  première 
chanteuse  légère. 

Ghevrier,  falcon. 


Jeanne  I'ouquict,  chantiu.se  légère. 

SnoLGi,  contralto. 

Veolia.m.  dugazon. 

Ijarhary,  deuxième  dugazon. 

WlLlKKT,  dnrgnt'. 

Perhat.  deuxième  chanteu.se. 

BALLET 

MM.  d'Alessandri,  maître  de  ballet. 

Daumas,  danseur  comique. 
M"'"    d'Alessaxdri,    première   danseuse. 

Bava,  deuxième  danseuse. 


J'ai  déjà  parlé  de  Warot,  de  J.  Boycr  et  de  Maupas.  Il  est  donc  inutile  que 
je  revienne  sur  ces  excellents  artistes,  qui  furent  revus  avec  grand  plaisir. 
Cette  troupe  contenait  une  collection  de  jolies  femmes  et  de  chanteuses  de 
talent.  M"'"  Vaillant-Couturier,  dans  tout  l'éclat  de  sa  jeunesse  et  de  sa 
radieuse  beauté  blonde,  ne  tarda  pas  à  se  créer  de  nombreux  admirateurs. 
Douée  d'une  très  jolie  voix  d'une  pureté  ravissante  et  d'un  beau  talent  de 
cantatriee,ellen'avait  pas  encore,comme  comédienne, l'expérience  qu'elledevait 
acquérir  plus  tard.-  Moins  poétiquement  jolie  que  M"*  Vaillant,  M^i^  Fou- 
((uet  n'en  était  pas  moins  charmante.  Cette  cantatrice,  d'un  tempérament 
très  artistique,  possédait  un  organe  fort  beau  et  fort  étendu  qui  lui 
permettait  d'aborder  avec  bonheur  des  rôles  très  différents  comme  emplois. 
C'est  ainsi  que  nous  eiîmes  le  plaisir  de  l'entendre  tour  à  tour  chanter,  dans 
les  Haguenota,  Marguerite,  le  page  et  Valentine.  M"»  Chevrier,  une  falcon 
de  premier  ordre  sous  le  rapport  de  la  voix  et  du  jeu,  complétait  le  trio 
qu'un  vieil  abonné  galantin  avait  surnommé  les  Trois  Grâces.  Malheureuse- 
ment, nous  ne  pi'ofitâmes  pas  longtemps  de  la  présence  de  M'ï«  Chevrier. 
Dans  le  courant  de  décembre,  cette  excellente  artiste  tomba  jualade  et  fut 
obligée  de  quitter  Nantes,  suivie  des  regrets  de  tous.  Différentes  falcons, 
M"'^»  pitteri,  Leslino,  Panchioni,  tinrent,  pendant  quelques  soirées,  l'emploi 
dans  le  courant  de  la  saison,  mais  la  falcon  réelle  fut  Jeanne  Fouquet. 

Le  ténor  Séran,  qui  avait  jadis  chanté  à  Graslin  pendant  un  niuis. 
en  1874,  revint  en  possession  complète  d'un  superbe  talent.  Sa  voix  était 
fort  belle  et  fort  agréable  ;  malheureusement,  l'homme  était  laid  et  san.s 
distinction.  Pourtant,  à  force  de  talent,  il  arrivait  à  faire  oublier  son 
physique  désavantageux .  Félix  Couturier ,  baryton  de  style  , 
comédien  plein  de  feu,  Guillabert,  bonne  basse  à  la  voix  pleine  et 
vibrante,  Richard,  charmant  second  ténor,  méritent  aussi  des  mentions 


MIREILLE  —  M™®  VAILLANT  —  SÉRAN  —  JEANNE  FOUQUET  215 

spéciales.  Tous  1rs  autres  artistes  tenaiont  leur  caiplui  hHim-  nriMi  ms  [n  is 
convenables.  M""  Vegliani,  la  diigazon,  fit  une  fugue  avant  môme  d'avoir 
débuté  et  fut  remplacée  par  M™*  Cavé-Rivenez. 

La  saison  s'ouvrit  par  la  prerai^re  représentition  de  Mireille  (29  sep- 
tembre iHSO).  Une  indisposition  de  Warot  ayant  empêche  de  donner  la 
Juive,  M.  Gravièro  no  craignit  pas  de  rompre  avec  la  tradition  et  il  eut 
raille  fois  raison.  Ce  charmant  opéra-comique,  une  des  meilleures  œuvres 
de  Gounod,  remporta  un  vif  succès,  malgré  les  indignes  mutilations  qu'on 
lui  fit  subir,  comme  dans  tous  les  théâtres,  d'ailleurs.  Quand  donc  se 
décidera-ton  à  suivre,  à  Nantes,  l'exemple  donné  par  M.  Carré,  à  l'Opéra- 
Comique  et  à  donner,  enfin,  Mireille  dans  sa  forme  primitive?  L'interpré- 
tation de  Mireille  était  admirable.  M""'  Vaillant  était  la  plus  ravissante 
Arlésienne  qu'on  pût  imaginer.  Séran,  Justin  Boyer,  Ytrae.  Maupas. 
M'''^"  Marie  Lyonnel  et  Barbary  se  firent  justement  applaudir. 

I^a  seconde  nouveauté  fut  Jean  de  Nivelle  (27  novembre  18S0),  un  opéra- 
cotnique  bien  oublié  aujourd'hui  —  et  justement  —  de  NL  Léo  Delibes. 
C'était  la  première  représentation  de  la  version  avec  récitatifs.  Plusieurs 
Parisiens,  entre  autres  NLM.  .\.Gouzien,  Paladilhe,Heugel,  avaient  fait  exprès 
le  voyage  de  Nantes.  Léo  Delibes  fut  traîné  sur  la  scène,  oiî  il  re<;ut  do 
nombreu.ses  palmes  et  couronnes.  L'interprétation,  confiée  à  M™*^*  Vaillant, 
Sbolgi,  Cave  Ilivenez,  MM.  Séran,  Couturi»^r,  Boyer,  Maupas,  étiiit  fort 
bonne.  Cet  opéra  eut  un  certain  succès  de  première  qui  ne  se  maintint  pas 
dans  la  suite. 

^{me  Vaillant  remporta  un  nouveau  trioniplie  dans  Philémon  e/  limn-is, 
joué  pour  la  première  fois  le  18  décembre  1SS<).  Les  autres  rôles  étiiient  très 
bien  tenus  par  Séran,  Boyer  et  Maupas. 

I^olifencic  fut  donné  à  la  Renaissance,  le  28  avril  l!S81,  au  bénéfiee  de 
Warot.  L'éminent  ténor  ét;iit  superbe  dans  le  rôle  du  mari  de  l^auline. 
L'interprétation  des  autres  rôles  était  confiée  à  Séran,  Couturier,  GuillaU-rt, 
Boyer,  à  M"»"^"  Fouquet  et  Wilfert.  c'est  dire  qu'elle  était  excellente.  .Malgré 
cela,  l'opéra  de  Gounod  ne  fut  pas  compris.  Les  beautés  sévères  de  cette 
œuvre  inégale,  mais  très  intéressante,  ne  plurent  pas  aux  NanLiis. 

Plusieurs  opérettes  nouvelles  furent  jouées  aussi  cette  année  là. 
M™"  Vaillant-Couturier,  qui  consentit  à  se  charger  de  rôles  en  dehors  île 
son  emploi,  fit  beaucoup  pour  leur  succès.  La  Fille  du  Tambour  M  ajnr  q\\{ 
de  nombreuses  représentations.  On  joua  aussi  Pomme  d  Afti,  la  Mare  des 
Compagnons  et  les  Mousquetaires  au  Couvent.  Cette  dernière  pièce,  jouée 
à  l'époque  de  l'expulsion  des  capucins,  d(»nna  lieu  à  de  légi'res  manifes- 
tations et  fut  retirée  de  l'affiche. 

Aida  fut  reprise  avec  succès.  Warot  et  Jeanne  Fouquet   s'y  montrèrent 
excellents.  Carmen  reparut,  elle  aussi,  sur  l'affiche  et  remporta  cette  fois  un 


216  LE  THAaTRE    a   NANTES 


triomphe  complot.  Le  chef-d'œuvre  de  Bizet  n'a  pas  quitté,  depuis  lors,  le 
répertoire.  M""  Fouquet  était  une  merveilleuse  Carmen.  Elle  jouait  et 
chantait  ce  rôle  d'une  captivante  façon.  Séran,  Boyer,  Richard.  M""* Vaillant 
tenaient  les  autres  rôles  et  complétaient  un  parfait  ensemble  dont  on  se  sou- 
viendra longtemps. 

On  dut  jouer  la  Nuit  de  Saint-Germain,  de  notre  compatriote  M.  Ser- 
pette, mais  ce  dernier  ayant  donné  au  Théâtre  de  la  Renaissance,  à  Paris. 
l'autorisation  de  monter,  avant  Nantes,  cotte  œuvre  qui  n'avait  encore  été 
jouéo  qu'en  Belfjique,  Gravière  la  retira  du  taleau  des  répétitions. 

Tournées  :  Phèdre  (Agar),  les  Plaideurs,  les  Grands  Enfants,  le 
Homard,  Jean  Daudrtj,  Lucrèfo  Borgia  (Agar),  Dirorçonn  (Mario  Kolb), 
Oscar  ou  le  Mari  qui  trompe  sa  Femme,  le  Klephte,  la  Jioussotte  (Dupuisi. 
'c  Monde  où  l'on  s'ennuie  (M™«  Devoyod),  Nana,  Julie  (M™*'  Favart). 

La  direction  Gravière  marque  l'apogée  du   Grand-Théâtre  de  Nantes. 


*  • 


La  subvention  fut  maintenue  à  120.OX)  francs,  mais  le  cirque  fut 
rétabli.  M.  Olive  Lafon  fut  appelé  à  recueillir  la  lourde  succession  do 
M.  Gravière. 

Lo  nouveau  plafond  de  Hertaux  fut   ])lacé  pour  roiut'itun-  de  la  raïu- 

pagne.  Disons  quelques  mots  de  cette  œuvre  très  remarquable  et  qui  fait  le 

plus  grand  honneur  à  notre  concitoyen.  Un  grand  nombre  de  groupées,  de 

personnages  allégoriques  animent  cette  vaste  composition.  Je  vais  signaler 

les   principaux.    L'un   de  ceux   qui  attirent  le  plus  vivement  l'attention 

représente  la  scène  des  Furies  dans  la  tragédie  des  Coephores,  d'Eschyle. 

Los  cadavres  de  Clytemnestre  et  d'Egisthe  gisent  à   terre;  les  terribles 

sœurs  sont  con«;ues  dans  un  mouvement  superbe  ;  au-dessus,  Melpomèno, 

le  glaive   en   main,   considère  avec  calme   cette  scène  d'épouvante.    O 

fragment  est  de  tout  premier  ordre.  Le  groupe  de  Vénus  et  de  l'Amour  est 

aussi  fort  réussi.  L'épisode  des  deux  petits  enfants  (|ui  se  sont  omparéa  du 

miroir  do   la  déesse  est  charmant.    Signalons   encore  un  autre  groupa  : 

L'Harmonie  et  la  Mélodie  se  tiennent  par  lamain,  Vlnspiration  personnifiée 

par  un  (Mifant  ailé  touche  du  doigt  lo  front  do  cette  dernière.  Différents 

autres  personnages  ornent  encore  le  plafond  :  Thalie,  Eutorpe,   Polymnie. 

les  Trois  Grâces,  Bacohus,    Momus,   le  dieu   do  la  Gaieté.    Ce   dernier 

personnage  est  placé  devant  la  scène.  Un  pan  de  sa  draperie  rouge  e^t  on 

tôle  et  se  rabat  en  dehors  du  cadre  du  plafond.  C'est  là  la  partie  faible  do 

l'dîuvre  de  Bertaux.  Ce  trompo-l'œil  banal  n'est  guère  artistique.  Mais  ce 

!éi:or  défaut  est  compensé   par  do   nombreuses  qualités.    Le  coloris  est 

splcndide,  les  personnages  bien  posés,  la  composition  d'un  très  grand  effet. 

Lo  Théâtre  Graslin  pouf,  â  bon  droit,  être  fier  de  son  plafond. 


BERARDI  —  PELLIN  —  LE  ROI  DE  LAHORR 


217 


SAISON     1881-1882 

O.    tuAJ'ON',    I>lrect«ur 
BnziAU.  chof  d'orchf 8tr<».  —  RROfK.  régiss-ur. 


MM.  Richard,  fort  Mnor. 
Val.  ténor  en  doiilili-. 
li.  Pk.lun,  li'ijur  l>'ger. 
Voisin,  deuxif'-nn'  ténor  Iûk'^i 
Gyox.  Iroisiinip  ti'nor. 
UïTo.  barytrjii  tl«  (;ntn<J  op.ra 
XcuY.  b.iryloii  'loix.nv  comuiu--. 
BnuN.  baryton  d'opéra  comiquo. 
DrNovf.,  ba««fi  nobi?. 
DonAT.  ba«t.sc  rliantant<^. 
RBtîiK.  ba.490  boulTt'. 
Savkrna,  Irial. 
(îRÉociRB,  laruelto. 


>f*»   Placbat,  faleon. 

iii  . 

B.  s- 

.Iii  1  on 

Uakum,  dui^Muit. 

N'ii\it.i.r.-<.  ilui.'gi'r, 

BALLKT 

MNf.  TstoPHiLC.  mailT*;. 
M-"   V>  i 

Al  ; 
s<'uao. 


l.-tjèrc. 


d.in  • 


Cette  troupe,  arrivant  ap^»^s  celle  do  Gravière,  parut  d'une  médiocrité  ;ï 
j)oino  honorablo.  Exceptons,  toutefois,  le  ténor  Pellin.  musicien  consomma, 
clianteur  et  comédien  dr  talent,  Denové,  lieine.  M*"  Guérin  et  Justin  Née. 

Les  chutes  furent  nombreuses  :  Utto,  Richard,  Durât,  M""  Flach.it  ot 
Legénisel  furent  rem plac«'w  par  FJérardi,  Eyraud.  Comte,  M""''  Delprato  et 
Tht'oine.  Ces  quatre  derniers  artistes  étaient  d'une  moyenne  p.assahle. 
Hcrardi  fut  accueilli  avec  enthousiasme.  Sa  voix  pui-s;int.'.  s.i  Ih'II.^ 
diction,  lui  assura  immédiatement  les  faveurs  du  publie. 

Un  scandale  signala  les  débuts  du  ténor  V^al.  Un  spectiiteur  ayant  ^itjlé 
M""^  Flachat  dans  la  Juive,  Val  alla  trouver  ce  spectalour  au  café  du  S|)ort 
pt  \o  frappa  brutJilemont  en  s'écriant  :  «  Si  nous  nous  entendions  |X)ur 
administrer  de  semblables  corrections  4  ceux  qui  nous  sifllcnt,  nous  les 
mettrions  bien  vit«j  à  la  raison.  »  Traduit  en  polica  oorreetionnoUe,  le  sieur 
Val  fut  condamné,  à  10()  francs  d'amende.  Le  surlendemain,  il  chantait  le 
Trouvère  pour  son  3«  début.  Pésj  son  entré*'  en  scèn»»,  co  ténor,  plus  habile 
à  donner  des  coups  de  poing  qu'à  tenir  son  emploi,  fut  aeoueilli  par  des 
bordées  de  sifflets.  Val  s'avança  .ilors  vers  un  abonné,  M.  Peyrautl,  qui  se 
tenait  dans  l'avant-sccue  de  j;;iuche  et  lui  dit  :  «  Vous  ét«'s  un  lâche  et  je 
vous  provoque  |)Our  demain.  »  Val  .<ie  retira  sous  les  hu^s  du  public  ;  on 
baissa  le  rideau  et  M.  PclIin  acheva  la  r»»présen talion  au  couteutement  de 
tous.  Apr^s  un  soandale  pareil,  tout  3»  début  était  inulilo  et  la  mnirio  signifia 
immédiatement  au  directeur  le  renvoi  du  sieur  Val. 

Le  lioi  de  Liihore  (12  çtvfil  1882)  fui  la  seule  grande  nouveauté  de  cette 
eampagne.   M.  Ma>senet  vint  diriger  la  représentatioq  et  fut  aimablemen 
accueilli.   .Vprùs  la  représentation   uiie  sérénade  lui   fut  doumV»  .^ous   le 
péristyle.  Bérardi  chaula  Scindia  i^vec  un   réel  talent.   Les  autres  rôles 


218 


LK   THÉÂTRE    A    NANTES 


étaient  assez  convenablement  tenus  par  Kyraud,  Comte,  Dénoyé,  M"«"  Del- 
prato  et  J.  Née.  Les' décors  et  la  mise  en  sc/^ne  étaient  très  réussis. 

La  Seroante  Maîtresse,  de  Pergolèsc,  fut  entendue  avec  curiosité.  On 
joua  encore  le  Jour  et  la  Nuit. 

Le  ténor  Jourdain,  qui,  plus  tard,  devait  «Icvcmr  professeur  <ie  ciiaut  ;iu 
Conservatoire  de  Nantes,  et  M™"  Derivis  vinrent  en  représentations.  Un 
soir,  M.  Lafon  qui,  jadis,  avait  été  baryton,  remplaça  dans  Charles  VI,  avec 
un  certain  succès,  Bérardi,  indisposé. 

Tournées  :  Léa,  la  Femme  à  papa,  Niniche  (Judic),  le  Prêtre,  les 
Rantzau,  le  Monde  où  Von  s'ennuie,  Divorçons,  Jean  Baudrij,  la 
J^apillonne,  M"'^  Caoerlet,  Marie  Tudor  (Agar),  les  Première»  armes  de 
Richelieu,  XiV/ (Judic),  Angelo. 

* 
*  * 

M.  Lafon  fut  renommé  directeur  avec  la  même  subvention,  seulement 
deux  nouvelles  clauses  avaient  été  introduites  dans  le  cahier  des  charges  : 
l'obligation  d'avoir  quelques  artistes  de  comédie  pour  pouvoir  jouer  des 
levers  de  rideau  et  celle  de  donner,  deux  fois  par  mois,  des  représentations 
populaires  à  moitié  prix. 


SAISON      1882-1883 

O.    liAFON",    Directeur 

Buzuu,  du  f  (l'orchestre.  —  J^iciNei.,  régisseur. 


AIM.  VEniiKKs,  fort  ténor. 
Madhas.  ténor  léger. 
StuaRT,  dcuxitMTie  ténor  légor. 
AuuEHT,  troisième  ténor. 
Br.RARDi,   liaryton  de  grand   opéra. 
Dki.pkch,  baryton  d'opéra  comiciué. 
Georges,  deuxième  baryton  d'opéra 

comique. 
(iuii.LAiîKRT.  basse  noble. 
O.  RoGKR,  basse  cliantante. 
Bkrry,    deuxième  basse  chantante. 
JoussEAUMK,  troisième  basse  clian- 
tante. 
Flavigny,  trial. 
Lionel,  laruette. 
(  )MEZT,  trial. 

M""    Alice  Raijanv,  première  chanteuse 
légère. 


Briard,  falcon. 
LiNSK,  contralto. 
DiOt'EssE,  chanteuse  légère. 
Flavioxy.  dugazon. 
Mau.i.et,  deuxième  dugazon. 
JuussE.  duègne. 

BALLET 

MM.  Cluzeau.  maître. 
M""    Lucie  JuLiANi,   première  danseuse. 
Louise  JuLiANi,  deuxième  danseuse. 

LEVERS  DE  RIDEAU 

MM.  DiouEsxE,  LiGXEi..  Flavioxy.  Mui- 

i.KH,  Bkrxy.  Gehvei.1.1. 
M"-    Delcroix,  JoessE.  Mau.lkt.  Henry- 
Stiaht,  .Muller. 


Cettt^  troupe,  sans  valoir  celles  de  Coulon  et  de  Gravière,  ofTrait  néanmoins 
un  bon  ensemble.  11  ii'y  eut  que  trois  chutes  :  celles  de  Cluzeau,  rem- 
placé par  Ruby,  de  Stuart,  auquel  succédèrent  Thivalin,  Cortolli  et  enfin 
Lejeune,  et  de  Delpech,  dont  le  rcmpla(.ant  fut  difiicile  à  trouver.  Bérardi 


ALICE  RABANY  —  MAURAS  —  HÉRODIADK  JlO 

jeune,  MerlicM-,   Arsaiulcaux  «'•(•houéi<rit  .successivement,  eiilin  (ierm:i  lut 
rceu. 

En  outre  de  Bérardi  et  de  (iuillabert,  déjà  connus,  cette  troupe  renfermait 
lieux  artistes  de  premier  ordre  :  M"*  Alice  Ral>aiiy  et  Mauras.  M""  Ilaban\ , 
(jue  des  revers  de  fortune  avaient  forcée  à  prendre  It*  Théâtre,  éUiit  fille  de 
notre  confrère  Alfred  Asseline  et  cousine  de  Victor  Hugo.  Elle  mettait  au 
>tîrviee  d'une  voix  magnifique,  au  timbre  un  peu  cuivré  mais  néanmoins 
fort  agréable,  un  tempérament  artistique  de  pn-mier  ordre.  On  se  rap|>elle 
ses  triomphes  d^ns  Faust,  la  Traviata  et  liamlet.  Dans  le  rôle  de  Mar- 
guerite, elle  était  absolument  idéale  ;  au  trio  final,  elle  enthousiasmait  la 
salle  entit're  par  la  chaleureuse  façon  dont  elle  lan^jait  l'invocation  sulilime  : 
\nf/rs  pur»,  anges  radieux.  Malgré  le  Im-I  avenir  qui  s'ouvrait  devant  elle, 
M"*  llabany  ne  tarda  pas  à  quitter  le  Thé^itre,  préférant  les  douceurs  de  la 
vie  de  famille  aux  triomphes  de  la  scène. 

Mauras  était  un  partenaire  digne  de  M""  Rabany.  Leurs  talents  se 
faisaient  valoir  mutuellement.  Ce  ténor,  l'un  des  meilleurs  de  ces  demif^res 
années,  possédait  un  organe  qu'altéraient  parf()i.s,  malheureusement,  quelques 
légers  accidents.  D'une  figure  expressive,  d'une  taille  élégante,  de  manières 
distinguées,  Mauras  était  en  outre  un  comédien  d'un  rare  t;àlcnt.  En  quittant 
Nantes,  il  entra  à  l'Opéra-Comique,  où  il  reprit  Carmen.  Ce  fut  son 
triomphe.  Il  était  absolument  remarquable  dans  le  rôle  de  don  José,  et  au 
dernier  acte,  il  atteignait  les  dernières  limites  du  tragique.  Engag<>  plus  tard 
:i  la  MiMinaie  di'  Bruxelle:},  il  y  remporta  de  vifs  succès  jusqu'en  18W.  La 
mort  implacable  est  venue  le  saisir  en  pleine  jeunesse.  Atteint  d'une  phtisie 
galopante,  le  malheureux  artiste  fut  emporté  en  quelques  semaines. 

Verhées,  joli  garçon,  lui  aussi,  et  ténor  de  griice  plutôt  que  de  force, 
Mme  Hriard,  falcon  fort  inexpérimentée  mais  douée  d'un  U'I  or^rane. 
M""  Duquesne,  enfin  Duquesne,  un  jeune  premier  d'un  réel  t;ilent.  qui 
devait  créer  plus  lard,  au  Vaudeville,  le  rôle  de  rEmi^reur,  de  Madame 
Sans-dcne,  sont  les  autres  artistes  de  cette  troupe  dont  les  noms  valent  la 
peine  d'être  conservés. 

Cette  année-là,  on  introduisit  définitivement  une  har^je  à  l'orchestre  el 
on  supprima  le  piano  qui.  jusqu'alors,  l'avait  remplacée. 

Quoiqu'il  n'y  ait  eu  que  trois  chutes,  les  débuts  traînèrent  on  longueur  et 
l<»s  artistes  refusés  ne  furent  remplacés  (lu'en  janvier.  M.  Lafon  rneourut, 
])i>ur  ce  fait,  dilTérenles  amiudes.  Eu  ce  temps.  I.i  Mairie  ne  badinait  jos 
avec  le  Directeur  et  avec  raison. 

Le  grand  événement  de  cette  saison  fut  la  prenuèro  reprt'scntition 
(V/Ièrodiade  ('£J  mars  188.'i).  Nantt^s  était  la  première  ville  en  t  rance  à 
monter  cette  œuvre  qui  contient  quelques  belles  pages,  perdues  dans  un 
fatras  de  choses  banales  et  sans  aucun  intérêt.  M.  Massonet  vint  diriger  les 


220  LE   THÉATKE   A    NANTES 


répétitions  et  la  première.  Le  tableau  de  la  chambre  de  Phanael,  ajouté 
après  les  représentations  de  Jiruxelles,  vit  le  jour  à  Nantes.  Iferodiade 
suscita  la  plus  vive  curiosité.  Huit  jours  avant  la  première,  la  salle  était 
déjà  louée.  Le  jour  de  la  représentation,  les  billets  se  vendaient  20  francs 
sur  la  place  Graslin.  L'empressement  était  tel  <iue  l'on  vit  nombre  de  dames, 
appartenant  à  la  haute  société  de  Xantes,  consentir  à  prendre  place  aux 
secondes  pour  ne  pas  manquer  cette  solennité  musicale.  M.  Massenet  fut 
acclamé  après  chaque  acte  et  couvert  de  palmes  et  de  couronnes.  Après  la 
représentation,  une  sérénade  fut  donnée  au  corajjositeur  sous  le  grand 
vestibule.  Le  morceau  choisi  était  le  chœur  des  Romains,  un  des  plus 
mauvais  passages  de  tout  l'ouvrage. 

Hérodiade  eut  un  vif  succès  ;  pendant  douze  représentations,  cet  opéra 
fit  de  très  belles  salles.  A  cette  époque,  où  le  goût  du  public  n'était  pas 
encore  épuré  par  l'audition  des  ciiefs-d'œuvre  de  Wagner  et  des  belle>< 
partitions  de  Saint-Saëns,  de  Bruneau,  de  Chari)cntier,  d'Erlanger, 
d'Humperdinck,  cette  œuvre  bruyante  et  trop  souvent  creuse,  mais  plus 
brillamment  orchestrée  que  celles  qui  formaient,  alors,  le  fond  du  répertoire 
courant,  pouvait  taire  sur  les  spectateurs  une  certaine  illusion. 

L'interprétation  à^Hérodiade  était  excellente.  Verhées  interpréta  le  rùlo 
de  Jean  d'une  façon  très  poétique  ;  Bérardi  chanta  Hérode  avec  son  superbe- 
organe.  M">"  Briard,  qui,  primitivement,  avait  fait  concevoir  quelques 
craintes,  bien  stylée  par  Massenet,  se  surpassa.  Guillabert  (Phanuel), 
M™"  Linse  (Hérodiade),  Flavigny  (la  Sulamite).  complétaient  une  inter- 
prétation véritablement  excellente.  Les  décors  de  Rubé  et  de  Chaperon 
étaient  superbes  et  produisirent  un  grand  effet.  ^L  Lafon  les  abandonna  à 
la  Ville  contre  la  remise  des  amendes  qu'il  avait  encourues  pendant  la 
saison. 

Un  vaudeville,  fort  gai,  de  notre  concitoyen  M.  A.  Hackniann  :  la  Fille 
aux  ttoh  Papas,  fut  fort  bien  accueilli. 

Galli-Marié,  Iq  ténor  Duchesne  et  les  chanteurs  Béarnais,  vinrent  en 
représentations. 

Tournées  :  115,  rnic  Piyalle,  Tète  de  Linotte,  le  Roi  s'amuse,  le  Crime 
du  Pecq,  les  Maris  inquiets,  Formosa,  Ne  dicorçons  pas,  le  Neceu  de 
Saturnin,  le  Père  de  Martial,  les  Effrontés,  le  Fils  de  Giboijer,  les  Mères 
ennemies  {\'^ar).  Un  Roman  parisien. 

Pendant  le  mois  de  mai,  une  troupe  parisienne  vint  jouer  Michel 
Strogoff.  Duquesne  tint  le  rôle  du  courrier  du  czar  avec  son  talent  habituel. 
L'œuvre  de  notre  éminent  compatriote  Jules  Verne  remporta  un  grand  succès 
bien  (jue  les  décors  fussent,  pour  la  plupart,  assez  défraîchis. 

Malgré  quelques  défauts,  parmi  lesquels  il  faut  citer  une  parcimonie 
extrême  et  une  insouciance  complète  de  la  mise  en  scène,  qui  allait  jusi}u'à 


M""    LArOMDE-DIÎPUKZ 


221 


jouer  duns  un  «Iccor  I-ouis  XV  lo  dernier  acu*  de   CitarlcM    W,  M.   i 

a*(in  rustcni  pas  moins  un  dus  btfns  din^ctcurs  qui  aici:t  ])us!»t>  à  Nunic^.  Lu 
Muirio  coniuiit  uno  grande  (auto  en  ne  faisant  pas  gou  possible  pour  le 
f'onscrver  :  «'lie  dovail  s'en  repentir. 


Le  nouveau  directeur  no  fut  nomni»-  que  tard,  «c  qui  est  toujours  une 
j,'ra\o  faute.  Il  avait  <Hi5  d'abord  (juesiion  de  M.  Sellier,  frère  du  ténor  de 
l'Opéra,  avec  Bérardi  comme  commanditaire  ;  mais,  au  dernier  moment. 
l'aiïaire  ne  s'était  pas  conclue.  Ce  fut  M.  Gaultier  de  Lonclc  qui  d6cro<-ha 
1.1  timbale.  Sa  direction  fut  terne  et  insignifiante  au  point  de  vue  artistique. 

SAISON     1883-1884 

E.    OAULTIER    DE    LONCLE,    Directeur 

UuzjAW.  olicf  il  orr.licslrc".  —  Mohkiu»,  ic'iiissoiir. 


nl'KIiA 

MM.   (iuii.i.AiiKUT,  fort  U:nor. 
Vasjjout.  ti'-nor  k'ger. 
DKii*uiii>4.  dpuxirino  lonor  logpi'. 
PiC(>etM.AN.  tniiHiônic  t«'nor. 
DoYKN.  baryton  de  Ki-and  op«^ra. 
l'BoNTv,   Ituryton  (l'ojurH  C(iniiiiii< 
Cahi'ai  X,  bîisso  noblo. 
Vkuxolii.i.kt.  basse  rhantant 
F)oxvAi-.  dciixièm»»  bas.s^-. 
ItAiTKH.  triul. 
Tony.  Uruott(>. 
Wii.iii.M.  IroisiriMi'  l>;issi'. 


M""  l.Ai:u:«iiF.-l)t'iM(Kt.    |ir<  iiii>  Il 
leune  bî^j'-re. 
Alks.  falcoii. 
HoMY.  corilrnlto. 
WlLIlKM.  cli.i;/ 
GAriTiKi?  m:  1 
Gaykt.  <lu^^llo. 
Vai-pv.  <luv'itKun. 

ualm:i 

MM.    liociiiER,  inaili-f-. 

Houiitit,  dunspur  cominue. 
>!"♦*    Maooy,  ju-»'!!!  ne. 

Kl.lM  11.    diMlX  •  ll.-i 


Les  (Icliiit^  ftin'iit  (li'sasir»Mi\.  (^iii.un*  t<>it  i.-nttrs  :  MM  tiuiii;ii>i'i  t, 
Pollen,  licrtbier,  Moreiui,  tous  plus  insulHsants  les  uns  que  les  antres, 
échouèrent  successivement.  Enfin,  le  vieux  Dulaurens.  l'ancien  ténor  de 
r<  )péra.  tout  fatigué  qu'il  était,  fut  admis.  On  lui  adjoignit  M.  Coltet.  Le 
ténor  léger  Vassort  fut  n'mplaeé  par  Villaret,  qui  n'avait,  avec  son  p<>re. 
(pie  le  nom  de  commun.  Il  échoua,  lui  aussi,  et  fut  remplacé  | Kir  M  Marris, 
qui,  en  eompariison  de  ses  prédécesseurs,  parut  supportibb*.  M.  Doyen  lit 
place  à  M.  Nfayan.  qui  dut  se  retirer.  Son  successeur  llor»  b  ne  fut  pas  plu> 
iieureiix.  Le  baryton  délinitif  fut  .M.  Roinieu.  Crépaux.  Vernouillct, 
Ni"-*  Maggi  tomlHNrenl  eux  aus.si  ;  leurs  remplaçauts  furent  Ëcîiutlo,  Vtlle- 
franck,  une  ba.sse  de  réel  talent,  et  M""  Lavignc.  I..e  laruette  Tony  et  le  trial 
Raiter,  «leux  artistes  do  vabnir  et  d'un  comique  achevé,  égayèrent  ." 
triste  saison  iwir  leur  vi«rve  endiablée. 

Du  cAtLî  des   femmes,  il  n'y  eut  pas  di»  chutes.  M"""  Lacouibe-Dupriu. 
toujours  eu  possession  de  son  Iteau  talent,   mais  comèdieune  toujoun»  au&»i 


38 


222  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 

glaciale,  liial;;p'  son  pas^^agi'  .1  1  »  »jifi.t  Cumiiiur  rt  a  i  '  »jii-i,i,  im  r'*\  in*  a\fi" 
plaisir.  M""'  Gaulli«M'  de  Loîwle,  comédifiiiie  fine  et  inlelligeiiU',  possédait 
une  assez  jolie  voix  de  dugazon,  qui  finit  par  se  fatiguer  à  force  de  clianler' 
l'opérette,  enfin  M""  Wilheiu,  qui  débiitiiit,  fit  apprécier  une  facilité  de 
vocaliste  de  premier  ordre.  En  faveur  de  sa  virtuosii«V  on  lui  ii.inli>iiri.i  son 
inexpérience  complète  de  la  scène  et  du  jeu. 

La  période  des  débuts  fut  des  plus  mouvementée.  Dans  le  public,  on 
accusait  la  Commission  de  se  montrer  trop  sévère  alors  qu'elle  n'était  que 
juste,  et  de  suivre  trop  fidèlement  les  avis  de  M.  Giraud-Mangin,  adjoint 
délégué  aux  Beaux-Arts.  Le  mécontentement  d'une  certaine  partie  du 
public,  habilement  fomenté  par  quelques  meneurs,  trouva  bientôt  l'occasion 
de  so  manifester.  La  ténor  Moreau,  dont  les  colpi  di  f/ola  avaient  immé- 
diatemeiU  eonc^uis  l(!S  galeries  supérieures,  t'clioua  à  son  troisième  début. 
dans  liohert.  Naturellement,  on  accusa  encore  la  Commission  de  parti  pris. 
Aussitôt,  un  journal,  le  Sati/re.  organisa  une  manifestation  en  faveur  de 
l'artiste  refusé  et  contre  l'adjoint  aux  Beaux-Arts.  Le  surlendemain 
12  décembre,  on  joua  Guillaume  avec  ledit  ténor,  dont  le  «  Suirez-moi  » 
faisait  vibrer  les  cristaux  du  lustre. 

Dès  son  apparition,  des  bravos  eniliousia>ies  partirent  des  seconde,  troi- 
sième et  quatrième  galeries,  bourrées  d'entrées  gratuites,  car  M.  Gaultier 
était  de  connivence  avec  les  partisans  de  ^L  Moreau  qu'il  payait  bon  marché. 
Des  silllets  répondirent  des  fauteuils  et  de  l'orchestre,  mais  ils  étaient  im 
puissants  à  lutter  contre  les  acclamations.  Ce  fut  bientôt  un  tapage  épouvan- 
table qui  dura  tout  le  temps  de  la  représentation.  On  ne  faisait  silence  que 
lorsque  le  ténor  chantait.  Les  cris  :  A  bas  la  Commission  !!!  —  A  bas 
Giraud-Mangin  !!!  —  k  mort  !  A  la  lanterne  !!!  —  Régisseur  !  "  .^e 
croisaient  de  toutes  paris  Plusieurs  fois,  on  dut  baisser  le  rideau.  Le 
régisseur  parut.  On  lui  réclama  l'admission  de  Moreau.  11  répondit  que 
cela  dépendait  du  Maire,  qu'on  lui  transmettrait  dès  le  lendemain  cette 
demande.  (.  Non.  tout  de  suite  !  Qu'il  vienne  !î!  »  «  —  Mais  M.  le 
Maire  est  au  Conseil  municipal  !»  —  «  Qu'il  vienne.  Nous  l'avons 
nommé,  il  peut  bien  se  déranger  pour  nt»us  !  »  Et  le  bruit  de  recommencer 
de  ])lus  belle.  Le  troisième  acte  se  joua  sans  qu'on  put  entendre  une  seul»' 
note.  Les  artistes  finirent  par  prendre  le  parti  de  mimer  leurs  rôles.  La 
représentation  s'acheva  sans  que  le  calme  revînt. 

Le  public  quitta  la  salle  et  alors  la  manifestation  dégénéra  en  une  véritable 
émeute.  Trois  cents  personnes  environ  s'élancèrent  en  hurlant  dans  la  rue 
l'"ranklin,  traversèrent  le  boulevard  Delorme  et  gagnèrent  ainsi  la  rue 
Mondésir,  où  demeurait,  alors,  ^L  Giraud-Mangin.  Là,  ils  brisèrent,  à 
coups  de  pierre,  les  vitres  de  son  hôtel.  Un  des  projectiles  lancés  par  les 
assaillants  faillit  même  blesser  un  des  jeunes  enfants  de  M.  (,iraud.  Après 


LES    CONTKS   d'iIOFFMANN    —    LAKMK  2'2'.\ 

cetUî  alfa<iue  sans  nom,  et  devant  la  |)olice  qui   arrivait,  les  groujx's   h» 
disperseront. 

Le  lendemain  un  arn'lt^  du  maire  défendit  â  Moreau  de  reparaître  sur  la 
-';ène.  Quant  à  M.  Giraud-Mangin.  il  donna  sa  démission  d'adjoint,  ce  en 
quoi  il  eut  tort,  car  il  n'avait  fait  «juc  remplir  son  devoir. 

Les  Contes  (rilojj'mann,  d'OlfenUich,  furent  jours  le  12  janvier  1«8-1  et 
accueillis  froidement,  malgn*  une  assez  bonne  interprcUUion.  M""  I^eombc- 
Huprez  se  montra  parfaite  dans  le  double  rôle  d'OI>mpia  et  d'Antonia.  Les 
principaux  autres  rôles  étaient  tenus  par  Villefranck,  Marris  et  M™" 
(iaulticr. 

iMhmii  (11   mars  188-1)  remporta  un  succès  plus  durable.  Cet  agràible 
opéiR  était  bien  interprété   par  M"'  Williem,  qui  trou\a  dans  le  |K'r>onnage 
de  la  jeime  bindoue  son  meilleur  rôle  et  par  Marris,  Villefranck,  excellent 
dans  NilakanUi,  Fronty  et  M""*»  AUVs,  Gayet,  Vald>  . 

Le  Tribut  df  Zamuva  (23  avril),  joué  par  Cotlet.  Romieu.  E(  lietto, 
l'ronty,  M'""*  Lacomlte-Duprez,  Aies  et  Valdy,  entniya  profondément  le 
p  ubiie.  Aussi  <|Uell»'  ''i''  '■  'ro<|ue  que  de  jnonf'T  '■•»•<•  ■envi.'  vénil..  .!.•  r  .u" 
teur  de  Faust  !  ! 

M.  Gaultier  ne  [X)rtait  au  grand  opéra  qu'un  intérêt  médiocre.  Il  réservait 
toutes  ses  faveurs  à  ro|M'relle.  11  fit  venir  NL  et  M""'  Simon-Girard  qui, 
|)en»lant  plusieurs  semaines,  firent  des  salles  combles  avec  la  J'rincesne  ries 
Canaries,  la  Fille  du  Tambour- Major  et  la  Fille  de  Madame  Anyot.  Les 
autres  ojx'-rettes  nouvelles  furent  :  Roccace,  le  Ceeur  et  la  Main.  Fanfre- 
luche, François  les  lias  f iléus. 

M.  Gaultier  était  d'im  caractèie  tracassier.  Il  adorait  les  procès.  Le  ténor 
Marris,  eu  ditîérend  avec  lui,  le  fit  mettre  en  faillite  le  21  a^ril.  Le  directeur 
fit  immédiatement  opposition  à  ce  jugement.  Le  21.  sur  le  vu  des  livres  de 
M.  Gaultier,  le  tribunal  rapporti  <ette  faillite,  qui  avait  été,  vraiment,  pro- 
noncée trop  à  la  légère. 

Tournié,  Guillemot.  Lassalle,  Wniot,  Bouvet,  M"»""  MontbazonelCaylus 
vinrent  vi\  représentation. 

Tournées:  L'Ftran</ère  (};\\w  .Méa),  Senje  Panine.  la  l\'ini„e  à  J*ajHt. 
le  liel  Armand,  (Fdipe  et  les  Femmes  suçantes  (Agar),  Huy  lilas,  le  Maî- 
tre de  Forges,  Secero  Torelli  (Jane  Méa),  Jiritannicua,  Tartufe,   le  Lèga 
faire  universel  (Agar).  le  Députe  de  liombignac  (Coquolin  et  Céline  Mon- 
Uilant). 

Pendant  les  mois  d'été,  on  joua  le  drmie.  Deux  nouveautés,  dues  a  l'un 
des  artistes  de  la  troupe,  M.  Cbampagne,  les  J*aeilions  noirs  et  Cam- 
^ron/ie,  n'eurent  aucun  succès.  Dans  ce  dernier  drame.  !.•  :    '  'ut 

sur  le  fameux  mot  «|u  Hugo  écrivit  en  toutes  lettres  dans  les  i.a 

troupe  de  l'Ambigu  :  Paul   Deshayes,   Lacressonnière,    Petit,  .M"-^»  Marie 


li'Jl  Lfc   TMéATRR   A    NAMTRS 

Kolb  et    Doshayos,   en    loto,    vint    donner  aussi   une  série  do  représon- 

tatioiis. 

•  « 

I'iit-(0  cette  niédiocro  campagne  qui  décida  d«''finitivement  l'Administra- 
tion à  réduire  la  subvention  ?  Je  ne  sais,  toujours  est  il  que  celle  résolution, 
désastreuse  i)our  notre  Tln'ïâtre,  fut  adoptée  par  le  Conseil,  le  25 mars  l88l 
Sur  le  rapport  de  M.  Martin,  lOO.W  )  tr.  de  subside  théâtral  étaient   -.-•!■- 
nient  inscrits  au  budget.  La  somme  était  ainsi  affectée: 

Orchestre .M  .(J0() 

Chœurs lil.iXjO 

Gaz 1().50D 

Machiniste l.nOl) 

100.0(K>  fr. 

L'orchestre  devenait  municipal.  L  's  ongai^ements  étaient  faits  par  la  Ville. 
Ce  système  olfrait  à  la  fois  des  avantages  et  des  inconvénients.  D'après  le 
nouveau  cahier  des  charges,  les  artistes  de  levers  de  rideau  étaient  supjjrimés, 
et  la  Ville  reprenait  au  l'^'r  mai  la  possession  <!<'  <'•<  Théàir.-  ■.n  II.  m  d<» 
les  laisser  au  directeur  jusqu'au  V)  juillet. 

Un  ii()u\eau  mode  de  débuts,  qui  devait  donner  les  plus  mauvais  résul- 
tats, fut  adopté.  Pour  flatter  la  popuhu'e.  ou  supprima  la  Commission  el  le 
vote  des  abonnés,  et  l'on  éuiblit  cette  chose  grotesque  :  le  suffrage  universel 
en  n.alière  artistique.  Tout  spectateur,  sauf  les  femmes,  recevait  en  entrant 
un  bulletin  portant  au  milieu  le  nom  de  l'artiste,  et  d'un  c<5té  :  oui;  de 
l'autro  :  riun.  Il  sullisait  de  déchirct  l'un  des  côtés.  L'artiste  était  toujours 
soumis  à  trois  débuts,  absolument  illusoires  d'ailleurs.  La  majorité  des 
électeurs  n'assisiaifut  pas  aux  trois  soirées  ct  ne  votaient  que  silr  utte  audi  - 
lion.  Aussi  arriva-ton  à  des  résultats  fantastiques.  ToltS  IcS  gens  soucicux  de 
la  dignité  duTliéàire  s'abstim-ent  bientôt  de  voter.  Que  pouvaient  faire  leurs 
(|uelques  Non,  eontie  l'avalanche  de  Oî»"  qil*assuralt  à  l'artiste  u:îe  .«jalle 
bourrée  d'entrées  de  faveur!  ! 

M.  Solié,  l'ancien  chef  d'orchestre,  l'ancien  administrateur  du  ThéAtre  au 
compte  do  la  Ville,  dematida  la  direction  et  l'obtint  sans  diflieultés  pour 
deux  ans.  11  avait  laissé  à  Nantes  les  meilleurs  souvenirs,  et  l'on  espérait  que 
sous  sa  direction  tout  irait  bien.  Mais  on  s'illusionnait.  En  peu  deteihps.  le 
nouveau  directeur  s'aliéna  les  sympathies  de  la  plus  grande  partie  du  publie, 
par  nu  caractère  diHlcile  (pion  ne  lui  connaissait  pi\n  îlutrelois,  —  Pfîel  de 
son  âge  sans  doute,  —  par  une  complète  insouciance  artistique,  enfin  par  Uiu- 
lésit)(M'ie  s:lns  exemple.  11  rognait  sur  tout.  Les  foyers  étaient  il  peine  éclai- 
rés, la  salle  à  peine  ehaufïée  au  milieu  de  l'hiver,  A  côté  de  M.  Solié, 
M.  Lafon  pouvait  ëtro  considéré  comni(>  un  prodigue. 


LAfit«    —    noI'X    —    MANON 


?r. 


SAISON     -1884-1885 

3QI..rF:,    Directeur 


MM.  lU:iiiifcii,  fort  Iniior. 
Maiitim.  It^ii..r  l''grtr. 
VhkAi..  Jeiixii'itift  lénor  If^ûr. 
I.AitiH,  barylui)  <Im  f(rHiiU  opéra. 
Khonty.   haryloii  iTiipera  coini(|m 
l)kn<)n.  Ims.'jr>  rioblr. 
^Iayas.  btt«im  chartlaïUe. 
VHkukttu:,  <ituxi<-iii<'  l»a.sNe. 
liAiioN,  triai. 
llKithKZ,  latùetl«». 


M—    Hauetti.  falc  i/. 

.Martisi,  cIm  Tp. 

KriMOAT,  char  '    .        „■  te. 
IJK  KuftuiNvtixe,  contralto. 

Pov.. ...  .i;.,,w..„ 

M  \  (lujtfizon. 

<  H.f,  ii'.ii,  dii'/'i' 

BAI-LKI 

M.  Roux,  malire. 
.M"*    Dku^s,  première  daiiRvu»«.-. 
Roi'X.  il<'uxtèin<-  dansfusc 


I.,!'  xTiiim,  Miliui'lu'iiii'iit,  III'  lut  m 'M  \  or.it  »it;  il  jh-i  sdiuic,  lii.ii>  ii  _n  fui  'p'u.v 

résiliations,  cell.',  de  M"  il»»  Fiviniin  illf  qui  fui  reiiiplacéo  par  M''  (iar»*lli 
ot  do  Debor  auijuel  Coste  succéda.  Co  dernier,  quelques  soniaines  après, 
devint  fou  suhiteiueul.  Ponsard  futap|M'léà  lui  succéder. 

L'enseujblo  de  la  troupe  éUil  assez  médiocre»  i>ourfcini  quelques  arti.ste.'^ 
valent  lu  peine  d'être  signalés.  Berger  avait  une  belle  voix  de  ténor,  au  tim- 
bre sympathique,  mais  il  mamiiiait  de  distinction.  Labis  ét;»it  un  e\cel- 
leut  artiste.  <|ui  niellait  un  fort  joli  or};ane  au  service  d'un  réel  talent  de 
olianieur.  M"  l'i.spigat  conquit  vite  les  sympathies  du  publie  (ur  s;i  jeu- 
nesse et  sa  tn.'s  jolie  voi\  d'une  éclatante  puretô.  Tout  comme  Berger,  elle 
devait  rester  deux  ans  à  Nantes,  où  elle  épousa  un  de  nos  vionciloyens,  dilet 
tante  bien  connu,  M.  René  Lebi»e,  l'un  des  architt^ctcs  de  la  Ville.  Quel- 
ques mois  apr«'s.  uneU'rrible  malailie  l'enlevait  à  l'ciirection  des  siens.  Euliu, 
citons  l'aimable  couple  Kou.v  (pie  nous  devions  g:irdcr  six  années  consé- 
eiiti\('s.  llabilu  maître  de  ballet,  dan-our  de  goût,  M.  Léopold  Roux,  pen- 
dant son  séjour  parmi  nou»,  accomplit  de  véritables  prodiges  avec  le  corps 
de  ballet  assez  restreint  <|ui  était  mis  à  sa  disposition.  M"'"  Roux  est  une 
des  ir.eilleurcs  danseuses  do  demi -caractère  qui  soient  venues  à  Nantes. 

Cotte  saison  fut  dos  plus  ternes.  Pourtant,  M.  Solié  daigna  nous  donner 
Manun.  M.  Massenet  vint  diriger  cet  o|>cra  comique  qui  compte  parmi  ses 
meilleures  productions,  m.llgré  bien  (ics  lorl{?tipurs  et  des  brutalités  d'orche>- 
tiaiion  ]\6t9  de  propos.  I.t»  musirion  he  fut  {çu^rp  oonti?nt  do  son  séjour  à 
Nantes.  Les  ré[)étitions  marctiaieut  mal.  Nt.  Solié  mettait  toute  la  m  luvaisi» 
volonté  possible  et  voulait  (aire  passer  l'œuvre  avant  qu'elle  no  fût  sue.  Ulie 
fois  môme,  ôni'fvôet  poussé  ù.  bout.  Nfassenet  jeta  >on  bAtod  do  chef  d'orehes- 
trc  cl  quitl;i  la  répétition. 

Kniin.    la  première  put  li-îu  ^11  mars  188.'»).    L'cKétnitiun  (ut  des  plus 


226 


I,i:   THKATRE   A    NANTES 


médiocre,  sauf  de  la  part  de  M""  Espigat,  de  Martini  qui  trouva  son  meil- 
leur rôle  CM  Des  Grioiix  et  de  Labis.  Plusieurs  fois  pendant  la  soirée,  M. 
Masscnot  donna  des  sij^nes  évidents  de  son  juste  mécontent«'nient.  Les  autres 
interprèles  de  cet  ouvrage  étaient  MM.  Mayan,  Fronty,  Baron, 
M™"  Po\ard  et  Massue. 

M.  Charles  Solié  fils,  qui  se  piquait  d'être  compositeur,  fit  jouer  deux 
de  ses  élucubralions  :  A  qui  la  Pomme,  opéra  comique  en  un  acte,  et  la 
Bamboula,  opéra-comique  en  trois  actes.  Ces  deux  œuvres,  d'une  insuffi- 
sance et  d'un  grotesque  achevé,  excitèrent  le  fou  rire  du  public.  Je  me 
demande  encore  comment  la  Ville  put  accepter,  pour  le  second  opéra  exigé 
par  le  cahier  des  charges,  une  insanité  musicale  comme  la  Bamboula. 

Une  reprise  de  Roland  à  Roncecaux,  opéra  où  Berger  était  à  son  avan- 
tage, eut  assez  de  succès.  M.  Solié  remit  aussi  à  la  scène  une  autre  vieillerie. 
Jérusalem.  Insuccès  complet.  On  reprit  encore  le  Roi  de  Laliore. 

Tournées  :  La  Cosaque,  la  Femme  à  Papa,  les  Champairol,  le  Maître 
de  Forges,  les  Pattes  de  MoucJie  (C.  Montahint),  Grinr/oire,  la  Flom- 
boijante,  les  Premières  armes  de  Riehelieu^  Indiana,  et  Charlemarjne 
(Jeanne  Granier  et  Marie  Kolb),  le  Bourgeois  gentilhomme,  le  Philosophe 
sans  le  savoir,  Denise,  la  Passant,  les  Fourchambault  {Ag^ar),  la  Docto- 
resse, 71/""  delà  Seiglière  (Coquelin),  Vue  Parisienne,  VAcare.  le  Malad>' 
imaginaire,  le  Légataire  unioersel,  Clara  Soleil. 


* 
*  * 


L'expérience  ayant  prouvé  que  l'orcliestre  coûtait  plus  cher  que  le  chiffre 
prévu,  M.  Nicollcau,  adjoint  délégué  aux  Beaux-A.rts,  parvint  à  faire 
augnienler  la  subvention  pour  la  campagne  18sr)-i88fi.  Une  somme  do 
118.042  francs  fut  inscrite  au  budget,  à  l'article  Théâtre.  Elle  ét^iit  ainsi 
répartie  : 

Orchestre G2.-ltX) 

Machiniste 1..500 

Espèces  payées  au  directeur  par  septièmes      54.712 

118.042 


SAISON      1885-18S6 
SOUCÉ,    Directeur 

C\\.  BiJZiAU.  clief  (t'orcliestn».  —  Lematte.  deuxième  chef  d'orchestre. 
Florentin,  régisseur. 


^IM.  Beroer,  fort  ténor. 
CoTTET,  ténor  iétîcr. 
Gi'ERNOY.  di'uxiènu'  ti'nor. 
Albert,  baryton. 
Laviu.e,  baryton  d'opéra  conii<iue. 


MM.   Rose,  basse  noble. 

l^i'HAT.  bas.se  chantante. 

I  .AUitKXT,  deuxième  basse  chantante. 

Mazard,  trial. 

Nicolle,  laruetle. 


LEMATTE 


—    «Il 


M'"-    SCHWEYEK 


LE  CHEVALIER   JEAN 


227 


Sgiiwkykk,  falcoii 

AcH,  contralto. 

Ehpioat.  rh;iril»'iis<'  {•i^rrr. 

JocâNNY.  (Ifiixièine  ch;inteuse  lég<Te. 

TfeviNi,  (lii(;nzon. 

Grantk,  dtuixionicdugazon. 

(illENET.  duè(^nt'. 


M.     Houx,  iiiallri'. 

M""  Parwiouni.  première  danseuse. 
Hoix,  .leuxiéme  danseuse. 


Les  chutes,  cette  année  là,  furent  un  |)eu  plus  nombreuses.  Pellin  vint 
remplacer  Cottet  cl,  p<;ndant  toute  la  saison,  fut  légitimement  applaudi.  .Sa 
voix  était  un  peu  fati^'uée,  mais  son  beau  talent  de  chanteur  ëtait  resté 
intact.  MM.  Palianli,  l'inévitable  et  médiocre  Fronty,  Servat,  M™""  Cande- 
lon  et  Pourret  succédèrent  à  MM.  Rose,  Laville,  Nieolle  et  à  M"*»  Jouannv 
et  tirante.  La  troupe  ainsi  reconstituée  était  à  peu  près  convenable  ;  mais 
M.  So^ié  savait  si  mal  la  présenter  et  si  peu  en  tirer  parti  que  l'ensemble  de 
la  saison  n'en  fut  pas  moins  médiocre.  La  seconde  basse.  Laurent,  artiste 
conseieneieux,  homme  charmant,  devait  roster  cinq  ans  att;i<hé  au  Théâtre, 
oii  il  sut  se  créer  de  nombreuses  sympathies.  Le  kiryton  Albert  avait  un 
organe  superbe,  mais  il  ignorait  l'art  du  chant.  M''"  Schweyer,  qui  épousa,  à 
la  fin  de  la  saison,  le  second  chef  d'orchestre,  M.  Lematte,  un  musicien  de 
Uilent,  était  bien  su[)érieure  à  M""  Baretti.  Cette  artiste,  fort  sympathique, 
avait  une  belle  voix  de  falcon,  dont  elle  se  servait  avec  habileté.  M""  Tévini 
était  une  assez  gentille  dugazon.. .  d'oi)érette.  M*"*  Appia.  une  contralto  sur 
le  retour,  vint  au  mois  de  mars  suppléer  M^'''  .\ch,  dont  la  nullité  dépa.ssait 
les  bornes.  Enfin.  M'""  Jeanne  Parmigiani,  première  danseuse,  qui  devait 
faire  pendant  plusieurs  saisons  partie  de  la  troupe,  parut,  pour  la  première 
fois  à  Nantes,  sous  la  deuxième  direction  Solié,  Cette  artiste  chorégra|)hique 
épousa,  quelques  années  plus  lard,  un  de  nos  concitoyens,  M.  K  Sabatier. 
Le  28  janvier  ISHti,  le  joli  o])éra  eojuique  de  Delibes,  le  Ifoi  l'a  Hit,  fut 
accueilli  asNCZ  froidement  et  ne  tarda  (as  à.iniit.-r  Tifi;,  h.,  fi  .1  ,jt  |Mjurt.int 
bien  interprété  par  Pellin  et  M""  Espig-at. 

IjG  (^heratler  Jean,  de  Victorin  Joncières,  dont  la  valeur  musicale  es* 
loin  de  celle  du  Jfui  l'a  dit.  eut  plus  de  succès.  La  première  eut  lieu  le 
1(»  février  1H8<),  sous  la  direction  du  compositeur.  Les  loU's  étaient  tenus 
par  MM.  Berger.  .Mhert,  hiirat.  M'"'*  Schweyer  et  Candelon. 

Eu  fait  d'oiK*rettes  nouvelles,  on  joua  Manivelle  Xitouc/n',  le>  l'ettts 
Mousquetaires,  le  Grand  Afogol. 

A  une  représentiition  de  Guillaume  Tell,  le  2  novembre,  il  y  eut  une 
grande  |.anique.  Lo  rideau  de  gaze  qui,  au  4"  acte,  imite  le,s  nuages,  .lyant 
frôlé  une  herse,  prit  feu.  V.u  un  instant,  tout  le  fon<l  du  Thé/ilr?  parut  en 
Uamines.  NL  Abraham,  chef  miehiniste,  put  heureusement  coujwr  les  fils  qui 
retenaient  le  rideau,  et  tout  se  borna  à  un  léger  dommage  matériel,  qui 
atlligea  profondément  l'économiq  ue  Solié.  Mais,  dans  le  public,  il  v  eut  un 


228  II.    riii.  M  im;   a   NANTES 

instant  d'émotion  terrible.  Ou  so  prôcipit;i  vers  les  issues.  Il  n'y  eut  pas 
d'accident  à  déplorer. 

L'ex»ellc;itc  busse  Boudoiiresquo  vint  donner  plusieurs  représeuUiions  et 
fut  accueilli  avec-  entiiousiasme. 

Tournées  :  Le  Demi-Monde,  Anloinette  Rigaud,  les  Jacobitex,  (ieor- 
gette,  le  Di^pit  amoureux,  Georrjeu  JJandin,  le  Médecin  malf/ré  lui, 
Marif/re,  Jonathan,  le  Sphinx  (Jeanne  Méa),  Une  Mission  dolicnte, 
le  Honh^ar  ronjiKjal,  la  Doctoresse,  le  Fiacre  117. 

Pendant  le  mois  de  mai,  la  troupe  des  Galeries  Saint  Hubert,  de 
liruxtiUes,  donna  des  représentations  d'opérettes. 

Deux  nouveaux  journaux  de  Théâtre  se  fondèrent  sous  la  seconde 
direction  Solié  :  \^  Gazette  Artistique,  organe  spécial  de  la  Société  des 
Concerts  Populaires,  et  la  Réforme  Artistique,  qui  prit,  plus  tard,  le  nom 
(\o.  Korrigan.  Ce  dernier  devait  mourir  drns  la  cinquième  année  de  son 
âge.  Pendant  la  saison  précédente,  une  autre  feuillt;  artistique,  Nante^Mo- 
derne,  n'a\ait  eu  ([ue  f|uel(|ues  numéros. 


VI 


DIRECTIONS    PARAVEY.    —     POITEVIN. 


188(J18iXj 

DetiUiers.  —  Sttjol.  —  Poitevin.  —  Jiiufunv.  —  Marthe  Duvieier.—  \fm»  Jouanne- 

I  achat.  —  M—  liotilnnii.  —  M—  Violetti.  —  Le  Ci<l.  ~  Les  Pi-cli.>uri»  de  INtIoî». 

Mi-phistophr-los.    —     Marguerite     VaiUantCouturier.   —    .U'i»    Sere>tr. 

(iounod  à  Santés. —  Centenaire  de  Graslin.       Ilumlet,  d'IIignard. 

Delroye.  —   liucognani.  —   M"'  Ismat-lGarctn.  —  Sigurd. 

Le  Roi   d'Ys.    —    Léon  du   liait.    —    Abraham  Lécy 

Lestellier.  —  Claccne.  —  JVf"*  lytville-Ferminet. 


A  direction  souriait  epcort-  ;t  M.  Solié.  Il  avait  beau  crier 
partout  (|u'il  j)erdait  de  l'argent,  on  savait  à  quoi  aVn  tenir. 
py^^^^t^^  Mais  l'opinion  publique  ét;iil  absolument  contraire  à  l'ancien 
M*^^'A^>--M  chef  d'orchestre.  Nantes-Lyrique,  pendant  toute  la  saison, 
avait  mené  contre  le  directeur  une  très  vive  campagne  et  l'avait  tu6  sous  le 
ridicule.  Malgré  quelques  chauds  protecteurs  qui  .s'entrenieiuiient  f)our 
M.  Solié,  l'Administration  municipale  couiprit  qu'elle  ferait  une  fjrande 
faute  en  le  renommant  directeur  une  troisième  fois.  Elle  choisit  M.  Paravey, 
administrateur  du  Théiitro  de  Bordeaux,  et  lui  confia,  pour  deux  ans,  la 
direction.  Celte  nomination  fut  très  bien  accueillie.  Distingue,  instruit, 
ehanteur  de  tjilont,  jadis  pensionnaire  do  l'Opéra  Comique,  ciiuseur  brillant, 
en^  parfait  homme  du  monde.  M.  Paravey  sut  conquérir  en  peu  de  temps 
la  sympathie  générale.  Ce  n'était  qu'un  cri  dans  la  ville  :  «  Quelle  diffé- 
rence avec  Solié  !!!  » 

La  subvention  fut  rabaissée  à  KXJ.CKlO  francs,  ainsi  répartis  : 

Orchestr.  .  .".7.000 

Machiniste 1 .  ÔOO 

Lispèces  payables  au  directeur  par  septièmes «ILSCO 


Les  débuts  furent  radicalement  supprimés  et  la  faculté  de  renvoyer  les 

artistes    (M)    (].>    les  couserv.M-    I  iiN>»''i>  au    Dir.'cti-nr. 


i.'iO 


LE   THEATRE   A    NANTES 


SAISON     1886-1887 

L.  F»ARAVEY,  Directeur 

Ch.  Huzui;,  clief  d'orclicsln'.  —  Mack.  ileuxiéme  ciu-f  iJ'orche*tre. 
Strki.esky,  régisseur. 


MM.  L)i;viLi.ii;n.s,  fort  tr'-nor. 

MoNTAiiiuL,  l«''n<ir  deiiii-caraclëre. 

Slmul,  ténor  léger. 
•         .Jduanne,  deuxième  ténor. 

I.>KM(jN,  troisième  ténor. 

(iuiLi.KMOT,  baryton. 

DuTiioiT,  baryton  d'opéra  («iiiiiqin 

(ïARUoNi,  basse  noble. 

PoiTKviN,  basse  chantante. 

Dkjkan,  basse  chantante. 

Laukicnt,  deuxième  basse. 

(lAiJLTfiEii.,  trial. 

lîouLANU,  laruelle. 

HonF.HT,  Iroisiéme  bass-e. 


M""  ViuLKTTi,  falcon. 
DuviviKfi,  contralto. 
Jouan.vk-Vachot.  ciianlcuse  légère. 
PfcLossE,  deuxième  chanteuse  légère. 
BouLANi).  duga/on. 
LovKLY,  deuxième  dugazon. 
MAsr.EKKH.  troisième  dugazon. 
Uruaj.v,  duègne. 

BALLET 
M.    Roux,  maître. 

Pakmigiam,  première  danseuse. 
Roux,  deuxième  danseuse. 


Cette  troupe  offrait  un  excellent  ensemble  et  M.  Paravey  sut  la  faire 
valoir  avec  une  remarquable  habileté.  Le  ténor  Devilliers  commençait  à 
décliner,  mais  il  avait  encore  une  voix  superbe  et  éclatante,  malheureuse 
ment  rebelle  aux  effets  de  demi-teinte.  Dans  le  courant  de  la  saison,  fatij^ué 
par  les  représentations  du  Cid,  il  lui  arrivait  parfois  de  chanter  un  peu  faux. 
Sujol,  dont  le  père  avait  fait,  jadis,  partie  de  la  troupe  de  (iraslin,  était  le 
ténor  léger  par  excellence.  Sa  voix  d'une  souples.se  rare  se  prétait  avec  une 
facilité  étonnante  aux  vocalises. 

I..C  retour  de  l'excellent  baryton  Guillemot  fut  salué  avec  plaisir  par  iuu> 
les  habitués  du  Théâtre.  Poitevin,  une  l)asse  chantante  à  la  voix  cuivrée  et 
sonore,  comédien  intelligent  sinon  chanteur  distingué,  devint  bientôt,  néan- 
moins, un  des  artistes  aimés  du  public.  Il  avait  jadis  été  coryphée  sous  la 
direction  Bellevaut  ;  deux  ans  après,  il  devait  succéder  à  Paravey.  Parmi 
les  autres  artistes,  il  faut  citer  Jouanne,  un  deuxième  ténor  di  primo  car- 
/e//o;  Dirthoit,  très  bon  baryton  d'opéra  comique;  Gardoni,  une  basse  douée 
d'un  organe  magnifique  que  gâtait  une  fâcheuse  inexi^érience  ;  enfin  Bou^ 
laml,  une  vieille  counaissajice,  toujours  fort  amusant.  Le  ténor  de  demi- 
caraclèrc.  Moiilariol,  indisposé  au  commencement  tle  la  saison,  fut  remplacé 
par  M.  Hovet,  artiste  de  talent  mais  dont  la  voix  était  quelque  peu 
fatigué;\ 

La  troupe,  du  cAté  des  femmes,  était  au-^i  très  bien  partagée. 
M'""  Jouanne-Vachot,  beauté  fine  et  distinguée,  possédait  un  merveilleux 
talent  de  chanteuse  légère.  Elle  égrenait  comme  en  se  jouant  les  vocalises 
les  ])lus  dTIlieiles.  La  comparaison  avec  le  rossignol  est  bien  vieille  et  bien 
usée.  Mais  en  parlant  de  M'"«  Jouanne,  elle  est  tellement  vraie  qu'on  se  voit 


M"*  JOUANNE-VACHOT —  MARTHK  DUVIVIKK  —  M**  BOULANI)         'Z-ii 

forcé  do  la  r<';éciiter.  Dans  Kosine  du  /iarbier  et  dans  la  Reine  des  Ifii^/n-'- 
noix,  elle  remporta  de  vrais  tHonipiu.-s.  La  blonde  Marthe  Duvivier,  la 
trice  à  Bruxelles  d'/férodiade,  artiste  d'une  grande  valeur,  cbanteus*>  de 
style,  comédienne  parfaite,  fil  bien  vite  la  conquête  du  public.  Elle  el.  * 
et  joua  Carmen  avec  un  talent  de  premier  ordre.  ()\\  se  raj»p«;ll<- 
son  succès  dans  la  Farorite.  (irAcc  à  elle,  le  vieil  opéra  de  Donizetli  fit 
plusieurs  salles  conildes.  Elle  disait  la  phrase  du  dernier  acte  :  O  bonheur, 
c'eut  mon  rroe  perdu,  d'une  fa<;on  exquise.  De  même  qu'Eli^>a  Masson.  elle 
faisait,  à  chaque  fois,  bisser  le  duo.  L'excellente  artiste  nous  quitta  au  raojs 
d'avril  pour  aller  créer  à  Paris  le  r6le  d'Ortrude  de  Lohengrin.  à  l'unique 
représentation  du  ciief  d'<euvre  de  Wagner,  a  l'Mden.  ^^'""  Sbolf;i  lui  suo- 
ec'da  sans  la  remplacer.  La  fab'on.  M""  Violetti.  possédait  une  voix  superbe, 
d'une  grande  étendue,  d'un  timbre  magnifique.  Elle  n'avait  encore  chanta 
que  le  répertoire  italien,  aussi  sa  prononciation  était-elle  défectueuse.  J'ai 
gardé  pour  la  fin  la  toute  charm:inte  M"»'  Bouland,  qui  était  venue  déjà  à 
Nantes  sous  la  direction  Coulori,  avec  son  mari;  mais  alors  elle  n'avait  pas 
encore  abordé  le  Thédtre.  (.'hanteuse  intelligente,  comédienne  extraordinai- 
rement  bien  douée.  M"»®  Bouland  devint  bientôt  l'enfant  gâtée  du  public 
nantais  qui  l'applaudit  sans  se  lasser  pendant  deux  ans.  NL  Paravey 
l'emmena  ensuite  avec  lui  à  l'Opéra-Çomique.  A  la  fin  de  sa  carrière. 
\[mn  Bouland  fit  une  heureuse  tentative  dans  la  comédie.  Elle  créa  avec 
suecés  sous  le  nom  de  Hertry.  im  rùle  dans  le  Fils  suriiatarel,  de  Gr  • 
Durancourt,  joué  au  Téatro  de  Cluny.  Dans  l'opérette.  M™"  Bouland  <-i,.: 
absolument  ravissante.  Le  rAle  de  Benjamine  de  Joséphine  oendtte  par  ses 
sœurs,qu'e\\e  jouait  avec  une  gaminerie  des  plus  réussie,  lui  valut  une  série 
d'ovations  méritées.  La  grdee  et  l'amabilité  de  M™'"  Bouland  lui  {.ragnèrent  la 
sympathie  de  tous.  D'une  complaisance  inépuisaltle,  d'une  exquise  bonté, 
jamais  elle  ne  refusa  son  concours  aux  œuvres  pour  lesquelles  on  le  lui 
demandait.  Les  Nantais  surent  récompenser  l'excellente  artiste.  A  son  bt'^né 
fice  et  à  ses  adieux,  jamais  on  n'avait  vu  autant  de  cadeaux  el  de  fleur^. 
N'oublions  pas  non  plus  la  duègne  M""  Urbain,  étourdissante  dans 
l'opérette. 

M.  Paravey  apporta  à  la  mise  en  scène  si  négligée  par  ses  prtHl««ecssours 
im  soin  particulier.  Il  ètiit  aiilé  en  cela   par  le  <      •     ■ 

homme  doué  dune  dévorante  activité,  qui  renjpl> 

tantes  d'une  façon  fort  remarquable.  Le  magasin  de  costumes  était  dan-» 
un  état  dé[)l«>ial)le.  Le  nouveau  directeur  fit  venir  à  ses  frais  un  costumier. 
Choristes  el  figurants  ne  parurent  plus  en  guenilles  sur  la  scène. 

Le  foyer  du  publie  fut  orné,  cette  année-là,  de  deux  panneaux  peints  pir 
un  de  nos  concitoyens,  M.  Levrault.  Ctns  panntviux.  représentiint  des  sujets 
antiques,  furent,  de  l'avis  général,  jugés  d'un  goût  fort  malheureux.  On  se 


2.32 


LE   THEATRE    A    NANTES 


demande  encore  comment  la  Ville  accepta  deux  compositions  aussi  médio- 
cres. Le  plafond,  dû  au  même  peintre,  parut  plus  réussi. 

La  première  œuvre  nouvelle  jouée  par  M.  Paravey  fut  le  Cid,  repré- 
sentée sons  la  direction  do  M.  Massenet  le  8  janvier  1887.  Ce  médiocre  opéra, 
où  l'auteur  de  Manon  osa,  avec  une  étonnante  présomption,  s'attaquer  aux 
vers  de  Corneille,  fut  monté  avec  beaucoup  de  soin.  Trois  beaux  décors  neufs 
furent  faits  pour  la  circonstanceet  produisirent  beaucoup  d'effet.  L'interpréta- 
tion offrait  un  excellent  ensemble.  Elle  était  confiée  à  MM.  Devilliers  .Guille 
mot,Gardoni,  Poitevin,  Dejean,  Illy,  M'^^^Violetti  et  Pélos*,e.  Dans  le  char- 
inant  ballet,  une  des  rares  bonnes  choses  de  la  partition,  Roux,  M™^*  Parmi- 
gianiet  Roux,  obtinrent  un  vif  succès. 

Le  comité  de  la  Presse  organisa  au  bénéfice  des  inondés  du  Midi  une 
représentation  qui  eut  lieu  le  5  février  1887.  On  joua  les  Deux  Avares,  de 
Grétry  et  les  Jumeaux  de  liercjame,  pantomime  de  M.  de  Lajarte. 

Les  Pêcheurs  de  perles,  le  premier  opéra  de  Bizel,  furent  représentés  le 
30  février.  M™»  Jouanne-Vachot,  Sujol,  Duthoit,  Poitevin,  interprétèrent 
cette  œuvre  de  jeunesse  du  compositeur  de  Carmen.  Malgré  des  pages 
intéressantes,  cet  opéra  n'eut  aucun  succès  et  disparut  de  l'affiche  après  trois 
représentations. 

M.  Paravey  devait  terminer  brillamment  la  saison  en  montant  une  œuvre 
qui  n'avait  pas  encore  été  jouée  en  France.  Depuis  longtemps,  je  voulais 
faire  représenter  sur  notre  scène  le  Mophistnphélès  d'Arrigo  Boïto,  qui  me 
semblait,  après  Aïda,\di  plus  sincère  manifestation  de  l'évolution  artistique 
au-delà  des  Alpes;  —à  cette  époque  Othello,  Falstaff',\si  Bohême  n'avaient  pas 
encore  vu  le  jour.  11  était  donc  regrettable  que  la  France  fût  le  seul  pays 
d'lM)roi)e  à  ignorer  cet  opéra.  Jusqu'ici  je  n'avais  pas  réussi.  M.  Paravey, 
plus  artiste  que  ses  prédécesseurs,  se  laissa  convaincre  et  résolut  d'être 
le  premier  directeur  àmonter  cet  ouvnige  intéressant: 

r^a  partition  de  M.  Boïto  n'est  pas  un  chef-d'œuvre  ;  en  bien  des  endroits 
die  est  fort  inégale,  surtout  du  côté  de  l'instrumentation  qui  est  faible, 
mais  elle  n'en  a  pas  moins  une  réelle  valeur.  M.  Boïto  a  suivi  de  très  près  la 
pensée  de  Goethe  et  l'a  rendue  parfois  d'une  fa(,on  des  plus  heureuse, 
notamment  dans  le  Prologue,  la  Prit<on,  l'épisode  d'Hélène,  la  Mort  de 
Faust.  Malgré  ses  faiblesses,  Mcphistophélès  est  l'une  des  productions  les 
plus  remarquables  de  l'Ecole  italienne  moderne.  La  première  eut  lieu  \o 
2H  avril  18^7,  avec  succès.  Poitevin  remporta  un  triomphe  mérité,  dans  le  rôle 
de  Méphistophélès.  qu'il  créa  avec  une  vive  intelligence.  Devilliers,  Jouanne, 
\Imos  Violetti,  Bouland,  Gaultlieil,  tenaient  avec  talent  les  autres  rôles. 

Deux  opérettes  :  Le  Petit  Chaperon  Rouge,  de  ^L  Gaston  Serpette,  qui 
vint  diriger  la  première,  et  Joséphine  vendue  par  ses  Sœurs,  obtinrent  un 
éclatant  succès,  grAci>  à  la  charmante  M"*®  Bouland. 


DIRECTION   PARAVBY 


233 


Tournées  :  Cromwel  (Taillade),  le  Bonheur  Conjugal,  un  Comeit  Judi- 
ciaire, Francillon,  Xuma  Hourneatan,  le  FiU  de  Giboijer,  Don  César  de 
liaxan,  le  Mariage  de  Figaro,  Gringoire,  les  Prér.ieuses  Ridicde»  (ees 
quatre  pièces  avec  Coquelin),  la  Comtesse  Sarah,  Durand  et  Durand 
(Daubray),  Tailleur  pour  Dames,  Un  Parisien,  V Ftrat,i,irt\  Cfianiillar 
(ces  trois  pièces  par  Coquelin). 

Pendant  le  mois  de  septembre  18Hfî,  on  joua  à  Graslm  le  Tour  du  Monde 
a\T'c  un  vif  succès.  Une  troupe  de  comédie  donna  des  représentations  pen- 
dant le  mois  de  mai  1880. 

Le  ThéAtrc  avait  été  des  plus  suiti.  Presque  toujours  on  faisait  le  maxi- 
mum. Pourtant  la  campagne  se  chiffra  par  un  fort  déficit.  M.  Paravey  ne 
trouvait  jamais  rien  de  trop  beau  pour  la  mise  en  scène,  et  il  dépensait  sans 
compter.  Le  12  mai,  il  envoya  au  maire  sa  démission  de  directeur.  Il  voyait, 
disait  il,  par  expérience,  qu'il  était  impossible  de  marcher  avec  une  subven- 
tion do  100,000  francs  ;  dans  ces  conditions,  il  préférait  se  'retirer  plutôt 
que  d'être  forcé  de  faire  moins  bien  la  campagne  suivante.  La  municipalité 
se  trouva  fort  embarrassée.  L'année  ét;iit  trop  avancée  pouravoir  chance  de 
trouver  mi  directeur  sérieux.  L'Administration  prit  le  sage  parti  de  d«iaui- 
der  au  Conseil  de  porter  la  subvention  à  120,0<»  francs.  Celui  ci  se  fifttùer 
l'oreille.  Enfin,  après  une  longue  discussion,  l'augmentation  fut  volée  dans 
la  séance  du  2G  mai.  M.  I*aravey  reprit  alors  sa  démission.  Toute  Ja  presm, 
d'ailleurs,  avait  été  unanime  pour  demander  qu'on  fit  lo  possible  poar 
conserver  à  la  téu^  du  ThéAtre  «  le  jeune  et  sympathique  »  directeur,  qui 
avail  redonné  à  Graslin  son  éclat  de  jadis. 

L'incendie  do  l'Opéra-Comique,  qui  venait  d'avoir  lieu,  décida  la  Ville  à 
prendre  dans  les  TliéAtres  dos  mesures  de  sécurité.  Pendant  tout  l'été  on 
travailla  ferme  pour  être  prêt  à  l'époque  de  la  réouverture.  Voici  les  princi- 
pales améliorations  apportées  à  Gnislin.  On  installa,  d'abord,  un  rideau  de 
fer  plein,  d'un  p.»ids  de  40.000  kilos,  tombant  en  trois  secondes.  Derrière, 
une  herse  d'eau  fut  placée  pour  empêcher  l'échaufTement  du  rideau  en  cas 
(l'incendie.  Au  dessus  de  la  scène  il  existait  déjà  un  réservoir  d'eau  de 
20.000  litres  ;  on  en  construisit  un  second' de  37.00()  litres  au-dessus  de  la 
conciergerie.  Toutes  les  portes  communiquant  avec  la  scène  furent  faites  en 
f(Me.  On  isola  complètement  la  scène  de  la  salle  au  moyen  d'un  mur  épais 
en  briques  réfractiiires  depuis  les  dessous  jusqu'à  im  mètre  au-dessus  des 
faîteaux.  On  supprima  les  herses  de  gaz.  Cette  mesure,  excellente  au  point 
de  vue  des  précautions  à  prendre,  avait  par  contre  un  grave  inconvénient. 
La  scène,  par  suite,  se  trouvait  mal  éclairée,  la  lumière  venant  de  cAté  au 
lieu  de  toml)er  de  haut.  On  enleva  les  petits  escaliers  qui  conduisaient  du 
couloir  des  fauteuils  à  celui  des  |)remières.  On  plaça  de;»  barres  de  fer  à 


234 


LK   THÈATHE   A    NANIhS 


lVxt<^rionr  du  mominieiit  <.'t  «If  nouvelles  échollos  i>our  faciliter  une  évalua 
lion  rapide  par  les  fenêtres,  l'^nfin,  on  fransporla  rui*  Molière  le  bureau  de 
location  et  on    fit  du  local,  occupé  précédemment  par  lui  rue  Corneille,  un 
poste  de  poliec.  Tous  ces  travaux,  qui  furent  exreutés  sous  l'habile  direction 
de  M.  Lebec.  s'élevèrent  à  la  somni<^  ']>•  .'7  r.:'.!)  fr..ti<'«. 


SAISON      1887-1888 

L.  PARAVEY,  Directeur 

i'Ai.  LJlziai',  cht'f  d'urchfsire.  —  Ma<;k,  deuxième  ch<"i  d  orrlp-siri 
Sri'.KLKSKY  régisseur. 


MM.   Bernard,  furl  ti'nor. 

Louant,  ténor  dcnii-caracli-rr 
Sujoi,,  lénor  ir-gi-r. 
Roche vii.LE,  Irnor  on  double. 
FioRATTi,  deuxième  tOnor  rn  dou- 
ble. 
Démon,  troisième  ténor. 
GouTi  HIER,  baryton. 
Heaijgé,  baryton  d'opt-ra-comique. 
Mai.zac,  Ijasse  noble 
Poitevin,  basse  chantante. 


Laurent,  deuxième  basse. 
Ometz.  trial. 
BoLi.ASi»,  laruette. 
Vaillant  Couturier,  première  chan- 
teuse h'-gère. 
Devianse,  falcon. 
MouNitR,  contralto. 
Henoux,  chanteuse  lègi-re. 
BouLAND,  dugazon. 
Duot'ESNE,  deuxième  dugazon. 
Urhain,  duègne. 


Cette  troupe  était  bien  inférieure  à  la  précédente.  Avouons-le  franche- 
ment, elle  renfermait  des  nullités  comme  on  n'en  avait  pas  encore  vu,  même 
sous  la  direction  Solié.  M.  Paravey,  hypnotisé  devant  la  direction  de 
rOpéra-Comique,  alors  vacante  et  qu'il  convoitait  ardemment,  n'avait 
apporté  qu'un  soin  distrait  à  la  formation  de  .sa  nouvelle  troupe. 

Le^ ténor  Bernard  avait  un  organe  très  généreux,  mais  il  n'avait  aucun'' 
notion  de  l'art  du  chant.  A  la  fin  de  la  saison  les  directeurs  de  l'Opéra 
l'engagèrent,  mais,  après  quelques  représentations,  ils  trouvèrent  le  moyen 
de  s'en  défaire  au  plus  vite.  M.  Bernard  ne  fut  pas  plus  heureux  à  la 
Monnaie  de  Bruxelles.  Il  retomba  alors  à  Carcassonne  d'où  il  n'aurait 
jamais  dii  sortir.  La  voix  du  ténor  de  derai-caraetère  Lorant  était  légèn*- 
ment  fatiguée,  mais  elle  était  conduite  par  un  véritable  artiste,  chanteur  de 
valeur,  comédien  excellent.  Le  retour  de  M™*  Vaillant  Couturier  fut 
accueilli  avec  joie.  La  vaillante  artiste  nous  revenait  en  pleine  possession 
d'un  talent  très  complet  et  très  original.  Sa  voix  avait  un  peu  perdu  de  sa 
légèreté,  par  contre  elle  avait  gagné  en  ampleur.  Comme  l'avait  fait  jadis 
Jeanne  Fouquet,  elle  aborda,  durant  la  saison,  certains  rôles  de  falcon  et  de 
contralto.  Ces  tentatives  furent  plus  ou  moins  heureuses.  —  son  interpré- 
tation du  rôle  de  Carmen  suscita  beaucoup  de  critiques,  — mais  elles  étaient 
toujours  intéressantes  au  point  de  vue  artistique.  M""' Vaillant  possédait  une 
personnalité  indiscutable;  elle  aimait  à  sortir  des  sentiers  battus,  à  affronter 
les  difficultés.   Dans   FausL  elle  nous  présenta  une  adorable  Marguerite, 


MAKGL'EniTB    VAILLANT-COUTURrBR  —  COUNOD  A  NANTES  235 


Vt'tui'  nu  costiiiiii- lie  l;i  |)i'tit'"  ]>,i\  s.iiiiif  :iii'Miiaii<lr  fi  iiuii  j).i>> 'i-- cette  riilx  me 
robe  à  traiiie  (jui  Iransforinc  eu  grand»'  daim?  l'humble  aiuanic  de  Faust. 
Quand  elle  apparut  ainsi,  ce  fut  de  toutes  parts  un  cri  d'admiration  Le  chef 
d'œuvre  de  (ioiinod  eut,  grâce  à  elle,  un  nouveau  suecè».  :  on  le  joua  dix-huit 
fois  pendant  la  campagne.  Mireille,  qui  avait  été  jadis  son  premier  rôle  a 
Nantes,  valut  aus>i  a  M"  N'aillantdes  triumphes  mérités.  Dans  Manon  enfin, 
elle  chanta  et  joua  en  artiste  consommée  tout  le  rôle  de  la  maîtresse  d«  Des 
Gricux.  M™"  Vaillant  Couturier,  que  nous  avions  connue,  sobs  la  direction 
Graviôro,  chanteuse  ravi>sante  mais  c  imédit-niie  assez  ordinaire,  était  deve 
nue   une    artiste   absolument   hors  ligne.   Son  second    séjour  à    Nantes 

(laissera  certainement  une  trace  plus  durable  que  le  premier. 
Dans  le  courant  de  novembre  M,  Paravey  eng:igea,  pour  suppléer 
M"*  Kenou,  absolument  insuiiisantc,  M""  Seveste  à  qui  restait  du  moins  le 
lient.  A  la  fin  de  la  saison,  celte  artiste  épousa  M.  Normand,  ex-maire  de 
Nantes,- qui  se  résolut  à  chercher  dans  ce  mariage  une  consolation  à  ses 
tlt'boires  politiques. 

A  la  fin  de  décembre  M.  Paravey  atteignit  enfin  le  but  qu'il  poursuivait 

i|(»piiis  si   longtemps,    i^e  (ionvernement  l'appela  a    la    tét*'   de    l'Opéra- 

<'oinique.  Le  directeur  pour  «ela  n'abandonnait  pas  le  Théâtre  de  Nantes, 

qu'il  laissait  aux  bons  soins  du   fidèle  Stréleski.  Mais  le  cahier  des  charges 

•    eoiitient  un  article  int4>rdisant  au  directeur  de  Graslin  de  diriger  une  scène 

iieleonquc  dans  une  autre  ville.   Une  interpellation  eut  lieu  à  ce  sujet  au 

•nseil  municipal.    On  cria  haro  sur  le  pauvre  Paravey,  coupable  d'avoir 

cepte  un  poste  aussi   avantageux  que  celui  qui  lui   était  offert,  sans  avoir 

■mandé,  préalablement,  la  permission  du  maire.  Tout  finit  par  s'arranger; 

le  nouveau  directeur  de  r<  )péra-Coniique  s'engagea  à  envoyer  par  mois  deux 

Il  listes  de  son  théâtre  de  Paris  jouer  sur  son  théâtre  de  Nantes.  Celte  corn- 

lunaison  avaul;igeuse  fut  acceptée  et   il  ne  fut  plus  question  de   poursuivre 

\I.  Paravey  |)Our  avoir  violé  le  cahier  des  charges. 

k       .\u  commencement  de  février  1888,  (iounod  passai  cinq  jours  à  Nantes  où 

il  était  venu  dirig^^r  aux  Concert.s  Populaires,  un  festival  en  son  honneur.  Le 

■J  février  on  joua  Mirt^illf  au  Grand  Théâtre  et  le  Maître  assiî.t;i.  dans  la  loge 

|)réfe<'torale,  à  la  représenUilion  de  sa  belle  œuvre.  Pendant  toute  la  soirée 

l'illustre  vieillard  fut  l'objet  d'ovations  chaleureuses  ;  à  la  sortie  les  specta- 

t 'urs  se  massèrent  sous  le  grand   vestibule  et,  quand  l'auteur  de   Fatutt 

ipparut  au  haut  des  marches  de  l'escalier,  ils  l'acclamèrent  avec  enthou- 

I    siasme.  La  veille,  un  grand  banquet  avait  été  offert  à  Gounod.  à  l'HAtel  de 

l'nince.  Pendant  le   diner  la  musique  milit;iiro  et  la  musique  muni»  ip  île, 

^Toupées  sur  la  place  Graslin.  exécuteront,  lour  à  tour,  un  choix  de>  œu\re> 

ilu  célèbre  musieien.  Après  le  banquet  le  compositeur  se  rendit  encore  au 

(irand-Théâtre  où  l'on  jouait /os<*/>/ime  cendtt*'  par  ses  sœur». 


SU)  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


J'eus  le  grand  honneur  tant,  que  Gounod  resta  à  Nantes,  de  lui  tenir 
presque  constamment  compagnie.  Je  n'oublierai  jamais  les  heures  exquises 
passées  à  côté  de  ce  grand  clianneur  dont  je  ne  partageais,  certes,  pas  toutes 
les  idées  mais  que  j'admirais  sincèrement,  quand  même.  Gounod  n'était  pas 
seulement  un  musicien  de  génie  qui  apporta  une  note  nouvelle  dans  l'expres- 
sion musicale,  c'était  aussi  un  littérateur  de  race,  un  brillant  orateur.  Tous 
ceux  qui  assistèrent  au  banquet  de  l'Hôtel  de  France  purent  s'en  convaincre 
en  l'écoutant  parler  d'admirable  façon  de  l'Art  en  général  et  de  Mozart  en 
particulier.  Gounod,  ce  soir  là,  détailla  à  ses  auditeurs  les  beauU^s  de  Don 
Juan  avec  une  éloquence  vibrante. 

—  La  grandeur,  nous  dit  Gounod,  réside  le  plus  souvent  dans  la 
simplicité.  Mozart  a  le  sens  de  la  beauté  pure  :  il  ne  se  laisse  pas  égarer  ; 
il  va  toujours  droit  au  but.  Rien  de  trop,  rien  de  moins.  Un  soir,  que  j'étais 
chez  un  astronome  de  mes  umis,  je  passai  longtemps  à  admirer,  à  travers 
l'un  de  ses  instruments,  les  profondeurs  du  ciel.  Je  remarquai  alors  le 
phénomène,  que  l'on  ne  peut  distinguer  à  l'œil  nu,  mais  qui  existe,  et  qu'on 
appelle  la  lumière  sidérale,  lumière  d'une  blancheur  éclatante  et  douce  à  la 
fois.  Eh  bien,  dans  le  ciel  de  l'Art,  Mozart  est  de  la  lumière  sidérale  ! 

En  dehors  de  Mozart,  deux  autres  musiciens  étaient,  de  la  part  de 
Gounod,  l'objet  d'une  vive  admiration  :  Beethoven  et  Bach. 

—  La  Neucième  Symphonie,  s'écria-t-il,  à  un  moment,  c'est  la  Bible  des 
musiciens  ! 

Sur  Bach,  il  prononça  ces  mots  profonds  : 

—  Si,  par  un  malheur  impossible,  il  arrivait,  un  jour,  que  toutes  les 
œuvres  musicales  se  trouvassent  détruites,  sauf  celles  de  Jean-Sébastien,  on 
pourrait  reconstituer  avec  elles  toute  la  musique,  car  Bach  est  i^n,.  n. ■!,,,- 
leuse  gui  n'est  pas  encore  condensée. 

Bn  vain,  j'essayai  de  lancer  Gounod  sur  la  ([uestion  Wagnérienne.  Il 
nous  déclara  que  Wagner  était  une  immense  personnalité  musicale,  mais 
sans  s'expliquer  davantage. 

La  conversation  étant  tombée  sur  les  passions,  Gounod  émit  •  avec 
enjouement  ce  délicieux  aphorisme  : 

—  Les  passions  doivent  être  des  domestiques  :  pour  ma  part,  je  n'aurais 
jamais  eu  le  courage  de  les  renvoyer.  Il  faut  leur  paver  de  bons  gago<. 
mais  qu'elles  restent  toujours  des  domestiques. 

Je  retrouve  aussi  dans  les  notes  que  je  pris,  ce  soir-là,  ces  deux  belles 
pensées.  En  les  transmettant  ici,  je  revois  l'air  inspiré  et  prophétique  avec 
lequel  Gounod  les  prononça  : 

—  Après  l'Incréé,  qui  a  tout  créé  de  rien,  la  plus  grande  puissance  est  le 
Génie  qui  crée  tout  de  presque  rien. 


GOUNOD    A    NANTES  237 


—  Une  belle  action,  une  belle  v»^rilé,  une  belle  œuvre  d'art,  voilà  trois 
choses  (jui  f»'r<jnt  toujours  des  dupes. 

Le  Maître  avait  en  horreur  les  parodies. 

—  Je  n'ai  jamais  consenti,  nous  confia  l  il,  à  aller  entendre  le  Petit 
Faïutt.  Non  pas  parce  que  l'on  parodiait  une  de  mes  œuvres,  —  moi  je  ne 
suis  rien,  —  mais  parce  que  je  ne  comprends  pas  que  l'on  puisse  rire  de  ce 
(jui  vous  a  fait  pleurer.  lit  Marguerite  m'a  fait  pleurer. 

Une  autre  fois,  Gounod  se  défendit  énergiquement.  près  de  moi,  d'être  un 
mystique. 

—  Mou  esprit,  me  déclarat-il,  n'est  nullement  porté  au  mysticisme.  Le 
mysticisme  implique  une  sorte  de  crtMulité  nébuleuse.  Moi,  au  contraire, 
je  sais  ce  que  je  crois,  et  pourquoi  je  eroi^.  I.a  Foi  fst  une  fone  de  r.\iiie. 
la  Crédulité  est  une  faiblesse  de  l'Esprit. 

J'ai  parlé  tout  à  l'heure  du  culte  professé  par  Gounod  envers  Mozart.  Ce 
(tulte  était  devenu,  \ni\x  à  peu,  chez  l'illustre  cora{X>siteur  une  vérit;ible 
idolâtrie.  A  ce  sujet,  je  raconterai  un  souvenir  personnel.  Un  jour,  je  me 
trouvais  chez  Gounod,  dans  ce  Vaste  c^ibinet  de  travail  de  l'hôtel  de  la  place 
Malesherbes,  où  je  le  revois  encore  avec  sa  belle  et  douce  tête  blanche, 
ressortant  vigoureusement  sur  le  velours  noir  du  veston.  Notre  conversation 
avait  été  longue  ;  pendant  près  de  deux  heures,  Gounod  m'avait  tenu  sous 
le  charme  de  sa  parole  pénétrante.  Le  lendemain,  jo  partais,  une  fois  de 
plus,  pour  l'Allemagne,  assister  à  un  cycle  wagnérien.  Au  moment  de 
prendre  congé  du  Maître,  je  lui  fi^J  part  de  ce  voyage  dont  je  no  lui  avais 
pas  encore  parlé.  S»»n  visage  s'assombrit  aussitôt  et  il  garda  un  moment  le 
silence.  Enfin,  m'erabrassant,  —  il  embrassait  beaucoup  —  :  «Va,  nuui  fils, 
dit-il,  je  prierai  pour  loi  !  pour  que  tu  re^•iennes  au  seul  Beau,  au  seul 
Grand,  au  seul  Vrai,  à  Mozart  !  »  Les  prières  de  Gounod,  si  tant  est  qu'il 
en  fit  vraiment,  sont  restées  inetlicaces  ;  mon  admiration  pour  Wagner,  en 
elFet,  n'a  fait  que  croître. 

La  première  nouveauté  de  cette  saison  fut  une  œuvre  médit»'.  Diane  de 
Spaar,  opéra  d'un  certiiin  M.  David,  fabricant  patenté  de  morceaux  de 
piano  imiUitifs.  Quelle  raison  avait  pu  pousser  le  directeur  à  mpnter  une 
nullité  pareille'???  Mystère  II  La  chute  de  cette  œuvre,  dont  le  livret  était 
dû  à  Armand  Silveslrt\  fut  complète  et  méritée.  Cette  représentation  fut 
une  erreur  de  Paravey.  Il  la  racheta  plus  lard  en  jouant  Hnmlet 
d'IIignard. 

La  Heine  de  Saba,  de  Gounod,  fut  jouée  le  6  mars  lft88.  Cette  partition, 
sans  grand  intérêt  aujourd'hui,  malgn^  quelques  belles  jxiges.  n'eut  aucun 
succès.  M"''  Vaillant  Couturier  fit  une  adorable  Balkis.  Le  reste  de 
r  interprétât  ion,    confiée  à    MM.   Bernard,    Malzac,   Couturier,   PoiK*vin, 

40 


■i^H  LK    TlllijATRE    A    NANTES 


Viii.et  Boul.ind  L'I   Urbain,  ne  soi'lait  pa^  <!.•  la  mediocrilé.  On  peignit  deux 
toiles  neuves  pour  cet  opéra. 

Le  c'éntenairo  du  (irand-Tluîntre  fut  célébré,  avec  solennité,  leô  avril.  La 
place  Graslin  et  le  monument  étaient  pavoises  et  illuminés.  Entre  le> 
colonnes  du  Tliéâlrr.  on  lisait  en  lettres  de  fou  l'inscription  suivante  : 

1788-1888 

H  O  M  M  A  G  K 

A 

GRASLIN 

Lfs  serres  du  Jardin  des  l-*lantfs  avaient  été  mise>  au  pillage  et  !•• 
grand  vestibule  se  trouvait  transformé  en  un  véritable  jardin.  Riclianl 
Cœuv-fle-Lion  qui,  depuis  de  longues  années,  n'avait  pas  été  représenté  a 
Graslin,  fut  joué  avec  succès.  Soulacroix  et  M™*  Molé-Truiïier,  de  l'Opt-ra- 
Coraique,  prêtèrent  leur  concours  à  celte  soirée  de  gala.  On  applaudit 
ensuite  un  spirituel  à-propos  en  vers  dus  à  nos  excellents  confrères 
MM.  Paul  Cliauvet  et  Léon  Brunsohvicg.  Knfin,  le  buste  de  Graslin  fui 
couronné  sur  la  soène  en  présence  de  tous  les  artistes.  Seules,  M'"*'*  Vaillant- 
Couturier  et  Mounier,  par  une  boutade  inexplicable,  avaient  refusé  de  s»* 
joindre  à  leurs  camarades. 

Hainlef,  de  notre  concitoyen  Hignard,  qui  [n'avait  encore  jamais  été 
représenté,  mais  dont  la  partition  était  gravée  depuis  longtemps,  fut  joué 
le  21  avril  1888,  C'est  une  œuvre  de  haute  valeur,  tant  au  point  de  vue 
musical  que  littéraire.  L'idée  de  Shakespeare  est  rendue  tout  le  temps  de  la 
fac^oii  la  plus  exacte  et  avec  le  respect  le  plus  scrupuleux.  Nous  sommes 
loin  des  inepties  impuissantes  et  réunies  de  MM.  Ambroise  Thomas,  Barbier 
etCarré,  M.  Lorant,  qui  avait  jadis  joué  la  comédie,  composa  lerôled'Hamlet 
de  la  façon  la  plus  remarquable.  Cette  création  comptera  dans  sa  carrière. 
M"i''  Vaillant-Couturier  fit  une  touchante  Ophélie.  Elle  interprétii  les  scènes 
de  folie,  si  difïérentes  de  celles  de  M.  Thomas,  avec  un  talent  absolument 
hors  de  pair.  Couturier  était  un  excellent  Laërte.  Il  disait  le  beau  cantahile 
de  la  scène  du  cimetière  :  Rentre  donc  dans  la  terre,  o  pauvre  désolée,  en 
véritable  artiste.  M"»®  Mounier,  MNL  Malzac,  Poitevin,  Fiorati,  Beaugé  et 
Maréchal  tenaient  convenablement  les  autres  rùles.  Très  intéressante  an 
point  de  vue  harmonique,  la  partition  d'Hignard  pèche,  malheureusement, 
par  l'instrumentation,  qui  est  grise  et,  en  général,  peu  nourrie.  Malgré  cela, 
malgré  aussi  quelques  longueurs  et  quelques  parties  écrites  dans  un  style 
ilémodé,  elle  restera  comme  l'adaptation  musicale  la  plus  intelligente  du 
drame  du  grand  poète  anglais,  Hignard  et  son  callaborateur  poétique. 
Pierre  de  Garai,  ont  introduit  dans  leur  œuvre  certaines  parties  déclamées 
sous  lesquelles  l'orchestre  coi\tinue  la  trame  musicale.  Ce  nouveau  système 
offre  l'inconvénient  d'exiger  des  artistes  de  grand  opéra  sachant  en  même 


lfAM[,trr.  DAMIïiTIDE    hignard 


2:<0 


t«Miijis  diro  l<'>  v(•r>^.  <J<'([('  iiiii'-f,  on  t'MiilAiic  bien,  l/'i-uvre  «i'Hign.ir>i  lui 
tr^s  applaudie.  L'auteur  fut  appel/;  a  grands  cris  sur  la  scène.  Toujours 
modeste,  Hignard  voulait  se  dérober  à  cette  ovation,  'lùais  le^'  artistes 
Tentraln/TiMit  et  il  dut  subir  les  acelamations  des  Nantais,  heureux  ûv 
saluer  l'ini  des  hommes  qui  ont  iionon*  le  plus  notre  vieille  cité  bretonne.  La 
représentatioti  do  cette  œuvre  termina  brillamment  la  dernière  campapiif 
(le  M.  Paravey,  comme  MrjtfiixtopfiélfM  avait  terminé  la  premi»:- 

Les  artistes  que  le  Dir«'ct«'ur  de  l'Opéra-Comiqu»'  envoya,  selon  >a  pro- 
messe, à  NanU's,  et  qui  firent,  à  chaque  ioi>,  salle\'omble,  furent  les  suivants  : 
Mesdames  Blanche  Deschamps.  Dufrine.  Mollé-Truffier,  MNf.  Bouvet, 
Soulacroix.  Delmas  cl  Mouliérat. 

Tournées  :  le  Mii^robe.  (iabrivU»-.  \.\  Joif  j<ni  ],>-iir  [Ni-    ia\ari     i  .lohr 
('onstantin ,  \i\   Souris,  Durand  et    Duranfi.   V Affaire  ('!f mène f au.  l>ora, 
les  FemniCH    Sarunte».  le   Siontie  où  l'on  s'ennuie,  (Agar),  les   Fourrham 
hault.  firitannicu.s  (Ag3r). 

Une  trou|)fde  com«''di«*,  sous  ladir.Miiou  de  M.  Louar.  l'-v.i»  t  i..  i.-  ,>,.) 
Théâtre  pendant  le  mois  de  mai. 

M.  Poitevin  qui.  comme  artiste,  avait  su  >o  concilier  les  .sympathies  géné- 
rales, demanda  la  direction  Très  soutenu  par  une  partie  de  la  presse  qui 
mena  en  sa  faveur  une  campagne  éncrgi(|ue  il  ne  tarda  pas  a  l'emporter 
sur  ses  concurrents  et  fut  nommé.  Le  Conseil  municipal  ne  maintint  pa^: 
l'augmentation  de  2().(MK)  francs  faite,  l'annéH'  précédente,  à  lasuhvention. 

Pendant  les  mois  d'été,  on  inst;illa  un  nouvel  orgue  au  lirand  ThcVitrc.  Ce 
superbt'  instrument,  dont  le  clavier  est  placé  dans  l'orchestre,  est  noù  par 
l'électricité.  Nantes  fut  la  première  ville  de  France  a  posséder  un  orgue  de 
ce  nouveau  svstène. 


I  h   11.  " 


SAISON      1888-1889 

A.  FOITEVIN",  Directeur 

11.  I    1   '1.  lieslrc.        l'tiiUAii.i,  d»Ml^     ti'.   .  11.  /  .1 
1^1  KKNT,  ré|ti'«M-ur 


MM.   Maiwiiu.l»:,  forl  tëiàor. 
(.itiuKKTEiU.  ténor  l<-gor 
KionATTi.  <lPuxi«'Mne  t«''aor  léji.r 
Hazam).  troigitMiio  tt'iiAr 
Ladim.  baryton  (!<■  ;;ianil  np<Tii 
Dklvove.  baiytoii  d'opora-omiqu- 
(luiLi.vMKRT.  basse  noble. 
NsvKt',  bas8«'  rhaiilanto. 
I.ACRKNT,  ileuxit'iiie  lia.s«<«. 
MoHOBT.  Iriul 
Lahranciie.  larnott. 
HiMCHKR.  troigième  basti*-. 


M""  TiitHiMikM,  falcuii 

Ihuafil-harcin,  piVlli 

UK  Sam.  rhantt'UHT  Mv-r. 
LicNOER.  coiitrallK 
Vai.lier.  (iu^/nn 
liiiAr,  deuxième  (bi^.iznn 
Thrain.  dti''Kiit' 

UALLKl 
M .   Rr>c.\.  inailn*. 

Parmioiam,  promi'To  dan«<^ua«. 
Koux,  danxièmo  danseur. 


^40  LE  THÉÂTRE   A    NANTES 


Cette  troupf;,  à  part  deux  ou  trois  exceptions,  n'offrait  rien  de  remar- 
quable. M.  Mainvielle  et  M"'"  Isaac  furent  forcés  de  partir.  Ils  eurent  pour 
successeurs  M.  Bucognagni  et  M""  de  Deyn.  Labis  et  Guillabert,  dont  on 
avait  appris  le  retour  avoe  un  vif  plaisir,  n'étiient  plus  que  l'ombre  d'eux- 
raônios.  L'('!toilo  de  la  troupe,  du  côté  des  hommes,  était  Delvoye,  qui 
prit,  dans  l'affection  dos  Nantiiis,  la  succession  de  M""  Bouland.  Ce  jeune 
artiste  doué  d'une  ravissante  voix  de  baryton,  chaude,  sympathique,  d'une 
échelle  très  étendue,  était  aussi  un  excellent  comédien.  Pendant  deux 
ans,  il  devait  faire  les  déliées  des  Nantais,  qui  ne  se  lassèrent  jamais  de 
l'applaudir.  11  alla  plus  tard  à  l'Opéra-Comique.  Le  ténor  Bucognani  pos- 
sédait un  bel  organe  ;  malheureusement,  au  point  de  vue  du  chant,  il  avait 
encore,  beaucoup  à  apprendre  Citons  aussi  la  basse  chantante  Neveu, 
artiste  de  talent,  (|ui  mourut  au  mois  de  janvier  en  laissant  d'unanimes 
regrets  et  Mordet,  amusant  trial,  qui  conquit  rapidement  auprès  du  public 
nantais  une  vériUible  popularité  ;  pendant  de  longues  années  il  devait  faire 
partie  des  troupes  de  Graslin.  Après  la  mort  de  M.  Neveu,  M.  Poitevin  fit 
venir  pour  lui  succéder  un  débutant,  M.  Cordier,  qui  ne  chanta  pas  souvent. 
La  mairie  autorisa  le  directeur  à  paraître  sur  la  scène  et  à  tenir  de  nou- 
veau un  emploi  dont  il  s'acquittait  si  bien. 

M""  Ismaël-Garciu,  femme  du  célèbre  baryton  Ismaël.  cantatrice  d'une 
haute  valeur,  mais  dont  l'organe  commençait  à  faiblir,  laissera  un  nom  à 
Graslin.  Son  meilleur  rôle  était  Dinorah,  du  Pardon  de  Ploërmel.  Elle  le 
chantait  en  grande  artiste, 

M'"'^  de  Sany  et  Vallier  avaient  de  généreux  organes;  mais  une  prononcia- 
tion impossible  nuisait  à  la  première;  une  médiocrité  complète  de  comé- 
dienne à  laseconde',  qui  avaità  recueillir  la  lourde  succession  deM™''  Bouland. 

Depuis  plusieurs  années,  je  menais  une  très  vive  campagne  pour  faire 
monter  à  Nantes,  Lohengrin,  de  Wagner,  et  Sigurd,  de  Reyer,  mais  jus- 
qu'ici je  n'avais  pu  réussir.  Aucun  directeur,  pas  même  Paravey,  n'avait 
voulu  se  risquer.  Pourtant,  pour  Sif/nrd,  j'étais  arrivé  à  déterminer  dans  la 
ville  un  tel  mouvement  d'opinion  par  les  deux  auditions  données  chez  M.  G. 
Roux,  le  grand  facteur  de  pianos  de  la  rue  Boileau,  que  je  vainquis  assez 
facilement  les  dernières  hésitations  de  M.  Poitevin:  je  le  dt'cidai  donc  à 
monter  le  noble  opérade  Reyer.  Quand  il  demanda  la  direction,  il  s'engagea 
à  mettre  cette  partition  à  la  scène.  Il  tint  loyalement  parole. 

Sifjurd  fut  joué,  pour  la  première  fois,  le  mardi  4  décembre  1888.  Buco 
gnani  trouva  son  meilleur  rôle  dans  le  personnage  du  héros  franc  Delvoye 
.se  fit  justement  applaudir  dans  le  grand-])rètre.  Les  autres  juterprètes, 
MM.  Labis,  Guillabert,  Boucher,  Et;ux.  M^^'^^Thuringer,  Sany,  Leuder. 
étaient  tous  d'une  faiblesse  déplorable.  Les  décors  de  MM.  Amable  elGardy 
furent  justement  admirés.  La  mer  de  llanimes,  |iroduite  par  des  jets  de  vapeur 


SICL'RD    —    LE   ROI    d'yS  :?  1 1 


d'eau  sortant  de  canaux  perc<^s  de  trous  et  placés  sous  la  scène,  produisit 
une  sensation  profonde.  Cette  partition  d'une  si  belle  abondance  mélodique, 
d'une  inspiration  si  haute  et  dont  de  nombreuses  maladresses  d'écriture  et 
certiines  lourdeurs  d'orchestration  n'arrivent  pas  à  altérer  la  splendeur,  eut 
un  immense  succès.  Malgré  une  interprétation  médiocre  dans  son  ensemble, 
Sigurd  atteignit  le  nombre  considérable  de  25  représentations.  Jamais 
encore  un  opéra  n'était  arrivé  sur  notre  Théâtre  à  un  chiffre  pareil.  Quelle 
victorieuse  réponse  aux  ennemis  de  la  musique  moderne,  qui  avaient  prédit 
que  l'œuvro  «  incomprehennihle  n  de  Reyer  ferait  à  peine  trois  soirées  !î!  La 
\'ille  acheta,  à  la  fin  de  l'année,  les  décors  ot  le  matériel  de  Sigurd,  qui  est 
entré  ainsi  définitivement  au  ré[)ertoire  du  Grand-ThéAtre. 

Lf  l'A  décembre,  il  y  eut,  à  la  oin(|ui^mo  de  Sigurd,  un  tapage  infernal. 
M.  Poitevin  ayant  limité  à  un  certain  nombre  les  entrées  à  prix  réduits, 
aecordées  par  M.  Paravey  aux  étudiants,  ceux-ci  résolurent  de  manifester. 
Poitevin  ayant  le  soir  pris  le  rôle  d'Hagen,  que  le  pauvre  Gnillal)crt  tenait 
d'ime  façon  insuflisante,  fut  accueilli  par  un»?  bordé  de  sifflets  lancés  du 
parterre,  bourré  d'étudiants.  Une  contre  manifestation  partit  des  autres 
places,  favorables  au  directeur.  A  plusieurs  reprises  la  représentation  fut 
troubhV.  Du  [)aradis  on  jeta  sur  le  parterre  difTérents  projectiles  :  pommes, 
légumes,  voir  même  jusqu'à  des  œufs.  Les  spectateurs  d'en  bas  ouvrirent 
leurs  parapluies  pour  se  proléger  contre  ces  projectiles  d'un  nouveau  genre. 
Pendant  un  instant  la  salle  offrit  un  curieux  aspect.  Lo  lendemain, 
M.  poitevin  retira  aux  étudiants  toutes  leurs  entrées  à  demi-place,  mais  il 
finit  bientôt  par  céder  et  les  leur  rendit. 

M.  Huzjau  tomba  malade  dans  le  courant  de  décembre.  Ce  fut  le  deuxième 
chef,  M.  Perrault,  qui  le  suppl&i  pt^ndant  une  partie  de  la  saison. 

La  seconde  nouveauté  fut  le  Roi  d"}'s  (20  février  1889).  Le  bel  opéra  de 
Lalo  n'eut  que  quelques  représentations.  L;i  faiblesse  de  son  int«»rprètation 
fut  la  cause  de  l'accueil  réservé  qu'on  fit  à  cette  œuvre  si  remarquable,  qui  fait 
tant  d'honneur  à  l'école  française.  A  l'exception  de  Delvoycet  de  Poitevin, 
les  autres  artistes,  MM.  (iuilx'rteau,  Cordier,  M™"*  Ismaël-Garcin  cl  Vallicr 
étaient  franchement  mauvais. 

Le  21)  avril,  Don  César  de  liasan  eut  une  uniquQ  représentation.  Ce  trè.s 
médiocre  op<Ma  de  Monsieur  .Massenet  fut  joué  dans  des  conditions  déplo- 
rables. Les  rôles  nétaient  pas  sus.  M"^'  de  Sany  se  permit  même  de  chanter 
un  morceau  partition  en  mains.  L'Administration  municipale  eut  la 
faibles.se  de  ne  pas  sévir.  Cette  soirée  pourtant  fut  absolument  hon- 
teuse. 

Dans  le  eourant  d'avril.  M""'"  Ismael,  dont  la  voix  était  do  plu^  en  plus 
fatigmv,  prit  le  parti  do  se  retirer.  Elle  fut  remplacée  piir  M"*  Storell,  qui 
fut  bien  accueillie  dans  Lakmè. 


lMv? 


LF   THEATRE    A    NANTES 


On  rt^prit  Hévodiadr,  avec  le  tableau  cl«'  la  chambre  d'Hérod»',  ajoiil*^  par 
Masseiiet  dopuis  la  j)iomi«;ro  représoiitation  à  Nantes. 

Mri  fait  de  nouvelles  opérettes,  on  donna  Mam' selle  C renom,  ïa.  liéarnaixe 
ri  Surcouf.  On  joua  aussi,  avfc  un  vif  succès,  un  ballet.  Afi/oftotix  et 
J^rimerère.  àù  à  la  eollaboration  dedeux  df  nos  enn.itoM-ns  \I\Î.  (irinptin- 
pour  le  scénario  et  Boiscbot,  pour  la  musique. 

Marthe  Duvivier,  Houdourcsque.  Bérardi  ri  Kurst  vinrent  en  repré- 
>fntations. 

Tournées:  les  Supriaes  du  Dinirci'.  J*ëjia,  Hof/erla  Honte,  le  I^arjum, 
Martyre,  la  Sécuriié  des  Familles,  Froufrou,  les  Femmes  Nemennes.  le 
J)('pif  Amoureux,  la  Portouse  d''  Pain  (Agarl. 

M.  i-'oïK'Viii  lui  reiioiuiut' direi'iriir  ijour  l"auiit'»*  IHHJ  l.v,»".  iJcii»-- second»- 
noniinatiou  ne  fut  pas  accueillie  avec  autant  de  satisfaction  que  la  première 
|)ar  le  public,  Poitevin  directeur,  à  tort  ou  raison,  s'était  fait  beaucoup 
<l'enneniis,  s'était  aliéné  bien  des  sympathies.  11  acheva  de  mécontenter  toui<' 
une  catégorie  de  spectateurs,  en  remettant  à  prix  entier  les  matinées  de  la 
Renaissance,  que  M.  Paravey  avait  eu  l'idée  de  donner  à  moitié  prix.  Enfin, 
il  irrita  différentes  Sociétés  de  la  ville  en  interdi.sant  formellement  à  tous  le- 
artistes  de  leur  prêter  un  concours  quelconque.  Jamais  directeur  n'avait 
eiioore  pris  une  telle  mesuic. 


SAISON     1889-1890 
A.  POITEVIN,  Directeur 

A.   liKvv,  chef  d'ori-lieslro.        l.fOii  Di   Jloi-.  deuxième  cluf  d'oi-fliestre. 
Lachhm'.  réiiisseur. 


MM.    Iii;sri:i.LiKR,  fort   It-aoi'. 
(ioiKOEL,  ténor  léptef. 
Kkhrikres,  deuxième  tenoi-  lfi;t'i 
Fi.KURix,  troisième  tèiinr. 
ST.V.MLER,  baryton  de  ^rand  opéia. 
Dia.vovE,  baryton  d'opéia-cnmi(|ue. 
t'.irAVAROcm:.  basse  noble. 
Dksmets,  basse  eiiantante. 
I.MJHENT,  deuxirmo  Ims.se. 
MoRDF.T.  trial. 
Mklimuje,  lamelle. 
«ii'.A.S  Iroi.siùnie  basse. 


M"'"   Lwn.i.i;  l-'EHXii.xKr.  faU-on. 

Marie  (i.vnniKi.,  première  ehanlouM- 
l.-fjère. 

OiiKitiN.     deuxième     chanteu.sc    lé- 
gère. 

Dn.i  AV-LANn.i.E,  Contralto. 

l'i.vNTiN.    dugazon. 

Mvupiv.  deuxième  duga/on. 

i'iii.Miai.  duègne. 

BALLET 
MM.   KuLN,  maître  «le  ballttl. 

Dklaim.ie,  danseur  oomiqun. 
Mm"  r,élin<'  ItoziEii,  première    danseuse. 

Hoix.  deuxième  danseus«\ 


M.  Buziau  qui,  depuis  quinzt^  ans,  tenait  de  la  fa«;on  la  plus  distinguée  et 
la  plus  artistique  le  bâton  de  chef  d'orchestre,  prit  sa  i^traite  cotte  année  la. 
Lt>    maire    (înibourd   qui,    pendant  quatre    ans   qu'il     rest;\     au    pouvoir. 


I.ÉON    1)1.     H'JIS    —    M""'    LAVILLE-FERMINET  2-IM 

it'Mioipçii.i  loiiJKiirs  le  }j1ii>  pr'»f(Uiil  iiupris  [)()ur  '  ••>  arii-iiqiifN,  m*  v 

donna  |>as  la  ijcine  ilo  donner  à    Biiziaii    un    -  ir  di;jn«*  de   lui.    Il 

prit  !••  priMnier  venu  qui  se  prrs<»nui,  un  r:ertain  M.  Abraham  Lévv  qui, 
jusque-là,  u'avait  pu  se  fixer  nulle  part.  Notre  malheureux  orchestre,  entre 
les  mains  de  cet  homme,  dont  le  seul  tdent  consistait  a  Kesliculer  d'un»* 
façon  désordonnée,  ixMielila  bien  vile.  Un  seul  trait  suffira  a  démontrer  lu 
valeur  du  chef  auquel  l'insouciance  de  M.  Guil)Ourd  conHa  un  orchestre  qui 
comptait,  alor>«.  parmi  les  meilleurs  de  province  et  qm,  au  bout  de  quelque» 
mois,  fut  coinpU'tem'MJt  désorgariisé.  Pendant  l'été,  M.  Lévy  installait  "«ur  h- 
Cours  Cambronne  un  concert  en  plein  vent,  où  il  dirigeait  des  polkas  de 
barrières  et  accompagnait  des  chansons  idiotes  et  môme  phornographiques. 
dégoisées  par  des  chauti'urs  et  chanteuses  de  quinzième  ordre.  Après  l«*s 
Solié  cl  le^  Bn/iau,  il  était  périible  de  voir  oecu|)er  le  fauteuil  de  premier 
chef  d'orchestre  par  M.  l.é\\  1^ 

Par  contre,  comme  second  chef,  iy>us  eûmes,  |H>ndant  celte  saison,  un 
miisicieii  de  premier  ordre.  M.  Léon  Pu  ]<oi«.,  gran^  ))rix  de  Rom»*  du 
(Conservatoire  de  Bruxelles.  pnMuier  prix  de  violon,  prix  de  piano,  premier 
prix  d'orgue.  Compositeur  d'un  mérite  reconnu,  théoricien  digne  de  succé- 
der à  l'cvcellcnf  harmoniste  Bu/iau.il  accepta  ce»  foulions  secondaires  pour 
se  familiariser  avct*  le  répertoire.  Kn  quittant  Nante.s,  il  alla  à  la  .Monnaie 
de  Bruxelles,  où  il  fut  s|M''cialeuicn'.  chargé  des  éludes  des  œuvres  wagné- 
riennes  dont  il  possède  une  connaissance  approfondie.  Il  est,  aujourd'hui, 
directeur  du  Conservatoire  de  I.ouvain. 

La  troupe  était  incontestablement  dv'  beaucoup  siij)érieure  à  la  |)récédente. 
M.  Lestellior  comptait  parmi  les  meilleur^  ténors  de  province...  et  les  plus 
chers.  La  voix  était  belle,  un  peu  sèche  pourtant,  mais  d'une  sûreté   extra 
ordinaire.  Cet  artiste,  qui  a\ait  chanté  longtempsen  Italie,  y  avait  contracté 
dos  habitudes  déplorables  dont  il  ne  voulait  pas  se  défaire  :  abus  des  |)Oints- 
d'orgue,  des  ports  de  voix,  des   oppositions  He  pm/io  et /orfe,  des  ration 
tenrfi.  Grâce  a  lui,   un  opéra  durait  dix  minutes   de   plus.    Nf"»*   Laville- 
Ferminet  était  une  cantatrice  de  tout  premier  ordre.  Quoi<|u'elle  ne  fut  plus 
de  la  première  jeunesse,  elle  avait  conservé  uncétonnanle  fraîcheur  d'organe. 
Sa  voix  était  d'une  homogénéité  parfaite,   d'un  timbre  sym|)aihique.  d'une 
étendue  remarquable.  Elle  possédait,  en  outre,  un  très  l>eau  talent  de  conié 
dienne.  Comme  M™*"  Fouquct  et  Couturier,  M"«  I^ville  .aborda  à  Nantes 
tous   les  rôles  du    répertoire.   C'est  ainsi  qu'elle   chanta    Faust,   \ornui. 
Carmen,  Charte»  VI.  Dans  ce  dernier  opéra,  elle  fit  une  Odette  ri'uiarqua- 
ble.  Norma  aussi  ét;iit  l'un  de  ses  meilleurs  nMes.  Mais  la  reprise  de  l'opéra 
de  Bellini,  qui  n'avait  pas  été  j«)ué  depuis  de  longues  années,    n'attira   p«'r- 
sonne  au  Théâtre.   M.    Chavaroche  avait   une   magnifique   \<iix  de  Uasse. 
M.  Claverie.  qui  vint  rempla»*er  M   Staiuler,éi;iit  un  baryton  de  grand  style. 


2'11  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


un  chanteur  consommr.  M"-  Gabriel  ne  plut  pas  et  fut  remplacé 
par  M"»  Storell,  qui  ne  retrouva  pas  son  succès  de  la  fin  de  l'année 
précédente.  M""  VVIlhera  vint  lui  succéder.  Cette  artiste  avait  toujours 
sa  jolie  voix,  mais  elle  était  est  resiée  l'artiste  insipide  et  insuffisante  que 
nous  avions  connue  jadis.  M.  Goffocl  résilia  ainsi  que  M'"''»  Duguay  Laville 
et  FoUemer.  Le  premier  fut  remplacé  par  M.  Déo,  jeune  artiste  doué  d'une 
jolie  voix;  la  seconde  par  M"""  (lollin,  qui  avait  autrefois  échoué  comme 
falcon  et  qui,  cette  fois-ci,  ne  plut  pas  d'avantage  ;  elle  céda  la  place  à  une 
cliantcusc  de  talent,  M"°Gérald,  que  l'organe  trahissait  parfois.  M^'Echaud, 
ex-artiste  de  Riquiqui,  succéda  à  M™®  FoUemer.  Ceci  était,  tout  bonnement, 
un  comble. 

Les  trois  premiers  mois  se  passèrent  cahin-caha.  Les  représentations 
étaient  peu  suivies  ;  l'Exposition  qui  venait  d'avoir  lieu  avait  un  peu  écorné 
toutes  les  bourses;  déplus  Poitevin  s'entêtait  à  vouloir,  celte  année,  vivre  sur 
le  vieux  répertoire.  Ce  n'était  pas  la  manière  d'amener  du  monde  au 
Théâtre.  Survint  l'épidémie  d'injtucnza  :  a  plusieurs  reprises  on  dut  faire 
relâche.  Les  artistes  non  payés  se  réunirent;  M.  Poitevin  arriva  une  fois  à 
conjurer  l'orage.  Mais,  quelques  jours  plus  tard,  voyant  qu'il  ne  pouvait 
sortir  d'une  situation  oij  les  circonstances,  mais  aussi  de  nombreuses  mala- 
dresses l'avaient  jeté,  il  prit  le  parti  de  dépo.ser  son  bilan.  Le  Théâtre  ferma 
le  9  janvier.  Les  artistes  proposèrent  à  la  Ville  de  se  mettre  en  Société.  Us 
demandaient,  cependant,  que  la  mairie  leur  abandonnât  le  cautionnement  de 
15,000  francs  de  ^L  Poitevin  et  les  déchargeât  de  l'obligation  de  donner 
deux  opéras  nouveaux.  La  municipalité  accueillit  leur  demande.  Après  une 
douzaine  de  jours  d'interruption,  nos  Théâtres  rouvrirent.  MM.Lestellier. 
Roux  et  Mordet  avaient  été  choisis  comme  administrateurs.  Le  malheureux 
Poitevin  quitta  Nantes  et  reprit  son  emploi  de  basse  chantante,  qu'il  aurait 
mieux  fait  de  conserver.  Pendant  ses  directions,  il  avait  commis  bien  des 
fautes  qu'il  aurait  pu  éviter.  Quoi  qu'il  en  soit,  on  doit  lui  conserver  un  bon 
souvenir.  C'est  lui  qui  a  monté  Sigurd  et  qui  l'a  bien  monté.  Son  nom 
resterai  Graslin  attaché  à  cette  belle  œuvre  que  les  Nantais,  grâce  à  lui, 
peuvent  applaudir  désormais. 

Les  artistes  réunis  firent  venir  M"®  Thèves  pour  suppléer  dans  l'opérette 
M"i«  Plantin. 

M'"°  Bouland  vint  en  février  donner  trois  représentations  :  Les  Dragons 
de  Villars,  Carmen,  le  Maître  de  Chapelle.  La  Société  empocha  des 
recettes  fabuleuses.  La  charmante  artiste  fut  accueillie  avec  un  enthousiasme 
indescriptible.  Carmen,  qu'elle  jouait  avec  un  t^ilenttout  à  fait  remarquable, 
et  qu'elle  n'avait  pas  encore  chanté  à  Nantes,  lui  valut  un  succès  mérité.  Sa 
dernière  représentation  eut  lieu  à  la  Renaissance,  dans  l'opéra  de  Bizet,  en 
matinée.  Le  Comité  de  la  Presse  avait  fait  appel  à  M'""  Bouland  et  lui 


M""    BOULAND  245 


avait  demandé  de  pièfer  son  eoneoiu.>  .m  >j*«-i;i.ic  i.-  .^u  n  or;_Miiisait  au  l>én»'*- 
fice  des  artistes  des  Variétrs,*  eux  aussi  en  dé«onfiluie.  Lîi  recette  fut 
superbe;  clic  dépassa  1,0()()  francs.  M™'- Bouland  rer;ul  des  ovations  sans 
fin.  Couronnes,  palmes,  cadeaux,  lui  furent  offerts  en  rmml>re  contidérable 
pendant  ces  trois  soirées  triompliiles.  I.e  (^omili'  delà  Presse  lui  envo\  a  sur 
la  scène  niônje  une  ma^^nifique  statuette,  véritable  œuvre  d'art. 
Mme    Bouland     conservera    longtemps    le    souvenir  de    cette    semaine. 

La  lifranrhe  de  Sfjanarelle,  o|x';ra  comique  en  un  acte,  de  Léon  Du 
Bois,  où  les  biillanles  qualités  de  ce  musicien  di.stintrué  purent  ctrc  .ippré 
ciées,  une  fois  de  plus,  fut  jouée  en  avril. 

On  représenta  aussi  deux  nouveaux  ballets:  l'un  l'iermi  tturprig,  livret 
de  M.  Thomas  Maisonneuve,  musique  de  M.  David,  l'autre  Ma  Afie  ta 
Lune,  deM.  Paolo  (A.  Dacltmann)  musique  de  M.  Silvani.  Le  public  fit 
bon  accueil  à  ces  deux  œuvres,  fiolamment  à  la  derni»>re,  qui  est  charmante 
en  tous  points.  M.  Roux  régla  ces  ballets  avec  un  grand  talent.  Dans  le 
premier,  qui  exige  une  figuration  considérable,  il  se  surpassa.  M""'  Kozier.  une 
danseuse  de  mérite  qui  avait  succédé  à  M™*  r*armigiani,  et  M""»  Roux  rem 
portèrent  aussi  dans  ces  ballets  un  vif  succès.  On  monta  encore,  pendant 
cette  saison  qui  fut  des  plus  ternes,  (iiUette  de  Xarhonne.  Signalons  aussi 
une  curieuse  représentation  de  la  Fitlr  de  Madame  Angot,  interpréii'*»'  par 
tous  les  artistes  d'opéra,  Lestellier  et  M"**  I^ville-Ferminet  en  tète. 

Nî'""  Montbazon  et  Moudouresque  vinrent  en  représentations. 

Tournées:  licUe Maman  (.Maiie  Kolb),  VAhbé  Constantin,  le  Ftacn^  117, 
les  Faux  Jionshommes.  les  Danichi'ff,  les  Misvrables,  Ffu  Toupinf!.  Mar 
got  (Marie  Kolb),  Belle  Maman,  les  Femmes  Nerreu«e> . 

pendant  les  mois  d'été  de  ces  deux  campagnes,    la  \  illc    lit    repeindre 

dilférenls  décors,    du     Prufihitr.     il,-    l:i     Juin-    et    dc>;    !finnirn,,t<     lU    ..Il 

avaient  besoin. 


41 


vil 

LES    TROIS    DIRECTIONS    MORVAND 
.189(J  —  189:{ 


Ih'rarience  du  OrantlThéfîtrf.--  Rucognani.  —  Clatfrie.  —  .V-«  Larille  Ferminel. 

hO^*  Salambinni.  —  I,a  Masocht^.  —  Lohingriti.  —  Rei>ri'S''ntations  srandaleut^i. 

M"    I/'matteSrhtrfy^r.    —    Mondnud.    —     A/—    Mtin'lnnttPannerntt. 

Marifiirritr  Saint  iMurenl.  —    Sainson  cl    Dalila.  —    !/«  Hi^vr. 

NN'erthfT.  —  Mi-><  KpIv.ii.  _  Rourgeoi'    —   !■'"••'•  •*"».• 


K  maire  (iuil»()ur(I,  cloiil  les  connaissancos  en  mafirrc  théâtrale 
étaient  absolument  nulles,  choisit  comme  dirorteur  un  certain 
<\'  M.  Melon,  dit  Morvand,  ex-artiste  de  comédie  sans  grande 
^£3;J  valeur  qui,  après  avoir  dirigé  un  nombre  considérable  de 
scènes  infimes,  Agen,  Valenciennes.  Cherbourg,  etc.,  etc.,  venait,  en  dernier 
lieu,  de  Lille. 

M.  Morvand  demanda  en  vain  une  augmentation  de  subvention  et  la 
suppression  du  cirque.  La  Ville  se  décida  pourtant  à  lui  donner,  de  fait, 
une  légère  compensation  en  lui  concédant  la  direction  dés  le  l'f  mai  et  en 
le  mettant  a  même  de  profiter  ainsi  du  produit  des  trouix's  de  passage 
j)endant  les  mois  d'été. 

Les  pièces  suivantes  furent  jouées  durant  cette  jWriode  :  Jm  Lutte  pour  la 
rie  (M""  Favarl),  Les  Cliemins  de  fer^  Le  Chapeau  de  paille  d'Italie 
(Lassouche),  La  Vie  à  deux.  Le»  Trois  Epiciers  (Baron),  Le»  Jacobites 
(M"'"  Segond-Wel)er).  Tout /en.  Tout  Jtamme,  Ménages  Parisiens  (Bras- 
seur). 

Pendant  le  mois  de  septembre.  NL  Morvand  loua  le  Grand-Théâtre  a 
NL  Baduel,  qui  l'exploita  ave<-  une  troupe  de  comédie  où  figuraient 
\jiifi  Favart  et  une  charmante  ingénue,  toute  fraîche  émoulue  du  Conser- 
vatoire, M"*  Carlix.  Kntre  autres  pièces,  on  joua  un  drame  intéressant  de 
notre  confrère  M.  Edouard  d'Aubram  :  Mary  Roucière. 


24H 


LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


SA  ISO  N      1  890-  1891 
J.  MORVAND,  Directeur 

Abraliam  Lftvv,  chef  d'orcheslre.  —  Tiiaon,  deuxième  chef  d'orchestre. 
Keraln  Ghkv.mkr,  rt-gisseur  général. 


MM.   l'.roufiNAM,  fort  tfrior. 
IH;ii.  lenor  lé^er. 
MiAXcosi.  douxiénie  lônor. 
Soi.AS,  troisirine  tt'iior. 
('■i.AVERii;,    baryton  de  grand  opéra. 
Lkhkeion,  baryton  d'opiracomiciUH. 
Athks,  bassp  noble. 
Darmant,  basse  •  banlaDte. 
S^min  CiiKVAi.rRR,  den.xit'-me  ba.ssp. 
Baron,  Irial. 
DoNVAi,,  lai  uetle. 


M'""  LAVBLUi-KKRMiNKT,  falcon. 

SAi.AMRfAxi,  première  chanteuse  lê- 

Xéro. 
FiNCKEN,  deuxième  chanteuse  légère. 
d'Alka,  conlraiti». 
Demoumn,  dugazon. 
Romain,  deuxit^me  duga/on. 
Dkohakk.  duègne. 

BALLKT 
M"'"    Hknnicoart,  nudtr«sso  df  ballet. 
pAHMKiiANi,  première  danseuse. 
Clain;  Ory,  deuxième  danseu;:». 


Biicognaiii,  peiidanl  son  iinnéo  d'absence,  avait  fait  de  sensibles  progrès. 
On  revit  aussi  avec  plaisir  le  baryton  Claverie  et  M""  Laville-Ferminet, 
dont  le  boau  talent  avait  t'ié  si  a|)[)récié  pendant  la  campagne  précédente, 
l'arnli  les  nouxeaiix  artistes,  je  ne  vois  guère  à  citer  que  M""  Salanibiani. 
chanteuse  légère  distinguée,  mais  comédienne  d'une  froideur  exagérée,  ot 
\Iiif  d'Alfa,  une  contralto  géante,  douée  d'une  as.sez  belle  voix,  mais  pleine 
d'inexpérien?e.  Cette  artiste,  à  la  suite  de  certains  faits  que  je  narrerai 
plus  tard,  ne  devait  pas  rester  à  Mantes.  Le  reste  de  la  troupe  ne  sortait  pas 
de  la  médiocrité.  MM.  Déo,  Darmant  et  M"'"  Demoulin,  mal  accueilHs  par 
le  public,  furent  résiliés  par  M.  Morvand.  Ils  furent  remplacés,  le  premier 
j)ar  M.  Mailland.  un  t(''nor  connaissant  le  métier,  mais  tiès  fatigué,  et  le 
second  |)ar  une  de  nos  anciennes  connaissances.  M.  Olive  Roger,  un  artiste 
des  plus  corrects.  Quant  à  M"*^  Guyot,  qui  remphi»;a  M"*  Demoulin,  autant 
elle  était  mauvaise  dans  l'opéra,  autant  dans  l'opérette  elle  était  charmante. 

Vue  reprise  dé  Paul  et  Virginie,  le  fastidieux  opéra  de  Massé,  n'eut 
aucun  succès.  La  première  nouveauté  fut  une  opérette  assez  médiocre 
d'.Audran  :  l.n  Cir/ale  et  la  Fourmi,  où  M"''  Guyot  se  fit  applaudir. 

.'.a  liofioi-Iie,  le  joli  opéra  comique  de  Ntessager,  fut  joué  le  13  janvier  IHîM. 
Insuccès  complet.  Cette  chute,  d'ailleurs,  était  facile  à  prévoir.  L'œuvre 
avait  été  à  peine  travaillée  ;  déplus,  M.  Morvand  en  avait  distribué  les 
rôles  de  la  fa(.on  suivante  :  Marot  (baryton),  M.  Mailland  (ténor)  ;  Longue 
V die  (basse  chantante),  M.  Sernin  (régisseur)  ;  Marie  d'Angleterre  (ehan 
teuse  légère),  M""  (iuyot  (dugazon)  ;  Colette  (dugazon).  M""  Salambiani 
(c.hanttnise  légère).  C'était,  comme  on  le  voit,  de  la  haute  fantaisie.  On  peut 
juger,  d'après  cela,  des  prooé  iés  artistiques  de  Tétonnant  directeur  que  la 
municipalité  Guihourd  devait,  pendant  trois  années,  infliger  à  Nantes. 


tOllENGRIN  249 


La  vive  (janipap;ne  de  prrsae  que  je  menais,  depuis  longtemps,  avec 
quelqu(,'s  ann's,  pour  fairt*  jouer  à  Nantes  Lohenfirin,  avait  fini  par  porter 
ses  fruits,  et  le  public  témoignait  liaulement  de  son  désir  de  connaître  enfin 
l'opéra  de  Wagner.  M.  Morvand,  en  prenant  la  direction,  annonça  qu'il 
jouerait  le  chef  d'œuvre  demandé.  Il  devait  être  le  preii»ier  «lirecteur  à 
risquer  la  partie  en  France,  et  il  annou»,ait,  bien  haut,  qu'il  allait  acln-ter  à 
M.  Lamoureux  le  superbe  matériel  avant  servi  à  l'unique  représentation 
de  riidcn.  Ces  belles  promesses  ne  devaient  pas  être  tenues.  Non  seulement 
M.  Morvand  se  laissa  distancer  par  Uouen,  mais  il  joua  le  clief-d'«i'uvre  de 
Wagner  avec  une  piteuse  mise  en  scën»*.  L'annonce  des  répétitions  de 
Lofirnf/rin  suscita  de  nombreuses  i)olémiques,  et  la  ville  se  partagea  en 
deux  camps.  Disons,  pourtant,  que  les  adversaires  de  l'œuvre  n'étaient  guère 
nombreux.  L'opposition  se  borna  siinj>U'mrnt  a  qUfl(|Uf.«>  artick-s  anli- 
NNagnériens  parus  dans  V L'nion  lirctonne  et  le  S'nnift-Moiuimn,  à  de 
nombreuses  lettres  injurieuses  et  naturellement  anonymes  qui  me  furent 
adressées  et  à  plusieurs  ajliehes  couvertes  de  boue. 

La  première  représentation  eut  lieu  le  samedi  21  février  18*.>l,  devant  une 
^all»'  magnifi<)ue.  Ce  fut  un  triomphe  immense,  ineoni.'stable.  La  soirA-  se 
passa  truiu|uil!ement,  sans  aucune  protestation.  Bucognani  retrouva  dans 
I.olionffrin^  son  grand  succès  de  Siffurd.  Il  chanta,  avec  une  voix  superbe 
mais  sans  aucun  style,  le  rôle  du  Chev;ilier  au  Cygne,  ('laverie  tint  aviT  son 
talent  habituel  le  rùle  de  Telranumd.  M.  .Vthès  ne  donna  aurun  relief  à 
celui  d'Henri  L'Oiseleur,  et  M.  Roger  fut  très  correct  dans  celui  «lu  héraut. 
Les  rôles  du  répertoire  moderne  «'onvenaient  généralement  moins  bien  <|ue 
ceux  de  l'ancien  n'-perloirc  au  genre  de  t  lient  de  Mme  Laville-Ferminet. 
L'excellente  artiste  remplit  fort  convenablement  sans  doute  le  rôle  d'Klsa, 
néanmoins,  elle  n'en  tira  pas  tout  le  parti  désirable.  Mlle  d'Alfa,  en  Ortrude, 
fut  d'une  comjdète  métliocrité.  L'orcho»5lre,  mal  dirigé  par  son  chef  Lévy, 
joua  cette  merveilleuse  partition  de  la  fa«.'on  la  plus  terne,  la  plus  molle.  Les 
choMus  furent  mauvais.  Quant  ••  la  niise  en  scène,  elle  dépass^iit  les  bornes 
du  grotesque.  M.  Morvand  n'avait  fait  aucun  décor,  et  toutes  ses  l»elles  pro- 
messes aboutissaient  à  présenter  I.nht'nf/rin  au  puMicdans  des  toiles  d'Ham- 
let,  du  CifL  et  de  Mit/non.  Jamais  (euvre  n'avait  été  donnée  encore  à 
Nantes,  dans  d'aussi  pitoyable»  conditions,  jamais  un  directeur  n'avait 
encore  eu  le  toupet  de  violer  d'une  façon  aussi  flagrante  l'article  X\  du  cahier 
des  charges.  Mais  tout  cela  n'était  rien  à  côté  des  mutilations  «juc  le  m  ilhetj- 
reux  Lohrnf/rin  allait  bientôt  subir. 

Dans  le  courant  de  mars^MlIc  Juliette  Jœger,  dite  d'Alfa,  contrilto,  fut 
cueillie  par  la  poli»e  et  expéditV  à  Paris,  afin  de  comparaître  devant  la 
sixième  chambre  pour  avoir  inculqut^  à  sa  jeune  steur  les  premier^  princip«».s 
d'un  art  quelque   pou  étranger  a  la  nuisique.  M.  Morvand  lit  \enir  pour  la 


250  LE   TfléATKR    A    NANTES 


remplacer  une  de  nos  anciennes  connaissances,  Mme  Delprato,  qui  chanta 
deux  fois  et  partit  aussitôt.  La  campagne  s'acheva  sans  contralto  et  le  rôle 
d'Ortrude,  de  Lohencjrin,  fut  confié  à. . .  la  seconde  chanteuse  légère  !  !  !  !  ! 
L'œuvre  de  Wagner  fut  alors  déchiquetée.  On  fit  dans  le  duo  des  deux 
femmes  des  coupures  vraiment  sacrilèges  ;  enfin,  pour  économiser  les  frais 
d'instrumentistes  supplémentaires,  M.  Morvand,  de  complicité  avec  le  chef 
d'orchestre  Lévy,  supprima  toute  la  musique  de  scène  du  deuxième  acte. 
Malgré  tout,  Lohengvin,  continua  à  attirer  la  foule.  Mais  tous  les  amis  de 
l'Art  furent  unanimes  à  déclarer  qu'ils  eussent  cent  fois  mieux  aimé  qu'on 
ne  jouât  pas  Lohcnrjvin  que  de  le  voir  massacrer  d'une  farjon  aussi  inique. 

Au  mois  d'avril,  Mlle  Salambiani  et  M.  Mailland  qui,  parait-il,  n'étaient 
engagés  que  pour  six  mois,  quittèrent  Nantes.  M.  Morvand  en  profita  pour 
faire  une  nouvelle  économie,  toujours  en  violation  du  cahier  des  charges,  et 
il  acheva  la  saison  sans  chanteuse  légère  et  sans  ténor  léger  à  demeure.  Il  fit 
venir  Mme  Dercims,  qui  parut  une  fois  dans  Hamlet,  et  laissa  à  tous  ses 
anciens  admirateurs  la  plus  complète  désillusion.  Mme  Mailly- Fontaine,  que 
nous  avions  connue,  jadis,  deuxième  dugazon  sous  le  nom  de  Maillet  et  le 
*énor  Cornubert  qui  vinrent  ensuite,  chantèrent,  la  première,  deux  fois,  et 
le  second,  une. 

Pendant  cette  saison,  le  Théâtre  Graslin  joua  trois  œuvres  dues  à  la  plume 
do  quatre  de  nos  concitoyens:  Chanson  du  soir,  de  M.  Thomas  Maison- 
neuve;  Les  Conscrits  de  Jagenne,  ballet  de  M.  Bollaërt;  enfin,  un  joli 
petit  opéra-comique  :  Le  Coq  de  Sot/ric/ni/,  paroles  de  M.  Gringoire,  mu- 
sique de  M.  Boischot. 

Tournées  :  Gentil  Bernard  (Jane  May),  Paris  fin  de  siècle,  Le  Pompier 
de  Justine,  L' Artésienne,  Les  Premières  Armes  de  Richelieu  (Jeanne  Granier 
et  Marie  Kolb),  Hanilet  (Mounet-Sully),  Henri  III  (P.  Deshayes),  Madame 
Mongodin,  V Obstacle,  Ferdinand  le  Noceur,  Le  Misanthrope  (VVorms), 
Lee  Joies  de  la  Paternité,  Musotte  (Minie  Ko\b).  Le  Régiment,  Un  Prijc 
Monthi/on,  Le  Juif  Errant  (Dumaine,  Taillade,  Lacressonnière),  Les  Faur 
lions/iommes,  LWrt  de  tromper  les  Femmes  (Marie  Kolb),  Un  Troupirr 
rjui  suit  les  Bonnes  (Lassouche),  Mademoiselle  de  la  Seiglière  (Coquelin 
et  Madame  Favart). 

Pendant  le  mois  do  septembre  1891,  une  troupe  de  comédie,  où  figuraient 
M.  Abel  et  Mme  Harris,  desservit  nos  Théâtres. 

Artistes  on  représentation. —  Mmes  Jeanne  Fouquct,  Krauss,  Richard. 
Baldo;  ot  M.  Paulus. 

*  * 

Après  une  saison  aussi  déplorable,  il  était  du  devoir  de  la  Municipalité  do 
congédier  au  plus  vite  M.  Morvand.  Le  maire  Guibourd,  avec  son  incompô- 
tonco  ordinaire,  non  seulement  redonna  la  direction  audit /mpressario.  mais 


L  OUEST-ARTISTE    —    MONDALD 


2Ô1 


enleva,  sur  sa  demaiid»*,  du  cahier  des  charges,  la  claus»'  conc^Tuanl  l'obli- 
prationfaiteaudirecteurd'avoiruue  troupe  d'ojiéraet  une  autre  d'opéra-comique. 
(>ette  suppression  était  un*'  faute  énorme  au  point  de  vue  artitisque,  car  sans 
utistes  d'opéra-comique,  il  est  impossible  d'avoir  un  bon  ensemble  musical, 
surtout  quand  on  a  affaire  à  un  directeur  aus.si...  lésinier  que  M.  Morvaiid, 
Par  le  fait  mî-me  de  l'économie  d'un  premier  ténor  léger  et  d'une  première 
ilianteuse  légère,  économie  que  l'on  peut,  au  plus  bas  mot,  évaluer  à  35.ÛU0 
francs,  la  subvention  se  trouvait  augmentée,  d'une  façon  indirecte,  soit,  mais 
qui  n'en  étiiit  pas  moins  réelle.  Jusqu'alors  aucun  directeur  n'avait  été  à 
Nantes  aussi  privilégié  que  M.  .Morvand  Dieu  sait  pourtant  s'il  méritait  cette 
faveur  I!  Devant  de  pareils  avantages  donnés  à  un  homme  qui,  pourtant, 
n'avait  absolument  rien  fait  de  bien  pendant  sa  première  année  de  gestion,  le 
public  était  en  droit  d'e.xiger  beaucoup.  Un  verra  tout  à  l'heure  s'il  eut  lieu 
I l'être  satisfait  de  la  seconde  direction  Morvand. 

Au  commencement  de  la  saison,  la  rédaction  entière  de  Nantes  Lyrifjue, 
viiulant  conserver,  comme  par  le  passé,  la  plus  complète  indépendance 
l'Mvers  le  directeur  du  Théâtre,  envoya  sa  démission  à  M.  Léon  Rénier,  pro- 
priétaire du  jou.nal.  Quelque  temps  après,  tous  les  rédacteurs  se  trouvaient 
réunis  de  nouveau,  avec  l'auteur  de  ce  volume,  comme  rédacteur  en  chef,  a 
l'ancienne  Gazette Ariiatique,  qui  augmenta  considérablement  son  format  et 
prit  alors»  le  titre  de  L'Ouest- Artiste. 


SAISON      1891-1892 
J.  MORVAND,  Directeur 

Abraham  Lévv,  clief  d'orchestre.—  LBy&iTRE,  dtaxième  chef  d'orchestre. 
IsA^Ac,  régisceur  général. 


MM.  Bu«:ooNA.M,  fort  ténor. 

l'.ouTELLiKR.  deuxioiiie  li'iior. 
MosDAUD,  baryton  d'op«'i-a. 
Makis,  baryton  d'oix-rotte. 
LouYRETTE,  basse  noblo. 
D\HTHh^s.  basso  chantante. 
Larcher.  deuxième  basse. 
MoRDET.  trial. 
Ducos.  luaruettd, 
RoiLviN.  deuxit'me  trial. 
TiYON,  Iroi.siènio  ténor. 
Faber,  troisième  basse. 


M""  I.ematte-schweyer.  falcon. 
Zevort.  contralto. 
I  rr. >i  x-BLREL,  chanteuse  légère. 
\i  "K,  dagazon. 

Saixt-laurext,  chanteuse  d'opérette. 
DEaRAEF-AUEL,  duègne. 
KoMAiN,  deuxième  dugazon. 

B.KLLET 

M—'  Hknxec vRT,  maîtresse. 

DiNAM  l'oRRo.  pronuère  danseu'*»». 
Claire  ory,  deuxième  danseuse. 


Cette  troupe,  dans  son  ensemble,  ne  valait  guère  mieu.x  que  la  précé 
dente.  Quelques  artistes  méritent,  néanmoins,  une  mention  particulière. 
Parmi  ceux-là  le  baryton  Mondaud  doii  être  cité  en  première  ligne.  Doué 
d'une  jolie  voix  qu'il  maniait  avec  art,  .M.  .Mondaud  po>sèdaitdeplus  un  très 
remarquable  t;ilent  de  comédien.  Son  succès  dans  liamlet  fut  considérable. 


252  LE  THÉÂTRE   A    NANTES 


M'"*  Lt'iniiiK'  .Srliur}fi .  (lUf  iiini-.i\  i>Mi- 1.' mi  il  uc  jadis  sous  la  seconde  direc- 
tion Solié.  nous  roviiit  on  pleine  possession  d'un  fort  beau  tilent.  Elle  fut 
tri's  applauilie  pendant  tonte  la  saison.  Signalons  encore  la  chanteuse 
d'oprrt'tli.',  M'""  Saint  Laurent,  une  comédienne  péiillanie  d'esprit,  qui 
devint  bientôt  la  favorite  du  public.  L'amusant  Mordet  retrouva  aussi  la 
faveur  des  amateurs  d'opérette.  M^L  Darthès,  Mari>,  M""  Zévort  ne  réussi- 
ront pas  et  M.  Morvand  se  décida  à  les  remplacer,  le  premier  par  un  débu- 
tant, M.  Combes-Mosnard,  qui  fut  sup|)léé  ensui'e,  pendant  quelque  temp> 
par  M.  Bladviel,  autre  débutant  ;  le  second  par  un  certain  M.  Freische,  tjui 
ne  tarda  pas  à  partir  et  dont  la  succession  fut  recueillie,  sans  que  la  muni 
cipalité  fit  la  moindre  observation,  par.  .  .  M.  Maris  ;  enfin,  la  troisième  par 
M™"  lienatli,  ex-chanteuse  d'opérette,  n'ayant  que  le  titre  de  commun  avec 
une  contralto.  Le  second  ténor  Coutellier  ne  brillant  pas  dans  l'opérette,  un 
ténor  spécialement  afïecté  à  ce  genre  fut  engagé  par  M.  Morvand.  Cet 
artiste,  M.  Lary,  fut  vivement  apprécié.  La  femme  du  baryton.  M"*»  Mon- 
diud-Panseron,  avait  été  primitivement  engagée  comme  chanteuse  légère, 
mais  un  ••tat  de  grossesse  avancée  la  força  à  résilier.  Cependant  cette  canta- 
trice, douée  d'une  voix  un  peu  menue,  mais  d'un  joli  timbre,  et 
j)Ossédant  un  très  réel  talent,  parut  avec  un  vif  sueeès  plusieurs  fois  sur 
notre  scène. 

Celte  saison,  malgré  les  quelques  bons  éléments  que  pos.sédait  la  troupe, 
fut  déplorable  au  point  de  vue  artistique.  M.  Morvand  sacrifiait  tout  à 
l'opérette,  tjuant  à  l'opéra  il  allait  comme  il  pouvait.  C'est  ainsi  qu'on 
joua  darmen  en  supprimant,  —  chose  à  peine  croyable,  —  le  chœur  des 
gimins!  !  Sigurd  et  Lohenr/rin  furent  repris  sans  qu'on  se  donnât  la  peine 
de  les  répéter  d'une  façon  convenable.  Les  représentations  de  l'œuvre  de 
Wagner  furent  encore  plus  scandaleuses  que  celles  de  l'année  précédente. 
Je  citerai  quelques  coupures  pour  montrer  les  manières  d'agir  du  directeur 
Morvand  et  du  chef  d'orchestre  Abraham  Lévy.  La  partition  de  Lohengrin 
fut  dépecée  par  eux  avec  un  sans  gcMie  extraordinaire.  Au  premier  acte,  ils 
supprimèrent  le  superbe  chœur  qui  précède  l'arrivée  du  cygne;  au  second 
acte,  sans  parler  d'importantes  suppressions  dans  le  duo  d'Ortrude  et  de 
Frédéric  et  dans  celui  d'Ortrude  et  d'Eisa,  ils  coupèrent  toute  la  poétique 
scène  du  lever  du  jour,  afi,n  d'économiser  des  trompettes  supplémentaires  ; 
de  plus,  ils  déchiquetèrent  d'une  odieuse  façon  la  marche  religieuse;  enfin, 
au  dernier  tableau,  ils  bifîèrent  impitoyablement  la  grande  scène  si  vivante 
et  si  animée  par  laquelle  il  débute.  En  résumé,  Lohengrin,  avec  toutes  les 
coupures  indiquées  sur  la  partition  d'orchestre,  par  les  éditeurs,  se  joue  en 
trois  heures,  .sans  compter  les  entr'àctes.  -\  Nantes,  Abraham  Lévy  et 
NL  Morvand  |)arvinrent  à  le  jouer,  entr'àctes  compris,  en  deux  heures  et 
demie,  c'est-à-dire  avec  plus  de  rapidité  que  la  moindre  opérette.  Après 
cela,  on   peut   tirer  l'échelle. 


SAMSON    f-rr    I»ALILA    —    LE   Rftvj:  2ÔJ 

A/if<s  //,'lf/ett,  l'ain usante  opérctto  d'Audran,  remporta  un  immense 
succès.    Le  r<M(;  d'HcHyctt  fut  chanté  d'abord  par  M'**  A^'».  cn^'  ia- 

Icraent,    puis   par     M"*   de    H6riot,    une  cliannante  actrice  d-  ..ios- 

l'arisiens.  M"""  Saint-Lauicnt.  dans  le  rftle  de  l'Espagnole,  qu'elle  avait 
cr<^é  :i  Paris,  fut  vivement  apprt'ciée  elle  aussi.  Mordel  était  excellent  dans 
le  rôle  du  clergyman.  Le  reste  de  l'interprétation,  confié  à  MM.  Lary  et 
Maris,  à  M™"  Auge,  Degracf  et  Romain,  était  excellent.  M.  .Morvand avait 
apporté  tous  ses  soins  à  bien  monter  cette  partilionnette,  qui  refendait 
a  son  idéal  artistique  et  grâce  à  laquelle  il  empocha  quelques  bons  billets 
de  mille. 

La  première  grande  nouveauté  de  la  saison  fut  Sanmon  et  Dalila,  joué 
le  jeudi  18  février  1892.  Le  chef  d'œuvrc  de  Camille  Saint-Saëns  était 
sacrifié  d'avance.  Pour  celte  œuvre,  il  est  nécessaire  avant  tout  d'avoir  une 
Dalila.  Or,  M™"  Bénatti,  cxchanteusc  d'oi>érette,  était  absolument  insufli- 
sanUî  pour  remplir  ce  rôle,  l'un  des  plus  lourds  du  répertoire.  11  fallait  toute 
l'ignorance  musicale  de  M.  Morvand  pour  avoir  la  pensée  de  confier  Dalila 
à  une  interprcte  qui  n'avait  pour  elle  que  sa  bonne  volonté.  Bucognani 
chanta  Samson  d'une  manière  assez  heureuse.  M.  Mondaud  tint  avec  une 
belle  autorité  le  rôle  du  grand-prétre.  La  jolie  Claire  Ory  fut  fort  applau- 
die dans  le  ballet.  Les  autres  rôles,  confiés  à  MM.  Louyrette  et  Combes- 
Ménard,  étaient  tenus  convenablement.  Les  chœurs  furent  détestables. 
Quant  à  l'orchestre,  il  i)rouva,  une  fois  de  plus,  à  quel  point  il  était  tombé 
entre  les  mains  de  son  chef,  Abraham  Lévy.  La  mise  en  .scène,  la  figuration 
étaient  absolument  grotesques.  Par  contre,  les  décors,  constatons-le,  étaient 
très  beaux.  M.  Morvand  avait  daigné  faire  brosser  ceux  des  .second  et  troi- 
sième actes.  L'écroulement  du  temple  ét;iit  vraiment  très  réussi.  Dans  de 
pareilles  conditions  d'interprétation  de  la  part  du  principal  rôle,  de  l'or- 
cheslre  et  des  chœurs,  comment  s'étonner  du  peu  d'empressement 
que  mit  le  publie  à  venir  entendre  Samson  et  Dalila'V} 

Une  autre  be)le  œuvre,  le  Rèce,  d'Alfred  Bruneau,  ne  devait  pas  être  plus 
favorisée.  Cette  partition  extrêmement  diflicile  demandait  de  longues  études 
Selon  son  habitude  détestable,  M.  Morvand  les  hdta.  Quand  le  com- 
positeur arriva  à  Nantes  pour  les  dernières  répétitions,  il  trouva  .son  ouvrage 
à  peine  su.  Plusieurs  fois  Bruneau  fut  sur  le  point  de  reprendre  le  train  ; 
cependant  il  se  contint,  et  il  eut  raison.  Il  put  ainsi  diriger  son  drame,  ce 
qui  valait  mieux  que  de  le  laisser  livré,  le  soir  de  la  première,  aux  mains  ou 
plutôt  aux  bras  de  M.  Lévy.  Le  lièce  se  joua  le  mardi  12  mars  isy2.  L'au- 
teur fut  plusieurs  fois  acclamé  par  une  salle  vivement  émotionnée  par  la 
sincérité  et  la  beauté  de  cette  partition,  dont  l'école  française  est  justemeut 
fière,  car  elle  est  un  pur,  un  admirable  chef-d'œuvre.  M.  Mondaud  fit  une 
supcrbo  création  du  rôle  de  l'évéque.  11  le  chanta  et  le  joua  en  artiste  con- 

42 


254  l.li    TIIKATKE    A    NANTES 

.soiiiiiiù.  Le  rôle  «Je  Félicien  ije  co:ivenaii  pus  aux  moyens  de  Bucogimni, 
qui  s'y  mollira  ries  plu»  iiiédiocre.  Musicienne  et  ehaiileuse  accomplie, 
M"'  Mondaud-Panseron  eût  été  une  parfaite  Angélique  sans  la  ténuité  de 
son  organe.  M.  Combes-Ménard  et  M""  Bénatti  tinrent  les  rôles  d'Hubert 
et  d'ilubertine  d'une  façon  vraiment  remarquable.  M.  Morvand  joua  le 
Rôve  dans  des  décors  en  loques.  D'ailleurs,  de  môme  que  Samson  et 
Dalila,  cet  ouvrage  n'avait  été  monté  que  pour  obtempérer  au  cahier  des 
charges  et,  dès  la  troisième  représentation,  il  fut  retiré  de  l'affiche  rour  céder 
la  place  à  quelque  opérette  sans  valeur. 

A  la  fin  d'avril,  M™"  Bouland  revint  voir  ses  amis  nantais.  Inutile  de 
dire  quel  accueil  enthousiaste  on  lui  fit  dans  Carmen  et /osép/jm«  tendue  par 
ses  Sœurs.  M""  Vaillant-Couturier  vint  aussi  chanter  Faus^  L'annonce  de 
la  venue  de  la  charmante  artiste  suffit  à  faire  une  salle  comble  à  la  Renais- 
sance. 

Pendant  cette  saison,  on  joua  encore  deux  mauvaises  opérettes  :  L'Oncle 
Cèlent  in  et  V  Amour  mouillé  et  l'on  reprit  la  Grande  Duchesse  et  la 
Belle  Hélène,  ainsi  que  le  Cid,  qui  n'avait  pas  été  joué  depuis  la  première 
directi-on  Paravey  On  représenta  aussi  un  charmant  petit  opéra  comique 
inédit:  le  Maître  à  chanter,  de  M.  Martin  de  Witkowski,  et  un  opéra 
en  un  acte,  pompeusement  qualifié  de  drame  lyrique  :  Rosaline,  de 
M.  Râteau. 

La  basse  Isnardon  vint  en  représentation.  Une  élève  de  notre  Conserva- 
toire, M^'"  Elvéda  Boyer,  douée  d'une  voix  fort  sympathique,  parut  pour 
la  première  fois,  sur  la  scène  dans  Mignon  et  obtint  un  certain  succès. 

L'électricité  fut,  pendant  cette  saison,  installée  à  Graslin.  L'inauguration 
du  nouvel  éclairage  eut  lieu  le  2G  décembre  1801,  avec  Sigurd. 

Tournées  :  Charlotte  Corday  ;  le  Testament  de  César  Girodot;  Ma 
Cousine  ;  Monsieur  l'Abbé  ;  l'Enfant  Prodigue  (ces  trois  pièces  avec 
Marie  Kolb).  Ma  Gouce mante  ;  Blanchette ;  Leurs  Filles  ;  Tante  Leontine; 
l'Ecole  des  Veufs  ;  les  Maris  de  leurs  Filles  ;  la  Dupe,  les  Revenants  ;  la 
Puissance  des  Ténèbres  (ces  huit  pièces  avec  M.  Antoine  et  la  troupe  du 
Théâtre-Libre).  La  Mégère  apprivoisée  (Coquelin)  ;  la  famille  Pont- 
Biquet  ;  Feu  Toupinel  ;  la  Cagnotte  (Brasseur). 

• 
*  * 

M.  Morvand  ayant  déclaré,  qu'à  tout  prix,  il  ne  resterait  pas  une  troisième 
année  à  Nantes,  la  direction  des  Théâtres  fut  déclarée  vacante.  Plusieurs 
postulants  se  présentèrent,  entre  autres  M.  Castex,  qui  devait,  l'année  sui- 
vante, décrocher  la  timbale.  Peu  â  peu, 'cependant,  tous  les  candidats  se  reti- 
rèrent, à  la  suite  d'avis  prétendus  charitables.  Le  temps  s'avançait  et  la 
Ville  commençait  â  ôtre  très  ennuyée,  lorsque  M.  Morvand  réapparut  eu 
sauveur.  Cédant  aux  sollicitations  de  M.Guibourd,  il  consentit  —  le  pauvre 


DIRECTION    MORVAND  255 


homme! — à  se  sacrifier  et  à  conserver  une  troi<i«iiit'  ,inn<r'  i:i  <iirc'iioFi. 
En  retour,  M.  le  M;iire  de  N:intes  lui  laissait  la  liberlc*  de  remanier,  à  son 
gré,  le  cahier  des  charges,  M.  Morvand,  comme  on  va  le  voir,  se  montra 
d'une  discrétion  qu'on  ne  saurait  trop  louer.  Il  se  rontenta,  seulement,  de 
réduire  à  six  mois  la  saison  d'opér.i  et  d'effacer  du  cahier  des  charges  la 
clause  concernant  l'obligation  de;  monter  deux  œuvres  nouvelles.  Tant  qu'il 
y  était,  M.  Morvand  aurait  pu  exiger  davantage  ;  son  bon  ami  Guilwurd 
aurait  immédiatement  opiné  du  bonnet.  Le  Maire  de  Nantes  n'a  t-il  pas 
été  jusqu'à  faire  voter,  dans  la  séance  du  12  avril  IS'Ji,  par  un  Conseil  tout 
à  sa  dévotion,  un  crédit  pour  acheter  les  décors  de  Lohengrin.  Or,  aucun 
décor  n'avait  été  fait  pour  cette  œuvre.  Dans  la  même  séance,  on  voti  aussi 
l'achat  des  décors  de  Samson  et  DalUa.  Pour  ceux-là  rien  à  dire,  mais 
acheter  à  M.  Morvand  des  décors  qui  n'ont  Jamais  exi.ftr,  voilà  ce  qu'on 
peut  appeler  un  comble  !  ! 

J'ai  déjà  dit,  à  propos  du  cahier  des  charges  de  l'année  précr«lente,  que 
la  suppression  de  l'opéra  comique  équivalait  à  une  augmentation  de 
35, 000  francs.  Avec  la  réduction  de  la  campagne  lyrique  à  six  mois,  on  peut 
affirmer  hardiment  que  la  subvention  accordée  par  la  municipalitéGuibourd 
à  l'un  des  direeteurs  les  plus  médiocres,  au  point  de  vue  artistique,  qui 
soient  venus  à  Nantes,  s'est  élevée,  pour  la  campagne  lH!)218i)3,  au  chiffre 
de  150,000  francs,  ainsi  répartis  :  100,(KX)  francs  en  espèces  et  50,(XX)  francs 
d'économies  réalisôei»  par  la  faveur  faite  au  directeur  de  supprimer  l'opéra- 
comique  et  le  septième  mois  d'opéra.  On  ne  saurait  donc  se  montrer  trop 
sévère  pour  l'Administration  qui,  non  contente  d'avoir  porté  un  coup  fatal 
à  l'art  musical  dans  notre  ville,  en  détruisant  la  Société  des  Concerts  Popu 
laires,  ^'orgeait  d'un  énorme  subside  un  directeur  qui,  pendant  les  deux 
années  précédentes,  avait  élofjuemment  prouvé  que  sa  place  n'était  pas  à  la 
tête  de  notre  première  scène. 

SAISON     1892-1893 

J.  MORVAND,  Directeur 

.\bnihiun  Lévy,  prcinier  chef  d'urchoslro.  —  <Iar.tiek.  ilcuxiem-  <  in-i  a  itcih  >tri'. 

Imaa<:,  règisRvur. 

DuRANTV,  chanl«!usp  léiirrru. 

Smvt  I.AUHKNT,      ohuutt'UBe      d'op»' - 

V-  '  '■•■■ 
la.    'N,  prvmii're  dugazoïi. 
Mêtiyikr,  Jeuxicms  du^az.^u. 
DasvAoa.  duègne. 

BALLET 

M*«   Hentikcart,  iii*Ilr»'8.s. . 

Dinau    Porro,    pri'iiU'>ro  dancmse. 
Bogjji,  deuxième  «iaiis»  use. 
PUTTl,  traTMti. 


MM.  Uccno.NANi,  forl  l»'n«)r. 

.\RiEL,  deuxinino  ténor. 

MosTKORT.  har>'lon  de  grand  opéra. 

Ci\Ri»oM.  bà.Hse  noble. 

(iounnoN.  basse  chantaulc. 

MoHDET,  trial. 

Dur.os,  laruelte. 

Fabert,  deuxième  basse. 

Decukne,  troiï^iômo  It-nor. 

Roland,  comi(]uo. 
M""    Noirkt  PB  Varennks,  falfon. 

Paulinb  Rochkr,  contralto. 


25G  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


Cette  troupe  était  au-dessous  du  médiocre.  Mettons  cependant  de  côté 
M.  Bucognani,  toujours  en  faveur  auprès  du  public,  et  M""  Pauline  Rocher, 
une  chanteuse  de  premier  ordre,  doublée  d'une  excellente  tragédienne. 
Malheureusement,  après  un  excellent  début  dans  la  Favorite,  M'i"  Rocher. 
tomba  grièv(îm(!nt  malade  d'une  pleurésie.  Quand,  au  bout  de  trois  mois, 
l'artiste  fut  entièrement  remise,  elle  n'eut  plus,  devant  les  tracasseries 
qu'elle  eut  à  subir,  qu'à  céder  la  place  à  l'artiste  que  M.  Morvand  avait  fort 
économiquement  engagée  pour  la  remplacer.  Dès  le  soir  de  l'ouverture,  le 
public^  par  son  attitude,  montra  qu'il  avait  assez  de  M.  Morvand  et  de  ses 
ficelles  et  qu'il  n'avalerait  pas,  cette  année,  toutes  les  couleuvres  présentées. 
C'est  ainsi  que,  la  mort  dans  l'âme,  le  directeur  fut  obligé  de  congédier 
M.  Gardoni,  M""'^  de  Varennes,  Duranty  et  Métivier.  M""  Duranty,  ancien 
premier  prix  du  Conservatoire  de  Nantes,  douée  d'un  filet  de  voix  attei- 
gnant à  peine  le  premier  rang  du  parquet",  et  d'un  joli  talent  de  vocali- 
sation, avait  été  appelée  par  M.  Morvand  à  faire  ses  débuts  sur  la  scène  de 
Graslin,  comme  première  chanteuse  légère,  aux  appointements  de  600  francs. 
C'était  une  jolie  économie,  quand  on  songe  qu'à  Nantes  nous  étions  habi- 
tués, jadis,  à  deschanteuses  légères,  comme  M""  Lavoix,  Dereims,  Lacombe- 
Duprez,  Rabany,  Vaillant-Couturier,  Jouanne-Vachot,  Ismaôl-Garcin,  etc., 
etc.,  payées  de  3  à  4,000  francs  par  mois.  Malgré  toutes  les  sympathies  que 
le  public  nantais  pouvait  avoir  pour  sa  jeune  compatriote,  il  était  impos- 
sible qu'il  acceptât  de  voir  tenir  par  une  élève  cet  emploi  important.  Sur 
Tordre  exprès  de  la  Municipalité,  M.  Morvand  congédia  M^'®  Duranty.  Il 
engagea  une  nouvelle  chanteuse  légère,  M''«'  Siebens,  aussi  médiocre  artiste 
que  jolie  femme.  Quant  à.M^'*  Duranty,  après  avoir  subi,  comme  de  juste, 
une  diminution  d'appointements,  on  nous  la  conserva  comme  seconde 
dugazon.  Un  autre  de  nos  compatriotes,  le  baryton  Montfort,  très  discuté, 
fut  sur  le  point,  lui  aussi,  d'être  congédié  ,  mais  des  considérations,  étran- 
gères à  l'art,  le  firent  maintenir  sur  notre  scène.  En  remplacement  de 
M""  de  Varennes,  M.  Morvand  nous  ramena  M"'^  Laville-Fermiiiet.  qui 
venait  de  résilier  son  engagement  à  Lyon.  La  basse  Bourgeois,  artiste  à  . 
l'organe  superbe,  au  remarquable  talent  de  chanteur  et  de  comédien,  prit  la 
place  de  M.  Gardoni.  M""«  Dasvéda  fut  remplacée  par  M""''  Fleury- Pillard. 
M^'*»  Rouvièrefut  appeléeà  remplir  l'emploi  laissé  vacant  par  M^'*  P.  Rocher. 
D'une  médiocrité  absolue,  cette  artiste  ne  parut  que  rarement  sur  la  scène. 
Dans  le  courant  de  janvier,  d'ailleurs,  M.  Morvand,  sentant  l'hostilité  du 
public  contre  cette  pseudo-contralto,  engagea  pour  la  suppléer  notre  jolie 
compatriote  M'"5  Elvéda  Boyer,  chanteuse  à  la  voix  un  peu  faible  hiais 
agréable,  et  artiste  pleine  d'intelligence.  Il  faut  encore  signaler,  parmi  les 
artistes  de  celte  troupe,  la  charmante  Saint-Laurent,  toujours  très  applaudie, 
et  le  baryton  d'opéra-comiquo  Broussan,  bon  chanteur  et  comédien  aimable. 


WERTHER    —    ELENA    8ANZ  257 


Devant  l'insuffisance  de  la  première  troupe  présentée,  la  critique  théAtrale 
se  montra  quelque  peu  sévj^ro  envers  l'irapressario  qui  abusait  ainsi  de  la 
situation  exceptionnelle  qu'une  municipalité  imprudente  lui  avait  faite. 
MM.  Gustave  Babiii,  dans  le  Phare  de  la  Loire,  Backmann,  dans  le  Nour 
cetliste^  Darthez  et  Destranj;es,  dans  VOuest-Artùste,  dirent  carrément  leur 
façon  de  penser.  M.  Morvand,  d'un  <aractère  quelque  peu  chatouilleux, 
n'admettait  guère  la  critique.  Dès  le  premier  mois  de  la  campagne,  il  sup- 
prima les  entrées  du  Nouoelliste,  auquel  il  savait  pouvoir  toucher  sans 
avoir  rien  à  craindre,  ce  journal  ne  faisant  pas  partie  du  Syndicat  de  la 
Presse.  Quant  à  rOa«s^-/lrr/jj<tf,  qui,  lui,  était  du  Syndicat,  il  ne  lui  fil 
subir  le  sort  du  Nouvelliste  que  plusieurs  mois  plus  tard,  quand  il  comprit 
qu'il  n'avait  plus  chance  de  demeurer  à  Nantes.  M.  Morvand  ne  garda  plus 
alors  aucun  ménagement  envers  les  quelques  journalistes  qui  osaient  dire 
tout  haut  ce  que  la  plupart  pensaient  tout  bas. 

La  seule  nouveauté  sérieuse  de  la  saison  fut  Werther.  Cette  œuvre,  la 
plus  sincère  et  la  meilleure  du  trop  fécond  Massenet,  fut  jouée  le  25  février 
1893.  L'interprétation  confiée  à  M.M.  Bucognani,  Montfort,  Gourdon,  Ariel, 
M"'»  Laville-Ferminet  et  Duranty,  était  des  plus  faibles.  Les  artistes  de 
grand-opéra  se  sentaient  mal  à  l'aise  dans  cet  opéra  de  demi-caractère.  Deux 
décors  nouveaux  furent  faits  pour  cet  ouvrage.  Celui  du  dernier  acte  repré- 
sentant le  village  de  Walheini  sous  la  neige,  est  d'un  fort  pittoresque  effet. 
Werther  n'eut  aucun  succès.  Les  reprises  faites  depuis  n'ont  pu  parvenir  à 
imposer  cette  partition.  La  chose  est  regrettable. 

Lohengrin  et  Sigurd  furent  encore,  cette  année,  indignement  massacrés. 
Dans  le  rôle  d'Hagen,  de  l'opéra  de  Reyer,  M.  Bourgeois  se  tailla  un  grand 
et  légitime  succès.  L'opérette,  comme  toujours,  eut  les  honneurs  de  la 
saison.  Outre  une  foule  de  reprises,  on  joua  deux  inepties  nouvelles:  les 
Vingt  huit  jours  de  Clairette  et  Toto. 

Samson  et  Dalila  reparut  sur  l'afficho  avec  une  Dalila  hors  ligne, 
M"**  Elena  Sanz  qui,  pt»ndant  deux  soirées,  tint  sous  le  charme  tous  les 
amateurs  de  musique  vraie.  Malheureusement,  avec  sa  maladresse  habi- 
tuelle, M.  Morvand  augmenta  tellement  1.^  prix  des  places,  que  la  sec<^nde 
représentation  eut  lieu  devant  une  salle  presque  vide.  M"»*  Elena  Sanz 
se  fit  aussi  applaudir  dans  Carmen,  qu'elle  jouait  avec  un  talent  tout 
personnel. 

Deux  jeunes  filles,  nos  complriotes,  M"«  Maréchal  et  Barrau,  se  firent 
entendre  pendant  la  saison  à  Grasiin,  la  premièn»  dans  le  Troucér",  la 
seconde  dans  le  quatrième  acte  de  la  Facoriie,  Elles  furent  sympathique- 
ment  accueillies  par  le  public. 

Pendant  le  mois  d'avril,  on  monta,  sans  décors  nouveaux,  une  grande 
féerie-opérette,  le  Voyage  de  Siuette.  Une  jolie  chanteuse,  M"«  Blanche 


258  LB  THÉÂTRE  A   NANTES 


Marie,  qui  paraissait  dans  un  costume  de  clown  plus  que  déshabillé,  était  le 
seul  attrait  de  cette  pièce. 

Les  11  et  12  août  1893,  la  Comédie  Française  devait  venir  donner  deux 
représentations.  Lo  10,  malgré  une  location  qui  dépassait  déjà  5,000  francs, 
dos  bandes  annoncèrent  que  les  soirées  n'auraient  pas  lieu.  Une  fumisterie 
pareille,  digne  d'une  troupe  de  passage  de  cinquième  ordre,  fut  sévèrement 
jugée. 

Artistes  en  représentation  :  Bérardi,  Melchissédec,  M'"**  Elena  Sanz, 
Perdrelli,  Tarquini  d'Or,  Castellanet,  Perrin-Theuler. 

Tournées  :  les  Dames  de  Buda-Pesth,  le  Chat  Noir,  le  Juif  Polonais, 
le  Système  Ribadier,  le  Malade  Imaginaire  (Marie  Kolb),  Monsieur 
Chasse  (Marie  Kolb),  Champignol  malgré  lui,  la  Souris,  la  Petite 
Marquise,  la  troupe  du  Chat  Noir,  Hernani  (Mounet-Sully),  Hamlet 
(Mounet-Sully),  le  Veglione,  le  Monde  où  Ion  s'ennuie  (Reicheml>erg),  le 
Premier  Mari  de  France  (Lassouche),  Tricoche  et  Cacolet,  Phèdre,  les 
Papillons. 

Depuis  longtemps  notre  première  scène  n'était  pas  tombée  aussi  bas  que 
sous  la  direction  Morvand.  Toutes  les  œuvres  sérieuses  étaient  d'avance 
sacrifiées  par  un  directeur  qui  n'apportait  des  soins  qu'à  l'opérette.  On 
répétait  à  peine  les  grands  opéras  alors  qu'on  consacrait  des  six,  huit  répé- 
titions à  des  élucubrations  de  sixième  ordre.  Trois  ou  quatre  artistes  de 
valeur  égarés  au  millieu  de  nullités  dont  on  aurait  pas  voulu  à  Carpentras; 
une  mise  en  scène  absolument  piteuse  ;  des  chœurs  détestables  ;  voilà  ce  que 
nous  valut  la  direction  de  cet  impressario  qui,  grâce  à  des  avantages  énor- 
mes et  à  des  frais  extrêmement  restreints,,  fit  de  gros  bénéfices  pendant  les 
trois  années  qu'il  exploita  le  Théâtre  Graslin. 

Dans  son  rapport  sur  la  question  théâtrale,  M.  Guisthau  appréciait  ainsi, 
au  Conseil  municipal,  le  8  février  1893,  l'administration  Morvand  : 

«  La  campagne  théâtrale  1891-92  peut  compter  parmi  les  plus  mauvaises. 
Elle  est  menaccée  de  n'avoir  d'égale  que  celle  qui  se  poursuit  à  l'heure 
actuelle  (celle  de  1892-93). 

»  Nous  n'avons  pas  à  rechercher  toutes  les  raisons  d'être  de  cet  état  d'in- 
fériorité. Nous  ne  voulons  même  pas  nous  demander  si  la  direction  de  nos 
théâtres  n'a  pas  été,  par  erreur  et  de  bonne  foi,  confiée  à  un  homme  aussi 
imprévoyant  en  matière  d'art  que  soucieux  de  ses  intérêts  com- 
merciaux. 

»  Si  l'on  en  croit  le  cahier  des  charges,  on  doit  compter  sur  une  troupe 
de  grand  opéra  de  premier  ordre.  L'expérience  des  deux  dernières  années 
peut  permettre  d'apprécier,  sans  plus  de  commentaires.   » 


VIII 


DIRECTIONS    CASTEX.   —   JAHYER, 


1893-1896 


Miranne.  —  Tournié.  —  Sentenac.  —  Vilette. —  Hertnann-Devriès.  —  Jane  Dhàsty. 

M"   Tariol-Iittityé.   —  A/"«   Hibes-Tournié.  —   Pairie.  —    L'Attaquo  du  Moulin. 

Alfred    linmeau    à    Nantes.    —    Tanntixuser.     —    Accident    et   incidfnt. 

Ansaldi.    —    (iritnaud.    —    Joil  Ftibre.  —    Jane  Fnrdor.    Hosalia 

Lan.brecht.  —  Othello.  —  Cavalluria  Itusticaaa.  —  Tbamara.  —  Ri^pa- 

rations  au  Grand-Thédtre.  —  Sertal.  —  Lafarge.  —  Cazeneuve. 

Ghaane.    —    Artus.    —    A/H»    Buhl.   —     Eva    Romain, 

Marguerite  Vaillant-Couturier.  —  Les  incidents 

Lafarge.   —     Emeute.    —    Scaremberg. 

Proserpine.     -   Les  artistes    en 

société. 


'incurie  de  M.  Guibourd  qui,  pendant  les  quatre  ans  qu'il 
demeura  au  pouvoir,  manifesta  toujours  pour  l'art  musical  la 
plus  profonde  insouciance  U),  nous  avait  valu  les  directions 
Nïorvand.   Il  ne  devait  pas  en  ôtre  de  môme  sous  l'admini.s- 

IratioM  de'M.  Riom.    Le  nouveau  Conseil  municipal  se  montra  décidé  de 

relever  le  niveau  artistique  de  notre  première  scène. 
Autour  de  MM.  Guist'hau  et  Teillais,    il  se  forma    un   groupe   pour 

demander  au  Conseil  de  ramoner  la  subvention  au  chiffre  de  120.000  francs. 

La  question  théâtrale  fut  débattue  dans  la  séance  du  mercredi  8  février  1893. 

La  discussion  fut  chaude.  L'Administration  ne  proposait  que  le  maintien 

des  lOO.OiX)  francs. 

Enfin,  après  un  remarquable  rapport  de  M.  Guist'hau,  où  les  directions 

Morvand  étaient  vertement    appréciées,    et    une    longue    discussion   où 

MM.  Guist'hau  et  Teillais  défendirent  énergiquement   l'augmentation   de 

subvention,  la  somme  de  120.000  francs  fut  finalement  accordée  par  17  voix 

contre  12. 


^1)  Soyons  justes.  Nous  devons  à  M.  riuibotird  l'installation  sur  le  cêurg  Cambrons^ 
des  concerts  en  plein  veat  dirigés  par  M.  LéTy. 


260  LK   TIIKATRE    A    NANTES 


Le  favoritisme  dont  la  municipalit(^  Guibourd  avait  fait  preuve  envers 
M.  Morvand  rendait  absolument  indispensable  un  remaniement  du  cahier 
des  charges.  Voici  les  principales  modifications  qui  y  furent  apportées. 
Beaucoup  ne  sont,  d'ailleurs,  comme  on  le  verra,  (|u'un  retour  à  l'ancien 
cahier  des  charges. 

1"  Rétablissement  de  l'opéra  comique  ;  2"  Rétablissement  du  septième 
mois  de  la  campagne  lyrique  ;  >  Rétablissement  de  deux  opéras  nouveaux 
à  monter  par  campagne  ;  4°  Rétablissement  des  débuts  ;  5°  Suppression  de 
l'orchestre  municipal  ;  G°  Création  d'un  abonnement  aux  places  de  parterre 
et  numérotage  desdites  places  ;  7°  Obligation  au  directeur  de  donner,  par 
mois,  douze  représentations  d'opéra.  Défense  faile  de  donner  plus  de  deux 
représentations  d'opérette  de  suite,  aux  jours  des  représentations  ordinaires 
au  Grand-Théâtre  ;  8°  Augmentation  du  nombre  des  danseuses  ;  douze  au 
lieu  de  huit,  non  compris  la  danseuse  noble  et  celle  de  demi-caractère  ; 
9"  Suppression  de  la  vente  des  journaux  dans  la  salle  ;  10»  Droit  réservé  à 
la  Ville  de  disposer  gratuitement  de  l'orchestre  deux  fois  dans  le  courant  de 
la  saison  ;  11°  Contribution  pour  moitié  par  la  Ville  dans  les  frais  de  décors 
nouveaux,  sans  que  cependant  cette  moitié  puisse  excéder  six  cents  francs 
pour  les  décors  d'un  acte. 

Pour  les  débuts,  une  Commission  de  quinze  membres  choisis  par  le 
Maire,  tous  les  abonnés  à  l'année  et  les  abonnés  au  mois  à  prix  entier 
étaient  appelés  à  prendre  part  au  scrutin.  Les  débuts  devaient  être  termiaés 
à  la  fin  du  deuxième  mois  de  la  campagne.  Passé  ce  délai,  le  Maire  était 
libre  de  résilier  le  traité  avec  le  directeur  ou  de  lui  retenir  une  somme  de 
cinq  cents  francs  par  jour  de  retard. 

La  démunicipalisation  de  l'orchestre  était  devenue  nécessaire.  Les 
inconvénients  de  ce  système  étaient,  en  réalité,  plus  graves,  que  ses 
avantages.  Quand  Ed.  Garnier  demandait  avec  tant  d'insistance  la  création 
d'un  orchestre  municipal,  il  ne  voyait  que  le  bon  côté  de  la  chose,  c'est-à-dire 
que  les  musiciens,  n'étant  plus  engagés  par  le  directeur,  ne  seraient  pas 
soumis  à  des  mutations  annuelles,  que  l'on  pourrait  ainsi  conserver  les 
valeurs,  éliminer  les  médiocrités  et  arriver,  de  cette  façon,  à  posséder  un 
orchestre  de  premier  ordre.  C'est  ce  qui  aurait  dû  être,  mais  malheureuse- 
ment c'est  ce  qui  n'était  pas.  Malgré  tout  ce  qu'on  pourra  dire,  je  prétends, 
et  beaucoup  de  musiciens  impartiaux  sont  de  mon  avis,  que  pendant  sa 
municipalisation,  l'orchestre  a  déchu.  Cela  parait  bizarre,  pourtant  c'est 
pourtant  comme  cela,  et  je  vais  donner  la  raison  de  cette  anomalie.  J'aborde 
ici,  je  le  sais,  un  sujet  délicat,  mais  je  me  suis  promis  do  dire  la  vérité, 
Certains  musiciens,  assez  médiocres,  mais  ayant  l'avantage  d'être  Nantais, 
faisaient  agir  à  la  Mairie  et  obtenaient  d'être  conservés.  Une  municipalité 
est  toujours  obligée  à  certains   ménagements  qu'un  directeur  ne  garderait 


J.    MIRAVNB 


2fîl 


j)as.  l'infin.  1rs  imi^ionns.  •»,>  scnUint  p:i\vs  pir  la  Ville,  n'apportaient  pus  à 
leur  sorvico  tout  le  zèle  désirable.  Peu  leur  importait  de  contenter  lo  direc- 
teur, ils  étaient  fonctionnaires  municipaux  Le  Cahier  des  charfl;cs  avait 
beau  dire  que  lo  directeur  conservait  toute  aiitorité  sur  son  orchestre, 
il  n'en  («tiit  pas  ainsi.  Ce  système  (|ui,  bien  appliqu»^  aurait  pu  donner 
do  bons  r(îsultits,  n'avait  donc  pas  répondu  à  l'attente  de  ceux  —  et  j'en 
états  —  qui  l'iivaiiMit  si  vivenient  réclamé.  Le  Conseil  agit  donc  sarment 
en  démimicipalisant  l'orcliestre. 

Les  musiciens  et  les  chefs  furent  soumis,  comme  les  artistes,  aux  débuté, 
mais  la  Commission  de  quinze  raeuibr«.»s  était  s«»ule  appelée  k  voter. 

M.  Castex,  ancien  dire.teur  du  Casino  de  Saint  Malo  où  il  avait  acquis  une 
fortune  assez  rondelette,  fn'  .i.m;^;  t>.i  i .  nitii>;,;i.,|itC.  Uiom.  pour  succéder 
à  M.  Molou  dit  Morvan<l 

Le  premier  soin  du  nouveau  directeur  fut,  avant  toute  chose,  do  congé- 
dier le  maestro  Abraham  Lévy  et  d'engager  pour  lo  remplacer  M.  J. 
Mininne,  chef  d'orchestre  do  Marseille  que  la  fermeture  momentanée  du 
ThéAtre  de  cette  ville  avait  rendu  libre.  Sous  la  direction  de  M.  Miranno. 
artiste  de  haute  valeur,  parfait  musicien  connaissant  admirablement  les  par- 
titions modernes  et  dirigeant  avec  une  fermeté,  une  précision  tout  ;i  fait 
nMiiarquables,  notre  orchestre  redevint  jiromptoiient  ce  qu'il  était  avant  do 
tomber  entre  les  pattes  do  Lévy,  c'est-à-dire  lun  «les  meilleurs  de  pro- 
vince. Dés  les  premières  représentations,  le  nouveau  chef  conquit  les  faveurs 
(lu  publi»'  qui  ne  lui  ménagea  jjas  ses  justes  applau»lissemenl.s  pendant  tout 
le  temps  de  son  séjour  à  Nantes.  Miranne  resta  pendant  trois  ans  dans  notre 
ville.  Tout  le  monde  regretta  son  départ  quand  il  nous  quitta  pour  aller  pren- 
dre, au  Grand  Tbéïi ire  de  Lyon,  la  succession  de  M.  Luigini. 


Mir 


SAISON      1893-1894 
CASTEX ,    Directeur 

•  .   rlu'f  <1  oicli«'!>lr«'.  —  li-t  AU  Hfc,  (ieuiÙMiic  ■  ■■.■  i  u  "i.hcsCre 
De.si:\mis,  ri-RisMcur. 


M  M .  IUVN4UD.  fort  t»>n<>r. 
Semknao,  léiior  K^k'"''- 
IIenhiot,  deuxième  lônor. 
KosTF.ix,  trol»i<'»mo  li-nor. 
Mnunoe  Fabbk.  prt'tniorp  l>a8so  |>r" 

fonde. 
Hertnann  Dkvbik*.  batse  rhatiUititi 
ViLETTE,  baryt«ii  d'upi-ni. 
FutD.  baryton  d"op«'rac<iniii|ii'  . 
ÎVvr«iK.  baryton  ir<>|«<r;i-coniiqU'  . 
PiCHuN.  (louxièiuu  l>:n  yton. 
Df  S(:zv.  Uouxiviii«  busse 
I.ARV.  trial. 
MonnET,  laruottc. 


M-"    ^LOTn.  «oimino  dnimatiqni'. 
Janu  DiiAitTv,  conIraJio. 
SAVKRNAY.pn-iniiTechnnteu8«-K-gi'rc. 
Tap:      '•  •  ..  daguon. 

Hi>  /atifO. 

lU;ii  1 1.  \.N!'.  Il  ■jiMeixii:  lingaïuii. 
Bêlia.  du.'v*no. 

BALLKI- 

Ri;ht   maitr«*  d*  l«nll«'r 

Div-  •lansonih'. 

l*i\iTi.  danseuse  tmve<<' 


202  M'.    rilKATKK    A    NANTK.c 


Cette  troupe  contenait  plusieurs  bons  «'-li^nients.  Le  baryton  Vilette,  le 
ténor  léger  Sentcn.ic,  la  basse  chantantr  H.  Devriès,  sans  être  des  artistes 
de  tout  premier  ordre,  réunissaieul,  pourtmt,  un  ensemble  de  sr^rieuses  qua- 
lités. On  vil  avec  plaisir  le  retour  de  l'excellent  Lary  qui  avait  été  très 
apprécié  deux  ans  avant  comme  ténorino  et  qui  prit,  cette  année  là,  l'emploi 
(le  trial.  Du  côté  des  femmes  il  faut  citer  d'abord  Jane  Dhasty,  fort  jolie 
fille,  douée  d'une  voix  un  peu  dure,  mais  vibrante.  Venant  après  les  con- 
tralti  do  troisième  ordre  que  pondant  trois  ans  Melou  avait  amenées  a 
Nantes,  (îetto  artiste  fit,  dès  son  apparition,  une  impression  excellente.  La 
falcon  M""  Lloyd,  avait  une  belle  voix  mais  elle  manquait  totalem<*nt  de 
de  tempérament  et  d'intelligence  scènique.  La  dugazon,  M™»  Tariol- 
Baugé,  a  laissé  à  Nantes  les  meilleurs  souvenirs  comme  femme  et  comme 
chanteuse.  C'est  incontestablement  l'une  des  bonnes  divettes  qui  aient 
paru  sur  notre  scène.  Depuis  elle  a  fait  son  chemin  et,  mainlenant.  c'est 
l'une  des  chanteuses  d'opérette  les  plus  applaudies  de  Paris.  Parmi  les 
danseuses  signalons  a,ussi  les  noms  de  M""*  Dinah  Porro  et  Piatti. 
M"«  Maggi  seconde  danseuse,  ayant  été  refusée,  lut  remplacée  par 
M""-' Zucconi.  La  deuxième  chanteuse  légère,  M™«  Savernay,  résilia  après 
la  première  répétition.  Elle  fut  remplacée  par  une  cantatrice  de  très  grand 
talent  M'"'  Desgoria  qu'un  fâcheux  physique  desservait,  malheureusement 
auprès  d'une  certaine  partie  du  publie.  Comme  vocaliste  elle  était  infiniment 
supérieure  à  la  première  chanteuse  légère  M"**  Salembier,  dont  l'agréable 
figure  ne  pouvait  néanmoins  faire  oublier  l'organe  aigre  et  dénué  de  tout 
charme.  Cette  chanteuse,  malgré  un  scrutin  irrégulier  —  35  votants  et  3(5 
votes  —  qui  aurait  du  faire  annuler  l'opération,  fut  déclarée  admise  par  la 
municipalité.  M"»*  Salembier  n'avait  pourtant,  obtenu  qu'une  faible  majorité 
de  quatre  voix. 

Le  ténor  llaynaud  qui,  à  plusieurs  reprises,  avait  î>uscité  les  murmures 
(lu  public,  fut  refusé.  M.  Pruym  le  rempla(;a,  mais,  dès  sa  première 
apparition,  il  fut  accueilli  par  les  silllets.  M.  Castcx  engagea  alors  un 
ténor  (|ui  avait  fait,  jadis,  une  brillante  saison  à  Nantes  :  M.  Tournié. 
Chanteur  consommé,  tragédien  lyrique  de  premier  ordre,  M.  Tournié  avait 
fourni,  depuis  son  premier  s(''jour  à  (iraslin.  une  carrière  brillante. 
Malheureusement,  il  était  sur  le  déclin.  La  voix,  fort  belle  encore,  se 
fatiguait  vite,  malgré  l'habileté  (\Q5jicplleft  employées  par  l'artiste.  Tournié 
nous  donna  plusieurs  belles  représentations,  notamment  des  Huguenote  et 
de  Sif/iird,  mais  il  tomba  malade  au  beau  milieu  de  la  saison  et  ne  put  la 
continuer,  La  présence  de  M.  Tournié  nous  valut  d'applaudir,  uialheu- 
nnisement  trop  peu  souvent,  sa  femme,  M""*  Ribes-Tournié,  douée  alors 
d'une  jolie  voix  de  soprano  dramati(iue,  qui.  depuis,  est  devenue  franche- 
ment une    voix  de  soprano   léger.  Nous   eùme>^    luss:    cette  année-là,  les 


l'attaque    DC    moulin    —    PATKIE  203 


promiers  essais,  commf  fort  téuor,  de  M.  Fontcix  jeune,  engagé  comme 
troisième  t«''nor.  Ce  jeune  artiste  chanta  d'un  organe  soiior»'  «'t  vigoureux  et 
sans  trop  do  maladresses  gu«'lqu<'s  rùles  du  vieux  rêiK^rtoire. 

Au  moment  de  sa  nomination,  M.  Castcx  avait  laissé  espérer  qu'il 
monterait  la  \\'alL\i/rie.  Il  n'en  fut  rien.  L'admirable  partition  de  Wagner 
fut  bien  donneur,  cotte  ann»M'-là,  à  Nantes,  mais  sans  1«'  pnîsii^re  de  la  mise 
on  scène.  En  elFet,  avec  l'aide  de  quelques  amis,  j'organisai,  dans  la  salle 
du  Cercle  des  Beaux-Arts,  une  audition  de  la  Wallujrie,  qui  eut  liru  avec 
un  plein  succès  (3  d<^<"embre  1H9^{).  Le  ténor,  M.  Maliaud,  qui  devait 
chaiiliT  Sicgmund.  ayant  ét<^  pris  d'un  enrouement  subit,  le  r«*»l»'  fut  tenu, 
au  pi;>(l  levé,  par  M.  Alfred  l'irnst,  le  distingué  critique  w.ignerien  dont,  ce 
soir-là,  on  entendait,  pour  la  première  fois  intégralement,  la  l)elle 
traduction. 

Au  Théiitre,  la  pretnièpe  ii()ii\<';nii<'  lut  J'utrie,  de  M .  l'aladhile,  «i-uvre 
d'une  médiocrité  honorable,  eonrue  dans  le  siyb'  meyerb«H'rien,  un  peu 
rajeuni,  il  est  vrai,  mais  pas  suflisammeni  pour  avoir  ebance,  à  l'heure 
actuelle,  de  fournir  un»'  fructueuse  carrière.  Ce  grand  opéra  répondait 
bien  à  l'esthétique  bourgeoise  de  M.  Caslex.  11  crut  habile  de  le  donner  aux 
Nantiis  dès  le  d('l)ut  de  la  saison,  «ouïptant  sur  une  belle  série  de  n-présen- 
talions.  L'ancien  directeur  du  casino  de  Saint-Malo  se  trompait.  Le  publi»' 
accueillit  plus  que  froidement  l'œuvre  duc  ompositt'ur  de  Afandnlinaln  et  les 
quelques  rares  belles  page>  qu'il  contient  ne  purent  le  sauver  d'une  chute 
irrémédiable.  Patrie  étiit  pourtant  assez  bien  montée.  M.  Cnstex  avait  fait 
brosser  à  Paris  un  fort  beau  décor  p<iur  le  premier  acte.  L'interprétation, 
confiée  à  NfNL  Vilette,  Tournié.  Devriès,  Ilenriot,  Fuld,  Hjugé,  de  Sézy, 
de  Sézy,  Fonleix,  et  à  M''"  Lloyd  et  Uondejiu.  éUiit  bonne.  Le  grand  ballet 
des  Nations,  par  contre,  était  mal  réglé. 

M.  ('astex  fut  mieux  inspiré  dans  son  seeond  choix.  Cette  fois,  il  devait 
remporter  un  éclatant  succt's.  L'Attaque  du  Moulin.  d'Alfn-d  Bruneau, 
venait  d'être  jouée  à  rOpéra-Comi»|U«'.  M.  Castex  résolut  d«' monter,  sans 
plus  tarder,  l'œuvre  si  vibrante  et  si  dramatique  de  l'original  eom|>ositeur 
du  If  ire.  N^nmoins,  le  directeur  du  (Jrind-ThéAtn»,  qui.  |Kmr  un  opéra 
comme  Patrie,  dont  on  lui  avait  prédit,  d'avance,  le  sort  malheureux,  avait 
fait  un  décor  neuf,  ne  daigna  pas  enciidrer  \'Atta(/ue  duv.s  des  décors 
brossés  spécialement,  ce  qui  eût  été  la  moindre  des  chos«'s.  M.  Castex  se 
servit  de  toiles  prises  à  droite  et  à  gauche,  estimant,  siins  doute,  qu'une 
belle  o'uvre  doit  se  suHire  a  elle-même.  L'événement  lui  donna  raison.  Bien 
({ue  montée,  au  point  de  vue  de  la  mise  en  scène,  avec  un  sans-gAne  qui 
rappelait  les  mauvais  jours  de  la  direction  Morvand,  V Attaque  du  Mautitt 
remport;i  un  suicès  éclatant  et  durable.  L'œuvre  de  Bruneau  fut  jou»'"»' 
douze  fois  pendant  cette  saison  et,  depuis,  elle  a  été  toujours  heureusement 


264  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 

reprise.  Biiuicau  vint  à  Niiiiies  pour  les  répétitioDs  et  il  duigta,  au  milieu 
d'ovations  ciilliousiastes,  la  première  repiV-sciiUition,  qui  eut  liiîu  le  samedi 
]()  février  18'.)4. 

La  veille,  la  répétition  générale  avait  été  troublée  par  un  fâcheux  incident. 
M.  Tournié,  qui,  depuis  environ  un  mois,  était  souvent  indisposé,  fut  pris, 
au  milieu  du  premier  acte,  d'une  complète  aphonie.  M-  Senienac  se  trouvait 
heureuseracnt  là  et,  comme  il  avait  étudié,  à  tout  hasard,  le  rôle  de 
Dominique,  il  remplaça,  au  pied  levé,  M.  Tournié.  M.  Sentenac,  d'aillemrs, 
se  tira  à  son  honneur  de  ce  rôle  et  il  .sut  s'y  faire  applaudir.  Viletle  créa 
avec  talent  le  rôle  de  Merlier.  Françoise  était  personnifiée  de  la  façon  la 
plus  charmante  par  M""  Ribes-Tournié.  M"«  Dhasty  chanta  d'une  voi.x  un 
peu  criarde  le  beau  rôle  de  Marcelline.  M.  Devriès  tint  avec  autorité  celui 
du  capitaine  ennemi.  Par  contre,  la  sentinelle  éiait  assez  médiocrement 
chantée  par  M.  Heniiot.  A  la  dixième  représentation,  le  rôle  de  Fran- 
çoise fut,  par  suite  du  départ  de  M'n«  Tournié,  confié  à  M"'  Salembier, 
qui  le  chanta  d'une  manière  pitoyable. 

M.    Castex  monta  aussi    Tannhœuser.    Mais,  avec  une  inconséquence 
impardonnable,  il  attendit  la  fin  de  la  saison  pour  jouer  la  belle  œuvre  de 
Wagner,  pour  laquelle  il  ne  fit  aucun  frais.  Lorsqu'il  postulait  la  direction, 
M.  Castex  s'indignait  de  la  négligence  apportée  par  ^L  Morvand  à  la  mise 
en  scène.  A  l'en  croire,  il  n'en  serait  pas'de  même  avec  lui.  Toutes  ces  belles 
intentions  n'étaient  que  [mves  galéjades  méridionales.  En  réalité,  ^L  Castex, 
mal  secondé  par  le  régisseur  Descamps,  se  fichait  tout  autant  de  la  mise  en 
scène  que  son  peu  regretté  prédécesseur.  Pour  Tannlui'user,   M.  Castex  fit 
brosser,  en  tout  et  pour  tout,  unie  méchante  petite  ferme  de  trois  mètres  de  ' 
haut  qui  était  censée  représenter  la  Wartburg  et  une  silhouette  de  taureau. 
Pour  la  grotte  du  Vénusberg,  nous  dûmes  nous  contenter  d  une  caverne 
malpropre  du  vieux  répertoire,  et  pour  la  grande  salle  de  la  Wartburg,  de 
l'éternel  palais   rom:in,   servi    avec  une  satiété  écœurante   dans  tous  les 
ouvrages. 

M.  Tournié,  depuis  sa  mésaventure  de  VAtta<jue  du  Moulin,  avait  obtenu 
un  congé  illimité,  puis  avait  fini  par  résilier.  Pour  channer  Tannhœuffer, 
M.  Castex  engagea  un  jeune  ténor,  M.  Gogny,  dont  la  voix  faible  et  sans 
timbre  convenait,  en  réalité,  assez  peu  au  rôle  du  chevalier.  Il  s'en  lira, 
sinon  brillamment,  du  moins  d'une  façon  honorable.  VilcUo  se  fit  souvent 
applaudir  dans  le  rôle  de  Wolfram.  M"*  Dhasty,  une  superbe  Vénus,  joua 
intelligemment  ce  rôle,  dont  la  tessiture  était  trop  élevée  pour  sa  voix. 
M'^o  Lloyd  ne  donna  aucun  caractère  à  Elisabeth  ;  elle  se  contenta  de 
chanter  correctement,  ce  qui  n'est  pas  sullisant  i)uur  le  répertoire  wagnérien. 
Les  autres  personnages  étaient  convenablement  représentés  par  MM.  Fabre, 
Fuîd,  Henriot,  Fonteix  et  Mi»"  Rondeau.    La  Bacchanale  du  premier  acte 


TANNH-CL'SER 


265 


était  rt'ghV  «l'une  fa^on  d(''plorable  ;  l«'s  chœurs,  habillés  de  rostumes  <ii..i 
conques,  furent  niéiliocres.  L'orchestre,  por  contre,  merveilleu>«.'Uienl  dirigé 
par  Minmne,  mériia  les  plus  vifs  éloges.  Après  l'ouverture,  une  chalcureuge 
ovati<»n  salua  le  distingué  chef. 

TannJiœuser  reniporUi,  malgré  U>utes  ses  imperfections,  un  succès  com- 
plet. LNinivre  do  \\'agnfr  se  joua  jusqu'à  la  fin  de  la  saison  au  milieu 
d'api)laudissemonts  unaniiues.  La  première  eut  lieu  —  admirez  ce  choix 
iniclligeni  —  If  mardi  de  Pâques,  27  marsl8î>l,  un  mois  seulement  avant  la 

fermeture  du  Thcâtiv  ! 

La  dernière  semaine  de  la  saison,  M.  Castex  se  décida  àreprendre  Samson 
f^ /)(i/j/a.  L'insuccès  des  deux  années  préct'«dentes  l'efTrayait  d'auUmt  plus 
que  ccrUiins  habitués  du  Théiïtre,  bien  qu'admirateurs  du  chef  d'oeuvre  de 
Saint  Saëns.  le  détournaient  de  le  remettre  à  la  scène,  persuadés  que  sa 
cliute  était  désormais  irrémédiable  à  Nantes.  Je  n'étais  pas  de  ceux-là. 
J'avais  au  contraire  la  conviction  qu'une  partition  géniale  comme  Sanuon 
et  iJalila  Unirait  un  jour  par  triompher.  Il  ne  s'agissait  que  de  savoir 
l'imposer  au  public.  Après  bien  des  hésitations,  M.  Castex  consentit  enfin  à 
faire  une  dernière  tentative.  L'opéra  de  Saint-Sai^ns,  cette  fois,  remporta  un 
succès  complet.  Jano  Dliasty  était  une  suihtIm'  et  Ciïplivante  Dalila.  Ce  n'de 
était  certainement  celui  «jui  convenait  le  mieux  à  la  natuitî  de  son  talent. 

\-.Q  fait  d'opérettes  nouvelles,  .M.  Castex  monta  Ali-liaba  et  le  Dîner  de 
Mfiflt'lun,  un  joli  acte  inédit  de  notre  concitoyen  M.  AbdAllah  Charles, 
>ur  ut»  amusant  livret  de  M.  d'Aubram. 

Un  jeune  élève  du  Conservatoire  de  Nantes,  NL  Baudin,  doué  d'une 
agréable  voix  de  ténor  s'essaya,  cette  année-là,  dans  la  Traciaia 

Au  début  de  la  saison.  r.\dministration  municipale  autorisa  l'installation 
d'un  rideau  d'annonces  au  Grand -Théâtre  et  à  la  Renaissance.  Cette  idt^, 
peu  heureuse,  fut  unanimement  blâmée. 

Mmo  Bouland  vint,  à  la  tin  d'avril,  chanter  Mii>s  Helyctt  et  Carmen.  Elle 
fut  très  fêtée.  Le  lénor  l'uc,  de  l'Opéra,  lit  retentir,  dans  les  Huguenots, 
l«>s  échos  de  la  Renaissance  des  éclats  de  sa  voix  métallique.  Les  amateurs 
d'acrobaties  vocales  s'en  donnèrent  à  cœur-joie.  Les  ténors  Jourdain  et 
Lestellier  vinrent  aussi  »jn  repn»sentation.  Ce  dernier  ne  retrouva  pas  son 
su<'cès  de  jadis. 

Un  accident,  qui  aurait  pu  avoir  de  graves  conséquences,  eut  lieu  le 
lil  décembre  lW);t.   pendant  le  premier  acte  du  Pardon  de  T'  La 

lampe  que  <'or<.'ntin  alhnue  dans  sa  cabane  se  renversa,  l'ess'  elle 

était  remplie  prit  feu  et  une  tîamme,  haute  d'un  mètre,  lécha  le  décor.  Avec 
une  grande  présence  d'esprit.  M.  I.Ary,  qui  jouait  le  rAle  du  cornemuseux, 
jeta  sur  la  lampe  son  large  ehapenn  breton,  ot  la  piétinant  avec  force,  il 
parvint  à  ét«Mndre  ce  ^^ommeui«  ni.nt  ilnie.ndie.  Le  public  montra  un  grand 
calme;  personne  ne  quitta  sa  place. 


2GG 


LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


Le  19  avril  1894,  un  amusant  incident  eut  lieu  tandis  qu'on  jouait  devant 
une  salle  vide  le  Caïd,  de  M.  Thomas.  Un  spectateur  qui  se  trouvait  dans 
une  loge  de  face,  ayant  demandé  qu'on  allumât  la  lampe  électrique  qui  se 
trouve  dans  chaque  loge  et  s'étant  vu  refuser  cette  fantaisie  par  l'économe 
M.  Castex,  qui  ne  gaspillait  pas  la  lumière,  ne  trouva  rien  de  mieux  que 
d'aller  acheter  une  bougie  et  de  l'allumer,  après  l'avoir  plantée  dans  une 
pomme  de  terre.  Les  agents  de  police  expulsèrent  ce  facétieux  personnage 
au  milieu  des  rires  et  des  quolibets. 

Du  12  mai  au  12  juin,  une  troupe  de  comédie  dirigée  par  M.  Minute 
exploita  le  Théâtre. 

Tournées  :  \S Héroïque  Le  Cardunois,  la.  Famille  Pont-Biquet,  Sapho, 
Napoléon,  la  Beauté  du  Diable  (Brasseur),   le  Panache,  le  Fil  à  la  Patte. 


Dans  sa  séance  du  13  mars  1894,  le  Conseil  municipal  réduisit  la  subven- 
tion théâtrale  à  100.000  francs.  Pour  justifier  cette  diminution,  la  troupe 
d'opéra-comique  était  supprimée.  MM.  Teillais  et  Guist'hau,  malgré  toute 
leur  énergie  ne  purent  arriver  à  faire  maintenir  le  chiffre  de  120.000  francs. 
L'extrême  droite,  comme  toujours  d'ailleurs,  se  signala  par  son  acharnement 
contre  la  subvention.  M.  Catta,  demanda  même,  dans  un  discours  long  et 
fastidieux,  l'abaissement  du  subside  à  80.000  francs. 

Deux  candidats  se  trouvaient  en  présence.  MM.  Castex  et  Lafon.  Tous 
les  deux  demandaient  des  remaniements  assez  importants  dans  le  cahier  des 
charges.  Le  Conseil  fit  quelques  légères  modifications  et  M.  Castex  après  avoir 
déclaré  qu'il  se  retirerait  si  on  ne  lui  accordait  pas  tout  ce  qu'il  demandait, 
notamment  la  suppression  de  la  troupe  d'opéra,  pendant  le  septième  mois.  — 
finit  tout  de  même  par  signer. 


SAISON     1892-1893 
OA.STEX,    Directeur 

MiRANNE.  premier    chef  d'tircheslre.  —  Isaye  ue  Tuntou,  deuxième  chef  d'orchestre. 

Desgamps,  régisseur. 

Raynaldi,  chanteuse  légi-re. 


MM.  Ansaldi,  fort  ténor. 

Bauthk,  ténor  en  double. 
JouviN,  deuxième  ténor. 
Sonnet,  troisième  ténor. 
Rey,  baryton  d'opéra. 
FuLD,  baryton  d'opéra-comique. 
Joël  Fabiie,  basse  profonde. 
Laporte,  basse  chantante. 
•     HE  Skzv,  deuxième  l)asse. 
TiARY,  trial. 
MuHUET,  laruette. 
M"""  Fo:i)OR,  soprano  draniaticiue. 
DuASTY,  contralto. 


CoLi-.MiD,  i)remière  duga/on. 
i5()zz.vM,  divetle. 
Lkhcvhf,  deuxième  dugazon. 
Voisine,  troisième  dugazon. 
liÉLiA,  duègne. 

BALLKT 

MM.   IIansen,  maître  «le  ballet. 
M""'  Massom.  première  danseuse. 
Zaci.one,  demi  cai-actère. 
Bi:nr.f:,  travestie. 


M"»"    FŒDOR   —   GRIMAUIi   —   AN8ALDI   —   JOËL   FABRK  267 

Cette  troupe  contenait  des  éléments  do  premier  ordre.  D*abordM"*  Fœdor, 
comédienne  froide  et  inexpérimentée,  mais  chanteuse  de  talent  douée  d'un 
ravissant  organe  de  soprano  dramatique.  M""'  Fœdor  devint  vite  l'artiste 
aimée  des  Nantiiis  qui  n'oublièrent  pas  de  sitôt  la  fai.on  délicieuse  dont  elle 
chanta  liriinni'hilde,  Mar^'uerite,  .lulietle  et  Valentine.  Jo<ïl  Fabre.  avait 
une  fort  belle  voix  de  basse,  sonore,  bien  timbrée,  d'une  grande  étendue. 
C'était  de  plus  un  excellent  (•onu''dion.  Le  ténor  Ansaldi  eut  de  chauds  parti- 
sans parmi  ceux,  de  plus  en  plus  rares  aujourd'hui,  heureusement,  qui 
s'extasient  devant  un  ut  dù^se  lancé  avec  vigueur.  Mais  si  l'organe  de 
M.  Ansaldi  était  remarquable  dans  le  registre  supérieur,  il  était,  par  contre, 
fort  médiocre  dans  le  médium.  Aussi  les  rôles  du  nouveau  r«''pertoire 
étaient  ils  peu  favoraljlcs  à  ce  ténor  qui  les  charitiiicnt.  d'ailleurs  avec  un 
ennui  évident. 

De  la  troupe  primitive  présentée  par  M.  Castex,  ces  trois  artistes  étaient 
les  seuls  vraiment  dignes  de  Nantes.  Les  débuts  se  chargèrent  d'améliorer 
les  autres  emplois.  Le  baryton  Key,  fort  belle  voix, — malheureusement  mal 
conduite,  —  fut  refusé.  Certfiines  personnes  intéressées  à  conserver  cet 
artiste  suscitèrent  du  tapage  quand,  le  surlendemain  de  son  échec,  il  chanta 
VAfricainr.  Mais  les  silllels  des  balcons,  des  lo^'es  et  de  l'orchestre  eurent 
raison  des  applaudissements  de  commande  partis  des  galeries  supérieures. 
M.  Rcy  fut  remplacé  par  M.  de  Backer  qui  ne  fut  p;Ls  plus 
heureux. 

iMifin,  le  troi^icnic  haiyton  jut'scnic,  M.  <  irini.iutl.  fiii  reçu.  La  vuix  de 
cet  artiste  n'était  pas  de  première  qualité,  mais  elle  était  conduite  avec  goût 
et  habileté.  Elégant  cavalier,  M.  Grimaud  acquit  vite  les  sympathies  du 
public.  Il  les  conserva  pendant  les  deux  années  qu'il  passa  à  Grasiin. 
M"' Collard,  duga/on,  eut  comme  remplaçante  M""  Kerlord,  douée  d'une 
jolie  figure,  d'une  jolie  voix  et  d'un  joli  talent  de  comédienne.  M"»'  Kondeau 
revint  comme  dugazon,  M''«  Lefèvre  ayant  été  refusée.  M.  Castex  conserva 
néanmoins  cette  dernière  C(Mnnie  chanteuse  supplémentitire.  Furent  égale- 
ment refusés  M.  Laporte,  remplacé  par  NL  B«'rtrand,  qui  tomba  lui  aussi, 
et  M.  Jouvin.  Ils  eurent  pour  successeurs  MM.  Péloga  et  Burgat.  qui, 
d'ailleurs,  ne  valaient  guère  mieux. 

M.  Castex  eut  les  plus  graiules  diliicultes  ]»our  faire  ndnietlre  un»?  chan 
teuse  d'opérette.  Devant  l'hostilité  du  publi»-.  M"*  Bo/./ani  résilia. 
M"'  Lesœur  lui  succéda.  La  voix  de  cette  artiste  était  dure  et  d'une  fraî- 
cheur douteuse,  mais  elle  avait  de  grandes  qualités  de  comédienne.  La 
Commission,  qui  avait  pourtant  accepté  avec  une  inconcevable  faiblesse, 
comme  première  chanteuse  légère,,  une  cantatrice  sans  valeur  comme 
M""  Raynaldi,  refusa  impitoyablement  M""  Lesœur.  Nous  toralx\mes  alors 

e  mal  en  pis.  M"""  Borclli  et  Vialda  subirent,  elles,  des  éoh«H:s  lamenta- 


268  LE  THÉÂTRE  A  NANTES 

\ 

blos  ot  nK'riti's.  Mais  pondant  tous  ces  dt^'buts  successifs,  le  temps  avait 
.marché  et  l'on  était  arrivé  au  29  décembre,  sans  chanteuse  d'opérette.  Or,  il 
existait,  à  cette  époque,  dans  le  cahier  des  charges,  un  article  infligeant  au 
directeur  une  amende  de  500  francs  par  jour  quand  les  débuts  n'étaient  pas 
termines  le  G  décembre.  M.  Kticnnez,  alors  adjoint  aux  Beaux-Arts,  esli- 
manl.  avec;  assez  de  raison,  d'ailleurs,  que  si  M.  Castex  n'avait  pas  trouvé 
de  chanteuse  d'opérette  convenable,  cest  qu'il  ne  voulait  pas  y  mettre  le 
prix,  l'avertit  que  l'amende  prévue  lui  était  appliquée.  M.  Castex  aussitôt 
engagea  une  charmante  divettc,  M''*'  Rosalia  Lambrecht,  des  Folies-Dra- 
matiques, qui,  pour  le  chiffre  de  3.000  francs  par  mois,  consentit  à  venir  à 
Nantes,  Néanmoins,  comme  les  débuts  ne  pouvaient  être  terminés  avant  le 
'.i  janvier,  c'était  une  amende  de  1  1,.jO0  francs  que  M.  Castex^  était  invité  à 
verser  dans  la  caisse  municipale.  L'infortuné  directeur  se  précipita  à  la 
Mairie,  implora,  cria,  menaça  de  dotiner  sa  démission,  d'alxindonnor  son 
cautionnement,  mais  le  Maire  fut  inllexible.  M,  Castex  qui  ne  se  gênait  pas 
pour  crier  contre  les  journalistes  quand  ceux-ci  avaient  le  dos  tourné,  b-s 
trouva  bons,  cette  fois-ci,  pour  faire  campagne  en  sa  fav«'ur.  L'un  d'mire 
eux,  à  qui  ^L  Castex  n'en  fui  pas  plus  reconnaissant,  d'ailleurs,  une  fois 
la  chose  obtenue,  se  donna  la  peine  de  faire  signer  par  les  abonnés  et  les 
habitués  du  Théâtre,  une  pétition  demandant  à  l'Administration  municipale 
de  ne  pas  appliquer  au  directeur  l'amende  encourue.  La  Ville  accéda  finale- 
ment à  cetic  requête. 

^L  do  Sézy,  deuxième  basse,  dut  résilier  par  suite  d'une  maladie  de  poi- 
trine, à  laquelle  il  succomba  dans  le  courant  de  janvier.  Il  fut  remplacé  par 
M.  Marpoint.  La  troupe,  avec  les  nouveaux  éléments  apportés  par  suite  des 
refus,  offrait  donc,  à  part  M'^**  Raynaldi,  dont  la  beauté  et  l'élégance  no 
suffisaient  pas  à  faire  une  bonne  chan"h.Mise,  un  ensemble  des  plus  satisfai- 
sant. M.  Castex  avec  une  rare  maladresse,  ne  sut  pas  en  tirer  tout  le  parti 
qu'il  aurait  pu. 

La  mise  en  scène,  déjà  très  négligée  l'année  précédcinr.  n.w,i,ii;,,i,i  ,i,. 
plus  en  plus  pendant  cette  camjiagne.  M.  Castex  n'avait  qu'une  seule  et 
imi(|ue  préoccupation  :  renouveler  constamment  rafiiche.  îl  faisait  passer 
les  pièces  imparfaitement  sues,  n'ayant  ludlement  U-  désir  de  les  maintenir 
au  répertoire.  Durant  cette  campagne,  ou  fit  à  Graslin  un  \éritable  travail  di' 
Casino.  Pourtaut  la  reprise  de  Samson  et  Dalila,  bien  prép^irée  et  interpré- 
tée excellemment  par.Tane  Dhasty,  Grimaudet  Fabreet  honorablement  par 
M.  Ansaldi,  aurait  dû  prouvera  M.  Castex  qu'un  bel  opéra,  mis  au  point, 
peut  fournir  à  Nantes  une  longufe  série  de  représentations.  Le  ehef-d'onivic 
de  Saint-Saëns  se  releva  brillamment,  cette  année  là,  de  ses  échecs  primitifs  : 
on  le  joua  douze  fois . 

Pour  donner  une  idt^o  de  la  parcimonie  apportée  par  M.  Caste\  u.tn-  ia 


OTHELLO    —    THAMARA  £60 


mise  en  scène,  je  rappellerai  l'aventure  de  la  machine  de  Sigurd,  dont  ou 
s'amusa  fort  à  l'époque.  M.  Castex,  au  moment  de  la  reprise  annuelle  de 
l'opéra  de  Keyer,  trouva  que  la  location  de  la  marliine  nécessaire  pour 
produire  la  vajMjur  coûtait  trop  cher.  Il  résolut  donc  do  faire  l'économie  de 
la  chaudière  dont  on  sh  servait  depuis  sopt  ans  et  qui  avait  toujours  donné 
d'excellents  ré.suilats.  M.  Cantex  loua,  comme  générateur,  l'éture  à  désin- 
fection ;  mais  ctîtte  étuve,  qui  ne  peut  fournir  qu'une  pression  d'une 
atmosphère,  n'envoya  dans  les  tuyaux  qu'une  quantité  dr  vapeur  insuf- 
fisante. L'embrasement  du  lac  fut  piteux.  On  se  wîraii  cru  dans  un  CbMtre 
de  dixième  ordre.  L'expérience  était  suffisante.  Néanmoins,  .NL  Castex 
s'enU^ta  à  ne  pas  reprendre  l'ancienne  machine.  Il  en  essaya  successivement 
deux  autres.  Fiiialemout,  ces  différentes  tentatives  lui  coûtèrent  plus  cher 
que  la  location  habituelle. 

M.  Custex  avait  traité  avec  l'éditeur  Ricordi  pour  Othello  et  FaUtaff, 
de  Verdi  et  MéphUtophélès,  de  Boîto.  La  reprise  de  cette  dernière  œuvre 
n'eut  aucun  succès.  M.  Abraham,  chef  machiniste,  avait  construit,  pourtant, 
un  tnic  assez  curieux,  au  moyen  duquel,  au  troisième  tableau,  Faust  et 
Mcphislophélès  s'envolaient  dans  les  airs.  Falaiaff  ne  fut  pas  représenté. 

Othello  se  joua  le  2  février  1895.  Cette  œuvre  de  Verdi,  qui  marque  la 
seconde  étape  de  l'évolution  musicale  de  l'illustre  compositeur  italien, 
contient  des  pages  de  tout  premier  ordre.  Je  suis  persuadé  qu'Othello  aurait 
eu  du  succès  si  M.  Castex  s'étai»  seulement  donné  la  peine  de  le  monter 
proprement.  Mais  le  directeur  du  Grand-Théâtre  n'avait  d'estime  que  pour 
le  Verdi  du  Troutère.  La  mise  en  scène,  le  ballet  d'Othello  éUiienl  grotes- 
([ues  et  l'ouvrage  fut  représenté  dare  dare,  avant  d'être  su.  M.  Grimaud 
chanta  et  composa  avec  habileté  le  rAle  difficile  d'Iago,  M"«  Fiedor  chanta 
remarquablement  Desdémone,  M.  Ansaldi  eut  de  bons  moments  dans 
Othello,  mais  aussi  quelques  fichus  quarts  d'heure.  Les  autre*  rôles  étaient 
bien  tenus  par  MM.  Fabre,  Barthe  et  Jane  Dhasty. 

M''"  Haynaldi  n'était  engagée  que  pour  six  mois.  Elle  fut  remplacée, 
pendant  le  mois  d'avril,  par  M"'  Julia  Fotel,  dont  le  très  beau  talent  de 
cantatrice  et  de  comédienne  arriv:iil  à  faire  pardonner  les  défaillances 
d'une  voix  très  fatiguée.  Ce  fut  cette  artiste  qui  créa  le  rôle  de  Sanluzia, 
dans  Caoalleria  Rusticana  (10  avril  1895).  Cette  vulgaire  et  brutale 
composition  de  la  jeune  école  italienne  n'eut  aucun  succès.  L'intermeuo, 
qui,  partout  alors,  était  bissé  avec  enthousiasme,  fut  à  peine  applaudi. 
Ceci  est  à  signaler.  Les  autres  rôles  furent  tenus  par  M.M.  Ansaldi, 
Fabro  ;   M-"  Kerlord  et  Bélia. 

La  troisième  nouveauté  de  la  saison  fut  une  œuvre  d'un  haut  intérêt, 
Thamara  de  notre  éminent  concitoyen,  M.  Bourgault-Ducoudray.  Ce(t« 
partition,  d'une  si  délicieuse  couleur,    fut  montée  sons  soin  aucun  et  vr^. 

44 


270  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


une  précipitation  regrettable.  M.  Bourgault  Ducoudray,  qui  avait  accepté  de 
diriger  son  ouvrage,  y  renonça  au  dernier  moment.  La  première  de 
Thamara  eut  lieu  le  25  avril  1895.  M.  Bourgault-Ducoudray  assista  à  la 
représentation  dans  la  loge  de  la  Mairie.  Toute  la  soirée,  il  fut  l'objet  de 
chaleureuses  ovations  et  il  fut,  à  la  fin  du  dernier  acte,  traîné  sur  la  scène.  Les 
interprètes  de  7'Aamara étaient  MM.  Ansaldi,  Grimaud,  Fabreet  M"«Dhasty. 

Les  opérettes  nouvelles  furent  Cousin-Cousine,  Toto  et  Rip.  Cette 
dernière  pièce,  qui  demande  une  grande  mise  en  scène,  fut  montée  d'une 
fa(^on  grotesque.  M"*  Lambrechts  ayant  terminé  son  engagement  fin  mars, 
le  rôle  principal  de  l'opérette  de  Planquette  fut  créé  par  M'"*  Martin-Goët. 
M.  Castex  joua  aussi  deux  ballets  inédits  :  le  Violon  enchanté,  de 
M.  Kaiser,  Qi  Au  Printemps,  de  M.  Bollaërt.  L'Attaque  du  Moulin  l\x\ 
reprise  le  2  mars.  Cette  fois-ei,  on  joua  l'ouvrage  avec  les  costumes  de  1870. 
Bruneau  vint  à  Nantes  avec  l'intention  de  diriger  la  représentation,  mais, 
après  la  répétition,  il  y  renonça,  estimant  avec  raison  que  M.  Castex,  selon 
sa  déplorable  habitude,  faisait  passer  l'œuvre  avant  qu'elle  ne  fût  sue.  Le 
compositeur  asista  à  la  soirée  dans  une  loge  de  face.  A  la  chute  du  rideau, 
il  fut  appelé  à  grands  cris  sur  la  scène. 

Le  12  février  1895,  Sigurd  atteignit  sa  cinquantième  représentation.  A 
cette  occasion,  AL  Castex  aurait  pu  organiser  une  soirée  de  gala.  Toujour:; 
mal  conseillé,  il  s'y  refusa. 

Dans  le  courant  du  mois  de  février,  un  des  tuyaux  du  bassin  qui  se  trouve 
au-dessus  de  la  scène,  à  Graslin,  creva  par  suite  de  la  gelée.  Il  s'ensuivit 
uns  inondation  qui  atteignit  une  partie  de  la  scène  et  le  magasin  d'habille- 
ments. Il  y  eut  une  dizaine  de  mille  francs  de  dégâts. 

Mn  avril,  Bucognani  vint  en  représentations. 

Tournées  :  Les  Joies  du  Fojjcr,  le  Chat  Noir,  Athalie  (Marie  Laurent), 
Pour  la  Couronne  (Philippe  Garnier),  Monsieur  le  Directeur,  Madame 
Sans-Cène,  Une  Mission  délicate.  Cabotins  (Coqueliu  aîné),  Gabrielle 
(Coquelin  aîné,  M""  Favart),  la.  Joie  fait  peur  (Coquelin  aîné),  la  Marraine 
de  CJiarletj,  VAbbé  Constantin,  les  RicocJiets  de  l'Amour,  YEngrenayo, 
la  Fille  bien  gardée  (Baret),  VHàtel  du  Libre-Echange  (Marie  Kolb), 
JJirorrons  (Marie  Kolb). 

*  # 

Le  4  février  1H95,  la  subvention  de  100,000  francs  fut  votée  sans  aucune 
opposition.  Plusieurs  remaniements  heureux  furent  apportés  au  cahier  des 
eharges.  L'orchestre  fut  augmenté  de  deux  premiers  violons.  Un  para- 
graphe spécial  obligea  le  directeur  à  fournir,  chaque  fois  que  cela  est  néces- 
saire dans  les  ouvrages  modernes,  les  instrumentistes  supplémentaires.  Une 
commission  spéciale  de  cinq  membres  fut  créée  pour  statuer  sur  les  musi- 
ciens de  l'orchestre.  La  pénalité  de  500  francs   infligée  au  directeur,  par 


VILLE  DE  NANTES 


1  T 


THEATRE  CRASLIN 


Plan  du  Grand-Théâtre   (état  actuel) 


HENRY   JAHYER  2T1 


jour  de  retird  dans  la  «omposition  de  la  troupe  à  partir  du  9  d/'cembre,  fut 
réduite  à  30()  francs.  Enfin,  pour  éviter  les  scandaleuses  razzias  de  billets, 
une  clause  défendit  au  direct<'ur  de  délivrer,  à  la  mt^nio  personne,  plus  de 
dix  places  contiguës  de  la  môme  catégorie  et  plus  de  cinq  places  de 
catégories  différentes.  Une  pétition  ayant  réuni  170  signatures,  avait  été 
remise  au  Conseil  municipal  pour  demander  la  municipalisalion  de 
l'excellent  chef  M.  Miranneet  l'augmentation  du  quatuor  à  cordes.  Comme 
on  l'a  vu  plus  haui,  cette  augmenLition  fut  accordée,  du  moins  en  co  qui 
regarde  les  violons,  quant  à  la  municipalisation  de  M.  Miranne  elle 
eût  été  votée  sans  difficulté  sans  l'intervention  de  M.  Guibourd. 
L*ex-maire  de  Nantes  parvint  à  faire  échouer  la  combinaison  proposée, 
et  qui  sauvegardait  les  intérêts  artistiques  de  notre  scène.  Mais  M.(iuibourd 
ne  pouvait  supporter  qu'on  municipalisât  M.  Miranne,  successeur  de 
son  excellent  ami  Abraham  Lévy.  Le  rôle  de  M.  Guibourd,  au  Conseil 
municij»!,  fut  toujours  néf;iste  à  l'art  musical.  Malgré  son  étiquette  de 
consorvat<^ur,  M.  Guibourd  ne  fit  jamais  que  détruire  et  désorganiser.  Si 
la  municipalisation  du  chef  d'orchestre  ne  fut  pas  obtenue,  le  Conseil  intro- 
duisit, du  moins,  dans  le  cahier  des  charges,  un  article  portant  que  la  nomi- 
nation des  chefs  d'orchestre  devrait  être  agréée  par  le  Maire. 

M.  Castt»x  ne  se  reprcsmita  pas.  Il  comprit  qu'il  pouvait  fort  bien  courir 
à  un  échec  et  il  préféra  s'abstenir.  M.  Henry  Jahyer,  secrétaire  général  de 
l'Opéra-Comique,  lui  fut  donné  comme  successeur.  Celui-ci  demanda  de 
remplacer  la  troupe  d'opérette  soumise  aux  débuts  par  une  troupe  d'opéra" 
comique.  Le  Conseil  municipal  accorda  volontiers  ce  changement. 

La  nomination  du  nouveau  directeur  fut  accueillie  par  toute  la  presse 
nantaise  avec  la  plus  grande  satisfaction.  Henry  Jahyer,  qui  était  d'une 
excellente  famille,  se  distinguait  du  directeur  que  nous  venions  de  subir 
par  son  instruction  de  lettré,  par  son  éducation  d'homme  du  monde,  par  ses 
allures  cordiales  exemptes  de  tout  cabolinisme.  Causeur  sympathique  et 
aimable,  journaliste  actif  et  intelligent,  en  relation  avec  tout  le  monde 
artiste,  Jahyer  paraissait  à  même  de  donner  à  notre  première  scène  le  plus 
vif  éclat.  Ses  projets  étaient  superbes.  Il  voulait,  d'abord,  monter  'i 
Walkyrie  Si^ec  la  nouvelle  traduction  d'Alfred  Krnst,  et  cela  n'était  pas. 
comme  avec  M.  Castex  ou  avec  d'autres  directi'ursqui  vinrent  ensuite,  un 
projet  en  l'air.  Jahyer  avait  signé,  avec  les  éditeurs  de  \ii  W'alkyrie,  un 
traité  en  règle  et  les  partitions  furent  envoyées  à  Nantes.  Panui  les  autres 
grandes  nouveautés  promises,  il  faut  aussi  signaler  trois  œuvres  inédites, 
Brisris,  l'opéra  que  Chabrier  avait  laissé  inachevé,  PinySin,  de  M.  Maré- 
chal et  C/mnso/»  AoureZ/c,  de  M.  Bordicr.  Hélas  I  tous  c»»- 1v.mm\  i.r,.i.i< 
ne  devaient  pas  se  réaliser. 

Pendant  l'été  de  181)5  d'importantes  réparations  furent  faites  au  Grand- 


272  le"^théatre  a  naktes 


Théâtre.   La  façade  fut  entièrement  remise  à   neuf.  Le  grand  restibule 
dont  certaines  aculplures  de  la  voûte  étaient   rongées  par  l'humidité,  fut 
restauré  de  fond  en  comble.  Les  statues  de  Corneille  et  de  Molière  furent 
nettoyées  ;  —  elles  en  avaient  besoin.  L'escalier  d'honnf^ur  fut  refait  et  les 
lustres  furent  redorés.  Un  nouveau  système  de  cliauffage  fut  installé  dans  la 
galle  et  sur  la  scène.  Les  water-closeta  reçurent  d'heureuses  améliorations 
au  point  de  rue  du  confortable  et  de  la  propreté.  On  installa  enfin  des  tambours 
aux  portes  du  vestibule.  Toutes  les  peintur«'S  furent  lavées  et  de  nouvelles 
lampes  électriques  furent  mises  dans  les  loges,  de  façon,  cette  fois,  à  ne  paa 
gêner  la  rue  des  spectateurs.  Dans  le  foyer  du  public  on  plaçaquatre  immenses 
et  superbes  aquarelles  de   notre  compatriote  Charles  Toché,  d'une  couleur 
puissante  et  harmonieuse,  d'un  grand  effet  décoratif.   Les  deux  premières 
symbolisent,     l'une     les     goûts     artistiques,     l'autre     les     occupations 
commerciales  de   la    Ville    de    Nantes  ;   la  troisième    et    la    quatrième 
caractérisent,  par  des  personnages,  le  drame  romantique  et  la  comédie. 
D'importantes  modifications   furent  apportées    à  l'orchestre.    Le    niveau 
du  plancher  fut  baissé  d'environ  quaire-vingts  centimètres.  Depuis  longtemps 
celte  réforme  était  réclamée.  Elle  eut  pour  résultat  de  donner  à  l'orchestre 
une  sonorité  excellente  et  pondérée,  mais  elle  mécontenu  fort  Messieurs 
les    instrumentistes    qui    se    trouvaient    ainsi    privés    de  la   vue    de  la 
scène  et  de  la  faculté  de  causer  avec  les  spectateurs  du  premier  rang  des 
stalles.  L'énorme    proscenium  fut  considérabieracnt  réduit  ;   cola  permit 
de  gagner  un   rang  de  places   au   parquet.    Par  contre,  la    baignoire  du 
fond  fut  supprimée  pour  permettre  de  donner  au  parterre  une  nouvelle 
sortie.    Un  passage  fut  aussi   ouvert  sur  toute  la    longueur  du   parterre. 
Les  places  supprimées  furent  remplacées  par  des  strapontins  se  relevant 
automatiquement.  Enfin,  pour  l'établissement  du  truc   de   la  chevauchée 
des  Walkyries,  on  pratiqua  dans  les  murs  de  la  scène,  côté  cour  et  côté 
jardin,    deux  larges    ouvertures   à    la    hauteur    du    premier  étage.    Ces 
ouvertures    furent    fermées    par    des    portes    en    fer.    Plusieurs   décors, 
notamment  le  deuxième  acte  de  Mireille,  le  quatrième  acte  de  Carmen  et  le 
quatrième  acte  de  Roland  à   Ronceoaux,  qu'on    devait  utiliser  dans   la 
Walhyrie,  furent  repeints. 

En  plus  des  abonnements  au  mois  et  à  l'année,  [M.  Jahyer  créa  des 
abonnements  au  jour.  Ces  abonnements  n'étaient  jpas  personnels.  Tout 
abonné  était  libre  de  disposer  à  son  gré  de  la  place  qu'il  n'oocupait  pas. 
M.  Jahyer  essaya  aussi  [de  donner  les  matinées  de  la  Renalsianee  à  prix 
entier.  Cette  innovation  ne  réussit  pas.  Esiimant,  avec  juste  raison,  que 
doux  représentations,  par  semaine,  à  moitié  prix,  faisaient  du  tort  au 
Grand-Tliéàtre,  le  directeur  prit  un  moyen  terme  :  les  matinées  furent 
données»  prix  réduit.  Les  suooesseurs  de  M<  Jahyer  maintinrent  ce  s^st^ttie. 


LATAnGE  —  m'**   BCHL 


m 


La  Ipoupf  réunie  par  Nf ,  Jahyer  était  des  plus  complète. 


SAISON     1895-1896 

Henry    JAHYER,    Directeur 

MiRAMNE,  pr<'ini'»r  clief  d'orchestre.  —  Bokcuot,  deuxième  chef  d'orehe«lr« 
Nkrtai,.  f'uixMur 


MM.  Lafarok,  premier    t^nor    en    tous 
genres. 

Claude  Maks,  fort  téacr. 

Gaxsmkuve,  U'iior  léger. 

Gbimauu.  barvton  d'opéra. 

Ohacmb.    baryton  d*op*rn-«omi«7ue. 

ViNCBK.  baase  d'opéra. 

AnTua,  liafiM'  d'op^ra-oomiqa«. 

AitNAun.  deuxième  baaae. 

Latit,  trial. 

MoBDKT.  lamette. 

MtLUtuL'E,  comique. 

Ni^MOT,  di*nxi^me  trial. 

PanxaaMAnp,  troiai^me  ténor. 

M""  Tti-PA,  falcon. 

Bi  i.H,  Boprano  If'ger. 


LtiL.HDRT,  ••eoad  aoprano. 

Eva  Romaik,  coritrult*-). 

BoKiBA5,  tàleon  en  doubla. 

BotiT,  dugaaon. 

MouLix,  deuxi^m''  du^axon. 

Maria   Lambrechts,  deaxi<'mf'   du- 

gazoo. 
NfewoT,  troiaiànte  dngazon. 
I<£lia,  dii>''(^e. 

BALLET 
M.    HoLTZBB,  maltrvdo  ballet. 
M-"  Hf>giiia  Baudino,  premi.-r.'  danaeuae. 
.N'er..y,  demi-caractère. 
VwcErrr.  travestie. 


Cette  troupe,  à  pnrt  quelques  poinL<  faibles,  ét^iit  do  premier  ordre.  Le 
ténor  Lafarge  était  un  admirable  artiste,  chanteur  ronsommé,  com»'idien 
intelligent.  Les  vrais  musiciens  n'oublieront  pas  de  longtemps  la  remarquable 
manière  dont  il  interpréta  Samson  et  DnlUa  et  les  P^cheurg  de  Perles. 
Malheurcusemonf,  Lafarge  était  sujet  à  des  indispositions  fréquentes.  D'un 
autre  côté,  il  déplaisait  aux  amateurs  du  vieux  répertoire  qui  estiment,  avant 
tout  le  colpo  di  gota.  Il  fallait  donc  à  côté  de  Lafarge  un  fort  ténor  solide 
pour  pouvoir  tenir,  à  la  satisfaction  de  certains,  les  rôles  de  Guillaume  ou 
d'Eléazar.  M.  Jahyer,  qui  savait  parfaitement  que  Lafarge  ne  chantait  pas 
ses  rôles,  avait  engagé  un  jeune  débutant,  M.  Claude  Mars,  doué  d'une  voix 
assez  éclatante.  Le  calcul  était  habile  ;  si  M.  Mars  avait  eu  plai  de 
planches,  tout  eût  été  parfait  et  les  mécontent»  n'auraient  eu  aucun  prétexte 
de  plainte.  Le  ténor  léger  Cazeneuve,  le  baryton  d'opéra-comique  Gbasne, 
la  basse  chantante  Artus  étaient  tous  des  artistes  de  valeur  dignes  des  plus 
grandes  sc«''nes.  De  mAme  M.  Vinrhe,  basse  profonde,  chanteur  accompli  et 
qui,  pourtant,  no  trouva  pas  grâce  devant  le  parti-pris  do  certains  abonn<^; 

ceux  ci.pourtant.aoceptèrentsans difficultés M*«Tylda, un sopranodramatiquc 
d'une  taille  minuscule  et  dont  la  voix  criarde  et  peu  juste  fit  soufTrir  cruel- 
lement nos  oreilles  pendant  toute  la  saison.  Parmi  les  femmes,  il  faut  riter 
M'i*  Bûhl,  délicieuse  chanteUM  légère  qui  arrivait,  comme  MM.  Lalargeet 
Artus,  de  l'Opéra-Comlque,  et  M««  Era  Romain,  un  contralto  à  la  roii 
chaude  et  veloutée.  Il  convient  aussi   de  ne  pas  oublier  parmi  1m  booi 


274  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


éléments  de  cette  troupe  le  régisseur  général,  M.  Nerval,  un  artiste  véri- 
table, un  metteur  en  scène  hors  ligne.  Los  débuts  furent  des  plus  mouve- 
mentés. Un  certain  groupe  d'abonnés  et  d'habitués  du  Théâtre  prenaient 
plaisir  à  susciter  des  dilficultés  à  M.  Jahycr,  dont  la  jeunesse,  l'esprit 
indépendant  et  hardi,  déplaisaient  à  leur  encroûtement  routinier.  Voir  ouvrir 
une  saison  théâtrale  par  Samson  et  Dalili  leur  paraissait  une  atteinte  portée 
à  leur  dignité  personnelle!  !  Lafarge,  fatigué  le  soir  de  son  premier  début 
dans  Samson  et  Dalila,  avait  pris  une  éclatante  revanche  quelques  jours 
après  dans  le  même  rôle.  Il  avait  suscité  un  véritable  enthousiasme  et  son 
succès  avait  continué  dans  les  Pêcheurs  de  Perles  et  dans  Roméo  et 
Juliette.  Quelle  ne  fut  donc  pas  la  stupéfaction  du  public  quand  on  apprit, 
pendant  le  dernier  entr'acte  de  Roméo,  que  M.  Lafarge  venait  d'être  refusé 
par  24  non  contre  16  oui.  Dès  que  l'excellent  artiste  apparut,  ce  fut,  dans  la 
salle,  une  tempête  de  cris  de  :  Vive  Lafarge  !  A  bas  la  Commission  !  Devant 
le  tapage,  le  rideau  dut  se  baisser  et,  quelques  instants  après,  M.  Nénot, 
régisseur  parlant  au  public,  vint  annoncer  que  M.  Lafarge,  très  émotionné 
par  la  nouvelle  de  son  refus  était  hors  d'état  de  chanter  le  cinquième  acte. 
Le  public  quitta  la  salle  toujours  aux  cris  de  :  Vive  Lafarge  !  A  bas  la  Com- 
mission !  Démission  !!  Deux  à  trois  cents  personnes  coururent  à  la  sortie  des 
artistes.  Quand  Lafarge  parut  on  l'acclama  et  on  le  porta  en  triomphe  à  la 
Grande  Brasserie.  Là,  le  ténor  remercia  les  assistants  qui  lui  affirmèrent 
qu'ils  mettraient  tout  en  œuvre  pour  le  faire  rester  à  Nantes,  puis  une  voix 
cria  :  «  Allons  chez  Etiennez  !  »  et  la  foule  se  précipita  vers  la  place 
Royale,  où  demeurait  l'Adjoint  aux  Beaux-Arts.  Mais  la  police  arriva  en 
nombre  et  les  manifestants  se  dispersèrent.  Le  lendemain,  on  jouait  les 
Pêcheurs  de  Perles.  La  salle  était  comble.  Dès  que  Lafarge  parait  la  mani- 
festation commence.  Les  rappels  succèdent  aux  rappels,  les  ovations  aux 
ovations.  Le  spectacle  devait  se  terminer  par  les  Rendez-vous  bourgeois. 
Pendant  le  dernier  entr'acte,  le  public  prend  la  résolution  do  ne  pas  laisser 
continuer  la  représentation  si  on  ne  lui  donne  pas  satisfaction.  Le  tapage 
recommence.  M.  Nénot  parait.  Quinze  cents  voix  réclament  l'admission  de 
Lafarge.  Le  régisseur  se  retire  et  revient  quelques  instants  après  pour 
déclarer  que  «  l'Administration  municipale  ne  peut  statuer  séance  tenante  », 
et  il  demande  de  laisser  achever  la  soirée.  Le  boucan  éclate  à  nouveau.  Enfin, 
au  bout  d'un  certain  temps,  M.  Nénot  revient  une  troisième  fois  pour  faire 
connaître  que  :  «  l'Administration  municipale  va  aviser  à  donner  satisfac- 
tion au  public.  »  Cette  déclaration  ramène  le  calme  et  la  représentation  peut 
se  terminer.  Le  lendemain,  le  Maire  prit  l'arrêté  suivant  : 

»  Le  Maire  de  la  Ville  do  Nantes,  chevalier  de  la  Légion  d'honneur. 

»  Vu  l'article  10  du  cahier  des  charges,  lequel  édicté  que  la  Commission 
des  débuts  sera  composée  de  tous  les  abonnés  à  l'année  et  d'un  nombre 
égal  d'abonnés  au  mois  et  que,  dans  le  cas  où  ces  derniers  seraient  en  plus 


LES  INCIDENTS  LAPARCE  —  MARGUERITE  VAILLANT-COUTURIER      275 


grand  nombn;  que  les  premiers,  on  n'admettrait  au  vote  qu'un  nombre 
d'abonnés  égal  à  celui  des  abonnés  à  l'année  et  ce,  par  voie  de  tirage  au 
sort; 

»  Considérant  qu'à  l'ouverture  de  la  campagne  théâtrale,  le  nombre  de>j 
abonnés  au  mois  était  égal  à  celui  des  abonnés  à  l'année  et  qu'il  n'y  a  \)n> 
eu  par  suite,  à  procéder  à  un  tirage  au  sort; 

»  Mais  qu'au  cours  et  notamment  dans  la  seconde  moitié  d'octobre,  un 
certain  nombre  d'abonnés  au  mois  se  sont  fait  ins«rire,  que  ces  abonnés 
venant  après  la  confection  de  la  liste  de  la  Commission  des  débuts  ne 
devaient  pas  voter  ; 

»  Que  cependant,  en  fait,  |)lusieurs  d'entre  eux  ont  pris  part  au  vote  le 
samedi  20  octobre,  relatif  au  ténor,  M.   Lafarge. 

»  Que  ce  vote  est  [jar  suite  tiiLiclK-  de  nuUitt-  ; 

»  ARRETONS: 

»  Article  premier.  —  Le  vote  du  s.miedi  2(»  octobre  IROô  e^t  aiuiulé 
en  ce  qui  concerne  M.  Lafarge. 

»  Art.  2.  —  Un  nouveau  vole  sur  l'aduiisMun  de  M.  Lalargc  aura  heu 
sans  nouveau  début,  à  un  jour  qui  sera  ultérieurement  fixé. 

»  Art.  3.  —  M.  le  Commissaire  central  est  chargé  d'assurer  l'exécution 
du  prés»>nt  arrûlé. 

»  En  l'Hôtel-de- Ville,  à  Nantes,  le  28  octobre  1895. 

Lt;  Main', 
»  Etienne  Etiennez.  adjoint.  * 

Au  second  scrutin,  M.  Lafarge  fut  accepté  par  39  oui  contre  9  non.  Ce 
résultiit  dépassait  toutes  les  espérances  de  ses  amis  (jui  ne  comptaient  pas 
sur  une  victoire  aussi  complète.  Le  remarquable  ténor  ét;ut  donc  des  nôtres; 
hélas!  pour  trop  peu  de  temps.  Mais  avant  d'arriver  aux  nouveaux  incidents 
que  suseita  M.  Lafarge,  finissons-en  avec  les  débuts. 

M.  Vinchc  fut  remplacé  par  .\L  Lavallée  qui  ne  fit  qu'une  seule  appari- 
tion à  la  Renaissance.   Cet  artiste  était  complètement  aphone.  Le  public, 
ordinairement  si  calme  et  si  bon  enfant  des  matinées,  se  jxiya  lui  aussi  un 
chahut  assez  bien   conditionné.  On  se  serait  cru  transporté  dans  (|ueique 
théâtre  du  Midi.  La  basse  Bordeneuve,  qui  jouissait  d'une  certaine  réputa- 
tion, fut  alors  engagée.  Après  plusieurs  retirds  apportés  à  ses  débuts  par 
une    iiulisposition    persistante,     NL    Bordeneuve    parut  et    fut    congédié 
de  suite.    Enfin    M.  Sylvain,  une    basse  à   la   voix  très   solide,  fut   re<;u. 
M"*  lyéaudry,  seconde  ehanteuse  d'opéra,  tomba  elle  aussi.  Sa  remplaçante 
fut  M""  Corroy  qui  ne  tarda  pas  à  résilier.  M""  Vaillant-Couturier  fut  alors 
engagée  p<.)ur  tenir  cet  emploi.  La  délicieuse  créatrice  à  Nantes  de  Mireille 
fut  revue  avec  un  vif  plaisir  et.  bieii(|ue  sa  voix   eût   perdu  un  peu  de  Sj^ 
fraîcheur,  elle  charma  encore  bien  souvent  le  public,  not;imment  dans  Faust 
et  Roméo.  M""  Bonjoan  et  Franck,  soprano  dramatique  et  contralto  en 
double,  après  des  apparitions  malheureuses,  résilièrent  et  ne  furent  pas  rera- 
plaiées. 


879  ^^  THÉÂTRE    A.   NAWTS9 


Le  7  njvoiabro,  Lafarge,  uttfiint  par  l'influeozu,  n'arrivait  qu'à  force  de 
courage  à  achever  Roméo  et  Juliette.  La  direction  lui  accorda  quinze  jours 
de  repos.  Mais  voici  que  M"«  Bùhl  tomba  elle  aussi  malade.  Le  23 
novembre,  len  //a//«e/io^8  étaient  affichés,  quand,  vers  cinq  lieures,  M"«  Buhl 
fit  dire  qu'il  lui  était  complètement  imposisible  do  chanter.  On  ne  savait 
que  jouer,  quand  Lafarge.qui  se  sentait  beaucoup  mieux,  proposa  de  chanter 
Samaon  et  Dalila,  L'offre  fut  acceptée.  Ce  changement  de  spectacle,  annoncé 
au  dernier  moment,  ne  fut  pas  du  goût  de  tout  le  monde  et,  dès  le  lever  du 
rideau,  on  sentait  que,  dans  la  salle,  couvait  un  orage.  Les  deux  premiers 
actes  se  passèrent  sans  incident.  Lafarge  n'était  pas  très  en  Toix,  mais, 
grâce  à  son  talent  de  chanteur  il  charmait  quand  même,  et  ses  adversaires 
ne  trouvaient  pas  l'occasioiiîde  «  l'attraper  ».  L'entr'actc  entre  le  second  et 
le  troisième  acte  se  prolongea  d'une  façon  insolite.  Plus  d'une  demi-heure 
s'était  écoulée  et  le  rideau  ne  se  levait  pas.  Le  tapage  commença.  Le  régis- 
seur Nénotviut  alopg  annoncer  que«  lu  représentation  ne  pouvait  continuer 
pour  l'instant,  que  M.  Lafarge  était  tombé  sans  connaissance  et  que 
deux  médecins  essayaient  vainement  de  lui  faire  reprendre  ses  sens  ».  Le 
public  alors  se  fâcha  tout  rouge.  Les  ennemis  de  M-  Jabyeravaient,  pendant 
Tentr'acte  démesuré,  habilement  chauffé  la  salle.  M.  Nénot  proposa  pour 
terminer  la  soirée  soit  le  ballet  d'Hamlet,  soit  le  Chalet  ou  bien  encore  le 
remboursement  des  places.  Cette  dernière  proposition  fut  acceptée  et  le 
public  se  précipita  au  contrôle  pour  exiger  son  argent.  Là,  on  s'aperçut  bien 
vite  que,  les  spectateurs  ayant  quitté  leurs  places  respectives  sans  prendre  de 
contre-marque,  le  remboursement  était  matériellement  impossible. 

Alors,  éclata  une  véritable  émeute.  Des  promeneurs  accoururent  du 
dehors  se  joindi-e  aux  spectateurs.  On  hurlait  :  «  A  bas  Jahyer  I  »  et  aussi 
«  A  bas  l'Ouest- Artiste  !  A  bas  Destranges  !  »  Certains  imbéciles  m'acçu- 
saiept,  en  effet,  d'ôti-e  cause  de  ce  qui  arrivait,  parce  que  j'avais  contribué, 
plus  que  tout  autre,  il  est  vrai,  au  maintien  de  Lafarge.  Quelques  abounés 
prétendaient  que  ce  dernier,  en  réalité,  n'était  pas  malade  et  qu'il  ne  termi- 
nait pas  Samson  simplement  par  peur  des  «  canards  ».  S'il  avait  été 
donné  à  ceux-là  de  voir,  comme  moi,  le  grand  artiste  étendu  sans  vie  sur  le 
parquet  de  sa  loge,  les  yeux  fixes,  les  membres  rigides,  ils  n'auraient  pas 
douté,  un  instant,  de  la  réalité  de  son  indisposition. 

Cependant,  la  foule  qui  s'était  massée  dans  le  vestibule  rentra  dans  la  salle, 
enpoussant  des  vociférations  sauvages.  Alors,  il  se  passa  un  fait  inouï.  Les 
bancs  du  parterre  furent  arrachés  et  brisés,  Iqs chaises  des  baignoires  furent 
jetées  sur  les  fauteuils  d'orchestre,  les  grandes  housses  destinées  à  recouvrir 
les  balcons  des  galeries,  furent  tirées  dans  la  salle  et  déchirées  ;  dans 
l'uichestre,  une  contre-basse  fut  brisée,  les  timbales  renversées.  Pendant 
ce  temps,  que  faisait  la  police  ?  Dès  les   premiers  symptômes  de  tumulte, 


SCAREMBERG    —    PROSKRPINE 


277 


M.  l'Adjoint  aux  Beaux-Arts  sV-tiit  erapivssé  de  rentrer  chez  lui.  Quant 
au  commissaire  do  service,  «a  femme  et  son  parapluie,  qu'il  avait  f)erdus 
dans  la  bousculade,    Tinquiétaient  seuls,  et  c'est  en  vain  que  les  a^'ents 
lui   demandaient  ihi:>  ordres.  Voyant  cela.   Jahyer  prit  sur   lui  de   faire 
brus<|iiement   éteindre  les    lumitres   de  la  salle   et  le    public    finit    par  se 
décider  à   s'en  aller  brailler  au   dehors,   jusqu'au    moment  où    il  en  eut 
a.ssez.  Le  lendemain,  le  Maire  prit  un  arrêté  interdisant  â  M.  Lafarpe  de 
reparaître  sur  les  scènes  des  Théâtres  de  V  ci--  ...........  /.tint  mm.-  e.mse 

de  trouble. 

Où  trouver  un  premier  ténor  '.'  Les  agences  n'avaient  à  offrir  que  de« 
ehant<»urs  venant  d'échouer  sur  des  scènes  de  second  or<lre.  Parmi  ceux-ci 
se  trouvait  un  jeune  artiste,  presque  débutant,  que  les  dileltanti  de 
Montp«'llier  avaient  ivfusé.  NL  Jahyer  engagea  M.  ScaremlxTg  à  l'essai, 
car,  comme  tour  le  monde  d'ailleurs,  il  deraeuniil  sc«?ptique  à  l'égard  de 
son  nouveau  pensionnaire.  Ce  fut  pour  lui  et  p^uir  le  public  une  agré.ible 
surprise  de  trouver  en  M.  Seareinberg  un  ténor  du  plus  b<'l  a\enir,  «'xcel- 
lent  musicien,  dont  la  voix  fraîche  et  solide  était  d'un  timbre  des  plus 
agréable.  Malgré  le  peu  de  rôles  qu'il  connaissait,  M.  Scaremberg  fut  re«;u 
à  l'unanimité.  L'excellent  artiste,  par  un  travail  acharné,  se  forma  bientôt 
un  répertoire  complet,  passant  avec  un  égal  bonheur  do^  Huguenots  dont  le 
rôle  de  Rioul  était  son  triomphe,  à  Lakmé  el  de  Lakmé  à  Lohengrin. 
Depuis,  M.  Scareml)erg  a  fait  brillamment  son  ch»'min  ;  il  est  devenu  l'un  des 
ténors  payés  U's  plus  chers  de  Belgique  et  de  Province. 

La  première  représentation  de  Pronerpine  eut  lieu  le  i  janvier  189G,  avec 
un  certain  suc<ès.  Cette  œuvre  de  Saint-Saéns,  qui  n'a  pas  encore  réussi  à 
s'imposer  à  Paris,  contient  des  pages  tour  à  tour  puissantes  et  gracieuses. 
Si  cett<»  partition  de  l'illustre  auteur  de  Samaon  et  Dalila  laissa  a>sez 
froid  le  gros  publi<-,  du  moins  fut-elle  tn'^s  appn'ciée  des  musiciens.  Klle  se 
joua  six  fois  devant  des  spectateurs  enthousiastes  qui  bissèrent,  à  chaque 
soin'M»,  l'adorable  finale  du  deuxième  acte  et  la  chanson  à  boire  de  Squarocca. 
L'interprétation  était  excellente.  M'"»  Vaillant-Couturier  lit  une  ravissante 
courtisane  du  XVP  siècle.  Elle  disait  certaines  phrases  du  premitT 
acte  de  la  plus  délicieuse  façon.  M"*  Bùhl  était  une  exquix»  .Vngiola. 
MM.  Scaremberg.  fîrimaud,  Artus,  ne  méritèrent  que  des  éloges.  Enfin, 
l'orchestre,  adnnrablement  dirigé  par  Miraune,  ne  doit  pas  ètri'  oublié  lui 
non  plus. 

Quelques  semaines  auparavant  M.  Jahyer  avait  donné  la  première  repré- 
sentation de  la  Virandiùre.  Celte  œuvre  posthume  de  M.  Benjamin  Godird 
remportai  un  four  noir  et  mérité.  On  joua  aussi  pendant  la  {nrioile  de  la 
direction  Jahyer:  la  Dot  de  Brigitte,  la  Femme  de  Xarciêne  et  VKnt^rement 
de  la  Toledad. 

45 


278  LE  THÉÂTRE  A  NAÎfTBS 


Jahycr  était  à  Paris  depuis  trois  jours  quand,  le  mercredi  15  janvier  1896, 
1(3  U'iégrapho  apporta  à  Nantes  la  triste  nouvelle  de  sa  mort  subite 
due,  disait  la  dépèche,  à  la  rupture  d'un  anévrisme.  L'exacte  vérité 
ne  tarda  pas  à  L^tre  eonnue.  Le  malheureux  Jahyer  s'était  tiré  un  coup 
de  revolver,  à  la  suite  d'une  grosse  perte  de  jeu.  11  importe  de  faire 
remarquer  que  la  situation  du  Théâtre  de  Nantes  ne  put  avoir  aucune 
influence,  sur  la  fatale  détermination  de  Jahyer.  En  effet,  les  recettes  des 
trois  premiers  mois  de  la  saison  étaient  supérieures  aux  recettes  correspon- 
dantes de  l'année  précédente. 

Pour  terminer  la  saison  les  artistes  se  réunirent  en  société  sous  la  gérance 
de  M.  Nerval.  Excellent  régisseur,  homme  intelligent  et  énergique,  nul 
n'était  plus  à  môme  que  M.  Nerval  de  mener  à  bonne  fin  cette  délicate 
entreprise.  Malheureusement  la  bonne  volonté,  les  excellentes  intentions  de 
l'Administrateur  général  furent,  à  chaque  instant,  paralysies  par  le  mauvais 
vouloir  des  uns  et  des  autres.  Chacun  tirait  :i  hue  et  à  dia  et,  malgré  les 
pleins  pouvoirs  qu'on  lui  avait  donnés,  M.  Nerval,  découragé,  énervé,  fut 
souvent  sur  le  point  de  tout  hlcher,  car,  comme  il  le  disait  justement  lui 
même,  ses  pleins  pouvoirs  étaient  complètement  illusoires  :  c'était  comme 
s'il  avait  tenu  en  main  la  garde  d'une  épée  sans  lame.  Les  artistes,  à  part 
de  rares  exceptions,  opposèrent,  pendant  trois  mois  et  demi,  la  force  d'inertie 
]  i  plus  complète  aux  désirs  de  leur  administrateur.  On  renonça  successive- 
ment aux  reprises  du  Réce  et  de  Tannhœuser,  malgré  toutes  les  promisses 
faites  et,  pour  l'œuvre  de  Wagner,  malgré  un  engagement  formel  avec 
l'éditeur,  parce  que  certains  artistes  ne  voulaient  pas  apprendre  de 
nouveaux  rôles. 

A  part  une  Revue  Locale  sans  grand  esprit,  intitulée  Crébillonnex.Qi  pour 
laquelle  elle  n'hésita  pas  à  faire  certains  gros  frais,  la  Société  des  artistes 
vécut  sur  les  pièces  préparées  par  Jahyer. 

C'est  ainsi  que  la  Nacarraise,  ayant  été  retardée  par  suite  du  suicide  de 
Jahyer,  fît  son  apparition  vers  la  fin  de  la  saison  avec  un  insuccès  complet 
d'ailleurs.  Le  public  nantais  montra,  une  fois  de  plus,  son  bon  goût  en  accueil- 
lant plus  que  froidement  cette  méchante  élucubration,  indigne  du  talent  de 
Monsieur  Massenet.  Le  ténor  Claude  Mars  leva  le  pied  vers  la  fin  de  janvier 
avec  une  danseuse.  Il  ne  fut  pas  remplacé. 

Le  17  décembre  1895,  un  peu  avant  l'ouverture  des  portes,  un  commen- 
cement d'incendie  se  déclara  dans  le  grenier  situé  au-dessus  des  appartements 
de  M.  Bastié,  inspecteur  municipal.  Des  cendres  chaudes,  déposées  par  une 
domestique  imprudente,  avaient  communiqué  le  feu  à  une  caisse  de  bois. 
Quelques  seaux  d'eau  suffirent  à  éteindre  les  flammes  ;  les  dégâts  furent 
insignifiants. 

M.  Artus,  basse  chantante,  ayant  écrit  dans  le  courant  de  février  une  lettre 


L  INCIDENT   ARTLS  1'     ' 

grossière  à  M.  Bistrhiné,  chroniqueur  théâtral  du  Proqrèn,  à  la  suitiî  d'une 
critique  fort  anodine,  fut  mis  à  l'index  par  la  Presse  Nantaise 

M"»"  Tariol-Beaugé  vint  en  représenUition. 

Tournées:  La  Dnmc  aur  CamoliaM  (Sarah-liernti.tr  it;,   Mnj'ni   (>;ii,in 
Beinhardt).  \ps  Jeux  dr  L'Amour  et  du  Ilanard,  le  Paradis,   \cs  Inutiles, 
Prcheum  d'InUinde  (Marie  Laurent),  Madame  Sans-Orne,  les  Tenailles,  le 
lifmplnrani ,  Marcelle,  {nFliLuntirr  (Taillade),  Charlotte  Cor</ay  (Taillade), 


1\ 


DIRECTIONS   :   MARTINI.    —  QIRAUD. 
YILLEFRANCK 

1800  —  VM\ 


Mnrgurritr  iinrtini  —  TltCr»'$e  Clément.—  SémlKnc—  Ut>u^man.  —  Sal.-unmbA.  — 

EvaiiRoline.—  Laittutr.  —  Era  liomain.—  M"'  Luca.  —  ItvHaulor.— Alfred  Uruneau 

à  Santfx.  —Henri  VIII  —  Dlnnche  kfarie.—  Vfrdier.  —Marguerite  DesTarêiUrs. 

—  lilnnrUe  de  ConiiHi.  •'0<iyl>'  UendrirMx.  —  Hcnnel  «l  («n-tt-l.  —  Siri-Lind. 

—  Priuct'sse  «l'Aubergo.    —    Phryné.  —^Inriient   Dohhelnrrr.  —  Samuel 

Hnvy.-'  Unuri/eiiis.  —  Siirs.  —Jarqmft  —  .V'  liriftti  —  3/"-  Poiçng. 

—  Orplw'f.—  IluMa.  —  \é%  Vie  <!♦•  Bolu'me    -  ASnr/furrile  (iiraud. 

—  Engel.   —  Dumonthitfr.  —  féraud  de  Sointpal.  —  L'odou. 

—  Jiitu'  lUUhori.    -  Ili'lt'ne  ThtTy.  —  M^Chotain.  —  Jeanne 

Lambert.  —  A/H*  Sterrkmnnns.  —   Le  cycle  des 

leurres   d'Alfred   liruneuu.  —   IjC    Juif 

Polooais.  —  IphigènioenTauridc.  — 

(>n.lrill.in    — TKa;"» 

ft'U  ^  subvention  lui  v<»uie  dans  lo  courant  de  lévrier.   Elle  était 

Ijpjli'r -jj    maintenue  à  lOO.OOO  francs  avec  le  ui«imc  cahier  des  charges. 

'•  *?J^-iN    ï-'i  clause  suivante  fut.  iit-anmoin*.  ajouli'o  sur  la  demande  du 

^«l^^>•.^L^5A  docteur  Teillais.  «  Le  directeur  n'éUint  obligé  qu'à  une  troupe 

d'op»'ra  et  à  une  troupe  d'opérette,  ne  pourra  jouer  l'opéra-comique  que  s'il 

cng.ïgo   un  ténor  K'gor  et  une  chautcu^ii'  léi;«'»re   d'o|>éra  comique.  »  Celte 

interdiction  cUiil  moltvé*'  par  ceriainf>  scandaleuses  représentations  de  la 

seconde  direction  Castex. 

M.  Castox  qui  n'avait  jamais  pu  se  consoler  de  quitter  Nantes  où.  en 
deux  ans,  il  avait  gagné  une  quarantaine  de  mille  francs,  s'empressa.à  peine 
Jahycr  des<cndu  dans  la  tombe,  de  redemander  la  direction.  Il  se  croyait, 
cette  fois,  certain  de  réussir.  Quel  ne  fut  pas  sou  désappointement  quand  il 
apprit    que    radministration .    bien   in-  "    "  '  '  'ré 

M.  11.  Martini,  ((ui  avait,  jadis,  sous  l.i  n 

succès,  le  rôle  de  Des  Gricux.  de  Manon. 

Tout  comme  Jahyer.  M.  Martini  appartenait  à  une  bonne  famille.  Il  avait 
de    l'instrueiion  et   de  l'édueation  et.  ave^^   !••     "-s  rap|x>rt-    •'•■••"t    f"'» 


282 


LE   THEATRE    A    NANTES 


agréables.  Directeur  habilo,  ayant  une  connaissarioo  approfondie  des  rouages 
du  Théâtre,  M.  Martini  éliiit  constamment  tiraillé  par  les  deux  côtés  de  sa 
nature.  Artiste  d'une  intelligence  éveillée,  il  voyait  bien  ce  qu'il  fallait  faire, 
mais  le  commerçant  madré  qui  était  aussi  en  lui  l'empêchait  souvent  d'accom- 
plir le  «  beau  geste  »)  nécessaire.  Il  essayait  donc,  d'abord,  de  marcher  le 
plus  écononuquemeiit  possible,  mais  quand  il  sentait  que  la  presse  et  le 
public  allaient  se  rebiffer,  avec  une  dextérité  extrême,  il  savait  les  désarmer 
en  leur  olfrant.  à  temps,  l'artiste  ou  l'œuvre  désirée.  M.Martini  avait  eu  soin 
aussi  de  se  mettre  au  mieux  avec  M.  Lemoine,  adjoint  aux  Beaux  Arts,  et 
de  lier  avec  lui  des  relations  tellement  intimes  que  ce  dernier  devait  se 
trouver  souvent  gôné  pour  faire  au  directeur  les  remontrances  nécessaires. 
Cet  adjoint,  honnête  passementier  de  la  ville,  que  les  fantaisies  du  suf- 
frage universel  avaient  poussé  à  l'Hôtel  de  Ville,  n'était  désigné  par  rien 
pour  remplir  les  délicates  fonctions  de  délégué  aux  Beaux-Arts,  sa  parenté 
avec  un  peintre  de  talent  étant,  en  effet,  un  titre  insuffisant.  M.  Lemoine 
se  montra,  d'abord,  plein  de  bonnes  intentions,  mais  il  ne  sut  jamais  les 
faire  aboutir.  De  plus,  son  désir  de  contenter  tout  le  monde  ne  réussit  qu'à 
le  brouiller  avec  beaucoup  de  personnes.  M.  Guist'hau,  en  plein  Conseil 
municipal,  reprocha  plusieurs  fois  à  l'adjoint  sa  regrettable  faiblesse  envers 
le  directeur  des  Théâtres. 

M.  Martini  entra  en  fonctions  dès  le  mois  de  mai  1896,  le  Théâtre  n'ayant 
été  laissé  à  la  Société  des  artistes  que  jusqu'à  cette  date.  Pendant  ce  mois, 
M.  Décori  vint  jouer  les  Deux  Gosses  et  d'autres  drames  avec  plusieurs 
artistes  de  l'Ambigu. 

Pendant  les  mois  d'été  le  mobilier  du  Théâtre  fut  en  partie  repeint  et 
remis  en  état;  tous  les  accessoires  furent  soigneusement  inventoriés  et  classés. 


SAISON     1896-1897 

Horace    MARTINI,    Directeur 

DoBiiKLAERB,  i>remier  chef  d'orcliostie.  —  Codls,  deuxième  chof  d'orchestre. 
Dklaire.  ri'gisseur. 


MM.  CÎAUTiKH.  fort  ténor. 

Lariuudièrk,  deuxième  ténor. 

Breton,  ténor. 

Stévens,  troisièm*'  tônor. 

SfvVKii.iiAC.  baryton  d'opéra. 

RossKEi..  baryton  d'opéra-coniiquo. 

BouxMANN.  basse  d'opéra. 

ZuoooNi,  basse  chantante. 

Uheleyns  dt>uxiénio  basse. 

RoussKi.,  trial. 

MoRORT,  lariKMte. 
M'»"'    Marnuerilo   Mautini,   soprano   dra- 
matique. 

Dalzen,  falcon. 


M- 


Packhirrs,  chanteuse  légère. 
Vii.LA,  contralto. 
Dasty.  duRu/on. 
Campan.  deuxième  dtigazon. 
Marcelle  Olivier,  divette. 
Markels,  duègne. 

BALLET 

Linda  Pastore.  maîtresse  de  ballet, 

danseuse  étoile. 
BossY.  première  danseuse. 
TooxûLi.  demi -caractère. 
rARis.  travestie. 


MAid.UKKITK   MARTINI    —  TH^HÈSB  CLéMBNT  283 

Engagé  à  Lyon  à  de  superbes  conditions  rexeellenl  chef  d'orchestre 
Miranne  quitta  Nantes  accompagné  des  regrets  de  tous.  Un  certain 
M.  Dobhielaére  lui  succéda  sans  le  remplacer.  Ce  maHtro,  comrao  jadis 
Lévy,  avait  fait  une  quantité  de  théâtres  sans  avoir  jamais  pu  réussir  à  se 
fixer  nulle  part.  En  d<.Tnier  lieu,  il  arrivait  de  Bordeaux  où  il  ét;iitchef  d'or- 
chestre en  second.  D'un  caractèn»  atrabilaire  et  ombrageux,  M.  Dobbelaêre 
sut  d'autant  moins  coïKjuérir  les  sympathies  du  public  que.  comme  artiste, 
il  ne  s'imposait  pas.  Sa  façon  de  diriger,  nerveuse  et  irréguli«'*re,  sa  non- 
compréhension  des  œuvres  nouvelles,  prêtaient  justement  le  flanc  à  la  cri- 
tique. Ce  musicien  était  évidemment  déplacé  comme  premier  chef  à  la  tête 
d'un  orchestre  de  grande  ville.  Il  aurait  pu,  néanmoins,  comme  s«i'ond, 
rendre  des  services  car,  a  défaut  d'aulres  cjualilés,  il  était  ponctuel  et 
soigneux. 

Cette  année  là,  une  artiste  prima  tous  ses  camarades  parmi  lesquels  elle 
brillait  comme  une  étoile  de  première  grandeur.  On  gard'-ra  toujours.  4 
Nantes,  le  souvenir  de  l'admirable  chanteuse,  de  la  grande  tragédienne 
qu'était  Marguerite  Martini,  .sœur  du  directeur  des  Théâtres  municipaux. 
Grande,  mince,  distinguée,  le  visage  rayonnant  d'intelligence,  M"*  Martmi 
mett;iit  au  service  d'une  voix  expressive  de  soprano  dramatique  une  con- 
naissance consommée  de  l'art  du  chant.  Chacune  de  ses  apparitions  sur  la 
scène  était  un  véritable  triomphe  .  Les  rôles  d'Eisa,  d'Elisabeth,  de  Korenn, 
de  nninnehild,  de  Salammbô,  de  Valentine,  furent  interprétés  par  elle 
comme  ils  ne  l'avaient  jamais  été  à  Nantes,  comme  ils  ne  léseront  proba 
blement  jamais.  M'*«  Martini  n'éuiit  malheureusement  engagée  qu'en  repré- 
sentations. Non  soumise  aux  débuts,  elle  ne  devait  donner,  d'abord,  que  cinq 
repré.sentations  par  mois.  Ce  nombre  fut  ensuite  élevé  à  huit  en  retour  de 
la  tolérance  accordée  p;ir  la  munici|);iliié  de  conserver  M"*  de  Brools, 
malgré  le  relus  de  la  commission.  Personne  n'eut  à  se  plaindre  de  cet  arran- 
gement qui  sauvegardait  les  intérêts  artistiques  du  ThéAtre. 

Les  cliutes  furent  nombreuses.  Le  ténor  Gauthier  tomlw»  et  fut  remplai  é 
successivement  p;ir  MM.  Kenaud  et  .Mestre.  Ce  dernier  fut  admis  bien  que 
fort  médiocre.  MNL  Zucconi  et  Breton  échouèrent  eux  au.ssi.  Ils  eurent 
comme  successeurs  MM.  Darras  et  Baudin.  La  falcon  en  titre,  M"*  Dalzen 
no  réussit  pas.  M.  Martini  fit  alors  un  coup  de  maître  en  engageant  pour  la 
remplacer  une  débutante  de  réel  talent,  élève  d'une  artiste*  qui  avait 
laissé  parmi  les  amateurs  du  ThéAtre  un  excellent  souvenir.  Alice  Rabany. 
M''»  Thérèse  Clément,  une  grande  jeune  fîlle  à  la  voix  sonor»»  et  puissante, 
au  jeu  intelligent,  fit  une  excellente  impression  sur  le  public.  Elle  fut  reçue 
à  l'unanimité  et,  toute  l'année.elle  fut  très  juslt»ment  applaudie.  Elle  chanta. 
d'une  fa(,*on  vraiment  remarquable,  le  rôle  d'Hilda  de  Sigurd.  et  ceux  de 
Vénus,  de  Tannhœu»er  c\  de  Margueril«\  de  Fau»t.  M"«  Packbiers  fut  rem- 


281  LE   THEATRE    A    NANTES 


placée  par  M"«  Rhaijane  qui  échoua  elle  aussi.  M"«  de  Brools,  qui  parut 
ensuite,  ne  réunit  pas  davantage  la  majorité  des  suffrages.  Cependant  M.  Mar- 
tini ayant  olfert,  eu  échange  d(;  son  maintien,  de  donner,  par  mois,  trois 
représentations  de  plus  avec  sa  sœur,  la  présence  de  M"«  de  Brools  fut 
tolérée.  Cette  artiste,  d'ailleurs,  quitta  Nantes  à  la  fin  de  février  et  M.  Mar- 
tini engagea  alors  des  chanteuses  légères  en  représentation.  C'est  ainsi  que 
vinrent  successivement  M''"  Biihl  qui,  indisposée,  ne  retrouva  pas  son 
^uccès  de  l'année  précédente,  Salambiani,  Giaconnetti  et  Aubecq.  M"" 
Campan  fut  remplacée  par  M^^*  Gheleyns  qui  fut  refusée.  Ces  deux 
artistes  continuèrent,  néanmoins,  à  chanter,  M.  l'Adjoint  aux  Beaux  Arts 
ayant  bénévolement  consenti  à  fermer  les  yeux. 

M™"»  Marcelle  Olivier,  par  suite  de  grossesse,  dut  bientôt  abandonner  son 
service.  Un  incident  amusant  s'était  produit,  quelque  temps  auparavant^  au 
moment  du  vote  touchant  radmission  de  cette  chanteuse.  Le  président  venait 
de  déclarer  le  scrutin  ouvert  quand  il  aperf;ut,  sur  l'urne,  un  mystérieux 
pli  cacheté.  Le  mari  de  la  jolie  débutante,  en  termes  très  affîrniatifs,  préve- 
nait la  Commission  théâtrale  que,  contrairement  aux  bruits  répandus  dans 
le  public,  la  position  de  sa  gentilh;  moitié  n'était  intéressante  qu'au  point  de 
vue  strictement  artistique.  M™*-"  Olivier  fut  admise,  mais  quand,  un  mois 
après,  elle  dut  se  rc^tirer,  sa  présence  sur  la  scène  n'étant  plus  possible,  les 
abonnés  regrettèrent  de  n'avoir  pas  exigé  d'autres  preuves  qu'une  lettre  de 
mari.  M'"'^  Olivier  ne  reprit  son  service  qu'en  avril.  Pendant  son  absence, 
elle  fut  suppléée  par  M™"  Gilberte  Andrée,  qui  ne  plut  pas,  puis  par 
M™«  Laurent. 

Outre  M"''  Martini  et  Clément,  quelques  artistes  méritent  aussi  une  men- 
tion particulière  :  M.  Séveilhac,  dont  la  merveilleuse  voix  de  baryton  conquit 
vite  les  faveurs  du  public,  mais  qui  laissait  fort  à  désirer,  malheureusement, 
au  point  de  vue  du  chant  et  de  la  tenue  scénique  ;  M.  Bouxmann,  basse 
profonde  douée  d'un  bel  organe  ;  le  second  ténor  Larbaudière  ;  le  trial 
Roussel,  très  amusant;  enfin  M.  Paranque,  ténor  eh  double,  engagé  dans  le 
courant  de  la  saison  et  qui,  à  défaut  d'une  voix  suffisante  pour  l'emploi, 
possédait  un  assez  beau  talent  de  chanteur. 

Le  jour  de  l'ouverture  de  là  saison,  M.  Séveilhac  chanta  VHi/mne  russe, 
en  l'honneur  du  Tsar,  qui  était  arrivé  le  jour  même  a  Paris  (G  octobre  189G). 
Grand  erithousiasme. 

Dès  le  mois  d'octoi)re,  NL  Martini  monta  Lohengrin.  Le  fait  mérite  d'être 
signalé,  les  directeurs  ayant  généralement  la  détestable  habitude  d'attendre 
les  derniers  mois  de  la  saison  pour  faire  les  reprises  intéressantes.  Mais 
M.  Martini  avait  la  grande  qualité  de  savoir  faire  trav  liller  ses  arti>^tev:. 
Avec  lui,  on  ne  perdait  pas  de  temps. 

La  première  nouveauté  de  la  saison  fut  Salammbô,  jouée  avec  succès  le 


SALAMMBO    —    EVANGELIM  KOI    I»'ys  285 


22  décembre  18'.Xî.  Cette  œuvje  de  Keyer,  saos  valoir  Siyurd,  contient 
néanmoins  dfs  p,ig<\s  suptrbos,  et  l'on  doit  savoir  gré  à  M.  Martini  de 
l'avoir  monléç.  Marguerite  Martini  créa  avec  un  talent  hors  ligne  le  rôle  de 
!a  prêtresse  de  Tanit.  Los  autres  personnages  furent  tenus  par  MM.  Mestre 
—  tr/'s  médiocre  en  Mathô,  -  Paranque,  Séveilliac,  Rouxmann,  Rosseel. 
M.  Martini  encadra  Salammbô  dans  des  décors  superlx?»  qui,  malheureuse- 
ment, sont  restés  sa  propriété.  On  admira  surtout  ceux  du  Templf  de  Tanit, 
dn  Temple  de  Moloch  et  du  Forum  de  Carthage. 

lîranf/e/ine,  de  M.  Xavier  Leroux,  œuvre  d'une  jolie  couleur,  sinon  d'une 
personnalité  accusée,  fut  représentée  le  2<J  avril  lHi>7,  sous  la  direction  de 
l'auteur  et  accueillie  avec  sympathie,  Les  interprètes  étaient  MM.  Pa- 
ran((ue,  Bouxmanii,  Ros«eel  ;  M"'*  Martini  et  Dasty.  Le  lendemain, 
21  avril,  à  l'occasion  du  s«^jour  à  Nantes  du  Président  Félix  Faure,  une 
grande  représciitation  de  gala,  par  invit^itions,  eut  lieu  au  (Jrand-TlK^itre. 
Le  spectacle  se  composait  d'actes  de^  HuguenoUs  do  Guillaume  Tell 
ùià'Eoanrjeline.   M.  Xavier  Leroux  dirigea  encore  l'orchestre,  ce  soir-là. 

Les  autres  nouveautés  furent  V Amour  Xfrdenn  et  Paillasse.  Bien  que 
supérieur  à  Caralloria  Rusiicann,  l'acte  brûlai  d(»  M.  Léoncavallo  n'eut 
pas  plus  (ic  succès  que  celui  de  Masc^igni.  En  opérettes,  NI.  Martini  donna 
liaholin,  le  Lycée  de  Jeunes  JiIIph  et  Dïl  Jours  aitx  Pi/rénées. 

Le  Roi  d'Ys,  qui  n'avait  pas  été  donné  depuis  sa  création,  en  !>>>:*,  (ut 
repris  avec  un  très  gros  succès.  Marguerite  Martini  chanta  d'une  adorable 
façon  le  délicieux  rôle  de  Rozerin.  M.  Martini  remonta  aussi  Tann^iœuser. 
L'interprétation  fut  excellente  de  la  part  de  M"^*  Martini  et  Clément,  et  de 
MM.  Séveilhac  et  Bouxniann.  Mais  le  ténor  Mestre  fut,  lui,  au-dessous  de 
tout.  Pour  cette  reprise,  on  fit  peindre  une  grotte  pour  le  premier  acte.  Ce 
décor,   sans  être   bien  famet;  it  mieux  que  Tlnfecte  toile 

couleur  de  suie  dont  M.  Castox  n  .i\.iii  pa.<  lu  honte  de  se  servir.  On  fil  aussi 
\[\Jerme  du  château  do  la  Warlburi;  et  certaines  parties  de  la  salle  des  fêtes. 
Ces  décors,  assez  maladroitement  peints  dans  les  ateliers  de  Nantes,  ne 
sont  pas  dignes  du  chef-d'œuvre  dç  Wag;  >  l'excellente 

idée  de  faire  venir,  dans  le  courant  de  la  mi-^  m    i  .s  Colonne  et 

Lamoureux.  Ces   deux  concerts  eurent  lieu  à  la  1.  iiicc  devant  des 

salles  combles,  le  premier  en  janvier,  le  second  en  avril  1807. 

Kn  avril,  M">*  Pauline  Hocher  devait  chanter  Carmen,  mais  a  la  suite 
d'une  violente  altercation  avec  M.  Dobb^i  •  ■  ■  '!-'  fit  dire  •  ^'  Martini 
qu'elle  ne  chanterait  pas.  On  dut  changer  i  -le. 

Le  28  janvier  18îï7,  un  léger  commencement  d'incendie  eut  lieu  après  la 
second  acte  de   Snlammlni.    Une  îles  lorehèros  du  T>  '  mt 

tombée,  l'esprit  dt*  vin  qu'ell»;  contenait  s»*  répandit  sur  !..  na 

un  coin  de  décor.  Les  pompiers  eurent  vite  raison  du  feu. 


286  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


En  mai  et  en  juin,  M.  Martini  donna  des  représentations  de  comédie  et 
de  drame. 

Tournées  :  la  Tortue,  Blanchette  (Antoine),  l'Illustre  Monthahord 
(Baron),  Madame  Sana-Gène,  V Empereur,  Doit-on  le  dire  (Brasseur),  le 
Jloi  Koko  (Brasseur),  Madame  la  Maréchale  (Desclauzas),  [c Bemplarant , 
Oriselidia  (Paul  Mounct,  Sylvain),  Disparu,  le  Barbier  de  Sécille 
(Reichemberg),  le  Dépit  amoureux  (Reichcmberg),  la  Petite  Fadette  (Jane 
May),  le  Petit  Lord  (Baret),  la  Doctoresse  (Marie  Magnier),  V Avare,  ht 
Malade  imaginaire,  le  Cirf,  les  Précieuses  ridicules,  le  Chat  Noir,  Frou- 
frou (Lina  Munte),  les  Fourchamhault,  lo  Paradis,  Durand  et  Durand, 
les  ^«n^^aM  (Baret),  Bataille  de  Dames  (Reichemberg),  Mieux  vaut  dou- 
ceur ('Reichemberg),  Eugénie  Buffet,  le  Mari  de  la  Débutante,  la  Sécurité 
fies  familles  (Brasseur),  Monsieur  Badin,  Un  Client  sérieux,  le  Sursis, 
les  Demoiselles  Clochard  (Jane  May). 


Pour  la  saison  1897-1898  la  subvention  fut  élevée  à  120,000  francs.  La 
campagne  devait  être  de  sept  mois  avec  tous  les  genres  lyriques.  Différentes 
modifications  furent  apportées  au  cahier  des  charges.  Les  débuts  furent 
supprimés  et  l'adjoint  délégué  aux  Beaux-Arts  était  laissé  seul  juge  de  la 
situation.  La  chose  était  fort  imprudente  avec  un  adjoint  comme  M  Lemoine- 
aussi  M.  Guisth'au  insista-t-il  pour  le  maintien  des  débuts,  mais  il  ne 
réussit  pas  à  l'obtenir.  Doux  soprani  dramatiques  et  trois  ténors  étaient 
imposés  :  un  premier  ténor  d'opéra,  un  ténor  de  demi-caractère,  un  premier 
ténor  d'opéra-comique.  Une  amende  de  50  francs  était  infligée  au  directeur 
dans  le  cas  o\x  il  ne  distribuerait  pas  les  rôles  conformément  aux  emplois 
indiqués  par  les  partitions.  La  grande  loge  du  fond  était  mise  gratuitement 
à  la  disposition  du  général  commandant  le  corps  d'armée.  Le  direcieur 
devait  payer  les  sergents  de  ville  de  service  au  Théâtre.  Ces  deux  clauses 
étaient  absolument  grotesques.  Pourquoi  faire  sur  le  dos  du  directeur  une 
politesse  au  commandant  du  11'  corps  d'armée?  ?  Depuis  quelques  années, 
l'armée  ne  rend  plus  aucun  service  au  Théâtre.  Dans  ces  conditions  on  se 
demande  quelle  utilité  d'accorder,  maintenant,  une  loge  au  général  en  chef  ? 
Quant  à  faire  payer  par  le  directeur  les  agents  de  service  dans  un  monument 
municipal,  c'est  une  véritable  anomalie.  La  représentation  au  Wnéfîce  du 
Bureau  de  bienfaisance  fut  supprimée.  En  revanclie,  le  droit  des  pauvres 
fut  élevé  à  35  francs  par  soirée.  Enfin,  toutes  les  anciennes  dénominations 
d'emploi  furent  officiellement  remplacées  dans  le  tableau  do  la  troupe  par  la 
logique  classification  selon  les  voix. 

M.  Martini  fut  renommé  directeur  bien  qu'il  eût.  pendant  toute  la  saison, 
donné,  avec  la  tacite  complicité  de  l'adjoint,  de  nombreuses  entorses  au 


LATA8TK   —  M™'  LI'CA  —  EVA    ROMAIN 


287 


cahier  des  charges.  Ces  infractions  avaient  été  sévèrement  jugées  par 
M.  Guist'hau  dans  une  longue  interpollation  au  Conseil  municipal  el 
l'adjoint  délégué  aux  Beaux-Arts  n'av.iit  pas  trouvé  un  mol  à  répondre  aux 
accusations  portées  par  le  conseiller  inlerpellatcur.  M.  Lemoine,  quelque 
temps  après,  n'autorisait  pas  moins  le  directeur  à  remplacer  l'un  des 
soprani  dramati(jues  par  une  second»*  chanteuse  légère.  M.  Martini,  tou- 
jours avisé,  s'était  dit,  en  effet,  qu'il  [)0urrait  faire  une  économie  par  ce 
changement  d'emploi. 


SAISON      1897-1898 
H.    MAJITTNT .    Directeur 

Dr.iJL.mit,  régisseur.  —  DoiiuBLAKnB.  chef  (i'orclifstre.  —  K.  Miciia,  deuxième  c\i>-(. 


MM.   Lvcx,  fort  ténor. 

DAN(i08.sK.  tcnor  domi-caractére. 

Duo,  ténor  léger. 

FioRATTi,  deaxièmu  tt-nor. 

SfcvBiuur:,  baryton  d'o|>éra. 

RdSSKKL,  baryton  d'opéra  comique. 

BuuxM&NN,  ba.s8e  profonde. 

Latastk,  bas80  cliantanto. 

Davikr,  deuxième  bas.io. 

HoussKi.,  triiil. 

MoRDKT,  laructte. 
M"«*   Talkxu,  .soprano  dramatiiiuo. 

LtVcji,  chant«;u8o  légère. 


Mni' 


AuBRoo.  chanteuse  légère. 
SÉbA-(^Rv.iLiio,  soprano. 
Paulin,  dugazun. 
Hai:u.  deuxième  dugazoo. 
DuFuis,  dut>gne. 

HALl-KT 

I.iNi'V  rA.><ToiiK.  n)altres.se  <!• 

danseuse  étoile. 
Toz/.i,  douzième  danseuse. 
Kaiiri.  travesti. 
Carlotta  Lini>or. 


ballet. 


Le  ténor  Luca  fut  très  discute^  pendant  toute  la  saison.  Sa  voix  rude  cl 
plutôt  barytonnante  niancjuait  souvent  do  charme  ;  il  avait  néanmoins 
d'assez  bons  moments.  Comédien  chercheur  et  intelligent,  il  arrivait, 
malgré  ses  défectuosités  vociiles,  à  intéresser.  La  baisse  chankint(>  Lata^te, 
artiste  jeune  et  plein  d'avenir,  doué  d'un  organe  charmant,  remporta  do 
grands  succès  pendant  toute  la  .saison.  M""»  Luca  était  une  chanteuse  légt'TO 
(le  valeur.  M""*  Talexis  «'t  Paulin,  très  convenables  connue  soprano 
dramatique  et  comme  dugazon,  méritent  d'être  signalées.  M™*  Séba-Carvalho 
résilia  après  un  début  (jui  excita  une  douce  hilarité  ;  elle  fut  remplacée  par 
M"""  Kva  Romain,  qu'on  revit  avec  un  certain  plaisir.  Malgré  bien  des  avis 
contraires,  M.  Martini  avait  engagé  comme  seconde  chanteuse  légère 
M"«  Aubecq,  qui  était  venue  en  représentation  à  la  fin  de  la  saisoo 
précédent*'.  M""  .\ubecq,  devant  l'hostilité  du  public,  fut  bientôt  forcée  do 
résilier.  M""  Doux,  une  chanleu><e  d'expérience,  la  rempla<.-a  avantageuse- 
ment. M.  Fioratti,  complètement  usé,  regut  comme  successeur  une  autre  de 
nos  anciennes  connaissances,  M.  Forrières.  Le  ténor  lé^er  Duc  fut  rem- 
placé successivement  par  MM.  l'abrègues,  Leduc  et  Bonijoly.  M.Martini 
engagea  enfin,  à  la  ()lacede  M.  Daugossc,   M.  Sélin.    Nous  garderons   sut 


288  Li;    TIIKAIKK    A    NANTES 


tous  ces  artistes  un  silence  indulgent.  La  <Jut'*gno,  M"'«  I)upuis,  céda  la 
place  à  M""*  Dessalle?,  qui  dut  se  retirer  elle  aussi  et  l'emploi  fut  alors 
confié  à  M™*  Tartanac. 

La  saison  .s'ou\rit  par...  Lfi  FiUe  du  Tambour- Major,  au  milieu  de  la 
mauvaise  humt.-ur  générale.  Kn  effet,  on  n'avait  jamais  encore  vu  la 
«ampagne  débuter  par  une  opérette.  Il  fallait  toute  la  faiblesse  de  M.  l'adjoint 
Lemoinc  pour  permettre  une  telle  f^ntiisie  à  un  directeur  d'une  scène 
subventionnée  de  120.000  francs.  J'ai  déjà  dit  combien  les  instrumentistes 
avaient  été  furieux  de  l'abaissement  du  planclicr  de  l'orchestre,  effectué 
en  189.").  Leurs  lamentations  finirent  P^ir  convaincre  M.  Lemoine.  qui  fit 
relever  ledit  planclier.  On  revit  donc,  comme  i)ar  le  passé,  M.  X... 
échanger  d'amicaux  bonjours  avec  ses  élèves  dispersés  dans  la  salle, 
^^.  Y.  .  envoyer  des  œillades  aux  petites  dames,  M.  Z. . .  bavarder  avec 
les  spectateurs  du  parquet,  ^L  Machin. . .  suivre  attentivement  le  jeu  des 
acteurs  au  lieu  de  lire  sa  partie.  Mais  on  ne  tarda  pas  a  constater  la  faute 
qu'avait  commise  AL  Lemoine  en  cédant  aux  sollicitations  intéressées  des 
musiciens.  La  sonorité,  ([ui  avait  tant  gagné  ])ar  l'abaissement  du  plancher, 
était  redevenuc  défectueuse  ;  rorciicstre  recommeueait  à  couvrir  les  voix 
d'une  déplorable  façon  :  plus  de  nuances,  piano,  forte,  tout  se  confondait 
dans  un  assourdissant  tapage.  Le  public  et  les  journaux  protestèrent  et. 
finalement,  dans  le  courant  de  novembre,  le  rabaissement  de  l'orchestre  fut 
de  nouveau  effectué. 

Les  premières  semaines  de  la  saison  furent  quelque  peu  agitées,  par  suite 
de  rinsudisanec  de  certains  artistes.  La  troupe  d'opérette,  notamment, 
laissait  tout  à  fait  à  désirer.  Manquant  de  divette,  M.  Martini  ne  se  gênait 
pas,  comptant  toujours  sur  l'indulgence  incommensurable  de  M.  l'Adjoint, 
pour  confier  les  premiers  rôles  à  de  seconds  emplois.  La  Presse  montra  les 
dents  et  AL  Martini  n'eut  pas  à  se  féliciter  de  certains  articles. 

A  la  séance  du  Conseil  municipal  du  2G  novembre  1897,  M.  Guist'hau 
intcrj)ella  M.  l'Adjoint  aux  Beaux-.\rts.  Il  conclut  en  disant  que 
M.  Lemoine,  du  moment  qu'il  assumait  seul  la  responsabilité  do  la  surveil- 
lance artistique  des  Thé'itres  munii-ipaux,  deA;iit  agir  énergiquement,  et 
qu'en  ne  le  faisant  pas,  il  méritait  non  seulement  la  critique,  mais  le  blâme. 
A  la  suite  de  cette  interpellation,  M.  Martini  publia,  dans  le  Phare  de  la 
Loiro,  une  lettre  dans  laquelle  il  répondait  aux  critiques  de  M.  Guist'hau. 
d'une  faeiiu  un  peu  vive,  allant  jus(iu'à  traiter  l'honorable  conseiller  de 
«  Maître  Jacques  dosquestions  artistiques  >:.  Cette  lettre  était  une  maladresse. 
Je  m'étonne  encore  que  AL  Martini,  homme  généralement  prudent  et  plutAt 
tergiversateur{(ue  briseurdevitres. ait  suivi  le  conseil  de  celui  ou  de  ceux  qui 
lui  suggérèrent  l'idée  de  cette  missive.  La  réponse  ne  se  fit  pas  attendre.  Le 
8  déeembriv  Af.  'îni-t'ii m   interpella  de  noii\-.s-iM  \T    T,''iii.i;ii,.  ««r  i!  fit  v.n.r 


ALKIIKD    liUKNKAIl    A    NANTKt    —    MliSSIDOU  2H*J 

l'ordre  du  jour  suivant  :  «  LetConsoil  muni(M|ial  invite  l'AdiuiniiitriKion  a 
exiger  du  (liifcteur  une  plus  stricte  observation   du  cahier  «i  ^•••«   eu 

mêiue  temps  (ju'uue   meilleure  interprétation   des  a-uvTes  ,   -.  ur   le» 

TbC'âtrea  municipaux,  u  Enfin, sur  la  proposition  de  M.  Benoit,  il  fut  décidé 
que,  pour  donner  une  leçon  à  M.  Martini  et  lui  apprendre  à  ne  pas  attaquer 
les  membres  du  Conseil  municipal  par  la  voie  def  journaux,  l'AdminiHtra- 
tiou  ne  l'admettrait  pas  à  postuler  une  iroisièuie  ann<^e  la  direction  des 
ThéAlreH. 

Cédant  à  de  pressantes  sollicitations,  M.  Martini   se  décida  à  monicr  lo 
nouvel  ouvrage  d'Alfred  Bruneau.  .Vtf/»/ii(/or,  dont  l'i  "\      '     lio 

nationale  de   musique  avait  été   fort   di>cutée.    En   ■  ;e 

(uuvremal  «-ompriso  à  Paris,  M.  Martini  fit  ré<«llement  acte  d'artiste  et  l'on 
doit  lui  en  savoir  gr<^.  Afes,sitlor  ont  une  partition  ({ui  comptera  dans  l'his- 
toire do  la  niusi(|ue  française  et  notre  ville  ))««ut,  a  bon  droit,  être  lien-  d'avuir 
cassé  un  sa  faveur  l'arrêt  injuste d«>s  ënobn  p^irisiens.  Alfred  Bruncau  C4>mpte 
à  Nantes  de  nombn'ux  amis.  Mais  les  plus  fervents  sont  encore  ceux 
<|u'il  ne  connaltpa-i.  C'est,  en  cfTel.  le  propn'dcs  grand.*,  arti-i        '  •  r 

dans  la  foule  des  amitiés   insoupçonnée^.  A    Nantes,  qui  a  i     ,  li 

première  à  monter,  apK's  Paris,  les  cDUvres  de  l'auteur  du  Hcce,  Bruneau 
posst'de  de  chaleureuses  sympathies  non  seulement  ))armi   Itvj  habitués  du 
rez  de-chaussée  et  des  premières,  mais  aussi  parmi  ceux  des  galeries   sup*'-- 
rieuros   qui  sont,  souvent,  meilleurs   juges    que  bien  dc£  spectateurs  for 
tunés. 

La  première  représentation  de  Met,aidor  eut  lieu  sous  la  direction  de 
l'auteur,  le  W)  novembre  1SII7.  M"»»  et  M"*  Bruneau  assistaient  à  la  repi^ 
seii talion  dans  une  loge.  Le  succès  fut  éclatmt;  après  chaque  acte,  le  rideau 
fut  obligé  de  se  relever  plusieurs  fois  et  de  longues  ovations  furent  faites  à 
l'autour.  Dans  son  ensemble  l'interpréiiition  étiit  l>oniu>.  L'  i  avec 

une  grande  intelligenc  le  rùle  de  Guillaume;    .Séveilha,  lui  du 

iiergor  avec  sa  voix  superbe;  à  chaque  représentation  on  lui  bis.sait  les 
idieu*.  Latastu  obtint,  aussi  lui.  un  succès  très  mérité  pour  l'excellente 
i.içon  dont  il  joua  et  chanta  le  dilficile  rôle  de  Maihias.  M*'  Il  '  ;t 

parfaite  ou  Véronique.  Dans  les  autres  personnages.  M'"»  Luca  et  M     .  i, 

furent  convenables.  Les  choeurs  cl  l'orchestre,  sous  l'habile  direction  du 
naître,  se  su n  '.La  mise  en  ■e.  Plu>ieui>  fragmenta 

le  décor*^  a\ peinb;  ou  coiu  : ,.  ..:    .    ..«rage  de  Bruneau.  La 

municipalité  fît  même,  spécialeuient,  l'achat  de  deux  cloohcii.  L'auteur  de 
Met^sidor    en    fut   le    parrain   et   leur  donna  les   noms  de  Véronique  et 

La  veille  de  U  preuuèro,  le  Ccrrli'  dr  la  Cnti'^ue  offrit  un  banque!  a 
M.Alfred  Bruneau, des  discours  y  furent  prononcés  par  MM.de  Witkowski 


290  Lli   THÉÂTRE    A    NANTES 


et  Etienne  Dostranges.  De  la  réponse  du  compositeur  il  convient  de  citer 
le  [)assage  suivant  : 

«  Vous  veniez  do  boire  ;'i  Km  Ile  Zola,  ^rand  ntniancior.  Kn  von<  tendant 
mon  verre,  je  bois  à  Emile  Zola,  mon  ami  dans  la  vie,  mon  maître  d'art, 
mon  guide,  mon  maître  de  cliaque  jour  en  ma  carrière.  Vous  avez  entendu 
dire,  sans  doute,  que  j'étais  troj)  heureux,  que  le  destin  m'avait  insolemment 
favorisé,  que  les  Théâtres  m'ouvraient  des  portes  à  peine  entrebaillées  j)our 
de  plus  vieux  que  moi.  C'est  vrai  et  le  peu  que  je  suis,  c'est  à  Emile  Zola 
que  je  le  dois  et  je  vous  remercie  encore  do  me  fournir  l'occasion  de  le  crier 
publiquement.  Quoi  qu'il  arrive,  désormais,  la  joie  de  mon  existence  e>l 
d'avoir  gagné  |)arcille  alïoction,  comme  l'honneur  de  ma  musique  est  d'être 
li('-e  à  r.idiiiirable  poème  de  Messidor.  » 

Après  l;i  ic présentation  de  Messidor,  Bruneau  se  rendit  à  V Association 
des  J'.'indiants,  où  une  grande  récejjtion  avait  été  organisée  on  son  hoimeur. 

Il  fut  accueilli  avec  un  véritable  enthousiasme.  J'extrais  les  lignes  qu'on 
va  lire  du  discours  prononcé  par  le  musicien. 


«.  Cette  émotion  ressentie  à  côté  de  vous  me  vient  de  ce  que  vous  êtes  la 
jeunesse  et  de  ce  que  vous  semblcz  m'aimer.  Ah  !  être  aimé  de  la  jinmesse  ! 
demeurer  en  communion  d'idées  avec  elle,  lui  donner  des  sensations  par 
une  œuvre,  quel  bonheur  et  quelle  fierté  on  en  doit  garder  quand  on  n'est 
cb'jà  plus  un  jeune  homme  et  quand  on  reste  un  homme  jeune  !  Et  c'est 
])oun|iioi  \ous  me  voyez  heun'ux.  Mon  Dieu  oui,  je  suis  heureux,  parfaite 
ni(>iil  heureux,  car  j'ai  foi  dans  l'avenir,  dans  la  vie  que  vous  représentez. 
Je  dois  cela.  Messieurs,  à  mon  maître,  à  mon  ami  Zola,  le  plus  grand  poète 
de,  la  vie.  et  j<!  l'en  renuucie  tout  aufcint  qui;  de  donner  à  mon  humble 
musique   les   chefs-d'œuvre   sans  lescjucls  elle   n'existerait  pas.  Boire  à  la 

bonne    \  ie   et    à    son    bon    poèt<',    c'est  boire  à  vous  et  à  \(»tre  jeunesse 

Comme   mon   (iuilhiunii'.   je  bois  donc  au  'riavail.  à  la  Paix,  à  la  santé  de 
tous...    )) 

(^uel(|ues  jours  plus  tard,  M.  11.  Martini  donna  à  son  tour  un  grand  dinor 
pour  fêter  le  succès  de  Messidor.  Les  critiques  des  dillereuts  journaux  y 
avaient  été  convit^s.  M.  Martini  prononça  un  petit  discours  qu'il  termina  par 
ces  paroles  spiiiluelles:  «  .b^  bois  à  vous.  Messieurs,  dont  la  critique  parfois 
sévère  no  m'a  jamais  garde  rancune  quand  j'ai  pu  faire  o-uvre  d'artiste,  ce 
<^|ui,  vous  le  saxoz.  n'est  pas  toujours  ais("  avec  les  dilHcullés  d'une  entre 
piisc  Ihi'-àtrrde,  et  je  suis  heureux  de  penser  que  vous  devez  avoir  pour  moi 
d'autani  plus  de  sympathie  <(ue  vous  n'a\ez  pas  hésité  à  mettre  en  prati<iue 
l'adage  latin  :  Qui  bene  aniot,  bene  castigat.  » 

Les  représentations  de  Messidor  furent  arrêtécfs  en  plein  succès,  à  la  neu- 
A  ièuu>  soiré'e,  par  une  interdiction  du  main»,  interdiction  motivée  par  les 
troubles  (|ui  airilèrent  Nantes  au  moment  de  la  pi'riode  aiguë  de  l'alfain» 
Dr<'yfus.  L'Ailmiuisiration  municipale  fit  preuve,  ce  jour-là.  d'une  regret- 
t.ible  pusillaniiuiti'.  Son  devoir  était  tie  maintenir  l'Art  en  dehors  de  toute 


HENRI   VII!  :J.»1 


<jUC><tion   p<)lili<|.i.  .  <  .  i.i   .11.1  ...lu.iii  |.iii- 

n'avait  on  li'eii  à  ,V/*'j»«/V/o/'.  Ouoi  qu'il  »*n  soit.  1 

et  <!••  Zola  fui  obligé  de  disparaître  de  l'aîRclic,  au  grand  regret  de  sc<  iioin- 

brcux  admirateurs,  Lo>  reprises  du  H'Cf  ci  de  V.\i  '     "     '    •  aiinon- 

c»''es  par  M.  Martini,  n'eurent  pas  liiHi,  toujours  p  "»• 

Le  20  janvier,  un  arréti>  du  Maire  prononça,  jusqu'à  nouvel  ordre,  la 
fermeture  du  (irandTliéâtn\  touttîs  les  rues  aboutissant  à  la  place  Graslin 
•^t'inl    harrt'es  et  orcupéi's  militairement  en  pn'*visi<»n  ■''  ''••  mani- 

festation   nationalo-anlidreyfusisto.    Mais,  devant   la    i  non  que 

causa  cette  mesure  dans  le  monde  des  artistes  et  des  employt^s  du  Thé;'itre, 
M.  Ktiennez  autorisa  le  surlendemain  la  n'ouverture  de  (ir 

Le  second  grand  ouvrage  mont»^  par  M.  Martini  (ut //«•/"  <  i/#/.«  i  u-- 
œuvre  de  Saint-Saiiis,  «..ms  valoir  Sanuton  et  Proscrpine,  est  d'une  Ix'lle 
tenue  musiciile.  On  l'entendit  avec  plaisir.  Elle  fut  jouée  le  17  février  18!»8. 
l.'intorprét^ition,  eonfl<'e  à  .\IM.  Séveilhac,  Sélin.  Lata-«te.  Houxnuutn,  à 
M'"*»  Romain  et  Talexis,  était  honorable. 

Un  ouvrage  jmur  lequel  M.  Martini  (jrofessait  une  afïeetion  p;irticulière, 
André  Cfirnier,  du  compositeur  italien  (liordano,  tomba  d'une  façon 
lamentiible.  On  avait  prédit  cette  chute  à  M.  .Martini,  mais  il  n'avait  rien 
voulu  écouter  et  il  passa  ur>  temps  précieux  à  mettre  en  scène  cette  ineptie 
musicale  qui  vaut  mieux,  pourtant,  que  la  Tarernerlea  Trabans  deM.  Maré- 
chal. M.  Martini  nous  infligea  aussi  cet  opéra-comique,  dont  le  four  fut 
encore  plus  coujplet  que  eelui  d'André  Chrnifir.  Nous  eûmes  encore 
W.  Portrait  de  Manon,  de  M.  Massenet  qui  laissa  le  public  complètement 
froid  et  Photi».  un  médiocre  opéra-comique  d'.Vudran  qui  fit  fuir  le  public 
au  milieu  de  l.i  représentation.  Knfin  M.  Martini  joua  un  petit  opéra  comique 
inédit,  du  à  deux  île  nos  concitoyens,  MM.  liathouis.  pour  le  livret  el 
Hélédin  po;;r  la  musique  :  Jirit/adler  roiuf  ara  raison  et  un  àprop<iS, 
fort  bien  traité  de  M.  Brunsehwig:  La  Naissance  de  la  Marseillaise. 

Les  opérettes  nouvelles  furent:  Le  l*uits  qui  jHirle.  Ma  Mie  Rosette  ot 
la  Poupée.  Cette  dernière  piée»'.  fort  bien  montée.  rem|K)rta  un  vif  sucws. 
Elle  se  joua  vingt  cinq  fois  et  rapporta  gros  à  M.  Martini  qui,  pour  le  prin 
cipal  rôle,  avait  engagé  la  charmante  Blanche  Marie.  L'auteur.  M.  Audran, 
vint  assistera  la  quatorzième  représentation  de  son  ouvrage. 

Pendant  le  mois  d'avril  M.  Martini  donna  une  série  de  super bt»s  repré- 
sentations avec  Marguerite  Martini,  Jane  Dhasty  et  Scsirembcrg.  Les  ténors 
David,  Lul)ert.  Uadoux,  .M"^'*  Bertlielly  et  Edeliiiy  vinrent  en  représen- 
tations. 

Cette  année  là,  la  municipalité  se  décida  enfin  à  faire  l'achat  d'un  nl'>c- 
ken^piel,  réclamé  depuis  longtemps. 

Pendant  la  saison  de  comédie  «lu  mois  de  mai,   M.  Martini  monta  un 


292  LE  THÉÂTRE  A    NANTES 


vaudeville  :  Fernand  Cortez,  dû  à  un  ancien  journaliste  parisien,  amateur 
de  théâtre  bien  connu  à  Nantes,  M.  Ernest  Adam.  La  représentiition  fut 
égayée  par  une  suite  de  plaisanteries  plus  ou  moins  spirituelles  organisées, 
avec  la  complicité  des  artistes,  par  plusieurs  joyeux  compagnons.  A  la  chute 
du  rideau,  l'aiitour  fut  trainé  sur  la  scène  et  une  couronne  descendit  du 
cintre  se  poser  sur  son  front.  Pendant  ce  temps,  les  artistes  s'agenouillaient 
devant  lui  en  des  poses  extatiques,  tandis  qu'une  quantité  de  cadeaux  fantai- 
sistes lui  étaient  passés  par  dessus  la  rampe  et  que  le  public  le  bombardait 
de  fleurs.  Après  le  spectacle,  un  groupe  nombreux  et  bruyant  reconduisit  en 
triomphe,  M.  Ernest  Adam  qui,  devant  ces  manifestations  par  trop  chaleu 
reuscs.  dut  clierchor  un  abri  dans  l'arrière-boutique  d'un  pâtissier  de  la  rue 
Crébillon.  Ce  fut  une  folle  soirée. 

Les  opinions  peuvent  différer  sur  les  résultats  des  directions  Martini.  Il 
ne  faut  pourtant  pas  oublier  que  ce  directeur  a  amené  à  Nantes  une 
cantatrice  de  premier  ordre,  M"*^  Marguerite  Martini,  qu'il  donna  un 
répertoire  des  plus  variés,  enfin,  que  ce  fut  lui  qui  monta  Messidor, 
Salammbô,  Henry  VIII  et  qui  reprit  le  Roi  d'Ys,  trop  longtemps  délaissé. 
Enfin,  M.  Martini  eut  toujours  à  C(x;ur  d'entretenir  avec  le  public,  la  presse 
et  les  abonnés,  les  relations  les  plus  courtoises. 

Pondant  cette  saison,  les  tournées  suivantes  vinrent  à  Nantes  : 
Le  Chemineau  (Lina  Munte),  Robert  Macaire,  le  Dindon,  VEcasion,  la 
Vie  de  Bohème,  Médor,  les  Mystères  de  Paris^  Napoléon,  l'Ami  Frits,  le 
Gamin  de  Paris  (Marguerite  Ugalde),  Blanchctte,  Gabrielle  (M^^  Favart), 
Briiannicus,  Leurs  Filles,  la  Râleuse,  Pour  la  Couronne,  la  Duchesse  de 
Montélimart,  Jalouse,  Néorosée,  VAube  de  la  guillotine,  le  Terre-Neuve, 
Catherine,  Ruy-Blas,  Mademoiselle  Fiji,  Lui,  Cyrano  de  Bergerac,  la 
Mare  au  Diable  (Jane  May),  Nos  Réseroistes,  le  Chai-Noir,  la.  Culotte, 
ï Etrangère  (Lebargy),  la  Joueuse  d'orgue,  le  Nouveau  Jeu  (Brasseur), 
Y  Amiral  (de  Féraudy).  V  Ecole  des  Belles-Mères,  la  Roulotte,  Madame 
Sans-Gcne. 


Pour  la  saison  1898-1899,  la  sul)vontion  fut  rabaissée  à  100.000  francs. En 
revanche  l'opéra  n'était  exigé  que  pondant  six  mois.  Les  débuts  furent 
rétablis.  Tous  les  abonnés,  sans  distinction,  eurent  droit  au  vote.  Né;ui- 
moins  une  Commission  municipale  de  cinq  membres  était  prévue  dans  le 
cas  oi!i  le  nombre  des  abonnés  serait  inférieur  à  vingt  cinq.  Chaque  artiste  étiiit 
soumis  à  trois  débuts  mais,  chose  absurde,  ces  débuts  pouvaient  avoir  lieu  dans 
deux  ouvrages  seulement. 

La  Ville  donna  comme  successeur  à  ^L  Martini-,  M.  Auguste  Giraudqui, 
depuis  trois  ans,  dirigeait  le  théâtre  ro3*al  d'Anvers.  Fils  de  l'ancien  séna- 
teur maire  d'Angers,  gentleman  accompli.    M.  Giraud  était  en   relation! 


V£RDIER  —  M"*»  IIENDRYCRX,  DE  CAMILLI,  DEVAREILLE8 


293 


avec  la  meilleure  Société  nantaise.  Sa  nomination  fut  1res   favorablement 
accueillie. 

Pendant  les  mois  de  fermeture,  différente»  améliorations  furent  appor- 
tées aux  Théâtres  raunieip.'iu.x.  A  Grasiin,  le  foyer  de«  artistes  fut  remis  à 
neuf  ;  il  en  avait  besoin.  Il  fut  tapissé  d'un  beau  papier  rouge  à  large  bando 
et  meublé  do  confortables  divans  en  velours  vert.  L'entrée  des  artistes  re^ut 
quelques  modifications  ayant  pour  but  de  la  rendre  plus  claire.  Enfin,  un 
tirabrt'  électrique  d'une  grande  puissanco,  placé  à  l't  •'  r  ot  que  le  ré^gis- 
seur  peut  actionner  de    son  bureau,  remplaça,   av.i  'raent,  l'antique 

cloche  de  l'entr'acte.  M.  fiiraud,  cédant  à  de   nombreuses  demandes,  créa 
des  abonnements  aux  troisirmes  galeries. 


SAISON      1898-1890 

A.    OIRAUD,    Directeur 

DonnsLAERE,  ehpf  d'nreh<>iitre.  —  Papix.  deiixièmo  rhof.  —  Monm,  rèfitMOr. 


MM,  Vkrdikk.  premier  l«''nor. 

ETKnNoi»,  ténor  (lomi-caract<"'ro. 
PoROBiiR.  deuxiènu*  ténor. 
SmuN,  baryton  d'o|KTft. 
Alheh niAi.,  liarytoii  d'opi'rfit»'. 
H.V8MEI.IN.  douxiônie  baryton 
SiLTKRTRB.  bassf  proTonde. 
Dons,  b«sa«  chantante. 
Rius,  deuxième  ba.tse. 
JoRDAMis,  laruotte. 
SoucHXT,  trial. 
DoNTAL,  basse  comique. 
Steviss,  troiaième  ténor. 
MuLLER,  deuxième  trial. 


^r— '    Théréso  CutsiENT.  soprano  drama- 
tique. 
Devarbim.bs,  soprano  léger. 
IIendrvi-.kx,  contralto. 
Dr  Camii.i.i,  dugazon. 
Pei.tikh,  diTette. 
Bach,  deuxième  dugazoa. 
AuoBR,  troisième  dugazon. 
Gksiy.  duègne. 

BALLET 
M.  HoLTXSR,  maître  de  ballet. 
M""   Rxaou-BAi'oixo,  première  danseose. 
LiuvA,  demi  caractère. 
Alberb,  travestie. 


L'ensemble  de  celte  troupe,  après  les  quelques  changements  apportés  par 
les  débuts,  était  bon.  Le  ténor  Verdier  possesseur  d'une  voix  au  timbre  trèa 
sympathique,  adroit  chanteur,  comédien  fort  correct,  conquit,  au  bout  de 
quelque  temps,  la  faveur  du  public.  M™*  Hondr}'ckx,  douée  d'un  très  bel 
organe  le  mezzo  soprano  et  d'un  rcol  Uilent  do  cantatrice  ;  M"*  deCamilli. 
une  dugazon  charmante  ;  M"»*  Devareilles,  une  excellante  musicienne  dont 
la  voix  d'une  extrême  pureté,  se  pri'Uiit  mieux  au  chafit  largo  qu'aux  voca 
lise.s  insipides  des  chanteuses  lêgt'ros.  furent  trôs  chaleureusemont  applau- 
dies pondant  toute  la  saison.  On  revit,  avec  un  vif  plaisir,  M"*  Clément  qui, 
deux  ans  avant. avait  fait,  à  Oraslin,  ses  premiers  débuts.  Parmi  les  artistes 
hommes,  il  faut  citer  aussi  .MM.  Silvestre  et  Forgeur.  Les  débuL^  éliminè- 
rent MM.  Alberthall,  Etornod  et  Souchet,  qui  furent  remplacés  jMir 
MM.  Vauthier,  Crèmel  et  Ohambéry,  un  trial  des  plus  amusants.  Nf.  Sou- 
chet reita,  néanmoins,  comme  comique.  M.  Jordanii  tomb«lui  aaisi.  Il  ent 


201  LE    THÉATRK    A    NANTES 


comme  romplarniit  M.  St«''phiine,  puis  M.  Auhcrt.  M™"  ZZ-lo  Durand  sut- 
c6d;iù  M"""  Pcllicr  ot  M"'  Van-Denosse  à  M""  Albors,  qui  passa  dans  un 
qnadrillo.  M"'  Rogj^ia-Baudino,  qui  avait  été  fort  appréciée  comme  pre- 
mi6ro  danseuse  trois  ans  auparavant,  fut  refusée  à  la  suite  d'une  petite 
<a1>al('  qui  n'avait  rien  à  voir  avec  l'art.  Les  amis  de  cette  danseuse  organi- 
st-ront  une  série  de  boucans  et  l'Administration  prit  un  arrêté  int<'rdisant  à 
M"'  Baudino  de  reiiaraître  sur  les  scènes  de  Nantes.  M"'  Ripamonti  qui 
lui  succéda,  diit  se  retirer,  son  physique  ne  répondant  pas  à  son  talent. alors 
a])parut  Anita  de  Bias2i  dont  la  beauté  ravissante  sullit,  seule,  à  capff'  !< - 
sullVagcs  des  abonnés. 

I.o  7  janvier  1H99  eut  lieu  la  première  représont:Uion  d'un  ravissant  chef- 
d'œuvre  que  M.  Giraud  avait  été  le  premier  à  jouer  en  français,  pendant  sa 
direction  d'Anvers  :  Ilaënsel  et  Greiel.  Cette  adorable  partition,  tout»- 
j)arfuméc  de  poésie  naïve,  fut  accueillie  avec  enthousiasme  par  tous  le- 
musiciens.  A  chaque  représentation,  trois  morceaux  étaient  régulièrement 
bissés.  M'^*-"  de  Camilli  créa  d'une  délicieuse  fa<;on  la  petite  Gretel  ;  elle  a 
laissé  à  Nantes,  dans  ce  rôle,  d'inoublial)les  souvenirs.  Pour  Haënsel. 
iM.  Giraud  engagea  lUie  jeune  cantatrice  suédoise.  M''"  Siri-Li\id,  dont 
l'accent  n'avait  rien  de  désagréable.  M^'*'  Clément  chanta'  et  joua  d'une 
manière  très  remarquable  le  dillicile  personnage  de  la  fée  Grignotte.  L<'s 
autres  rôles'  étaient  bien  rendus  par  Mm«*  Devareilles,  Ilendryckx  et 
M.  Simon.  Une  assez  jolie  toile  de  forêt  et  quelques  fragments  de  décors 
furent  brossés  pour  cet  ouvrage. 

Là  seconde  nouveauté  fut  Princesse  (VAulterge,  du  compositeur  belge 
Jan  Blockx.  Cet  ouvrage  intéressant  de  l'école  flamande  contient  de  fort 
belles  pages,  notamment  une  scène  de  carnaval,  où  la  polyphonie  vocale 
et  instrumentale  produit  un  elTet  considérable.  Vrincesse  (VAubi'f[n'  fut 
jouée  le  21  janvier  1899.  M"^^  Hendryckx  fit  une  émouvant*»  Keinildr. 
M.  Verdier  un  excellent  Merlyn  et  M.  Dons  un  farouche  Rabo.  Le  rôle 
de  Rita  ne  convenait  guère  à  M""*  Devareilles.  Les  autres  personnages 
étaient  confiés  à  MISL  Simon,  Rius  et  à  M''*  Clément.  Jan  Bloekx  dirigea 
les  deux  premières  représentations  de  son  ouvrage,  qui  se  maintint  sur 
rafliche  avec  succès. 

Phrijnè  fut  joué,  le  'M  j.'(nvier  1S99.  On  écouta  avec  un  vif  plaisir  ce 
cliarmant  opéra  comique  de  Saint-Saëns,  dont  l'intcprétation  était  confiée  à 
la  jolie  M"»'  Devareilles,  à  M'"  de  Camilli  et  à  MM.  Crémel  et  Vau- 
thier. 

Vin  fait  d'opérettes.  M.  Giraud  monta  les  J'ciites  Mirhu  et  VAiiherfjc  du 
Tohu-Bohu.  Il  joua  aussi  le  l)allet  de  Delibes  :  Coppelin. 

Le  charmant  ténor  David  vint  en  représentation.  MM.  Lucas  et  Séveilhac 
firent,  chacun,  une  réapparition  sur  notre  scène. 


L'iNCIDEXT  DOnBBLAEnK  295 


Les  |)i«"'rs  siiiv.iiilt'S  fin  '  >  par  ii<'< 

I^     J'oscil    (Lill.i    MlUii     .     .       Gninil    O  -  .,        .  n>,iiiHiii--n 

f'nntrfileur  don    Wayonn-IAtH,    Antnnr  du    Cod»\ 
Terre- Xruce,  la  Dame  de  chez  Maxim,  Villa  Gaby^  le  {j'^tulurmn  tv. 
jtitir  (Harcl),  Cyrano  de  /icn/erac,  le  Chrmineau  (I.ina  MmiU*),  \f  l*ai  •,..„, 
Mii.'itx  caul  douct'ur...  ei  riolence,  Adrienne  Lecourreur  (Liiia  Muiitc),  !•; 
Chfft  Noir,  la  lioulotte,  Pour  le  Afàle,  la  C<uêerolê,  le  Vieux  Marcheur, 
(lirasseurj,  Michel  Strof/off  {llom:i\iï).  Ma  liru  (Baret). 


M.   Girami   oiilrott'imit  le»   n^latioiis  los   plus  cordinli^  avo*^  ton 

mrmhrt's  (II*  rAdiiiiiiistrilion   mimi«-i|»al«,  -     ' 

Lo  canicU'i»' fr;in«' ri  lo\;il,  mais  un  p<^ij  ci  ..     ,     ... 

longtemps  Hym|)athiser  arec  celui  do  l'adjoint  (U*lt'gu<i  aux  iWux-Arb),  qui 
protrgeait  le  chef  d'orclioslro  DobbcMatiro  contre  \f.  Giraud.  Ce  dernier. 
n'avait  pas  tard*'?  a  s'aporrcvoir  de  la  valeur  n'^'ll»»  d-'  '  '  '  '  ' — 
liaulrniont  nianjfrslr  son  int«'nti(Ui  d«î  K'  congédier  |»our  I 
La  situation  s'était  envenimée  à  un  tel  point  que  M.  Giraud  n*adreâs:iit  1 1 
parole  à  M.  I)ohl)ela«'re  qjie  pour  les  affaires  de  serviee.   Nf.  Lemoine   prit 

ouvert«'mcnl   parti  pour   le  chef  d'orrhestre  el  il  lai:isa  <••  ' ...i. ...... 

paroles  qui  firent  supposer  que  M.  Ginud  no  seniit  pas  r. 

Los  cln)8es  en  étaient  là  quand,  dans  les  derniers  Jours  de  déeerabn»  IWJK, 

NL  (liraud  n-deiuanda  la  dire«'tion  |)our  un  lap-    ' 

(jue  le  e^diier  des  eliargt'^    ne  fùl   vol»'.   l'riU'  <|. 

IKMi  les  |M>tiles  comliinaisons    de  l'adjoint  aux    h<MUX-Arls.    La   nouvell'* 

e.nididature  «le  M.  tîiraud   fut  fortement  appuv«'e   par   les  journaux,  qui 

profuèreni  de  l'oceasion  po»ir  protester  contre  l.i  |)rétention  de  M.  IsC — • 
tl'iinposer  NL  Doliix'laeiv  au  directeur.  Enfiu,  r«»mnn*  le  hruit  île  Un, 

iiiadlenienls  s'était  Yé|Kuidu  dans  le  public,  aUinn  tués  voulurent 

ni.uiili-sler  «lain'inent  \vhv  opinion  et  ils  a<I  -iilion 

«•ouverli'    «!•'    Imit    «'.lii      VI       iiiii.v    K.tiir  i     tl.« 

M.  «lir.iihl.  I..'  :;i 

l>our  un 

M .   Ltii'ii ii'v.    ^1 1 1     II'  M  \     1  I 

M.   Giraud  à  leurs   nie>«(iiii  >  a 

\riiuts  se  briser  contre  lu  haute  honnêteté  de  M   h>  Mniro  de  Nant4*s. 
\L  L<'moine  n'avait  p:iv  ir 

M,  (iir.uid  sou    uni    l><'l 

rê|Wuition  de /'Ar//?'» .  M.  I' 

li^te   <(ui   l'avuit  plu-  nais  san 


296 


LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


bornes  permises,  se  mit  à  l'insulter  de  la  façon  la  plus  grossi^^c'.  Dès  le 
lendemain,  la  presse  nantaise  fut  saisie  de  l'incident  ;  M.  Dobbelacre  fut 
aussilôtrais  à  l'index  et  son  maintien  à  Nantes  déclaré  impossible.  M.  Lemoine 
n'en  continua  pas  moins  à  soutenir  quand  môme  M.  Dobbelaëre,  et  il  fit 
tout  au  monde  pour  empêcher  M.  Giraud  de  trouver  un  nouveau  chef, 
allant  môme,  après  avoir  fait  attendre  sa  réponse  pendant  un  mois,  jusqu'à 
refuser  d'en  accepter  un  qui  offrait  toutes  les  garanties  artistiques  voulues. 
Mais  M.  Lemoine  ne  devait  pas  ôtre  le  plus  fort.  Les  critiques  firent  ime 
démarche  auprès  de  l'Administration  municipale  et  lui  expliquèrent  la 
situation.  Aussitôt,  dans  une  lettre  officielle,  ^L  le  Maire  de  Nantes  déclara 
((  qu'il  ne  pouvait  être  désormais  question  du  maintien  de  M.  Dobbelaëre 
comme  chef  d'orchostrti  o.  M.  Lemomo  dut  s'incliner.  M.  Giraud  restait 
donc  à  Nantes,  M.  Dobl>elaëre  ctiiit  congédié,  et  satisfaction  était  donnée  à 
la  Presse  nantaise.  Après  ce  triple  dessous,  tout  le  monde  s'attendait  à  ce 
que  M.  l'adjoint  aux  Beaux-Arts  donnât  sa  démission.  Il  n'en  fut  rien. 

La  subvention  fut  maintenue  à  100.000  francs.  Six  mois  seulement  d'opéra 
étaient  exigés,  le  septième  mois  le  directeur  était  libre  de  jouer  ce  qu'il  vou- 
drait, mais  il  devait,  quand  même,  conserver  les  chœurs  et  l'orchestre. 

Est-il  besoin  d'insister  sur  l'absurdité  de  cette  clause?  Du  moment  que 
l'on  n'exigeait  pas  d'opéra,  à  quoi  bon  forcer  le  directeur  à  conserver  un 
orchestre  et  des  chœurs  au  complet?  Pour  sauvegarder  les  intérêts  de;; 
musiciens  et  des  choristes,  évidemment.  Mais  alors  que  faisait-on  de  ceux 
du  directeur  ? 

En  outre  des  abonnés  à  l'année,  une  Commission  municipale  de  cinq 
membres,  prise  exclusivement  parmi  des  amateurs,  fut  appelée  à  juger  les 
artistes.  Cinq  fauteuils  devaient  être  réservés  à  ces  commissaires.  Ceci  était 
tout  bonnement  scandaleux.  Jusqu'alors,  quand  il  existait  une  Commission, 
ses  membres  avaient  simplement  leurs  entrées  au  Théâtre.  Avec  le  nouveau 
système,  ces  cinq  fauteuils  réservés  équivalaient,  pour  le  directeur,  à  une 
perte  sèche  de  480  francs  par  mois. 

SAISON     1899-1900 
A.    GHRAUD,    Directeur 

BovY,  chef  d'orchestre.  —  Nazy,  deuxième  chef.  —  Murfer,  régisseur. 


MM.    Vkbdikh,  premier  toiior. 

Gazotti:,  lénur  deiiii-curaclère. 
FoiuiEUK,  deuxième  ténor. 
Stevens,  troisième  ténor. 
YàLLiKB,  barytuu  d'optWa. 
DjiXphet  ,    baxylou    dopera  cumi  - 
que. 


Maktln,  basse  profonde. 
Dekvck,  basse  chanlaule. 
RiDs.  deuxième  basse. 
HuussKi..  triai. 
MoHDtiT,  larueUe. 
SoccuKT,  comique. 
MuLLKR,  comique  marqué. 


SAMUEL   BOVY  —    8IZE8  —  ORPHÉE 


2îr7 


>[•*•    UbiktTI,    (Mi|,i..ii>.  iir.irri.itPHJ. 

Detarbillem.  soprano  \^-^l^^^. 
Hendry.;kx.  ••■.(itrall.. 

ZiNA    PoiONV.    <lll^;a/.uli. 

Edkmnv.  «livi-tl.-. 
HACii,   (N-iixioiiio  dagazon. 
DBRvtM.K.  troisièm*'  dugHZi'U 
GfcNiN.  dii'viie. 


b.KLlAVV 
MM.   HoLTtEH.  msHm  <1«  balleU 
Dk  Bu«i.  I 

4  ;  1 1  I   4  I M  .  I      I  I  ■ 


\' 


tr»v.«sU«'. 


A  la  place  de  M .  I)obbola«'re,  dont  le  d»^part  ne  pouvait  la»>-  '% 

M.  Giniud  eiif^afjoa,  comme  premier  chef  d'orchet»tn»,M.   ." i      y. 

Jeune,  actif,  intelligent,  excellent  musicien,  passionnr  pour  son  art, 
M.  Bovy  eut  vite  fait  d'acquérir  la  situation  pn'«pondénmie  duc  à  son  m^'-rilc. 
Miranne  avait,  enfin,  trouvé  un  ^  :  di^'ne  de  lui. 

La  troupe  primitive  contenait  ph. ;    ..jn-valeurs.  MM.  Cazotte,  Vallier, 

Martin,  Deryckx  furent  refus«>s.  M.  Cazotte  fut  remplacé  par  M.  Broca, 
M.  Vallier  par  M.  Hernard  qui  tomba  lui  aussi,  puis  par  M.  Sires, 
M.  Der}'okx  par  Nf.  Jacquin  et  M.  Martin  par  M.  Bourp^ois. 

La  trou|x»  ainsi  remaniée  se  trouva,  sanscontn^dit,  la  meilleure  de  prorince. 
Il  y  avait  de  longues  années  que  nous  n'avions  pas  eu  à  Nantes  un  ensemble 
aussi  parfait.  J'ai  déjà  parlé  de  MM.  Verdier  et  Forgeur,  de  M™'*  Deva- 
reilles  et  Hendr}cks.  Le  jeune  baryton  Sizes.  excellent  chanteur,  comédien 
plein  de  spontanéité  et  de  feu,  avait  été  prêtt'î  par  l'Opéra,  l'n  autre  artiste 
de  haute  valeur,  la  b;«sc  chantante  Jacquin.  en  quittant  Nantes,  enlri  à 
rO[)éra-Comique.  M.  Bourgeois  qui,  quelques  années  aupanivant,  avait  tenu, 
avec  un  grand  succt\s.  l'emploi  de  basse  profonde,  fut  revu  avec  plaisir. 
Le  ténor  léger  Broca,  un  parfait  musicien,  quelque  peu  discuté  au 
début  de  la  saison,  devait  arriver,  par  un  tnivail  acharné,  à  conquérir  l'^timo 
de  tous.  Mordet,  dont  on  avait  été  privé  pendant  un  an.  fit  .sa  renlnV  au 
milieu  des  applaudissements  unanimes. 

Du  côté  féminin  la  troupe  n'éhut  pas  moins  bien  partagtv.  M"*  Brietti, 
une  soprano  dramatique  à  la  voix  éclauinte  et  solide,  M"«  Poi^ny,  dont  l'or- 
(îane  délicieux  s'unissait  a  un  physique  charmant,  enfin  M»»  Edeliny, 
une  divelte  de  talent  et  d'expérienct»,  complél;iient  avet-  M"'»»Hendryckx  el 
Devareilles  un  remarquable  cadre  de  troupe. 

Le  premier  ouvnijçe  donné,  cette  annéi'-là,  en  dehors  du  rép  u 

rantpar  M.  (liraud  UnOrpfue  (11  novembre  1890).  L'immortel  «1..  .  -re 
deGliick  n'avait  pas  été  joué  à  Nantes  depuis  le  début  du  siècle.  C'.unt  donc, 
pour  les  habitués  du  Théâtre,  une  vériuible  nouveauté.  On  doit  d'autant  plus 
féliciter  M.  Cfiraïul '!'  '"  '     '.  "  .é- 

diocre  confiance  en  ^1  i       ^  ,  .  mt 

jamais  douter  des  chefs-d'œuvre:  leur  heure  finit  toujours  par  arriver.  Orphée 
remporta  un  succès  éclatant.  L;i  tragédie  lyrique  de  Gluck  se  joua  onie  fois 

4M 


29S  LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


devant  dos  salles  enthousiastes.  Il  est  vrai  que  l'interprétation  était  absolu- 
ment remarquable.  M""'  HendrVckx  chanta  d'une  voix  chaude  et  péné- 
trantfl  et  joua  d'nno  fa.,'On  parfaite  le  rôle  écrasant  d'Orpluie,  M""»  Deva- 
rcill(^s  fit  une  l»onne  Murydic»',  M""  Poigny  gîizouill.i  gentiment  le.««  arieties 
de  l'Amour  et  M"Miaeh  fut  très  suffisante  dans  l'Ombre  heureuse.  Mai<. 
avec  M"'  Ilendryckx,  le  véritable  triomphateur  fut  M.  Bovy,  qui  sutobtenir 
(!(;  ses  musiciens  des  effets  de  douceur  auxquels,  depuis  trois  ans,  on  n'était 
plus  habitué.  A  la  fin  du  troisième  acte,  le  publie,  ravi,  faisait,  chaque 
fois,  au  distingué  chef  d'orchestre  une  ovation  bien  méritée.  Pour  com- 
pléter la  soirée  lorsqu'on  jouait  Orphée,  M.  Bovy  eut  l'excellente  idée  de 
donner  une  partie  de  concert  composée  cxclu-sivement  d'œuvres  classiques. 
C'est  ainsi  que  nous  eûmes  de  très  bonnes  exécutions  de  la  Symphonie  en 
ai  rameur,  de  V Héroïque,  de  la  Pastorale  de  la  Si/mphonie  écossaiae  et  de 
difierents  morceaux  de  Rameau  et  de  Mozart. 

Après  Orphée,  œuvre  de  pur  classicisme,  M.  (Jiraud  monta  Hidda,  de 
César  Franck,  l'une  des  partitions  les  plus  avancées  de  l'école  moderne 
française,  dont  le  livret,  malheureusement,  n'est  pas  à  la  hauteur  de 
l'admirable  musique.  Hulda  fut  jouée  le  7  décembre  1800.  L'interprétation. 
confiét»  à  MM.  Verdier,  Jacquin,  Rius,  Broca,  à  M^'^*  Brietti,  Deva- 
reilles,  Ilendryckx  et  Poigu)-,  était  bonne.  Le  ballet,  par  contre,  éuiit  mal 
réglé  par  M.  Holtzer,  et  le  public  faillit  se  fâcher  le  premier  soir.  Bien  que 
Hulda  ait  fait  une  moyenne  de  1,750  francs,  M.  Giraud,  cédant  à  je  ne  sais 
quelle  influ(Uioe,  ne  joua  cotte  belle  partition  que  trois  fois. 

La  partition  de  Franck,  œuvre  d'art  noble  et  austère,  fut  retirée  do  l'affiche 
pour  faire  place  à  la  reprise  du  Cïrf,de  M.  Massenet,  dont  la  seconde  re])ré- 
sentation  arriva,  à  grand'poine,  à  faire  730  francs  de  recette.  La  remise  à  la 
scène  de  cotte  pièce  fut  très  sévèrement  jugée  par  les  critiques  de  Nantes. 
Tous  se  trouvèrent  d'accord  dans  leurs  appréciations  sur  cet  opéra,  dont 
quelques  rares  belles  pages  ne  peuvent  faire  pardonner  le  tapageur  fatras. 

Avec  Orphée^  le  grand  succès  de  la  saison  fut  la  Vie  deBolicme,  du  c«un- 
positeur  italien  Puccini.  Cette  œtivro,  un  peu  superficielle,  mais  d'inspira- 
tion charmante,  sinon  toujours  très  personnelle,  de  jolie  couleur,  de  vie 
intense  se  joua  quinze  fois.  La  première  eut  lieu  It»  8  mars  liXX).  L'interpré- 
tation était  absolument  remarquable.  Le  rôle  de  Mimi  servit  de  début  au 
llié;\tre,  àM'^*"  Marguerite  (iiraud,  lille  du  directeur.  M"'  ttiraud,  à  peine 
ilgée  alors  de  dix-neuf  ans,  elianta  le  joli  rAle  de  la  petite  brodeuse,  avec  une 
voix  d'un  timbre  moelleux  des  plus  séduisant,  d'une  pureté  extrême  et  qui, 
dans  les  sons  filés  d'une  façon  exquise,  atteignait  à  de  ravissants  effets.  De 
plus,  chose  véritablement  extraordinaire,  M>'«  Giraud  se  révéln,  du  premier 
eoup^  comédienne  accomplie.  Au  premier,  au  troisième  et  au  quatrième  actes, 
elle  avait  d'ad^orabh'S  trouvailles.  A  Nantes,   le  non)   de   M"^'  Marguerite 


NfARCUBRITfi  OIRAUD  —    LA   Tl»  DE   BOHèME  JOO 


Giraihl  i  -'■">'' 

.•iprôs,  . .  .  ^'  ^ 

fa<.on  lu  plus  brilUnto  par  en  môina  rùle  do  Mimi.  M.  Juûi(uiii  h4  un  Sohau- 
nardd»s  pîuNîiinuKant.  M.  Brw.»  t  -  .  i  :.>. 

M.  Sizds  ix^rsomiifia  Marfcl  :i  1.1  .1 i   -       , 

niif  fort  juste  à  Colline.  M  "  Poi  une  tlôlion-UîW  Munotu», 

Mordi't  et  I{ou3*'l  furent  très  amusanw  daiiH  ien  rôloe  de  M.  Boooit  et 
d.»  S:iint-rMidr.  ^r.  <;ir..nd.  fHuir  11  V  '  ''  '  -  '•  '■  -  ^*-in«  le 
déror  (lu  troisi/'inc  acte,   la  Jinrr  et  di* 

iionibicux  fragmonia  pour  le»  autres  tiblcnux.  Les  toiles  avant  subi  un 
retard  dans  leur  envoi,  la  promi»'"rf!  eut  lieu  daii- 

bien  que  mal.  Il  eût  mieux  valu  retarder  la  r<  j-i     ■ 

saison,  la  Ville  acheta  les  décurH  de  lu  lio/n'-me  et  elle  fit  tien. 
On  repr<5sonla  aussi  un  joli  ballet,  Nedja,  dû  à  Tun  de  nos  concitoyens, 

M.  S(^lil: 

lîim  i\\M'  ;  '  1.    ••ii<  -n- 

en  e«'la  mal  ■  ,  ,^  vclle.  Il  se 

contenta  de  donner  une  ineptie  intitul«k»  le  Ê/oulin  des  Roses,  qui  lui  ayait 
C'tA  im])oséo  par  l'éditeur  Jouk'rt.  '  unie  livret 

(jutî  comme  imisi«]i!e.  lombi  sou.s  !■-  ....-  -  -  ....  , .    .....  ..u  de  mars, 

M""  Hendryckx  i<»ml»:i  ^'lavrment  malade.  Elle  fut  remplac«îe  par  une  jeune 
débutante,  M'*  Marcillac,  qui  réussit  à  se  (aire  applaudir  dans  Orphée, 
malgré  récr.is.iiii  souvenir  do  M*"  Hendryckx. 

Profitant  d'une  clause  du  «abier  des  charges,  M.  Giraud  congédia  une 
partie  de  la  troup»',  piinlant  le  mois  d'avril.  MM.  Verdier  et  Jacquin,  (firent 
remplacés  par  MM.  Gautier  et  Greil,  et  M«^  Génin  par  M"»«  Stany,  ton-, 
■•irtistes  méiliocres. 

Un  nouveau  décor,  assez  réussi,  do  Cathédrale,  fut  brossé  jwur  le  J*ro- 
pInHe.  Un  nouveau  truc  fut  installé  pour  rë<Toulûmcnt  du  temple  de  Samson 
et  Dalila,  enHn,  pendant  les  mois  de  fermeture,  le  manteau  d'Arlequin  (ut 
repoint. 

Deux  vestiaires  furent  établis  au  rox-de  chaussée  ;  celui  de  gaucbu  dans 
les  anciens  locàiix  du  oommissorial  de  police,  celui  de  droite  dans  b'^ 
anciens  \vater-cl<' 

Un  diman<  '■••  v...   ,  -  ........ 

NitoïKfhf,  W  .1,  pour  .ilUV'cr  la  n>p.  .le 

uclo  du  liarbier.  Des  protostiitions  s'élevèrent  de  toutes  parts  et  la  potico  dut 
intervenir,  •«  ""      .re 

les  acteurs  1     ,  ,  -.        .  lu 

mot  drûle  de  Roussel  vint  entin  calmer  la  colère  du  public.  Le  wéine  soir 
(  1  février  lUOO),  au  moment  où  lo  rideau  allait  se  lever,   on  sentit  sur  la 


SOO  LE   THÉÂTRE  A    NANTES 


scène  une  odeur  de  chiffons  brûlés.  On  chercha  d'où  provenait  cette  odeur 
et  l'on  finit  par  découvrir  que  le  feu  avait  pris  dans  la  poche  du  pardessus 
d'un  machiniste.  Celui-ci,  qui  fumait  en  arrivant  au  théâtre,  avait  laissé  sa 
pipe  mal  éteinte  dans  la  poche  de  son  pardessus  qu'il  avait  suspendu  dans 
un  placard  rempli  d'effets. 

Le  10  mars  1900,  à  la  seconde  de  la  Vie  de  Bohème,  une  panique  se  pro- 
duisit pendant  le  troisième  acte.  Au  début  du  duo  entre  Mimi  et  Marcel, 
une  forte  odeur  de  caoutchouc  brûlé  se  répandit  dans  la  salle.  Quel- 
ques personnes  sortirent  et  bientôt  le  public  entier  fut  debout.  M.  Giraud  et 
le  régisseur  se  précipitèrent  sur  la  scène  et  rassurèrent  le  public  dont  l'émo- 
tion se  calma  bientôt  devant  les  assurances  qu'on  lui  donnait  qu'il  n'y  avait 
aucun  danger.  Un  court  circuit  électrique  s'était  produit  sur  la  scène  et  l'en- 
veloppe en  gutta-percha  d'un  fil  avait  brûlé. 

Tournées  :  La  Dame  de  chez  Maxim  ;  Le  Torrent  ;  Que  Suzanne  n'en 
aache  rien  (Baret)  ;  Le  gendarme  est  aans  pitié  (Baret);  L'anglais  tel  qu'on 
le  parle  (Baret)  ;  Coralie  et  C'^ ;  La  Conscience  de  l'Enfant;  Les 
Fourchambault  ;  Le  Christ  (avec  son  auteur,  M.  Grandmougin  et  Jeanne 
Brindeau);  Jean-Bart ;  Andromaque  ;  Les  Plaideurs  ;  Le  Vieux  Marcheur  ; 
Les  maris  de  Léontine  (Baret)  ;  Les  gaietés  de  l'Escadron, 

Les  directions  Giraud,  surtout  la  seconde,  compteront  parmi  les  meil- 
leures de  ces  dernières  années.  Il  est  à  regretter,  néanmoins,  que  M.  Giraud 
n'ait  pas  tiré  de  ses  belles  troupes  tout  le  parti  désirable.  Avec  les  remar- 
quables éléments  dont  il  disposait,  il  lui  était  possible  de  varier  davantage 
le  répertoire  et  de  monter,  au  moins,  deux  ouvrages  nouveaux  de  plus. 
Mais  M.  Giraud,  directeur  intelligent  et  artiste,  restait  souvent  indécis  et 
flottant  entre  les  décisions  à  prendre.  C'était  là  sou  gros  défaut. 


Comme  je  l'ai  dit,  M.  Giraud  avait  été  renommé  directeur  pour  une 
période  de  trois  ans  avec  faculté  de  résiliation,  de  part  et  d'autre,  le  31  décem- 
bre de  chaque  année.  A  la  suite  d'un  mouvement  de  mauvaise  humeur,  qu'il 
regretta  ensuite,  j'en  suis  persuadé,  il  envoya  sa  démission  à  la  Municipa- 
lité pour  les  deux  saisons  qui  restaient  à  courir. 

La  Ville  choisit,  pour  succéder  à  M.  Giraud,  M.  Henri  Villefranck,  qui, 
jadis,  avait  fait  partie,  comme  basse  chantante,  de  la  troupe  Gaultier  de 
Loncle  (saison  18831S81).  Depuis  NL  Villefranck  avait  été  directeur  à 
Dijon  et  à  Reims,  où  il  resta  sept  ans.  M.  Henri  Villefranck,  homme  d'une 
grande  affabilité,  arrivait  à  Nantes  avec  la  réput;ition  d'un  administrateur 
dos  plus  habile.  Son  séjour  dans  notre  Ville  devait  confirmer  ce  juste  renom. 
M.  Villefranck  apporta  à  la  mise  en  scène  un  soin  tout  particulier.  Jamais 
luxe  pareil  n'avait  été  déployé  au  Grand-Théâtre  de  Nantes.  Le  directeur 
en  fut  récompensé  par  une  saison  des  plus   fructueuse.  M.    Villefranck 


ENGKL.  —  JANE    BATIIOHl 


:m 


savait  semer  pour  récol ter.  Ilnorogardait  pas,  comme  tant  de  ses  préd<'c<  sseurs. 
à  dépenser,  s'il  le  fallait,  quelques  renlaines  de   fnincH  p  >u  •   donmr  a  un 

onvr  11' ■  1.'  r-  dji.'  propre  à  le  bien  mettr*'  ••"  v  iL-nr   T  f  t>i.  Mi^   tnî  .  n  ^n    t.- 


SAISON     1900-1901 

Hânrl  VILLEFHANCK,  Directcu  - 

Samuel  Bovv,  p  oniier  chef  d  orchestre    —  L»  K|!«4X<:k,  deuxi  «me  e!i«f  J'orcli  «tre. 

I  »i  1  vNx.  r>'giHs«ar. 


MM.   En<;kl.  premier  l»^iior. 

OKUvt'HxY.  pn-inier  toiior  do  grand 

c^irrftft  tradiictioiiH. 
CofKiu.  premier  ténor   d'opén»    co 

rai  que 
PfcHiNi,  t»«nor  d'<»p<'r.i  comique. 
DiMosTiKH,  si'omd  U-nor. 
NoÉ  CAi>EAt'.  sei'ond  Irnor. 
VixcEXT.  ténor  Masuol. 
Jean    Albeht,    baryton    de    ^'rancl 

opéra. 
Edwy.  bary-ton  d'upéra  comique. 

FftBALi»  DK  Saint  Poi..  pri-uii.Te 
basse  cliautanh'. 

Athkm,  basK*'  noble. 

RiTKr.  seconde  bas.se,  second  bary- 
ton d'ojM'ra. 

D'Ahzel,  seconde  basse. 

MoHDKT,  laruelte. 

Dahnai;!).  laruetie. 

Di  iiotit,  trial. 

Mi'M^:r.  dt'uxit-me  trial. 


M*'«    llt'l^neTHEBRV.so;  rarodramatiqae. 
JuliaCHo'.jiiM.  premier  ■opraiiolè^er. 
Ratiiuri.  stipraiio  L-ger. 
Mari.iu.ac.  oontral.o. 
Jeanne  Sterckhaans.   pri  m  •  r.    lu- 

gazon. 
Ifuibelle  (HtuRiox,  •  luint-uso    d-q^ 

rette. 
Lkuairk.  seconde -Uigixon. 
(iKi.i.v-LA.><tAU.K.  m'-re  iliigazui'. 
Jane  DakiEY,  stcondi'  du^-a/  m. 
Blanche Kkki.k., LE  >•'<-. in, i.dn^a/  n. 
Gras,  second'*  dugizon. 

BALLET  DIVERTISSEMENT 

M"*  Ci'line   HonKR.  inaUr<  »i««-  de  ballet. 
Amelta  .«hbuna.  piemiére  d.ins4iia« 

noble. 
('.iRiiRKRo.  pn>miëre   danseuse   de- 
mi caractère. 

Eva  MtKY.  première  dnosense   tra- 
vesiie. 


Cette  troupe,  bim  que  possédant  des  éléments  de  tout  premier  ordre,  était, 
dans  son  ensemble,  inférieure,  surtout  en  ce  qui  concernait  !«•  grand  op«  ra, 
à  celhî  de  la  saison  180i>-ll)00.  Pourtiint,  présentée  ave<'  une  habileté  r.ite 
par  M.  Vilb'frarck,  elle  arriva  à  satisf.iirc  la  majorité  du  public. 

Le  ténor  Engel,  que  nous  n'avions  jajnaisrntcndu  à  Nantes,  chanteur  mer- 
veilleux, comédien  plein  do  feu,  musicien  consommé,  conquit  vite  les  suf- 
frages de  tous  ceux  qui  préfèrent,  à  la  qualité  brute  de  la  voix,  la  science  el 
If  style.  Cet  admirable  artiste  que,  malheureusement,  M.  Villefranck  no 
produisit  p^is  autant  qu'il  aurait  pu  le  fai:t;,  laissera  à  Nantes  d'inoubliai-  .  > 
souvenirs  dans  Lohengrin^  Le  Rèce  et  Carmen.  Il  convient  de  ne  pas  sépa- 
rer de  lui  une  jeuno  débutmtc.  gon  t'Iève,  Mil,.  Jane  Bathori,  chanleii><' 
(louée  non  seulement  d'une  voix  ravis»^  mte.  mais  aussi  d'un  Iri'-s  beau  talcni. 
Le  succ*'S  de  cette  exquise  amtatrices'anirma  rapidement  et  il  ne  se  démei:- 
lii  à  aucun  moment  de  la  .saison.  Pend  nt  tout  l'hiver,  M.  Engi'l  et  Mlle 
Hathori  doMni*>reut.  chaque  .semaine,  d;ins  la  journée,  des  séuicr  ' 
ij  ils  passèrent  en   reruo  les  chefs  d'<euvre  de  la  n.usique  v«..  . 


49 


302  LE    TIIKATRE    A    NANTES 


et  nio'lerne.  Ces  séanrcïi,  t  "es  suivies  par  toute  la  haute  société  nantaise, 
étaient  u  »  vrai  régal  artisiiq.ie. 

M.  Féraud  di  S  liiit-Pol,  basse  chmtante,  artiste  de  valeur  lui  aussi, 
complétait  avec  M.  Enf^el  et  Mlle  Balliori  un  trio  tout  à  fait  remar- 
quable. Certes,  au  point  de  vue  voeal,  M.  Féraud  de  Saint-P>)l  n'était  pas 
sans  défauts,  mais  il  rachetait  certaincsdi-faillances  de  son  organe  par  une 
superbe  diction,  uni!  autorité  incontestable,  unstyle  parfait.  Il  devintensuite 
professeur  au  Conservatoire  de  Nant(;s. 

Le  baryton  Aubert,  voix  splendide,  avait  encore  beauc  mp  à  pro;^'r"sser 
au  point  de  vue  de  l'art  du  chant.  Le  ténor  lé^er  Codou,  doué  d'un  organe 
chaud,  vibrant,  sympathique  dont  il  se  servait  avec  une  inexpérience  com- 
plète, fit  de  rapid-'s  progrès.  C^tons^  aussi  ^L  Dumontier,  un  charmant 
second  ténor  et  M.  Edwy.  Enfii,  un  de  nos  comp  itriotes,  amateur  bien 
connu,  débuta,  d'un  i  faeon  fort  h^'ureuse,  dans  remploi  des  secondes  basses, 
sous  le  transpararent  pseudon^nK;  de  Darzel. 

Du  coté  des  (  liantoiises,  rajjpeloiis  hîs  noms  de  Mlle  lltîlène  Théry,  une 
jolie  fotnnio  dont  la  très  agréable  voix  de  soprano  dram  iti<|ue  se  prêt.iil 
bien  aux  rôles  du  nouveau  répertoire,  de  Mme  Cholain,  soprano  léger  d'un 
talent  éprouvé,  de  Mlle  Sterckinaans,  une  aimable  dugnzon  et  de  Mme  Gelly- 
Lnssalle,  une  duègne  excellente. 

Un  scrutin  par  trop  in  lulgcnt  nous  conserva  Ki  ténor  Demauroy  qui 
n'avait,  en  tout  et  pour  tout,  qu'un  bel  orgme.  NL  At!;ès,  que  nous  avions 
déjà  eu  à  Nantes,  fut  refusé.  Néanmoins,  M.  Villefranck,  toujours  babil)  et 
heureux,  obtint  des  abonnés  et  de  la  Commission  qu'oji  tolérât  M.  Athè  , 
promettant  de  faire  venir  une  basse  en  représentation  pour  remplir  le  rôle 
d'IIagen,  de  Sicjurd.  M.  Villefranck  tint  sa  promesse.  La  basse  Dinard 
vint  avec  le  ténor  Lucas,  chanter  Sigurd.  Mais  l'œuvre  de  Reyer  ne  fut 
montée  que  quelques  jours  avant  la  fin  de  la  saison.  Ce  n'éiait  évidemment 
pis  ce  qu'avaient  espéré  les  abonnés. 

La  contralto,  Mlle  Germaine  Marcillac  qui,  l'année  précédente,  s'étiiit  fait 
entendre  avec  succès  dans  Orp/idc,  fut  refusée  à  égalité  de  voix,  malgré  un 
organe  au  timbre  chaud  et  sympithique  et  un  tempérament  fort  intéressant 
1:111e  fut  remplacée  par  Mme  Nady  Blanrart,  artiste  tout  au  plus  convenable. 
Dans  le  courant  de  février  Mme  Nady  rompit  son  engagement.  ^L  Villefranck 
engagea  alors  Mme  Linse,  l'ancienne  créatrice  d'Hdrodiade  ùlN^uIcs,  qui 
avait  conservé  quelques  restes  de  son  ancienne  bi*lle  voix, 

La  chanteuse  d'opérette.  M""  Gourjon,  prit,  au  bout  de  quelques  repré- 
sentations, le  sage  parti  de  résilier.  M.  Villefranck  engagea  alors  une  déli 
cieuse  divette,  M"*^'  Jeanne  Lambert.  Jolie  fille,  clianteuse  habile  douée  d'une 
voix  fraîche  et  sympathique,  comédienne  excellente,  Jeanne  Lambert  devint 
bientôt  une  des  artistes  les  plus  justement  aimées  du  public  nantais.  Outre 
ses  rôles  d'opérette,  dont  les  meilleurs  étaient  la  Toledad  et  Véronique,  elle 


JEANNE   LAMUERT  —  DRUNEAU   A    NANTES  303 

chanta  aussi  Carmen.  Ello  iiKuirua  la  fantasque  Zingara,  dont  elle  [>ossMait 
k?  hfx;  p'iysique,  avec  une  vrriu'î  exiraord  naire. 

Le  grand  iiiiériît  du  la  saison  repow  datis  le  nombre  et  la  rariét*  d« 
œuvres  nouvelles  et  des  reprises  importantes.  Dt*s  le  mois  de  novembre, 
M.  A^illefranck,  —  et  l'on  ne  saurait  lui  être  trop  reconnaissant  de  c£Ur 
intelligente  initiative,  —  remit  à  la  scène  im  chef-d'œuvre  dont  la  reprise 
étJiit  iéclani<j«  depuis  bien  longtemps  :  Le  Rfice,  d'Alfred  Briin<'au.  qui  avait 
été,  autnifoi.s,  indign<Mnent  sacrfié  sous  l'une  des  directions  Morvand, 
Depuis  trois  ;ms,  les  ouviages  d'Alfred  Firuneaii  étaient  frappés,  par  suite 
de  rinlerveniioQ  d'Emile  Zola  dans  l'alfaire  Dreyfus,  d'un  iniN-eile  ostra- 
cisme. Tous  les  gens  de  bon  sens  déploraient  un  pareil  état  de  choses. 
M.  Villcfranck,  courageusement,  annonça  qu'i!  ne  se  laisserait  pas  délouroer 
de  ses  projets  par  des  considérations  étnmgères  à  l'Art,  et  qu'il  remettrait  â 
la  scène  les  drames  dAlfivd  Bruneau.  Ltf  R»ce  fut  repris  ave<-  un  écl.itant 
succès  le  16  novembre  UMM).  [/interprétation  de  cette  œuvn'.  d'nne  inspira- 
tion si  personnelle,  était  des  plus  remaïquable.  M.  Féraud  de  Saint-Pol 
tint  le  personnage  do  l'évéque  avec  une  dignité,  une  noble>>e  incompa- 
rables. 11  exprima  toutes  l<is  nuances  de  ce  rôle  complexe  avei-  un  taU-nt  de 
pr-mier  ordre.  Engel,  qui  avait  créé  le  rôle  de  Félicien  avec  tant  de 
bonheur,  retrouva  à  Nanl«:s  le  nn'ine  suee<Vs  qu'à  Paris.  Aprè>  la  srèiie  avec 
SIM  pcr",  le  rideau  devait,  à  chaque  représentation,  se  r^-'luver  trois  fois. 
M"*'  Bathori  fît  une  exquise  .Angélique.  Elle  chanta  à  la  perfection  ce  rôle  si 
difficile.  I/i»rchestre,  bien  dirigé  par  M.  Rovy,  eut,  aussi  lui,  une 
gninde  part  dans  la  réussite  de  eette  repris<».  M.  Villcfranck  monta  avi»r  le 
plus  grand  soin  la  pirtition  d.*  Bruneau.  qui  fut  jouée  avec  le  dernier 
tableau:  La  Mort  fi'Anr/étique,  supprimé  lo  s  de  la  cn^ation.  VneJ^rtM 
représentant  la  fag.ide  d'une  église  fut  brossée  fwur  ce  tableau.  De  même, 
M.  Villefr.iiiek  fit  [>i'in.!r'»  vi, ••.;■!.•  ii.ijr  li  vir^'inil'' chambre  de  la  jxîtite 
brodeuse. 

M.  Villefranck  organisii,  du  i8  au  31  janvier  lS»>)l,  un  cycle  des  «l'uvres 
do  Brunbau.  Le  eomp<»siieur,  à  son  grand  regn't,  avait  été  retenu  à  Par», 
lors  du  la  reprise  du  Hère.  Il  vint  à  Nantes  pour  celle  ^e  l'.l r/ar/ .^  du 
Moulin  qui,  quelques  jours  après,  atteignit  sa  trentième  rc présentation  dans 
notre  ville. 

Le  28  janvier,  un  grand  banquet  fut  oilt-rt  à  Alfred  Bruneau.  dans  la 
salle  Turcaud.  par  les  criti(|ues  musicaux  nantais,  des  journalist<>s  et  de 
nombreux  amis  et  admirateurs.  J'extrais  du  discours  que  je  prononeaiau 
phampagiio  les  lignos  suiv;#iit(>s,  qui  fur  nt  soulignée"^  par  de^  applaudift;iOr 
ments  trî's  significatifs: 

«  Nous  admirons   en  vous.   in<>n  cher  ami.   le  compositeur  profondément 

ori^'iiial  et  i  '  ^.   qui   a  >es 

musu|Uis  1  .uianoii.  .a, 


504  LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


tour  à  lour,  cliaiiti-  la  rêverie  mystique  aux  prises  avec  la  passion  réelle  et 
la  douleur  huniaino,  l'héroïsme  de  nos  vieux  paysans  devant  l'ennemi,  le 
triomphe  du  blé  nourricier  poussant  hiut  et  dru  de  la  bonne  terre  de  France 
sur  l'or  mauvais  (;t  démoralisateur. 

Nous  aimons  aussi  votre  h.iute  proI)ité  d'Art  que,  devant  les  tristes 
défaillances  de  certains,  il  est  bon  d'ériger  en  e.\em[)le  ;  votre  belle  et 
combative  vaillance,  votre  infatigable  ardeur  ])our  ouvrir  à  la  musique  une 
larire  route  vers  plus  de  Vérité  et  d'Humanité, 

Enfin,  si  notre  admiration  va  sincère  et  profonde  au  fier  musicien  qui  n'a 
jamais  renié  son  noble  idéal,  nous  estimons  en  l'homme  privé  les  plus 
rares  qualités  du  cœur  et  de  l'esprit,  la  franchise  de  ses  opinions,  la  solidité 
à  toute  épreuve  de  ses  amitiés. 

Ces  qualités,  mon  cher  Bruneau.  j'ai  été  à  même  plus  (|ue  tout  autre  de 
les  apprécier  et  il  plaît  à  ma  vieille  alfeclion  de  les  célébrer  ici  devant 
tous.  » 


De  la  réponse  d'Alfred  Bruneau,  voici  un  passage  : 

((  En  accueillant,  comme  vous  l'avez  fait  dernièrement,  la  partition  do 
mes  débuts,  vous  avez  compris,  il  n'y  a  pas  à  en  douter,  et  je  vous  en 
exprime  ma  profonde  gratitude,  que  je  l'aimais  d'une  particulière  tendresse, 
non  pas,  certes,  pour  les  pauvres  mélodies  qui  y  chantent,  mais  pour  les 
vivants  souvenirs  qui  y  sont  attachés. 

Cette  partition,  Messieurs,  c'est  le  lieji  qui,  dès  le  commencement  de  ma 
carrière,  m'a  uni  fîlialement  à  mon  cher  et  grand  Emile  Zola,  mon  père 
intellectuel,  car  de  sa  seule  inspiration  a  pu  naître,  pourra  naître  mon 
œuvre  de  compositeur.  J'ai  un  orgueil  à  le  dire,  et  je  le  dis.  » 

Après  le  banquet,  une  grande  réception  avait  été  organisée  à  la  Société 
artistique  le  Clou,  dans  le  bel  atelier  de  l'architecte  Lafont.  M.  Léon 
Brunschvig  souhaita  la  bienvenir  au  Maître  dans  un  speech  en  vers 
dont  voici  une  strophe  : 

Notre  rôvp,  ce  soir,  ici  se  réalise, 
Cfest  noire  joio  ;\  iiou^.  c'est  au.ssi  notre  or^uoil 
D'applaudir  un  de  coux  dont  l'art  idéalise. 
Meunier,  ton  vieux  moulin,  Lorgor.  ta  brebi-'  grise, 
Angéliciu»-,  ton  blanc  linceul. 

Le  29  janvier,  on  joua  Le  Rt'-ce,  précédé  de  trois  fragments  de  Messidor, 
le  magnifique  Prélude  du  quatrième  acte,  la  Légende  de  rOr,  chantée  par 
M""^  Hélène  Théry,  les  Adieux  du  Berger,  chantés  par  M.  Aubert.  Bruneau 
dirigea  ces  fragments  et  fut  longuement  acclamé  à  sa  montée  au  pupitre. 
Pendant  toute  la  représentation  du  Nrre,  â  laquelle  il  assista  dans  une  loge 
de  face,  il  fut  l'objet  de  manifestations  enthousiastes. 

Le  30  janvier,  la  séance  hebdomadaire  de  M.  l*'ngel  et  de  M''"  Bathori 
fut  entièrement  consacrée  aux  œuvres  de  Bruneau.  En  présence  du 
compositeur,  les  deux  éminents  artistes  interprét>rent  les  Liedx  de  France 
et  les  Danses  françaises. 

Le  31  janvier,  eut  U^u  la  r-»prise  de  VAttajiw  du  Moulin.  Ce  fut  un 
véritable  triomphe  pour  Brmieau,  ',ui,  comme  pour  le /?«re,  se  tenait  dans 


BRl'NEAU  A  NA.NTE9  —  LF.  JHF  P<)U>NAIS  'î''' 


un«'  logo.  Mais,  aprt-s  le  dernier  acte,  il  fut  réclamé  avoo  une  telle  insi^t-nnf 
qu'il  dut  céder,  au  l>out  de  quelques  minutes,  uu\  a(X'laniattons  du  i 
et  paraître  deux  fois  sur  la  scène  au  milieu  des  artistes.  L'interprétation  de 
VAtiUfjue,  conliée  à  MM.  Féraiid  de  Saint- Pol,  qui  chanti  une  version 
pointée,  la  version  primitive  éUint  lr<»p  haute  jKîur  lui,  Codou.  Dumontier, 
Edwy  et  à  M"»*  Cholain  qui  trouva  dans  Franijoise  son  meilleur  rùle,  était 
excellfiite.  Seule,  M™*  Nady  fut  médiocre  dans  Marcelline. 

Après  la  représentation,  Alfred  Bruneau.  membre  d'honneur  de  I'.Ik*©- 
ciation  des  ICtudiants,  se  rendit  au  Corclo  de  l'A.  E.  N.  Au  fond  de  la 
grande  salle,  fort  bien  décorée,  sur  un  chevalet  entouré  d'une  lyre  en  (euil" 
lage,  avait  été  placé  le  portrait  du  Maître,  autour  duquel  s'«'nroulait  une 
banderolle  vi<»|('tt«î  porUint  ces  mois  :  «  Vive  Hruneau  !  »» 

L'auteur  du  litre  répondit  au  Pré>ident  de  TA.  K.  N..  M.  Crcmet,  par 
un  discours  dont  je  donne  ci-dessous  la  partie  principale. 

«  ...Il  m'est  doux  de   me  trouver  en  étroit*;  «ommunion  d'idées  avec  la 
jeunesse  qui  travaille  et  qui  pense,  (''rst,  pour  moi,  un  puissant  enr<»:. 
mont  à  achever  mon  ceuvre  dans  la  tranquillité  de  mos  conviction^    I' 
le  jour  déjà  lointain,  cela  remonte  à  mu*  douzaine  d'aiinô«!S,  où,  tr 
et   très  ignoré,  j'ai  osé  aller  demander  à  Emile  Zula.  très  grand  oi  u- 
rieux,   le  premier  dos  poèmes  que  je  dois  à  son  infinie  bonté,  je  n'ai  ■ 
L'i  "i  I'  à  colui  qui  est  mon  maitro  d'art  et  que  j'ainio  du  meilleur  de  nia  t  n 
::   >>o  roconiiaissaiito,  do  vouloir  moltro  dans  le  drame  lyrique  toujours  plus 
do  Vérité,  de  LiU'rié  «-t  d'Hiimaiiité.  do  vouloir  franciser  toujours  ; 
notre  oj)éra.  Si  j'ai  été  violommont  combattu  par  1*»''  uns.  m  ro\ 
été  chaleureusoinoni  défendu  par  les  autres.  Voii^ 
m'av^^«    nomm»'*    membre    d'hoiiiiour  de   votre 
accueilli  et  vous  m'accuoilloz  a  cette  minute  oiu'ore  de  façon  pi: 
ment  significative.    Laisser-moi.  sans  phrases,  simplement,  pui    ,  ■* 

me  permettez  de  vous  apj^eler  mes  amis,  vous  en  nMuen  lor  du  fond  du 
ccDur.  vous  dire  que  demain,  lorsque  je  reprendrai  ma  b<>sogn»'  habituyl!»*. 
le  souvenir  de  votre  réooption  si  charmante  et  si  cordiale  me  fortifiera, 
m'armera  pour  de  nouvelles  luttes. 

I»  Messieurs,  en  tendant  mon  verre,  je  bois  aux  soldats  des  idées  qui  nous 
sont  é^^alemonl  chères,  à  vous  tous,  qui  étiiiit  la  jeunesse,  ferei,  je  n'en 
doute  pas,  triompher  ces  idé«'s  dans  l'avenir  ». 

Après  ces  vibrantes  paroles,  une  longue  ovation  fut  faite  au  Maître. 

La  pnMnièrc  nouveauté  de  la  saison  fut  le  Juif  Polonatê,  de  M.  Camille 
Erlanger,  partition  robust»*  et  saine  qui  possède  dos  pages  spN 
«ouvre  très  remarquable,  qui  mérite  de  rester  au  rt''pertoire  ■:         -• 
représentée  avec  succès   le  l\0  novembre  rJOO.  M.  Camille  Erlanger  vint 
surveiller  les  dernières  répétitions  de  son  drame  lyrique  et,  à  la  première,  il 

c<mduisil,  au  milieu  de  chaleureux  bravos,  le  beau  pr  '    '  -  '•  •-    • 

acte.  Il  revint  à  la  scptièmi^  ropnsontation  et  fut  appelél^ 

stHîond-  acte.    L'iiiti'rjMrétition  offrait  un  parfait  ensemble.  M.   Féraud  de 

Saint-Pol  fil  une  magnifique  création  du  nMe  difficile  de  l'aubergiste  MatJiis, 


30G  LE  THÉÂTRE  A   NANTES 


qu'il  joua  d'uno  façon  tros  personnelle.  Cet  artiste  distingué  laissera  à 
Nantes  d'incffanaMcs  souvenirs  dans  les  personnages,  si  différents  pourtant, 
(le  lYnêque  Jean  de  Ilautccœur  et  de  Malliis.  M.  Dumontier  chanta  et  joua 
à  la  poifection  le  nMu  do  Nickel,  Les  autres  personnages  étaient  bien  tenus 
par  MM.  Codou,  Edwy,  M'""*  Cholain  et  Nady.  M.  Bovy  et  l'orchestre 
méritèrent  les  justes  félicitations  de  l'auteur.  La  mise  on  scène,  comme  tou- 
jours, était  fort  soignée. 

IljJiif/énie  en  Tauride,  qui  n'avait  pas  été  jouée;  a  Nantes  depuis  les  pre- 
mières années  du  XIX*  siècle,  fut  reprise  le  17  janvier  1001.  L'immortel 
chef-d'œuvre  de  Gliiek  fut  assez  inégalement  interprété.  ^L  Engel  chanta 
avec  un  j^rand  style  le  rôle  de  Pylade,  M^'^Tliéry  F\t  une  poétique  Iphigénie, 
mais  MM.  Aubcrt  et  Rivet  ne  furent  pas  à  la  haijteur^.des,  rôles  d'Oreste  et 

'^^'''^^-  ...  .v.j  ;:,./;     ,- 

Une  autre  reprise  intéressante  fut  celle  à' Hamtiel  et  (îrre^L  Cet  adorable 
chef  d'œuvre,  parfaitement^  interprété  par  M'»<=s.  Bathori  et,  Storclcmaans, 
ravissantes  toutes  les  deux  dans  les  personnages  des  enfants,  et  M"'  Théry, 
fut  revu  avec  un  vif  plaisir. 

Deux  autres  ouvrages,  d'un  genre  bien  différent,  furent  joués  encore  par 
M.  Villefranck  :  CendviUon  et  77/ais,  de  Monsieur  Massenet.  Cendrillon, 
<euvre  vcule,  ennuyeuse,  sans  émotion,  sans  sincérité,  attira  les  naïfs  par 
son  titre  et  par  les  attraits  d'une  superbe  mise  on  scène.  ^L  Villefranck  fit 
brosser  à  Paris,  pour  cette  partition  sans  valeur,  doux  magnifiques  décors  ; 
de  luxueux  costumes  furent  confectionnés  et  de  coûteux  jeux  de  lumière 
furent  installés.  Les  Nantais  furent  unanimes  pour  louer  la  mise  en  scène 
et  pour  apprécier  la  musique  à  sa  juste  valeur.  Aux  représentations  de  cette 
<euvre  industrielle,  il  était  fort  curieux  d'examiner  le  publie  bizarre  qui 
remplissait  la  salle,  braves  suburbains  accourus  de  Trcntemoult,  de  Couëron 
(m  de  Basse-Indre,  croyant  voir  misa  lascôuelo  vrai  conte  qui  avait  jadis  bercé 
leur  enfance,  et  déroutés,  agacés,  désillusionnés  par  la  pièoe  de  Monsieur 
Massenet. 

La  chute  lamentable  de  T/taïa  (21  février  IDOl),  dont  les  rcMes  furent 
tenus  par  MM.  Aubert,  Dumonthier,  Athès*,  M"°*  Cholain,  Sterckmaans  et 
Lèmaire,  montra  bien  que  les  œuvres  de  Massenet  étaient  désormais  en 
baisse  à  Nantes.  L'espoir  de  voir  une  féerie  au  titre  en,ir;igeant  n'attirait  j)lus 
le  public.  La  musique  restait  seule  pour  défendre  cette  partition,  l'une  des 
plus  mauvaises  de  l'auteur  de  Manon.  Ce  n'éUiil  pas  suiRsant.  Thaïs  ne  .se 
joua  (jne  deux  fois,  tît  encore  devant  des  salles  vides.  La  première  représen- 
tation fit  771  fr.  20  d(^  recette.  La  seconde  tomba  à  559  fr.  'jr>.  Cev  chiffres 
ont  leur  éloquence. 

Comme  opérettes  non  encore  jouées  à  Nantes,  M.  Villefranck  monta  le 
Ihiron  Tzigane,  le  PajHi  de  Franc ine,  Véronique,  Manxzelle  Carabin,  les 


niRECnOS   VILLETBANCK  307 


Petiten  Jlnlnn.  Il  j(jiKi  aussi  un  juli  i  illrt  :  CnUhri  dû  a  la  Je 

deux  »lo  na->  conciloyons,  MM-  Pa''l«>   .\.  li.icktn  ii»o).  fxmr  1  m 

(Arondel  ih*  I|ayes)  pour  la  musique 

Outre   MM.  Lucaa  ot  Dinard  qui  \inrent  ehanter  Sigurd  e\  les  Ilwjue 
notn  en   fin  de  -aiïon,  deux  chanteus.     '     '  '  ".  "^    "     rs, 

Mlles    KiMilir    Mary, et  V.ti  IImiT   i.  ... 

Mme  Cholaiii,  indi.spo^«•. 

Uu  jeune  rédacteur  *\\x  Phatt  de  la  Loire,  M.  l'ierr»   '  uô 

pour  les  choses  du  Tli6Aîr       *    'la  j)eintunî  U<  ■ 'n.ii;>r.   u    r  r»<ia 

trois  d<^cors,   l'un  pour  '  ■    pour  ThatM^  lo  ti^iupjuio  pjur 

Véronique^  Co  dernier  est  vriimenl  réussi. 

Pendant  le  mois  d'avril,  M.  V^iUf;frau<k  profiunt  do  la  latitude  lai^s*^  par 
le  cahier  lies  charf^rs,   ne  joua  quu  de  ro|)érett«".    Pendant   ;  il 

interciila  dan^  les  pii''Ot«  un  intermède  où  paraissaient  un<-  .  ii- 

seusch  anglaiitcs  levant  la  jambe  avec  un  ensemble  6loanant  et  un  clown 
imitateur  fort  habile. 

QuehjUes  jours  avaiu  la  nii  de  la  saismi,  u  se  ]>i(»(iuis:i  ;i  >  i.  imih  -ni  i:iri- 
dent  assez,  kuial  mms  dont  le-,  suites  eunuit  une  graviUi  exirLinr.  (.lu  jouait 
/?!/>.  Au  dernier  entr'acte  un  certain  nombre  4o  musiciens  arriveront  en 
retarda  leurs  pupitres.  Le  public  accueillit  jKir  des  rin>8  et  de-  sitllets 
rapp.'irition  de  ces  me^sieurs.  Les  instrumentistes  expliqu6ient  leur  retard 
jKir  ce  fait  que  la  sonnette  électrique  n'avait  pas  fonctionné.  Cet  incident 
n'aurait  pas  eu  d'autre  suite  si  le  président  du  Syndicat  des  musiciens  s'étant 
cru  olfensé  jMTsonnelhMnent  par  un  propos  tenu  à  haute  vt>ix  par  un 
rédacteur  du  Phnrc  de  la  Loire,  ne  s'étiit  livré  sur  lui  a  des  voies  de  fait 
que  les  paroles  imputées  ne  pouvaient  justifier.  Bien  plus,  le  lendemain,  le 
même  instrumentiste  frappait,  en  pleine  rédaction  de  ce  journal,  un  autre 
rédacteur  choisi  comme  témoin  par  le  premier.  L'alîain^  eut  son  dénoa(vnent 
t>n  simple  police. 

Mais  à  la  suite  de  divers  incidonUi  qui  vinrent  se  greffer  ^ur  le  premier. 
M.  Hovy  crut  devoir  donner  sa  démission.  Tou*  le>  re.qui 

avaient  apprécié  depuis  deux  an n   le  talent  de  .M.  .....  ...,.>.,  .eut  une 

pareille  détermination  et  se  demandèrent  avec  inqiaétude  p;ir  qui  NL  Vil- 
lefranck  allait  remplacer  cet  artiste  distingué.  Bien  plu!«,  la  plupart  des 
meilleurs  solistes  >'empre>.st' rent  de  «'       '        "     *  ,    Tout 

ceci  éUiit,  t'U  réalité,  une  conséquence  i  ion  do 

la  subvention  de  100,000  fnncs,  suppression  dont  je  parlerai  dans  le  volume 
({ui  contiendra  l'historique  des  Tht^Âtn^  de  Nantes  à  partfr  de  la  saison 

Pendant  cette  s^iison,  les  tournées  furent  peu  nombreuses.  Il  n'en  vint  que 
di\  :  L*Aiylon,Frou/rou  (M»"*  Jeanne  Brindeau  et  Lara,  M.  de  Féiaudy), 


308  LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


Le  Contrôleur  des  wagons-lits,  Coralie  et  C"<^,  La  Darne  de  cJiez 
Maxim,  Plus  que  Reine,  La  fdle  Elisa,  La  Robe  rouge.  Main  gauche. 
Vavtiale  330  (Ch.  Baret  et  Courteline).  Polin  vint  aussi  donner  une  repré- 
seutatioii. 

Différentes  améliorations  furent  apportées  au  Théâtre  Graslin.  Une  porte 
de  comnwinicatiofi  avec  la  rue  fut  ouverte  dans  le  foyer  des  artistes.  Lo 
réflecteur  de  la  rampe  fut  amélioré  de  façon  à  ce  que  réclat  des  lampes 
élettuiques  ne  gênât  plus  les  spectateurs  des  galeries.  A  l'intérieur  du  cadre 
de  la  scène  on  plaça  une  série  de  lampes  destinées  à  augmenter  d'une  façon 
notable  l'éclairage  des  premiers  plans.  On  installa  pour  les  figurants  qui 
s'habillaient,  jadis,  dans  le  garde-meuble,  une  vaste  loge  au  premier  étage; 
à  côté  du  magasin  des  costumes.  Enfin,  le  bureau  de  location  fut  transporté 
rue  Corneille  dans  un  local  plus  grand  et  mieux  aéré  que  cekii  de  la  rue 
Molière. 

Ces  travaux  furent  effectués  pendant  l'été  de  1900.  Pendant  celui  de  lixjl, 
on  refit  le  plancher  de  la  scène  qui,  datant  de  1805,  en  avait  le  plus  grand 
besoin.  Il  était  dans  un  état  lamentable  et  offrait  même  un  danger  constant. 
Le  nouveau  plancher  fut  construit  d'après  les  indications  de  l'habile  chef 
Hiaciiiniste  des  Théâtres  municipaux,  M.  Abraham,  qui  y  apporta  diverses 
«édifications  fort  heureuses. 


«) 
o 

c 
a 

m 

« 

C 

or 


^^^» 


\ 


THEATRE  DE   LA    RENAISSANCE 


1807  —  rj()l 


(](ui«lructiuii  de  la  ituUe.  —  L»i  Troupeji  ilulieniiQS.  —  Troupes  divcr»<-t>.  —  AcLul  >\\i 

Thj^titn-  par  la  Villi-.  —  PioC!»  inlcrlites.  —  Marret'it  cl  le  col<)nel   IIub<rt  •  a--.tc\. 

Sarati  bernhardt.  —    Incidents    —  Accidents.  —  Hi'paration  du  monument. 


La  cuu^tl'U' iK.ii  au  Tliéitro  delà  K<ii.nb>aijcu  r>l  duc  a  1  iiiiii,iii\r  de 
MM.  ToiiclKiis  frrres,  qui  déjXMist'ient  des  sointues  considérables  dans  cette 
entreprise  et,  finalement,  s'y  ruinèrent.  Depuis  longtemps,  le  besoin  d'une 
seconde  salle,  plus  vaste  que  la  preinirre,  où  l'on  pourrait  donner  des 
grands  concert:?,  des  conférences,  des  distributions  de  prix,  se  faisait  -sentir 
à  Nantes.  L'élévation  de  (!e  nouveau  théâiro  venait  donc  a  son  beuro. 

Les  travaux   commencèrent  en   186T   sous   la  direction   de  l'architecte 
Chenantais.  On  cul  d<'  gran  les  dillifultés  ;i  surmonter  pour  Htablir  solide 
meut  les   (onditions.    Une  source   qui,   il    n'y   a  pas   longienip*   oncoce, 
envahissait  souvent  le«  dessous»  du  Théâtre,  causa,  dès  l'abord,  de  nombreux 
ennuis.  Cependant  la  construction  marcha  assez  rapidamenl. 

La  Renaissance  oi,cuj)e  une  superficie  triple  de  celle  de  Graslio.  Lo 
diamètre  de  la  salle  exl  de  3<>n>  tU.  Le  cadre  do  la  «ct-ne  a  IH"*7<^  soit  j  mètre» 
d'?  plu.s  que  celui  du  (Jrand-Théâlre.  La  hauteur  est  de  IG  mètres.  Les 
dessous  ont  une  profondeur  de7"'25.  Le  fdafond  a  2ô  mt-lros  de  diamètre  ; 
il  se  compose  de  quatorz''  ar<ido<,  d  mt  si-ptsout  mobiles  et  pi»u\  eut  s'ouvrir 
l)our  éclairer  et  aérer  la  salle.  11  était  orné,  alors,  de  compartiments  repré 
v«ntant  des  peintures  allégoriques  :  Tragédie,  Comédie,  Musique,  et  des 
•<ujets  antiques  :  bacchantes,  faune  lutinant  une  chèvre,  courses  de  chars. 
\)  s  buste»  d'homme.s  «»t  artistes  illustres.  p«?inls  en  relief  :  Hcetiioven,  Mo 
/  irt,  Méhul,  Mcyerbeer,  llalévy,  Hugo,  Voltaire,  Malibran,  RaAjbel,  Mars, 
I^éjazel,  concouraient  aussi  à  rorneuienlalion  du  plafoiid.    L'en  :t 

d  ■  la  aoène  est  surmouu*  de  deux  statues  dues  à  M.  Méuard  :  la  ï  ...ô-  ^•'--  *  t 
la  Comédie  aiisi^es  supporloul  W^  armes  de  la  Villo.  Les  décorations  de  la 

61 


310  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


salle  cl  le  rideau  f Liront  faits  par  M.  Cambon.  Ce  rideau,  qui  a  été  remplacé 
depuis,  représentait  une  vue  du  port  de  Nantes  prise  des  hauteurs  de 
Sainte-Anne  ;  il  était  fort  réussi.  Les  décors  furent  brossés  par  M.  Bernier. 
La  salle  primitive,  installée  de  façon  à  être  transformée  en  cirque  par  le 
simple  arrangement  du  parterre  en  piste,  contenait  3.094  places.  Elle  sî 
e  ompose  d'un  vaste  part.-rre,  en  forme  de  corbeille,  surmonté  de  tro's  rang 
de  pourtour.  Au  dessus  s'étagent,  en  gradins  et  non  en  galeries,  cinq  rangs 
de  fauteuils  et  cinq  rangs  de  plat;es  de  premières.  Un  rang  de  loges  entourait 
jadis  ces  dernières.  Soutenu  par  de  légères  colonn?s  de  fer,  un  immens;; 
amphithéâtre  contenant  les  secondes,  les  troisièmes  et  les  quatrièmes  s'élève 
jusqu'au  plafond.  Adroite  et  à  gauche  de .  la  scène,  il  y  avait  autrJoi 
des  baignoires  grillées.  Une  écurie  pour  30  chevaux  était  installée  à  gauche 
de  la  scène  Un  vaste  foyer,  que  Graslin  envie  justement  à  la  Renaissance, 
orné  de  colonnes  en  fonte,  peintes  en  imitation  de  marbre,  prend  la  largeur 
de  la  façade  sur  la  place  Brancas.  Cette  façade  assez  simple  se  compose  de 
quatre  colonnes  d'ordre  composite  placées  deux  à  deux  de  chaque  côté  des 
larges  fenêtres  éclairant  le  foyer.  On  remarquait,  jadis,  entre  autres  orne- 
ments, deux  têtes  de  chevaux.  Ces  attributs,  inutiles  du  moment  qu'on 
avait  renoncé  à  louer  la  Renaissance  à  un  cirque,  ne  furent  enlevés  qu'en 
19U1.  Une  marquise  vitrée  abrite  les  baies  du  vestibule. 

1867  —  18G8 

L'inauguration  de  la  nouvelle  salle,  quoiqu'elle  fût  loin  d'être  entièrement 
aclievée,  eut  lieu  le  25  décembre  1837.  La  troupe  du  cirque  Ciolli  donna 
une  série  de  représentations. 

L'ouverture  définitive  de  la  Renaissance  eut  lieu  le  11  mars  ISfîS. 
MAL  Touchais  avaient  confié  la  direction  de  leur  Théâtre  à  M.  Guillaume. 
Le  spccUicle  était  composé,  ce  soir-là,  du  Misanthrope,  joué  avec  le 
concours  de  Lafo-itaine  et  de  M''^'  Lloyd. 

M.  Guillaume  fit  venir  de  nombreux  artistes  eu  représentations.  Ou 
applaudit  successivement  Lafontaine  dans  Dalila,  Neuville,  des  Variétés, 
Charles  Bataille,  M™®  Normann-Nérida,  violoniste  de  beaucoup  détalent, 
Laferrière,  M""'''  Déjazet  et  Ugalde. 

1868  -  1869 

^L  Hubert  succéda  à  AL  Guillaume.  La  féerie  de  Peau- d'Ane,  qui  fut 
montée  avec  luxe,  céda  bientôt  la  place  à  uuc  troupe  italienne. 

Alors  commença  la  plus  brillante  période  de  la  Renaissance  On  s'engoua 
à  Nantes  du  répertoire  et  des  artistes  transalpins  et  (îraslin  fut  délaissé  pour 
la  salle  Brancas,  qui  devint  bientôt  le  rendez  vous  de  toute  la  haut-»  société 


TOMDESl 


9TR">ZZI    —    LAUI\A    HARRIS 


811 


nantaise,  notamment  de  celle  dite  dea  Cours.  Cette  première  troupe  italienne 
ét^iit  ainsi  composée  : 

Stkvb.<(s,  chef  d'orrhîstre. 


MM.   TuwREBi,  premier  l^-nor. 
Terruni   dwuxi^'m*'  t«*nor, 
Strozzi,  baryte)!). 
Oruinar,  bajitie  profondf. 
Roccu,  basiie  boufTe. 


Mb**  LkVKk  Harrm,  iu)pr«no, 

DtMtRio-I.ii>t.Ar.iiK,  coolralto. 
Salvam,  coiiprimaria. 


Tous  ces  artistei!  étaient  excellents.  M'**  Laura  Harris  était  une  cbar- 
niunte  cbantcuso  d'un  talent  tn'  -ué.  M™'!*       '       '      '     '-posscdail 

un  splendide  contralto.  Onaj';  i  issi    dan-  i  saison  un 

autre  ténor  de  grand  mérite,  M.  Délia  Koca.  Toml)esi  et  Strozzi  avaient  des 
voix  magnifiques.  Le  premier  fit  bientôt  tourner  toutes  les  l6les.  C'était  un 
délire.  A  ses  adieux,  il  re<;ut  un  nonjbre  fabuleux  de  bouquets 

Pendant  cette  saison,  on  joua  pour  la  première  fois  //  ballo  in  Mouchera^ 
de  Verdi,  d«*vant  une  salle  superbe,  resplendissante  de  toilettes  luxueuses  et 
d'habits  noirs.  Suceès  complet. 

Pendant  l'été,  des  Concerts  Populaires  furent  organisés  sous  la  direriion 
de  M.  Dernier.  Les  places  les  plus  chères  étaient  à  deux  francs.  On  jouait 
tous  les  jours. 

18G9  1870 

Les  résultats  donnés  par  la  p-emière  saison  italienne  avaient  été  si 
brillants,  qu'une  nouvelle  troupe  se  forma  pour  l'exploitation  de  la  Renais- 
smce. 


MM.   Lixzi-CiiKi.i.Y,  premier  ti-nor. 
Maretti,  (ii'uxiùiue  U'ijor. 
Stro/.zi.  itaryton. 
(■KNniRci..  d(>uxii'mu  l)a9S4>. 


M*"    Laura  Harria.  première  ch«nt«'a*e. 

LecriiEAi.  i>r<mi"rf   ehanleute. 
I.Aiiiar.HE,  roniralto. 

HlCNAROHI.  i(l. 


Cette  seconde  .s-iis'ii    lut  ouverte  jur    J'uiui.  Un  i 

Jfarl:  et  du    W'alpurf/is.    lîn   revanelie.  <>n  (  li.mLi    ;  t 

pas  dans  la  partition  française. 

M""  Lucchesi,  jeune  et  jolie  feinmi»,  doui-e  d'une  voix  magnifique,  rem- 
porta  un  vrai   triomphe  dans  le  rôle  do  NT 1-*.  La  renlr<'v  de  I  ■   •■  ■ 

Harris  fut  aecueillio  par  des  transports  d'en  ue.  On  jouait  r<*  > 

la  Somnambula,  et  la  représentation,  si  bien  commencée,  faillit  se  terminer 

tr  uent.  Une  fuit. 

d  ...       .  e.   On  s'en   i.;..  :......     ,.   . ..,  .  :.  i...:.    ...    _. 

bougea,  quoique  plusieurs  s|>ectateurs  eussi>nt  crié:  <•  Au  feu  î 

Le  10  novembre  18(10,  on  exécuta  la  Afe.tse  de  Rossitu 
tation  exceptionnelle.   M""  Alboui  et  Marie  Battu,  M.M.  jioiiMt,  i.i^ni- 


312  LE    TIH-IATRE    A    NANTES 


fifo,  le  violoniste  Vieuxtemps,  le  contn.'bassiste  Bottesiiii,  prêtèrent  leur 
concours  à  cette  superbe  aiulifion. 

Cette  année  l;i,  l'exploitation  itiilienne  marcha  moins  bien  que  pendant  la 
saison  pr6c(''dente.  La  troupe  n'était  pas  aussi  bonne,  enfin  on  commençait 
à  se  lasser  de  ce  répertoire  usé  et  rococo,  borné  au  Nord  par  Luria,  au  Sud 
par  la  Somnambula,  à  l'Est  par  /  Puritani,  à  l'Ouest  par  Linda.  Le 
IG  novembre,  la  Renaissance  ferma  ses  portes. 

MNL  Touchais  commençaient  déjà  à  avoir  assez  de  leur  Théâtre,  qui  ne 
rapportait  pas  l'intérêt  de  l'argent  dépensé  pour  sa  construction.  II  fut 
question  alors  de  le  mettre  en  loterie  pour  devenir  ensuite  la  propriété  de  la 
Ville.  Le  projet  n'aboutit  pas. 

En  décembre,  une  troupe  lyrique  française,  sous  la  direction  de  NL  Bou- 
zeois,  dut  exploiter  le  Théâtre,  mais  l'autorité  militaire  ayant  refusé  de 
prêter  les  soldats  pour  chanter  les  chœurs,  les  représentations  ne  purent 
a\oir  lieu. 

.\u  mois  d'avril,  une  troupe  italienne  de  passage,  dont  faisait  partie  la 
Krauss  et  Nicolini,  donna  quelques  représentations.  Dt'jazet  se  fit  aussi 
entendre  à  la  Renaissance  pendant  cette  saison. 

1 «70-1 871 

Une  troupe  sous  la  direction  de  M.  Ribert  exploita  le  Théâtre  pendant  le 
mois  d'avril.  On  joua  une  revue  assez  amusante  :  La  Grande  Dépêche,  due 
à  la  collaboration  de  notre  concitoyen  M.  Bureau  et  du  dessinateur 
Collodion. 

1871-1872 

Toujours  sous  la  direction  Ribert,  on  monta  La  Belle  Hélène  avec 
Desclauzas,  Rhoiomago,  La  Reine  Crinoline, 

M""  Ernst  vint  en  janvier  1872  et  obtint  un  vif  succès  en  lisant  différentes 
poô-^ies  de  nos  grands  poètes. 

Le  27  janvier,  la  direction  passa  aux  mains  de  M.  Vidaillet,  qui  joua 
l'opérette,  la  comédie,  le  vaudeville.  Nous  remarquons  dans  la  troupe  le 
nom  d'Arnal.  C'était  le  neveu  du  célèbre  comique.  Cette  nouvelle  direction 
n'êut  qu'une  durée  éphémère. 

Le  IH  avril,  la  Renaissance  ouvrit  de  nouveau  ses  portes  sous  la  direction 
de  M.  Beaugé,  le  fils  de  la  soullleuse  du  Grand  Théâtre.  Entre  autres 
pièces,  il  joua  un  grand  drame  militaire  intitulé  :  Le  Siège  de  Paris, 

Thérésa,  Lafontaine  qui  joua  Ruy-Rlas,  Pasdeloup  et  son  orchestre 
vinrent  en  représentation. 

Dans  le  courant  de  juillet,  Beaugé  mit  en  répétition  Rabagas,  une  pièce 
de  Sardou  bourrée  d'allusions  antirépublicaines,  dont  la  représentation  à 


STROZZI   —   zrXA    DALTI  313 


Paris  avait  fait  boaiirniip  d^»  tnpag*^    [.o  Phare  de  la  Ivoire  prot^ta  dans  un 
article  vioknt  auquol    Hoati^<^  v<*^mt\\x,  TouU»  une  poU-iniquo  sVngag«>a. 
Finalement  le    maire,  qui  Atail  alors  M.  Leioup,  interdit  '• 
Le  L^S  sepUîmhre,  une  grande  repivs.ntation  eut  lieu  au  béi.    .       .    ..... 

soullleusc  do  Grasiin,  M""  Beaug(^.  On  jnua  I.p  Hépii  amoui^-ui  o\  Tartufe 
avec  M.  Savary,  de  la  Comédie  Français 

Cette  anm'e,   MM.  Touchais  ofTrirenl  a    1 1   \  ; 
sance   pour  uu»»  st»njnie  de  2*»<).<MMJ  frincs.  Le  <  .  ■ 

l'Administration  à  étudier  de  près  la  question. 

Une  Société,  patronnée  pr  MNL  le  général  M«'llinet,  AmousiRivIère, 
Boistard,  L.  BourRiult  Ducoudray  et  ("oiiiqiiet  se  forma  en  commandite 
pour  exploiter  la  Kcnais?anee.  Le  capitil  était  de  ItOO.DOcj  frnn  ^  i, ....•<•  .... 
COO  actions  de  .*»0()  francs  <  hacunc.  Tout  soiisf^ripleur  de  Iroi.s  ; 

droit  à  trois  cntn^s  réduites.  Le  baryton  Strozzi,  qui  s'était  crt^  do  nom- 
breuses  relations  dans  la  société  nantiise,  avait  <'•'  nis- 

trateur  gérant.  La  troupe  italiiMinc  réunie  par  Sti  ..s  ne 

fit  pas  ses  frais.  Parmi  les  artistes  qui  en  faisaient  partie,  il  faut  citer  en 
première  ligne  la   ravissante  Zina  Daiti,  chanteuse  d'expression  en  même 
temps  qu'étourdissante  voealiste.  M"»  Sonniéri  et  Carracioli  étaient,  <"" 
aussi,  des  rantafrices  de  valeur.  Le  ténor  Carrion  était  parfait.  Les  cli  ■ 
et  l'orchestre  étaient  médiocres. 

Kn  mars,  on  donna  do  belles  auditions  du  Stahat  ^[^lt€r  de  Rossini. 

Frédéric  Lemaltre,  bien  vieux,  bien  usé,  vi"»  -^r"  "-^nrésOTtation. 

1873  —  1874 

MM.  Chcssor  et  \'crpy  prirent  la  direction  <.'t  j'uiçrom  lo  aranic  c:  la 
comédie. 

Ces  directeurs  montèrent  La  Femme  de  feu,  pièce  tirée  du  fameux  roman 
de  Belot  qui.  comme  on  le  sait,  se  passe  en  fwrtie  à  Nantes  et  ^fareeau  ou 
len  EnfantA  de  la  Ixépuhlique.  La  Préfecture  interdit  do  chanter  la  Mar- 
seillaise et,  à  la  seconde  repn^sentatio'n.  interdit  l'œuvre  elle-même.  On 
assista  ainsi  à  ce  fait  curieux,  d'une  pièce  républic^iine  et  du  chant  nation.il 
répuitlicain,  mis  s\  l'index  p:  '       '  '     '      P        '"  t-  '     > 

venir  en  l'rance  pour  voir 
ceau  devait  encore  être  cause  d'un  incident  beaucoup  plus  grav.-. 

Déjar.et  se  fit  applaudir  dans  ditTéren tes  pièces  de  son  répertoire. 

1«TI  —  1875 

A  signaler  seulement  quelques  troupes  de  p;issage  ;  La  Maison  du  Afari 
Avec  Laferrière,  Toto  chez  Tata  (Céline  Chaumonl). 


314  LE   THKATRE    A    NANTES 


Doux  grands  concerts  furont  aussi  donnés,  pendant  cette  saison,  dans  la 
sallo  Brancas  :  celui  de  la  Nilsson  avec  Sivori  et  Servais  et  celui  de  l'ini" 
presario  Ulmann  qui  faisait  une  tournée  avec  PlanK's  Diaz  de  Soria,  Sivori, 
Alardet  Franchorao. 

1875  —  187G 

Tous  les  journaux  menaient  depuis  quelques  années,  une  vive  camprgne 
•■  faveur  de  l'achat  de  la  Renaissance  par  la  Ville.  Le  Conseil  autorisa  cet 
achat,  dans  sa  séance  du  2  mars  1875,  pour  une  somme  de  200,fX)0  francs. 
Le  monument  avait  coûté,  jadis,  p'us  de  80^,000  francs. 

A  partir  de  cette  année  l'existence  propre  de  la  Ftenaissance  est  absolu- 
ment finie.  Elle  se  confoi  d  désormais  avec  celle  du  Grand-Théâtre.  Cepen- 
dant la  Ville,  pour  quelqu  temps,  se  réserva  le  droit  de  louer  la  Renais- 
sance à  un  cirque  durant  les  deux  mois  d'hiver. 

Cette  année  on  monta  le  Tour  du  Monde.  Grand  succès  pour  l'œuvre  de 
notre  éminent  compatriote  Jules  .Verne.  Le  rôle  d'Aouda  était  tenu  par 
M"^  Iladamard,  qui  entra  plus  tard  à  la  Comédie  Française. 

1876  —  1877 

Grand  concert  donné  par  la  Patti.  Superbe  représentation  de  la  Nilsson 
dans  Faust. 

En  mais,  Faure  vint  jouer  Faust,  Hamlet  et  Guillaume  Tell.  Les  repré- 
sentations du  célàbre  baryton  fuient  des  plus  suivies.  Apris  Guillaume  Tell, 
les  choristes  allèrent  donner  une  sérénade  sous  les  fenêtres  de  l'Hôtel  de 
France  ou  Faure  était  descendu, 

Agarvint  jouer  Athalie  avec  les  chœurs  de  Mendelssohn. 

On  représenta  aussi  pendant  cette  saison  le  Voyarje  dans  la  Lune. 

1877  —  1878 

Un  arrêté  municipal,  en  date  du  22  décembre  1877,  interdit  aux  femmes 
légères  de  se  placer  ailleurs  que  dans  les  loges.  11  faut  croire  que 
depuis  la  suppression  de  ces  dernières,  l'autorité  a  renoncé  à  assigner 
aux  hétaïres  nantaises  une  catégorie  de  places,  car  elles  s'étalent  ouverte- 
ment, aujourd'hui,  aux  fauteuils  aus^i  bien  qu'au  pai  terre.  Pourquoi,  à  Gras- 
lin,  leur  interdit-on  alors  l'accès  des  fauteuils,  si,  à  la  Renaissance  on  ne  le 
fait  pas?  ?  ?   Beautés  de  la  logique  administrative  !  !  I 

M.  Coulon  jugea  t\  propos  de  faire,  cette  année,  une  reprise  do  Marchait. 
Cetle  fois,  la  Préfecture  no  s'y  opposa  pas.  La  première  eut  lieu  avec  un 
grand  succès  devant  une  salle  comble,  qui  bissa  la  Marseillaise.  L'ordre  ne 
fut  nullement  troublé.  Quelle  ne  fut  pas,  le  lendemain,  la  stupéfaction  gêné* 
lale  lorsqu'on  apprit  que  le  colonel  Ilubert-Castex  venait  de  refuser  au 
Directeur  de  lui  continuer  le  concours  de  la  musique  et  de  la  figuration 


LES    INCIDBMT3    DR    MARCEAU 


315 


miliUiirc,  ot  avati  int  nlit  à  tout  soldat,  de  mettre  les  piods  à  la  Renaissance, 
tant  qu'on  y  joucnit  Murrenu,  pirce  militaire  et  patriotique  où  l'on  com- 
mettait le  crime  de  cliant<T  l'hymne  national.  I^  Phare  tîe  In  Loire  publia 
môme  le  texte  de  l'ordre  du  jour  adressé  par  le  colonel  aux  soldats. 
M.  Ilubcrl-Castox  fit  di^nientir  et  pr«'t«ndit  que  I  '  '  n 

communiqué  à  la  place.  Quoi  <^u'il  en  soit,  cet  iii  nt 

considérable  et  mérité.  M.  Laisant,  a  la  Chambre,  interpella  à  ce  sujette 
ministre   de  la   guerre.  Finalement,  le  colonel  Hub<»rt-Caxtex  fut   déplacé. 

Cette  alFaire  fil  à  Marceau,  pièce  d'un*-   '  -•    «-rin  difîi<  il'       -     - '  ' ■    x- 

traordinaire.  Pendant  plusicurssoiré<'S,  I    ..  -anooviti  .\ 

tour  de  rôle,  (îuillemot  et  Mlle  Keggiani  chantaient  la  Mar  e'.Uai»e.  Celte 
dernière,  habillée  pour  la  circorist;ince  en  Charlotte  Corday,  tenant  à  la 
Iiiaiii  11' diapi'.iii  Iricolnif.  sunli'V.iit  un   f-rii' :<ii>.' i>;tu.'  it,,li-..T  ImiKl.'. 

1878-187i> 

Dans  le  courant  de  novembre  1878,  sur  les  quitro  heurCi  du  soir,  un 
commencement  d'incendie  éclata  dans  le  magasin  d'accessoires.  Ileureu53- 
ment,  on  s'en  aperçut  à  temps.  Il  n'y  eut  que  de  légers  dégâts  maté- 
riels. 

La  direction  Lcmoigne  inaugura,  pendant  cette  saison,  le  système  des 
matinées  dominicales.  L»  succès  fut  -ompletdès  le  premier  jour,  et,  depuis 
lors,  ne  s'est  pas  démenti. 

Tournée  :  VAt^sommoir. 

I«79  1880 


Cette  année,  le  Grand  Th-'Atre  ét;iit  en  réparatiuii  .  i  i.i  -uo^- nti.'u  .i.m 
affectée  à  la  réfection  do  la  salle 

La  Municipalité  choisit,  pour  exploiter  la  Renaissance,  M.  Jourdan,  qui 
était  à  la  tête  d'une  Société  d'arti>tes.  Aucun  genre  n'était  impo>é. 

L.    JOURDAN,    Administrateur 
Mahtin.  prouiicr  ch 'f  il'urcho*lre.  —  Jamu.  ri^^is-*.  ar 


(:»)Mf:t)IK 

M. M.    Vi  i-r  rùle. 

Ia  1  mo  deixi'^mo  r.M-v 

Havmom),  li.'nxi.'-iiio  r."-'.'-. 
Wi«:tox.    «1<'u\k''  ne  rv'Io. 
Saint  fiMiuE.  troisième  rMc. 
PnusfKR,  p<>re  noblo. 
Martin,  amouretix  comiquo. 
.)\MKM,  roini«|ii«.> 

UKI.OnMK     COIIli'|M0. 


.SunvuR.  comique. 
M'  •    M..N*  -  r.LbiKXT.     gr.in.| 

1  .1.  . 

MMNf.viET.  joune  pr.n.i."; 
KoHc^TY  jfiine  \'\  • 

StR\N*Kv      n».-*    ti     „., 
BOKSON 

DK   SaIX.    <!•:>    Mil      >i.4«. 

.\j«oi.»nK.  foiihr'  llo. 
Mar^km  r.  si.nl.iot*. 

C\RLI.  liut'gric. 


pr. 


31G 


LI-:  tukatki::  a  Nantes 


()l'i:RA-CUMl<Ji;K  ET  TIIADICTIONS 

MM.  r.ODiiviLu:,  fort  ténor. 

Marcel  Dr;viiiKs,  ténor  en  duuljlo. 

iJAiiiiTTi,  dcuxiùm  ■  l'-ipT, 

MAUdfc,  baryton. 

(^OMTii,  basHC, 

IIaly,  Uou.\i(!!me  bassi-. 

tiR.vciANi.  trial. 


<iAi.i.yLAKociiKu.K,  preiiliè.f,'  chan- 
teuse If'gt're. 

Jeanne  Ani.rke,  jeune  ohantease. 
SiiiKTri,  du;,'ii/on. 
De  Saise,  deuxième  dugui^ou. 
Sthaxskv,  du'gne. 


MM.  Comte,  Maugé  et  Mme  Gally-Larocliello  possudaieut  une  certaine 
valeur.  Le  reste  do  la  troupe  (';tait  dos  j)lus  médiocres. 

L'exploitation  ne  fut  pas  heureuse  et  se  tonnina  en  décemVjrc  A  partir  de 
celte  époque,  il  n'y  eut  plus  que  de  noral)reuses  tournées. 

Nouveautés  :  M^^Facari,  Lequel?,  IcCnhinet  Piperlin,  Doit-on  te  dire  Y 
Nounou,  Gavaud,  Minard  et  C''-'. 

Tournées:  VAnare,  (Marie  Kolb),  les  Martyrs  de  Strasbourg ^  la  Cagnotte, 
le  Légataire  unicersel,  le  Mariage  de  Figaro,  Jean  Nu-Pieda,  Phèdre 
(Agar),  Jonathan,  le  Fils  de  Coralie,  Gabrielle  (Mm<.'  Favart),.  Daniel 
Radiât,  Robert  Macaire,  V Aventurière^  les  Inutiles,  les  Folies  amoureuses, 
le  Vogage  de  M.  Perrichon,  le  Trésor,  le  Malade  imaginait  e,  le  Marquis 
de  Villemer.  le  Denii-M onde  {ces  doux  pièces  avec  la  troupe  de  l'Odéon), 
VAge  ingrat. 

Les  6.  7,  8  septembre  1880,  les  Nantais  purent  enfin  applaudir  Sarali 
Bernhardt.  L'immense  salle  de  la  Renaissance  n'était  pourtant  pas  1res 
pleine.  Beaucoup  de  persoiines  étaient  encore  aux  bains  île  mer  et  à  la  cam- 
pagne. L'illustre  artiste  joua  Adrienne  Lecoucrcur  et  Froufrou.  Elle  fut 
accueillie  par  de  longs  transports  d'enthousiasme  et  couverte  de  Heurs.  A  pi  es 
la  seconde  représentation,  un  grand  souper  lui  fut  oll'ert  chez  Monuier. 
Sarah  s'y  montra  charmante  de  verve  et  d'esprit. 

L'ancien  directeur  du  Grand-Théâtre,  M.  Bellevaut,  faisait  partie  do 
cette  tournée  comme  régisseur. 

A  partir  de  1879,  î^nnée  de  sa  fondation,  la  Société  des  ('once:ts  popu- 
laires donna  ses  concerts  dans  la  sall<^  de  la  Renaissance.  11  n'est  pas  dans 
le  cadrede  cet  ouvragede  retracer  l'historique  de  cette  Société  qui  afaitfaire 
à  l'art  musical,  à  Nantes,  les  progrès  les  plus  considérables.  Disons,  toute 
fois,  qu'elle  amena  à  la  Renaissance  les  plus  grands  coniposit(nirs  et  les' plus 
brillants  virrtuoscs. 

js,^  :-lS^l 


RiciuU'l)articulieràsignal«r  pendani  la  campagne  d'lu\er.  Sarah  Bernhardt 
revint  le  8  et  le  î)  seiitembre  à  la  grande  joie  de  ses  nombreux  admirateurs. 
Cette  fois  la  grande  artiste  joua  la.  Dame  aux  Camélias,  qu'elle  n'avait  pas 
encore  inlcrprélce  à  Paris  et  llcrnatii. 


SARAii    ukrnicaudt  SI' 


Pfndant  IVtcS  on  fit  subîr  un  rcmanicmcnl  à  la  siillc.  Ijc%  logws  dw 
prcnii/îres,  sauf  deux  dans  lo  fond  et  irois  de  «haquo  côuis  furent  î»up- 
priniff.s:iinsi  quoles  avant-scènes.  In  csoalierdo  doffa^enient  iul  construit 
pour  les  pn^niières. 

IhmI    \HfsJ, 

iN'udam  les  mois  d'IiiviT.  :iurun  f;ut  dijiÇn»'  <!  •'^ 

de  mai,  la  Compagnie  d«'s    f-'^,iirsi,,i,M  /'.tm.r  lia 

dans  la  salle  Branci.s. 

1882- IH8:; 

pendant  la  saison  lyrique,  toujours  rien  debicnint<*ressant.  Le  petit  ir.iin- 
train  ordinaire:  matinées  le  dimanche,  paroi  par-lâ  quelques  so 

Les  21  et  22  juillet.  Sarali  Hernhardt,  accomixipn'-'  '  •  M.;..;..  ^  ...u 
Fii'dora  avec  un  immense  succès. 

Les  Excursions  I/amiiton  revinrent  p«'ndant  le  mois  de  septembre. 

1S83  tWi 
On  joua  Pfdu  iTAne  sans  ^rind  surrhs. 

Rien  de  particulier. 

1S8(Î18«7 

M.  r.iravey  donne  les  inalin«'es  du  dimanche  a  moitié  prix.  Cette  inno- 
vation est  accueillie  avec  beaucoup  de  f.iveur. 

Kn  août  1886  eut  lieu  une  représentiition  du  Serment  (Tun  lireton.dnme 
de  NL  Grin^ire,  au  bénéfice  de  M.  Hesombes,  directeur  des  Variétés. 

J887-1888 

De  même  <|U  a  Graslin,  on  prit  à  la  Kenaiss;ince  d'importantes  mesures 
de  sécurité.   On  installa  un  rideau  de  fer,  un  bassin  et  îles  herses  d'eau. 

!i      _  il.  ii.<  .  v'i'rieures   et  de   nouveaux     ;  '      On  sup  ' 'S 

Il  1   11'      s  (|ui  exist;iient  au  bout  <!•  nenant    i      .  •l 

el  on  les  remplaça  par  une  pente  douce  commençant  à  partir  du  vestibule.  La 
salle  fut  aussi  rt»sl;iur«'*e.  Elle  en  avait  b»*soin.  car  elle  était  dans  un  état  de 
délabrement  complet.  Elle  fut  rep<nnteet  Lipisséeà  neuf.  Enfin,  o"  ••'  ■  >  " 
nouveau  rideau  dû  au  pineeau  do  Livastre.  En  voici  la  description.  \ 
au  premier  plan,  un  grand  escalier  au  haut  duquel  se  dressait  un  Temple 
grec;  (b>vanl.  une  sLitiii  (rA}>->lI.>ii  '  "        d'or.  An  '         '  "  s 

roBtrale»,  puis  un  larue  «juai  ilaiis  t  ulwconi;  o 


:ns 


LE  THEATRE   A    NANTES 


mer  calme  et  tranquille  sillonnée  de  nombreux  navires.  Toujours  à  gauche, 
de  liautes  falaises  perdues  dans  un  léger  brouillard.  A  droite,  une  draperie 
ronge  avec  les  armes  de  Nantes  et  de  Bretagne,  descendait  en  plis  harmonieux 
5ur  ane  balustrade  surmontée  d'un  Amour.  Au  pied  de  la  draperie  se 
tronvaient  des  masques,  une  flûte  de  Pau  et  dilférents  autres  accessoires.  Au 
bas,  dans  l'cncadreuient,  une  vieille  ins<;ription  latine  signifiant:  Ville  de 
Nantks.  Ce  rideau,  fort  réussi,  était  d'ini  grand  effet. 

f^cs  dessous,  continuellement  inondés  par  la  source  qui,  lors  de  la  cons- 
trwction,  avait  dor.né  tant  de  soucis  à  l'architecte,  furent  entièrement 
asséchés.  On  construisit,  a  cet  effet,  un  véritable  aqueduc.  M.  Lebee  dirigea 
tous  les  travaux  avec  son  habileté  ordinaire.  La  restauration  de  la  Renais- 
sance et  les  améliorations  apportées  au  Théâtre  s'élevèrent  au  chiffre  de 
117.380  francs.  N'oublions  pas  non  plus,  à  propos  des  travaux  considérables 
exécutés  dans  nos  théâtres  pondant  l'année  1887-88,  de  rendre  justice  à 
l'activité  et  à  l'inlelligence  de  M.  Nicolleau,  adjoint  délégué  aux  Beaux' 
Arts,  qui  s'occupa  toujours  avec  un  soin  particulier  et  un  intérêt  constant  de 
la  situation  artistique  et  matérielle  de  nos  scènes. 

1888-1880—  188<J-18i)0 

h^n  fait  de  choses  particulièrement  intéressantes  et  dont  je  n'ai  pas  eu 
l'occasion  de  parler  â  propos  du  Théâtre  Graslin,  je  ne  vois  guère  à  signaler 
que  les  nouvelles  représentations  de  Sarali  Bernhardt  dans  Jeanne  d'Arc  et 
la  Tosca,  les  19  et  30  juillet  1890. 

1890-1891  —  1891  1892  —  1892-1893 

Mounet-Sully  vint  jouer  7/am/e/ (janvier  \}l),  Jiuy-Blas  et  Œdipe-Roi 
(septembre  92). 

Une  panique  eut  liou  le  dimanclie  27  novembre  1892,  à  la  matinée,  où 
l'on  jouait  Robert.  Au  troisième  acte,  un  rayon  de  soleil  s'étant  glissé  dans 
la  salle  par  un  interstice  de  fenêtre,  un  imbécile  se  mit  à  crier  :  Au  feu  ! 
On  juge  de  l'émoi  des  .spectateurs  et  de  la  bousculade.  Plusieurs  dames  se 
trouvèrent  mal  ;  enfin,  le  directeur  et  le  régisseur  accoururent  sur  la  scène 
et  parvinrent  à  calmer  la  frayeur  du  public.  Cet  incident  aurait  eu  de  graves 
conséquences  si  les  spectateurs  n'avaient  pu  être  rassurés  à  temps. 

Dans  le  courant  d'août  189.'i,  unt»  troupe  de  Dahoméens  fut  exhibée  dans 
la  salle  de  la  place  Brancas. 

1893-1894  —  1894  1895 
Rien  à  .signaler. 

1 895-1 89G  —  1896-1897 

Le  15  mai  189G  eut  lieu  une  grande  représentation  de  gala  au  bénéfice  do 
la  statue  du  général   Mellinet.  On  joua  Le  ^farfJuis  de  VjV/cmc/' avec  le 


ICBSTAURATION   DK   LA    RENA1S8ANCF.  '^V* 

Prudijtiri,  rriidior,  M"'*  l'iersoii,  tlu  Minil,  Reichemberg  tl  Amel. 

^Au";  ist<w 

L<;  (iiiiiainrir  l'.t  d<'<iuiii<i<'.  um-  jj-iiinju»'  'wi  mu,  «-n  iii.4liiiif, 
au  preiiiiur  a(r(<*  de  Mit/non,  La  sallu  étant  trop  ch.lut^é(^  on  eut  U 
malencontreuse  idée  dVlrindre  le  calorifère  en  jetant  de  l'eau  >ur  les  cliar- 
lx)n«  embrasés.   Une  légère  (umé«»  et  une  odeur  d-  nt 

dans  la  .salle.  Cela  suUit  |)our  causer  une  bou.>>cu ^  ^. ^....,..c» 

dames  .s'évanouirent.  Cependant,  un  grand  nombm  de  s|xc(ateuni  qui 
n'avaient  pas  perdu  leur  sang-froid  essayaient  de  rassurer  le  public. 
M.  Martini  8;iut4'i  .sur  la  ^  "irmanl  qu'il  n'y  av^         iii  danger.  Enfin 

le  (îaUne  revint  et  la  repi'  i  s'a<'heva  s.uis  en 

pendant  l'été  de  IH'.WS,  on  oonslruisil  pour  la  Préfecture  et  la  Mairie 
de  nouvelles  avant  scènes.  Elles  furent  installées  plus  en  rctriit  que  les 
anciennes  cl  à  la  hauti'ur  d;vs  places  de  premières. 

IHlIK-lrtOlJ  —  !«>!)■  Î9(  M) 

En  septembre  181)8,  M.  Romain  vint  jouer  Michel  Strognjf  avec-  un 
matériel  entiôronient  neuf. 

Le  H  février  19<H>  eut  lieu,  .sous  les  an.^pices  de  la  Symphonir,  un  grand 
festival  en  l'honneur  de  notre  émiuent  concitoyen  Hourgault-Ducoudni^'. 
Le  compositeur  dirige;!  ses  u'uvres  au  milieu  des  acrlamation-^  dii  public. 
Une  danseuse  de  l'Opéra.  M"*  Sandrini,  mima,  a  wtte  soirée,  d'une 
remarquable  f.i^-on,  plusieurs  Dames  ijrecfjuett  dv  M.  Hourgault  Ducoudray. 

A  l'occasion  do  ce  festival,  la  Presse  nantaise  offrit  un  l>anquet  à  l'auteur 
do   Thamara. 

Le  cyclone  qui  ravagea  Nantes  en  février  lîKMj  causa  d'as.sez  grands 
dégâts  à  la  Renaissance.  Une  partie  do  la  toiture  fut  emportée,  et  la  pluie 
qui  p«'«nétra  dans  la  s;ille  y  causa  d'importantes  détériorations. 

«900  —  1901 

Durant  le  prinl<nnps  et  l'été  de  1901,  de^  réparations  considérables  fun>ul 
faites  à  la  Renai.ssaoce.  Ce  thé^ltre  avait  le  plus  grand  besoin  d'une  réfection 
complète,  aussi  bien  à  riiitcriour  qu'à  l'exi*'-  -  La  subvention  de 
lOU.lHHi  francs  fut.  en  partie,  atlcott'v  à  ca  ivx\ 

L'extérieur  du  mouument  fut  entièrement  ragréé.   On  cbaogoa  nombre 
dû  pierres  qui  étaient  en  mauvais  état,  on  r-  enfin,  ou 

rempla<;a  par  deux   lyres,    d'une  forme  assez   cv^;......  .  .v..   ..v  ..x  tito-s  de 

chevaux  qui  se  trouvaient  sur  la  fa(.'ade  et  qui  n'avaient  plus  aucune  raison 
d'\  clro  maintenues.  L'intérieur  de  la  ttalle  fut  refait  à  neuf  et  complètement 


320  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


repeint  en  «  modem  stylo  »,  sur  les  indications  de  M.  Olivier  Lcmoine, 
adjoint  délégué  aux  Beaux-Arts.  Quand  le  public  fut  admis  à  «ontempler  ce 
chef-d'œuvre  de  mauvais  goût,  ce  fut,  dans  la  ville  entière,  un  éclat  de  rire 
général.  La  salle,  badigeonnée  d'une  couleur  jaune,  réservée  ordinairement 
aux  murs  de  cuisines,  faisait  un  pitoyable  effet.  Les  différents  ornements 
perdaient  à  la  lumière  électrique  tout  relief.  On  ne  distinguait  absolument 
rien.  Devant  les  quolibets  qui  accueillirent  la  salle  ainsi  enlaidie  et  qu'on 
surnomma  les  <(  Folies-Leraoine  »,  —  en  effet,  en  entrant,  maintenant,  à 
la  Renaissance,  on  se  croirait  plutôt  dans  un  music-hall  que  dans  un  théâtre 
sérieux,  —  la  Municipalité  dut  regretter  amèrement  d'avoir  permis  à 
M.  l'Adjoint  délégué  aux  Beaux-Arts  d'essayer  ses  fantaisies  sur  un 
monument  public.  On  tâcha  alors  d'atténuer  les  laideurs  de  l'infortunée 
salle  en  renforçant  les  couleurs  des  fleurs  employées  dans  l'ornementation, 
en  faisant  courir  une  large  frise  de  feuillages  au-dessous  du  plafond  des 
galeries  et  en  jetant  sur  les  ignobles  murs  jaunes  un  semis  des  lettres  T.  R. 
entrelacées,  pour  en  dissimuler  un  peu  la  nudité.  Malgré  tout,  on  ne  put 
arriver  qu'à  corriger  imparfaitement  des  défauts  dus  à  une  conception 
fausse,  maladroite  et  anti-artistique. 

Le  soubassement  du  plafond,  orné  de  grands  iris,  est  d'un  assez  joli 
effet.  Par  contre,  le  motif  circulaire  qui  le  surmonte  et  qui  sépare  les 
médaillons  où  sont  inscrits  les  noms  des  grands  musiciens,  est  complètement 
manqué.  Il  se  compose  de  trois  lyres  ornées  de  guirlandes  de  glycine  et  de 
roses.  Chaque  arcade  du  plafond  est  séparée  par  une  sorte  de  pilastre, 
composé  d'anneaux  reposant  sur  une  lyre  plus  grande  que  les  autres.  Le 
tout  est  d'une  lourdeur  déplorable.  La  partie  du  cintre  directement  située 
au-dessus  du  lustre  figure  des  yelums  tendus,  peints  d'une  couleur  bleu 
tendre.  On  dirait  nn  immense  parasol  ou  plutAt  un  abat-jour  de  mauvais 
goût. 

Los  noms  des  musiciens  inscrits  dans  les  médaillons,  placés  dans  la 
guirlande  de  lyres,  de  glycine  et  de  roses  sont  :  au-dessus  de  la  scène,  ceux 
de  Wagner,  Gluck,  Mozart,  Méhul  ;  ensuite,  dans  un  ridicule  désordre,  en 
partant  de  la  droite,  ceux  de  Verdi,  Bach,  Berlioz,  Haydn,  Rossini, 
Gounod,  Lalo,  Bizet,  AVeber,  Franck.  On  aurait  pu,  il  nous  semble, 
adopter  une  classification  plus  méthodique  et,  surtout,  no  pas  oublier 
Beethoven.  Devant  les  protestations  unanimes  soulevées  par  cette  omission, 
M.  l'Adjoint  aux  Beaux-Arts  se  décida  à  faire  peindre  sur  l'avant-scène  de 
gauche  un  médaillon  où  l'on  inscrivit  le  nom  du  grand  symphoniste,  ainsi 
orthographié  :  Reethowen.  Cette  faute  ne  fut  corrigée  qu'après  plusieurs 
semaines,  alors  que,  dès  le  premier  jour,  elle  avait  été  signalée  par  les 
journaux.  Sur  l'avant-scène  de  droite,  ou  mit  le  nom  de  Meyerbeer. 

Si  l'ornementation  de  la  salki  est  complètement  manquée,  eti  revanche; 


RESTAURATION    DE    (,A    RENAISSANCE  321 

plusieurs  remaniements  hetfreux  furent  apportés  dans  sonatnénagemenl.  Les 
places  de  pourtour,  si  incommodes,  furent  sup;        '        '.  '  se 

trouva,  par  là  mt'rme,  agrandi.  On  lui  donna  un-  fs 

places  devinrent  alors  excellentes.  Elles  furent  divisées  en  trois  caU^ories  : 
fauteuils  d'orchestre,  stalles  d'orchestre  et  parterre.  Lc!*  deux  1<  :c 

furent  enlevées  et  remplacées  par  une  sortie  directe  sur  l'a-^iii  . -.cr. 
Les  fauteuils,  recouverts  de  velours  bleu  paon,  paraissent  noirs  à  la  lueur 
de  la  lumière  électrique.  Des  ornements  «  art  nouveau  »  en  relief  furent 
placés  dans  les  vomitoires  qui  donnent  accès  aux  fauteuils.  Ceux  de  droite 
et  de  gauche  ont  un  aspect  a^-sez  gracieux,  nnis  la  courbe  donnée  a  l'extré- 
mité des  parois  serait,  en  cas  d'incendie,  un  obstacle  à  la  prompte  évacuation 
de  la  salle.  Quant  à  celui  du  fond,  il  est  d'une  rare  laideur.  Le  rideau  peint 
par  Lavastre  en  1887  céda  la  i>laco  à  un  autre  concordant  avec  la  d«''coration 
générale  de  la  salle.  Ce  rideau  et  toutes  le>  peintures  de  la  salle  furent 
exécutés  par  le  peintre-décorateur  municipal,  M.  Guillot,  qui  venait  de 
succéder  a  M .  Lucot. 

Le  plancher  de  l'orchestre  fut  considérablement  abaissé,  de  fat.on  t{ue  la 
vue  des  spectiiteurs  ne  fût  plus  g(>néc  jar  les  musiciens.  La  scène  reçut  un 
nouveau  plancher  identique  à  celui  du  Grand-TbéAtre.  L'électricité  fut 
installée  partout.  Lo  <  jeu  d'orgues  électrique  »  de  la  Renaissance  est 
même  supérieur,  comme  agencemoni,  à  celui  de  Graslin.  Un  nouveau 
calorifère  remplaça  l'ancien,  qui  était  fort  défectueux.  Diverses  modifi- 
cations furent  apportées  du  côté  de  l'entrée  des  artistes,  qui  fut  rétréci»'  pour 
permettre  d'augmenter  de  deux  pièces  la  conciergerie.  Enfin,  diflcrenls 
travaux  de  réparation  et  de  solidification  furent  entrepris  dans  les  couloirs 
et  dans  le  vestibule,  où  des  colonnes  de  fonte  furent  placées  pour  soutenir 
le  plancher  du  foyer.  Celui  ci  n'échappa  pas  à  la  r.ige  d'«>nlaidissemeut  de 
M.  l'Adjoint  aux  Beaux-Arts.  On  le  peignit  de  couleurs  brutales,  où  les 
blancs,  les  violets,  les  rouges  hurlent  (les  uns  avec  les  autres.  Les 
panneaux  furent,  eux.  tendus  d'une  jolie  étotfe. 

Les  crédits  volés  pour  les  réparations  du  tbéÀtrc  ut-  i;i  ncuaissance 
s'élevaient  au  chiffre  de  133.000  francs.  .Mais  ils  furent  dépassés.  ICt  dire 
que  pour  ce  prix  on  aurait  pu  faire  quelque  chose  de  bien  !l 

Les  remaniements  divers  opérés  dans  la  salle  depuis  la  construction  ont 
assez  sensiblement  diminué  le  nombre  des  places.  Aujourd'hui,  la  Renais- 
sance ne  contient  plus  ofiiciellemeut  que  2.143  places. 


^^G^y^^^^^^"^^^ 


30 


.:É  11  \i  !-''  ; 


^cr^;*.»:-.  .-.s 


'J^l' 


1 


v/1  'i-^^'^  T^à^"   .''1  '-I 


5 

0^ 


• 


•« 
•• 

j: 
h 

c 

ô 

c 


\\ii*_^-:^' 


■'A  'A  à  V    :; 


«rf'T^'y*^.  t 


\i 


THÉÂTRE    DES    VARIÉTÉS 


1832  —  1894 

ra»riru   l{iqtn^ui.  -  I."    uourrlle  salle  de    la  rue  Merr<rur.  -  .Vj"    Lrroux. 

Ih'lavilU:  -  Mnin.  -  Itesombes.  -  Les  CJochw  de  (:orneT.ltB. 

..,,:.ii.- Vingt  Treize.  —  Valincuurt.  —  li»narel. 

Ih^moUtion    de    la    salle. 


ANS  un  local  a^scz  pnunh..  :,iluc  rue  du  Calvaire,  où  se  trouve 
aujourd'hui  le  iv  3.  vint  s'insUiller,  en  1832,  une  scène  de 
marionnettes  dirigée  par  M.  et  M™"  Leroux.  Ils  avaient,  d'a- 

^ bord,  donn(^  des  représentations  en  plein  vent  sur  la  Petite- 

Ilnllande.  C'  petit  théâtre  qui  faisaient  la  joie  des  enfants  mais  non  la  tran- 
quillité des  parents,  avait  rc.;u  du  public  le  nom  'de  liiguiqui.  Celle  appel- 
lation devait  lui  rester.  Même,  quand  bien  des  années  plus  tard,  l'humble 
baraque  se  transforma  en  un  véritable  théâtre,  ce  fut  toujours  pour  I  -  V  ■"- 

tais.  liiquiqui. 

Cependant,  celte  troupe  de  marionnettes  faisait  des  affaires  d'or.  D'année 
en  année,  un  public  plus  nombreux  se  pressait  sur  ses  rudimentaires  ban- 
qurtlrs.  La  famille  du  p^re  Leroux  s'était  accrue,  les  enfants  avaient  grandi, 
s'étaient  mariés.  Ils  se  mirent  à  jouer  entre  eux  quelques  petites  pièces. 

Kn  1854,  Riquiqui,  qui  avait  quitté.depuis  quelques  temps, la  ruedu  Cal- 
vaire pour  s'installer  rue  Merc.eur.  au  coin  de  la  rue  de  llndustrie.  aban 
donna  définitivement  les  marionnettes,  qui  avaient  commencé  sa  fortuiu*,  et 
se  mit  a  jouer  des   (  omédies  sous  le  nom   de  Théâtre  des  iMLansenxents- 
Comiquea.  L'ouverture  eut  lieu  le  dimanche  G  août.  Le  Rpoitacle  se  .m 
posait  de  Bruno  le  Fileur,  Pierrot,  la  léfjende  dtt  Grand  h  tan  g,  chaii!. 
par  M.   Léon,  âgé  de  six  ans.  et  ^Tne/rinme  qui  ne  gri:>e.   Le  prix    des 
places  était  fix6  comme  il  suit  :  premières,  1  franc  ;  deuxièmes,  0  fr.  Ù)  ; 
galeries,  0  fr.  40  ;  parterres.  •  fr.  25. 

Cette  tentative,  qui  réussit,  encouragtîa  la  fnuill.»  I.rn.ux  fi  continuer  celle 
exploitation  sous  lo  Titre  de  Troupe  Nanlai- 

Ce  fut  seulement  en  octobre  186<î  que  l'ancien  Kiquiqui  adapta  le  n- 
Variétés.  A  celte  occasion,  on  rappropria  un  peu  la  salle  qui  était  loin  u  . .... 


324  LE   THÉÂTRE    A    NANTES 


luxueuse.  Figurez-vous  un  espace  assez  exigu  entouré  d'une  simple  galerie 
de  bois.  Au  milieu,  des  sièges  peu  confortables.  La  façade  était  formée  d'un 
encadrement  de  bois  peint  ;  simple  décor  à  moitié  elTacé  par  la  pluie.  C'est 
dans  cette  salle  malpropre,  enfumée,  que  la  famille  Leroux  gagna  sa  for- 
tune. Ce  petit  thé;'ilre  qui  jouait  le  drame,  la  comédie,  le  vaudeville,  était 
fréquenté  par'les  ouvriers.  Cependant  les  bourgeois,  de  temps  en  temps,  se 
risquaient  à  y  aller,  quitte  à  recevoir  sur  la  tête  des  pslures  d'orange  et  de 
pomme. 

On  changeait  de  spectacle  deux  fois  par  semaine.  Les  samedi,  dimanche 
et  lundi  on  jouait  le  drame  ;  les  mardi,  mercredi  et  jeudi,  la  comédie.  Ce 
système  demeura  toujours  en  vigueur  à  la  salle  de  la  rue  Mercœur. 

En  février  1872,  les  Variétés  jouèrent  une  pièce  locale  :  Les  Mysière»  du 
Marchix.  Ce  drame  bien  noir,  mais  qui  offrait  un  intérêt  palpitant  pour  les 
habitants  du  quartier,  était  dû,  je  crois, à  l'un  des  bons  artistes  de  la  troupe, 
M.  Cardon,  qui  avait  épousé  M"'  Leroux. 

En  1873,  une  revue  du  même  auteur  :  Nantes  à  col  d'oiseau^  eut  un  très 
vit  succès.  A  cette  occasion,  toute  la  haute  société  nantaise  défila  à  Riquiqui. 
Bien  souvent  la  mère  Leroux  ne  put  retenir  un  mouvement  d'orgueil  en 
voyant  une  file  de  luxueux  équipages  à  la  porte  de  son  houi-houi.. 

En  mars  1876,  les  Variétés  firent  une  excursion  dans  l'opérette  et  jouèrent 
la  Fille  de  Madame  Angot,  C'était  assez  drôle.  Le  chef  d'orchestre  jouait 
du  piano  de  la  main  gauche  et  battait  la  mesure  de  la  main  droite. 

Cependant  M™«  Leroux  avait  peu  à  peu  amassé  une  fortune  assez  ron- 
delette. La  foule  aflluait  toujours  à  son  théâtre.  Elle  résolut  un  jour  de  rem- 
placer la  baraque  de  bois  par  un  véritable  monument.  Aussitôt  dit,  aussitôt 
fait.  Les  travaux  commencèrent  et,  en  quelques  mois,  un  théâtre  d'apparence 
sérieuse  s'éleva  sur  l'emplacement  jadis  occupé  par  la  petite  scène  des 
marionnettes. 

Le  nouveau  théâtre  avait  été  construit  par  M.  Moreau,  qui  tira  tout  le 
parti  possible  de  l'espace  assez  restreint  mis  à  sa  disposition.  La  salle,  jolie 
et  coquette,  se  composait  de  deux  galeries,  de  fauteuils  d'orchestre,  d'un 
parterre  et  de  quatre  avant-scène.  Pendant  quelque  temps,  il  y  eut  aussi  à  la 
première  galerie  deux  autres  avant-scène,  mais  elles  furent  supprimées. 
Le  plafond,  de  forme  ovale,  était  entouré  de  douze  petits  panneaux  représen- 
tant différents  sujets  légers.  Les  balcons  des  galeries  étaient  ornés  des  attri- 
buts de  la  musique  et  de  la  comédie. 

L'ouverture  de  la  nouvelle  salle  eut  lieu  le  jeudi  28  novembre  1878.  i..e 
spectacle  était  composé  du  Cheveu  Blanc,  de  Jeanne  qui  pleure  et  Jeanne 
qui  rit  et  de  Tromh-al-Cazar.  Ce  fut  une  véritable  scène  de  famille.  La 
brave  mère  Leroux,  âgée  de  près  de  80  ans,  mais  très  vaillante  encore  et 
toute  fière  de  sa  longue  vie  de  travail,  fut  amenée  sur  la  scène  aux  applau- 
dissements de  tous  et  reçut  plusieurs  bouquets. 


Théâtre    des    Variétés 
Ru«    Mcroaur 


LES    VARIÉTÉS    DE    LA    RUE    MERCŒLR  325 

Alors,  commença  pour  les  Variétés  une  période  de  splendeur  qui,ma]heu- 
reusoment,  ne  devait  pas  durer  de  longues  années.  La  troupe  était  bonne.  II 
me  suffira  de  rappeler  les  noms  de  Delaville,  un  premier  rôle  de  talent  ; 
d'Alain,  un  amusant  comique,  qui  était  en  même  temps  peintre  déco- 
rateujr;du  désopilant  Besombes  ;  deMalbœuf  :  dn  jeune  premier  Dubiaux, 
qui  épousa  la  [Kîtite  fille  de  M™J  Leroux,  Cécile  Cardon  ;  do  M"»'»  Cardon 
et  Allain,  —  les  doux  filles  de  M*""  Leroux,  —  et  de  M"**  Besorabe."». 

En  1880,  profitant  de  la  fermeture  du  Grand-Théâtre  et  de  la  déconfiture 
de  la  troupe  de  la  Renaissance,  les  Variétés  jouèrent  avec  succès,  les  Clo- 
ches de  Corneoilte.  Pour  cette  occasion,  deux  chanteuses,  M"»»  Vcrnet- 
Lafleur  et  Berthe  +'éal,  avaient  été  engagées. 

Un  drame  signala  l'année  1881.  L'administrateur  Malbœuf  qui,  comme 
comique,  ne  manquait  pas  d'un  certain  talent,  fut  trouvé  pendu  à  un 
portant. 

La  saison  1882  fut  des  plus  brillantes.  Deux  pièces  eurent  un  immense 
succès  :  Quatre- Vingt- Treize  de  Victor  Hugo,  où  Delaville  était  très  remar- 
quable dans  le  rôle  de  Cimourdain,  et  les  Locataires  de  M.  Blondeau  qui, 
pendant  trente  représentations,  dilatèrent  la  rate  des  Nantais.  Dans  ce«l« 
comédie,  Besombes  était  absolument  inénarrable.  Allain  y  était,  lui  arssi, 
fort  drôle. 

En  août  1882,  M™'  Leroux  mourut, âgée  de  84  ans.  Ses  derniers  momonts 
furent  attristés  par  la  venue  des  huissiers.  La  construction  du  nouveau 
théâtre  avait  coûté  plus  cher  qu'on  ne  pensait  d'abord.  M*«  Leroux  s'était 
endettée  ;  les  frais,  plus  considérables,  n'avaient  pas  été  compensés  par  les 
recettes,  réduites  forcément  par  l'exiguïté  de  la  salle,  et,  finalement,  la  ruine 
venait  briser  toutes  les  espérances  que  la  vieille  directrice  avait  fondées  sur 
son  cher  théâtre. 

Quelque  temps  après  la  mort  de  M"  Leroux,  les  Variétés  furent  mis  en 
adjudication  et  devinrent  la  propriété  d'un  notaire  de  la  Ville. 

M.  Besombes  père  voulut  alors  prendre  la  suite  des  affaires  de  M™'  Leroux. 
Mais  il  ne  s'rntendit  pas  avec  les  propriétaires  de  la  salle.  Il  fit  construire, 
sous  le  nom  de  Théâtri'  Nantais,  une  salle  en  bois,  dans  un  terrain  vague, 
situé  en  face  des  Variétés, au  coin  de  larueMercœur  et  delà  rue  du  Général- 
Meusnier. 

En  1884,  M.  Besombes  loua  définitivement  les  V^ariétés.  Il  y  resta  jjis- 
qu'en  1887,  année  où  il  abandonna  la  direction  après  des  affaires  peu  bril- 
lantes. Parmi  les  artistes  qui  firent  partie  de  sa  troupe,  il  faut  citer  M.  Fres- 
pech,  qui  avait  été,  en  1874,  administrateur  du  Théâtre  Graslin  et  les  deux 
excellents  comiques  Zynguet  et  Dargelès. 

Au  départ  de  M.  Besombes,  les  Variétés  passèrent  aux  mains  de 
M.  Ganelly.  Sous  cette  direction  on  joua  une  amusante  revue  locale  :  Ah  ! 
dame,  oui  dame  !  qui  avait  pour  auteurs  deux  de  nosconcitAvens.  MM.  André 


326  LE   THÉÂTRE   A    NANTES 


Richard  et  Paul  IJéraud-,  et  un  drame  fort  intéressant  d'un  autre  de  nos 
compatriotes,  M,  Jules  Uringoï^é"-  Le  Serment  d'un  Breton.  Cette  pièce  histo- 
rique eut  un  grand  succès  et  obtint  dix-sept  représentations  consécutives.  Le 
soir  de  la  première,  une  dame,  femme  de  l'un  des  héros  figurant  sur  l'affi- 
che, se  présenta  au  contrôle  pour  demander  si  son  mari,  décédé,  n'était  pas 
niàlmerié  dans  la  pièce.'  On  la  rassura  et  on  lui  offrit  une  loge. 

En  1888,  M.  Viilincourt  prit  la  direction.  Parmi  les  meilleurs  artistes  de 
sa  troupe,  il  faut  citer  M.  Bonarel  et  M"'^  Yorelle.  Une  reprise  de  la.  Famille 
Benoiton  eut  un  vif  silccès.  Le  jeune  Vàlincourt  était  excellent  dans  le  rôle 
de  Fan  fan. 

En  janvier  1890,  la  crise  provoquée  dans  tous  les  théâtres  par  l'influenza 
éclata  aux  Variétés  et  M.  Vàlincourt  fut  obligé  d'abandonner  son  théâtre. 
Le  Comité  dfé  la  Presse  organisa  au  bénéfiee  des  artistes  de  la  rue  Mercœur' 
la  grande  représentation  de  Carmen,  avec  M"'*  Boul^nd,  dont  j'ai  parlé 
dans  un  autre  chapitre.      .       .;  :.., 

La  saison  1890-91  se  fît  sous  la  direction  de  M.  Berthollot  avec  une  troupe 
lie  Renfermant  aucun  artiste  digne  d'être  spécialement  signalé.  Au  mois 
d*âvrir,  le  théâtre  fut  acheté  par  un  grand  propriétaire.  M.  Bélier^  avec 
l'intention  d'en  faire  une  maison  de  rapport.  Néanmoins,  cette  transforma- 
tion n'eut  pas  lieu,  mais  la  salle  resta  fermée  pendant  deux  ans. 

Dans  le  courant  de  février  1893,  les  Variétés  rouvrirent  leiirs  portes  sous 
le  nom  de  Théâtre  des  Arts,  avec  M.  Ricouard  comme  directeur.  Le  prix 
des  places  fut  augmenté.  On  ne  joua  que  la  comédie  et  le  vaudeville.  La 
troupe  était  bonne.  Les  principaux  artistes,  MM.  Blanchét,  Howey, 
Mmes  Leriche,  d'Ickles,  de  Givry.  ramenèrent  par  leur  talent  le  public  à  la 
salle  de  la  rue  Mercœur.  Pourtant  le  nouveau  directeur  ne  réussit  pas. 
Après  de  fréquentes  relâches  le  Théâtre  des  Arts  ferma  définitivement 
ses  portes  à  la  fin  du  mois  de  mars. 

A  plusieurs  reprises,  les  directeurs  qui  s'étaient  succédé  aux  Variétés,  et 
même  certains  conseillers  municipaux,  avaient  demandé  que  la  Ville  subven- 
tionnât ce  petit  théâtre.  Toutes  ces  tentatives  n'aboutirent  à  rien.  Un  théâtre 
des  Variétés  est  pourtant  utile  à  Nantes,  puisque  les  scènes  municipales  ne 
possèdent  pas  de  troupe  de  comédie.  Il  eût  été  bon  que  le  Conseil  accordât  la 
subvention  demandée. 

Aucun. directeur  ne  se  présentant  pour  louer  la  salle,  le  propritaire  se 
décida^  en  1894,  â  la  faire  démolir:  Une  maison  locative  portant  le  n"  22  de 
la  rue  Mercœur,  s'élève  aujourd'hui  â  la  place  du  théâtre  créé  par  la  mère 
Leroux. 

FIN 


TABLE    DES    A\^ATIERES 


TABLE    DES    ^\^ATIERES 


A\  ,mt-I'inp<»~  I 

liilio<iurliuii  III 

PREMIftUK  PAirriK 
Depuis  les  Origines  jusqu'à  la  Construction  du  Grand-Théâtre 

1430?  -  1787 

I.  -  Les  MysU>res  (14:W  -  1518) 1 

Lo  }eix  do  Hien  lutcisé  et.  mal  adcis'-  -~  mu-r-iAr^  ju' c  ■<  je  l'vs  t 
Nantes  à  cotte  époque. 

II.  —  Le  proiuiof  Optera  à  Nantes  (1596) 

Représentation  d'Arimrne,  dan.s  la  grande  sallo  du  ChAtpau. 

m.  —  Molière  &  Nantes.  —  Troupes  nomades  (1G39-1721)  ;» 

La  troupe  do  l'/i/u^/rt»  r«^a«n-«r.  —  Dans  quelle  salle  Molière  joua-t-il? 
—  Intolérance  du  Glerg»^. 

IV.  —  Lq  Salle  du  Dignon-Leslard.  Première  pi'riodo  (1T25-17S8)  17 

La  Montansier.  —  rolhit-d'llerboi.t.  —  (îoun-ill»'.  —  Lari\.'.  — 
Mil'»  DesglandH  et  Lenfant.  —  Anecdotes.  —  Appointements  don 
artistes  à  cette  époque. 

DEIXIÈMK  PARTIE 

Depuis  la  construction  du  ThéAtre  jusqu'à  l'Incendie 

1787  -  An  IV 

I.  —  Graslin  et  la  conslroction  du  ûrand-ThëAtrc  (1784  17S^ 

Dir-  •      —  _,j^. 

t.  :-»,  — 

Description  du  Ontud-Tutritre. 

M 


330  LE   THÉÂTRE    A    NANTlfe 


Page» 

II.  —  Directions  :  Longo.  —  Hodoljilie  et  IIus  (1788-1791) 37 

PièglftiTieHl  du  Théâtre.  —  Les  deux  Bapli-sto.  -  Mole.  —  I^  Saint- 
Huberti.  —  Mar.sias.  -  Affaire  Fieury.  —  M"«  Saint  Jamo.s.  — 
Anecdotes. 

III.  —  Directions  :  Fervillo.  —Violette  et  C".  —  Danglas,  Période  révo- 

lutionnaire (1791-An  IV)  45 

Anecdotes.  —  Carrier  et  le  Régisseur  du  Grand-Théâtre. 

IV.  —  Incendie  du  Grand-Théâtre  (7  Fructidor  An  IV) 57 

Dépositions  des  témoins.  —  Souscriptions  en  faveur  des  artistes. 

TROISIÈME  PARTIE 
Depuis  l'Incendie  du  Grand-Théâtre  jusqu'à   sa  Reconstruction 

An  IV  -  1813 
ThéàivcH  du  Chapeau- Rouge,   du  Bignon-Lestard  et  de  la  rue  du  Moulin 

I.  —  Le.s  petits  Spectacles  (1784-An  IV) (j7 

Première  période  de  la  salle  du  Chapeau  Rouge.  —  Deuxième  période 
delà  salle  du  Bignon-Lestard.  —  Pièces  révolutionnaires. 

II,  —  Directions:    Danglas;   —   Durnanoir,  Termets  et  Julien   Sévin 

(  An  IV-1813) 71 

Scandales.  —  Anecdotes.  —  Chants  patriotiques.  —  Pièces  interdites 
ou  expurgées.  —  La  Vestale.  —  Napoléon  à  Nantes.  —  Joseph, 
—  Ml'"  Pelet. 

III.  -  La  Salle  de  la  rue  du  Moulin  (1802-1818) 83 

L'ancienne  chapelle  des  Carmes.  —  Poltier. 

QUATRIÈME  PARTIE 
De  la  Reconstruction  du  Grand-Théâtre  à  sa  Gestion  par  la  Ville 

1813  -  1857 
Théâtre  Graslin.  —  Tlièàtre  des  Variétés 

I.  —  Directions  :  Arnaud  ;  —  Brice  ;  —  Jausserand  (1813-1820) 85 

La  nouvelle  salle,  —  W^'  Pelet.  —  Jaubert.  —  Talma.  —  Z>on  Juan. 
M'i"  Georges.  —  MH''  Mars.  —  Jausserand.  —  M"**  Lalande  et 
Floriny.  —   Huny.  —  Boioldiou. 

II.  —  Directions:   Léger.  —  Bousigues.  —  Jaubert  et   Clerniont   1820- 

1829) 103 

M™«  Allan-Ponchard.  —  M'""  Danaremont.  —  Les  Noces  de  Figaro 
Noiirrit.  —  Le  Barbier  de  Séi-illc.  —  M.  et  M'«  Roche.  — 
Ml'«  Duchcsnois.  —  M'""  Richard-^Muté.  —  La  Dante  Blanche. 
Robin  des  Bois.  —  ycmand  Cartes.  —  Bfttaille  au  Théâtre.  — 
Régnier. 


TABLE    DES    MATIKKES.  .'i>31 


III.  —  I)ii<'"  (ions  :  \\<'|s4-|i.  —  Nduti'Uii.        <.ri.iii'-«.     iw..  m-  --i  iiumon 

lliiwr.  —  niot.  —  Hizot.  —  Pourcolt  »l«*  Baron.  —  Val«Miil»rt.     117 

Nicolo-Inoaanl.    —    Lt  Muette.  —  AnecilolM.   —   M'I*  C» 
Fra    Diarolo.    —    Zampa.    —    />*   l'ré-nux  Ctern.  —  l.uo. 
Hobert  It  Itiahle.  —  .M~  I)amoreaa-Cinti.  —  Marie  Donral. 

IV.  —  I>irerUons  :  Ponchanl.  —  Iloti\.         I.onionniiT.      -   I,nf»»nt!liid". 

l'rat.  —  LafTilo.  (183«5  18».  129 

>!■•  Thilloniffurtaux.  —  Guillaumf  Tell.  I-'.iLr)-..        I.iji'.uUti. 

La  Juirr.  —  Ilt'rnant  —  I^s  l{iiywf^nt$.  —  Wcrnielrn.  I.ucir  — 

de    l.nmermoor.    —    M"    Vr^y  —     la     Fnrorile.    — 

H«rinann-I>on,  —  Ln  Fille  du  i.  —  Sorma.  —  Ilaner. 
M*«  Margueron.  —  Isma*-!.  —  Anecdotes. 

V.  —  DIrcrtions  :  Tilly.  —  Lemonnier.  —  TnliiT.  —  Lonionnivr  (18U- 

1851) n3 

Réparation  de  la  Salle.  —  Tilly.  —  6ot.  —  Solié.  —  Rach.-l.  — 
Calcina.  —  Eli«a-Maii80n.  —  Charlft  I  /.  —  hin/.L  —  Dulnc. 
Chollel.  —  La  Urine  df  Chypre.  —  Emoutes.  —  D^jaiet.  —  E«pl- 
nasse.  —  Dupro^.  —  Klarhat.  —  Ml'*  Ulm-a.  —  M'I*  Victoria.  — 
M'I*  Voiron.  —  Le  Songe  d'une  Xuit  d'Eté.  —  Charl*«n   Bataille. 

VI.  —  I)irorlions  :  Guuriii.  — Cléiiioiil.  —  Defrenne.  —  Holaiid  (1851 

18Ô7) !•,- 

Mclinguc.  —  LcvniMoar.    —    >!■•  lUlloii.  —  lUehel.  —  Duprat 
M">*  (l;iinbier.  —  il''*  Lu.nsonne  .—  Les    Socet  de   Jeanm-tte.  — 
I^e    Prophète.    —    Scandale.    —    Caabet.    —    M"«  Cîoi.sinard.  — 
Hèj^nier.  —  Moue.  —  L'Ktuile  du  Sord.  —  L'AIboni.  —  Oline 
Monloland.  —  Api>ointemrnt<i  d»-  i'<  »r.  t..  .»i. 

VII  —  Thi^alro  di»»  VuriéltV-*,  rue  de  l'-Vitliu  bcLhi;   .lN»i  IS  >'.'/ Hi'.J 


riNOril'lMK    IWRTIK 
De  la  Oestion  dM  Grand    Théâtre  par  la  Ville  â  la  fin    du    XIX    Sièrl*^ 

1857  -  1»)1 

I     -  (.iértintv  de  Cliorie»  Solié.  jtour  It)  coiuple  de  lu  Ville  (l^iTiT-iStil).     171 

M"»*  Hlllen.  —  Les  Drtignns  de  Villart.  —  I>«Ji«et  el  *'    ■  '        tr*. 
M'i*    I.avoyo.  —    M"'  BriènvFaurt'.  —  Mirapvlli.  — 

H«'juy.  —  M"«  Bori:h«'«»«'.  —  />»  Pned,  :••«. 

Le  Trour^re.  —  C.onito  Il«»rchari.  —  \pt- 

beoq.  —  Fnust.  —  Ma>*  Carvalho.  —  Kcouiialc»   tluMtcMT»  Je    la 
gvranoe. 


332  LE  THÉÂTRE   A   NANTES 


Pages 

II.  —  Directions  :  Cliahrillnt.  —  Jourdain.   —    Comminges.   —    Ber- 
nard. —  Coinmingos.  —  Défossez.   (1861-1871) 181 

Emeulos.  —  La  Statue.  —  M'"»  Tedesco.  —  Scandale.  —  Rigoletto. 
Elisa  Masson.  —  M^e  Picquet-Will.  —  Mm>;  Barbot.  —  Picot.  — 
Pons.  —  L'Africaine.  —  MU»  de  Taisy.  —  Nouvelles  Emeutes, 
La  Tt-aviata.  —  Depassio.  —  Mignon.  —  Dcsclauzas.  —  Anec- 
dotes. 

III.  —  Directions  :  Défossez.  --  Ferry.  —   De    Tholozé.    —    Frespech, 

Longpré  et  Francis  (1871-1875) 195 

Justin  Boyer.  —  Rougé.  —  Roger.  —  M™"  Balbi.  —  M'ie  Verger.  — 
Jourdan.  —  Ricquier-Delaunay.  —  Cécile  Mézeray.  —  Roméo  et 
Juliette.  —  La  Fille  de  M""  Angot.  —  Diyazet. 

IV.  —  Directions  :  Coulon.  —  Bellevaut.  —  Coulon.  —  Lemoigne  (1875- 

1880) 201 

Ch.  Buziau.  —  Tournié.  —  Pons.  —  Dauphin.  —  Caroline  Mézeray. 
M""  Seveste.  —  Reine  Mézeray.  —  M""©  Lacombe-Duprcz.  — 
Guillemot.  —  Maupas.  —  Warot.  —  Ilamlet.  —  ïrenioulet.  — 
Plain.  —  Féléeie  Arnaud.  —  M'ic  de  MoUcns.  —  Aima  Rcggiani. 
Paul  et  Virginie.  —  Aida.  —  Carmen.  —  Dereims.  —  M""»  De- 
reims-Devriès.  —  Delabranche.  —  Coralie  Geoffroy.  —  Dubouchet. 
Les  Cloches  de  CorneYille.  —  Manifestations  politiques.  — 
Réparation  du  Grand-Tl^éâtre. 

V.  —  Directions  :  Graviôre.  ■—  Lafon.  —  Gaultier.     —    Solié     (1880- 

1886) 213 

Marguerite  Vaillant-Couturier.  —  Hélène  Chevrier.  —  Jeanne 
Fouquet.  —  Séran.  —  Couturier.  —  Guillabert.  —  Mireille.  — 
Jean  de  Nivelle.  —  Philômon  et  Baucis.  —  Polyeucte.  —  Pel- 
lin.  —  Bérardi.  —  Le  scandale  Val.  —  Le  Roi  de  Lahore.  — 
Alice  Rabany.  —  Mauras.  —  Verhées.  —  Duquesne.  —  Héro- 
diade.  —  M'"»  Lacombe-Duprez.  —  Villefranck.  —  Emeute  — 
Les  Contes  d'Hoffmann.  —  Lakmé.  —  M.  et  M"'"  Simon- 
Girard.  —  Labis.  —  M'I»  Espigat.  —  Roux.  —  Manon.  —  Ml'" 
Schweyer.  — Laurent.  —  Le  Roi  l'a  dit.  —  Le  Chevalier  Jean. 

VI.  '-  Directions  Paravey.  —  Poitevin  1886-1890) 229 

Devillters.  —  Sujol.  —  Poitevin.  —  Jouanne.  —  Marthe  Duvivier.  — 
M"">  Jouanne- Vachot.  —  M'"  Bouland.  —  M""  Yioletti.  — 
Le  Cid.  —  Les  Pécheurs  de  Perles.  —  Méphistophélès.  —  Mar- 
guerite Vaillant  Couturier.  -    M'I'  Seveste.  —    Gounod  à  Nantes. 

—  Centenaire   de    Graslin.  —  Ilamlet,    d'Ignard.  —   Delvoyc.  — 
Bucognani.  —  M'""  Ismaël-Garcin.  —  Si^«rrf.    —    Le  Roi   d'Ys. 

—  Léon  du  Bois.  —  Abraham  Lévy.  —  Lestellier.  —  Glaverie.  — 
M«n«  Laville-Fcrniinct. 

VII.  —  Les  trois  directions  Morvand  (1890-1893) 2i7 

Décadence  du  Graud-Théàtrc.  -  Bucognani.  —  Claverie.  — 
M""»    Laville-Ferminet.  '  —  M"«    Salambiani.  —La  Basoche.  — 


TABLE   DBS   MATIIhlRES  3.'i3 


—  Loftengrin.  —  I;  I.  ■ 
inaltr'  Sch\v«-yi'r.    —    ' 

Mîir^'Hfiilc  Sain'  ! 
IJ     ,'!,.:,■.    -   M. 

\lli.    -    iMir.  .mil-   t.,i-t.'\.    -   Jaiiy.T   ,iSH:M896) 

Miranrp-.  —  Tourniù.  —  Sontenai*.  —  Vilt-tte.  —  Iienuanii-D«Tri'î«. 

—  Jano  DbaMty.  —  M*»*  Tarml-Uaugi'.  —  M»»»    Hil»  •.  T.uriii'-. 

—  Patrie.  —  l.'AUaque  du  Moulin.  —  Alfred  Bruiwau  ;'i  Nan- 
tes. —  Tnnnhu'user.  —  Accident  «-t  incident.  —  Ansaldi.  —  tîri- 
inaud.  —  Jofl  Fabrs.  —  Jano    Fn.-lor.  —  Houlia    Lambrocbt. 

-  Othello.  —  CantMt'ria   Ruttirana.  —  Thamara.  —  Uê|>ani- 
tionn  au  <iranJ-Tlié4lri!.  Norral.  —  I^fari;6.  —  QiKmouve.  — 

—  <îhnKni>.  —  Arlii-j.    —    M  ••    Buhl.   —  Eva    Ilomaiii     —  Mar- 

tiirior.      -    Les    incidents.  .   — 

iK'.  — Prost-rpinf.  —  Les  arti  :  .  lo. 

I\     —  Diroclions:  .Mnilini.  —  Giraud.  —  Villi^fran.k  (1896-I9t)l). . .  .      ÎS\ 

Marguerite  Martini.  —  Thf'r<^se  tlb'-ment.  —  Sëvellhac.  —  B<iuxintn. 

—  Saltimntb".  l'.rmifjetini-  -  I.:it:iHt<>.  —  Kva  Itoiiiain.  — 
M"*"  Luca.  —  Mrssitlfr.  -    Alfro  I  Iirun<'au)^  Nantes.  —  Henri  X'III. 

—  Hlanrbu  Marie.  —  V»'rdier.  —  Marj^ucrite  Desvan-illoH.  — 
Hlan<-licdo  Camilli.  —  Odylo  Ilendrickx.  —  nu-nsel  et  Grt'tel.  — 
Siri-Lind.  —  Princesse  d'Auhm-tje.  —  Phryné.  —  L'Incident 
DobliclaiTC.  —  Samuel  Bovy.  —  Buurfrcois.  —  5>izca.  —  Jarquin. 

—  M'I*  Brictli.  -  M"«  Poigny.  —  Orphée  —  Hulda.  —  Iai  Vie  de 
lii'théiiie.  —  Marguerite  (iiraud.  —  Eng)-1.  —  1^  -  — 
l'Vrau>l  df  Saint-Pol.  —  «'.o.lou.  —  Jane  Balhori.  —  ••n'. 
Mm»  (".liulain.  —  Jeanne  I„-itnlM<rt.  —  M"*  >  -  L« 
i-vi-lo  (l-s  .l'uvo's  (lAlfp.J  Bruneau.  —  Le  .  — 
Iphigénie  en  Tauriiif.  —  Cendrillon.  —  Thaïs. 

\  Ihùàlre  do  la  Henaiîisnnoo  (18<î7  1901). . 

Construction  dt>  la  salK'.  —  Les  Iriupes  italienn»;.s.  —  Irwtipth 
diverses.  —  .\cbatdii  Tlié.*\tre  par  la  Ville.  —  Pii«<«s  int«riiil»'-s.  — 
^fal■r,•a^^  et   le   colonel    Iluhert  (Jistex.    —   Sarab-Bernhardl.    — 

Iii' I  i'iils.  — Aiciilifits.        li  l'itration  du  monuiiifiil. 

\l.    -    1  ii-Mir.- M.-i  \  .iii.-t.'s,  ruo  Moiv.t  uf  (1832-180ij Ili» 

L'ancii'n    Ri(|iiiqui.   —  La  nouwlle   Kille   -I-'  I.i    rii.>    M. n-..  ir 
M"'"  L«i.>us,  —  Delaville.  —  Alain.  -   L 
de  Cornotille.  —  gc"'---  '•'.■■•'■  /•.•..• 
Démolition  do  la  aall 


^•:5i-O^Cîi- 


TABLE    DES    NOMS 


TAliLL 


DES 


Principaux  Noms  &  principales  pièces 


CITÉS     DANS     LE     VOLUME 


ifrirahtf.  1H8. 
Agar.  IIW.  liW.  '^K). 
.■li//(i.  2«IK.  '2\:,. 
Alain.  :C^:.. 

Allan  Ponrhanl.  (M-«)  106.1U7.11I. 
Alhort.  Z/:. 

Ail... ni.  i;:.. 

\        1  i  .  ■•'  :.   ■'■>■.  Ml,  270. 
\'  :hl-tli.  .   i»;.!. 
Armand,  lifcf. 

Aniaua.   i:{.  86.  K7.  '.•!.  «J.  •••     '7     •>«    1^-. 
Armiu.l    i'.-licit)  2U7.  'JUH. 

Vou/m.  (10   'Mi,    27U.    2U1. 

;«i'.. 

Anb«r,  ir.Mv»l. 
Aubort.  W2.  m\.  .106. 
Aubrani,  (K.  d)  '247. 


1;  i'-Km!inn. 
1 

'.\ 

.)9?n, 

if45,x>: 

1 

d.- 

»,' 

H.ir'-i,r 

'/. 

s 

■  r.'-- 

l". 

iLiibot, 

\1 

.,. 

Kv 

.. 

Uar.tli.  ^ 

M 

:., 

"*■'.• 

1 

1. 

1  . 

.». 

u.. 


'*;''•  i  *'"".'  »••'•  '" 


IW-juy.  174.  188.  1K9.  ivi». 

Itellfvaut,  '^ 

îi«M»ntti,  'M 

l: 

1 

•  • 

lU<n..i.  (MM.  d.v  •^'•;i 

lii-rnard.   !«•.  l'KJ. 

Ii.'rnlwrdt   Sarah)  S7i>,  3|G.  3UJ. 

Iterleaux.ail.2l«5. 

IlMlon.  U7. 

H.         •        :ri.-,. 

h  .le.  £4. 

l'.ii..  1 1.  iGi,  ns. 

H>t<i''liin.-.  ÎTli 

'  >l. 
1:18,  Htà.  IW. 
illari' li.tr. i  .ir  i.i  Musit>>.  Hl.  '*\. 
Hl.Hkx  wlati)  •^>i. 

itoi'idieu.  hnf,  loi,  laj. 

I{...»      \. ......    »  (■» 

1 
1 
1  m. 

r  .-s 

1  '7.  A. -4«M.  Ml,  3«Jw  S»l, 

Ilourvault-Daroodniv.  179.  17V.  'iSP.  271»- 
15  'A7. 


NT..  'J31 


-..  i«7.  ail,  2ift. 


b7 


338 


LE  THÉÂTRE   A    NANTES 


]{riôre-Faurt.  (M"")  174. 

Bricp,  97. 

Brictli  (M"«)  2'.i7,  298. 

Briol,  1S4. 

Broca,  297,  299. 

Broussan,  250. 

BruTieaii,   (Alfri-.l)  220.  253.  263.  264,  270, 

289,  290,  303,  »J4,  30.^. 
Brunsclnvig  (Léon)  2:J«,  291. 
Bucognani,  2-10,  248,  249,  253,  2û4,    258, 

2.J7.  270. 
Dûhl.  (M'I')  273,  27G,  284. 
Burgcrc,  (M"«)  88. 
Buziau.  (Ch.)  202,  204,  206,  208,209.  214, 

217.  218.  221,  225,  226,  230,  234, 249,  241, 

242,  243. 


Calcina,  76,  145. 

(îambier,  161. 

Camilli.  (MU»  de)  293,  294. 

Camoin,  {MU')  121. 

Canilclon,  (M"«)  227. 

Gardon,  324.  325. 

Carmen,  208.  215. 

Carrier,  51,52. 

Castclmary,  179. 

Castox.  2C.1,2(;2,263,   264,   265,  266,  267, 

2C.8,  2C.9,  270,  271,  281. 
CaY('-Rivonez,  (M»»)  198. 
Caubct,  165,  205. 
Cazoneuve,  273, 

Cendrillon,  30r). 

Chabrillat,  181,  182. 

Challart,  1()5. 

Charles,  177. 

Charny.  {M"<»)  185. 

Charpentier  (Gustave^  220. 

Chavaroche,  243. 

Cliapplain.  ir.  22,24,  51,  123. 

Ghauvel,  (Paul)  190,  238. 

Chenantais,  176,  .309. 

Chëreau,  (Piern-)  307. 

Chevalier  Jean  (Le)  217. 

Chevricr  (H('aène)214. 

Cholain,  (M'"e)  302,  305,  306. 

Ghollct,  148. 

Cid,  (Le)  232,  298. 

Glavcrie,  243,  248,  249. 

Cloiucnt,  162,  10)3. 

Clément,  (Thérèse)  283,  293,294. 

Cloches  de  Corncvillc  (Les)  208. 

Codoii,  302.  305,  306/ 

CocuU,  184, 


Collot  <i  Jlorhois,^;!,  02. 

Golombel,  150. 

Combcs-Ménard,  252,  254. 

Conimingos,  18'»,  18<i.  187,  188,190,  191. 

(Jlonipain,  42,  2*». 

(>omte-Borchard,  178. 

Contes  d'Hoffmann  (Les)  223. 

Cuquelin  (aînO)  178, 

Coulon,  201,  206. 

Couturier,  214,  215,  238. 

Crucy,  I,  31,  32,  33,  34,  84,  80,  87. 


Dalti  (Zina)  313. 

Dame  Blanche,  (La)  111. 

Dame  aux  Camélias,  (La)  158. 

Damoreau-Cinti,  (M»')  127. 

Danylas,  55.  58.  60,  05,  66,  71,  72,  74,  75. 

Dangnmont,  (M"")  105. 

Dauphin,  202. 

David,  294. 

Dt'fossoz,  192,  19.:-.  . 

Defresne,  164. 

Déjazet,  150,  168,  169,  173,  179,  189. 

Delabranclie,  209. 

Dflanoue.  (M»')  108,  110,  113. 

Delaunay,  179. 

Dclaville,  325. 

Delille,  (M"')  151.  152. 

Delvoyc,  340,  2il. 

Deniauroy,  302. 

Demerio-Lal)laclie  (M"«)  311. 

Demouchy,  95. 

Depassio,  191, 

Dereims,  210. 

Dereims-Devriès,  (M")  206,  210,  25t^ 

Desclauzas,  (M»"»)  192. 

Desgoria.  262. 

Desniarets,  24,  25. 

Destranges,  (Etienne)  21,    236,    237,  257, 
276,  290,  303. 

Desterbecq,  (M»')  179. 

Dovareilles.  (M-e)  293,  294,  295,  298. 

Devilliers.  230,  232. 

Devin,  l^. 

Devriès  (Ilermann)  2^2. 

Diiasty,  (.lane)  262,  2r4,265,  268,  270,  29l 

Doboliaëre,  283.  2*').  296. 

Doche.  (M-»)  183. 
Dons,  294. 

Don  Juan.  92,  210. 

Doria,  207, 

Dorval,  (Marie)  127,  133. 


TAflLR   DBS   MOM9 


3:19 


if.  V4S. 


!   l'A»,  U'I. 
.   I. 


l*>i|>i>z.  151. 

I»     I      su.     '2\\>,2âK 

1 .  ;  .rfi.*.  ru 


E 


Kdcliny  (M'").  '■H'H. 
K«Iw>.  ae.  :»ik'..  3»;. 
Kf...  I    P.Mi   :«)'   :>c;  laM,  306. 

j  ' 

1 


K. 


iiiaiiM-.    i'>i 


KUrnno/.  48,  374.  S7&.  SOCi. 
Etoile  du  Nord{L'i,  166. 


)«.  a».  306. 


irhal.  15».  I.V.  ini 


K'"-     4..-..'... 

1 

1  ,  - 

1 

I  ■   V. 

I 

II  MMCI.      i       ■ 


.  2i\.  'iV'.  :.*}. 

111 


Gmrd4»l.  W> 

(>ami«r  'ICd^uarvl).  197,  908,  fA). 
(îaullirr.  II,  •"   •"    ■  ' 
Oaulticrdi  \.'Ul.Zl\. 

Oclly-LaMli'-     <!      .  </!. 


( 

<. 
<•■ 

(. 
(. 

G 

(.  . 

t.  . 

<. 

(. 

(• 

(. 

4. 

(. 

(• 

«. 

(> 

(1 

<i: 

(. 

«.■ 

(. 

(. 

V, 

(. 

(. 

li'>ï,  i» 


.  i(K.  11b,  ita 


an.  V7. 


•n^ta. 


'•    <»rl    -r»! 


■^.  tm.  s».  9»;,  287. 9». 


a».  31.  11. 


777 


«»•.   T!»;    'rf. 


Il  r>*.  ;••>. 

;/ 

li  J. 

U 

)l>       M-'u  u».. 

//:.     --,   1    1. 

HrivirT«ki   (Odylt).   SU,  9M.  fB7.  9Hk 

*•■.» 
// 

Utnutkaét,  ti».  «lu.  M:t. 


'MO 


LE  th^:atre:  a  nantes 


Ilerrinanii-L/'Oii,  l'.Çt. 
H<.-urteaux,  W),  141. 
Ilignard,  10'),  \m,  '£». 
union  (Mll«),  ir)9,  173,  182. 
Huguenots  (les),  1.3:3,  liV). 
Ilulda,  2ÎJ8. 
Humperdiiick,  220. 
Huny,  102,  i:JO. 
Ilunër,  m),  141,  151. 
Hus,  4:3, /i'i.  4C.,  48.  49. 


Iphiffénie  en  Tauride,  306. 
IsmaiU,  140,  147. 
Isiiiaol-Gaxcin  (M»"),  240,  241. 


.Jacquin,  297,  298,  299. 

Jahycr,  271,274,  276,278. 

Jamet,  185. 

Jaubert.  88,  92. 

Jausserand,  98,  99.  100,  102. 

Jérusalem,  151. 

Joncières  (Victorinj,  188. 

Joseph,  81. 

Jouanne,  230. 

Jouanne  Vachot  (:\I'i«),  220,  231,  2:>>. 

Jourdan,  197'. 

Jourdain,  183,  218. 

Judith,  188. 

Juif  Polonais  {le),  305,  •W>. 

Juive  (la),  131. 

Julien  (S«Win)'  03,  G8,  09,  70,  80. 


Korlord  (M"-).  207. 
Kranss  (M"").  1!K>. 


Labis,  225,  220.  2'i0. 
Lacombe-Duproz  (M""),  205.  206.  2i\. 
Lafargc.  273.  274,  2^5  27<'>. 


Lafeuillade,  135,  i:». 

Lafon  (Olive),  ai6,  218. 

Lafoiid.  49. 

Lahmé,  223. 

Lalande  (M"'),  9î^t,  100. 

Lambert  (Jeanne),  3<t2,  3ftl. 

Lambert.  192. 

Lambrecht,  268. 

Lamy  (M-').  141. 

Lannet  (Mno').  177. 

Lary,  252,  202,  2C>5. 

Lassenno  (M"«),  101, 

Lataste,  287,  289. 

Laurent,  227. 

Laurent  (M"")i  185. 

Lavilk-Ferminet    (M"«),    2'»3.    248.    249, 

256,  257. 
Lavoye  (M"»),  174,  177. 
Lekain,  20,  24. 
Lemaire  (M""),  82. 
Leniatte,  227. 
Lemoigne,  20:). 
Lenioine  (Olivier).  282.  284,  286,  2S7,  2«S. 

295,2)0.  321».  321. 
Lemonnior,  181.  134,  149.  1,')2.  153. 
Lemoule  (.Mil'),  lia,  lU»,  12.S,  1.31. 
Leroux  (M--)  323,  324,  :«5. 
Lesbros,  127,  130,  150. 
Lesoeur  (M"«),  2()7. 
Lestcllier,  243,  244. 
Letourneux.  (53,  64. 
Levasseur,  158. 
Levassor,  145. 

Lévy  (Abraham),  243,  252,  253,  261. 
Lind  (Siri),  2)4. 
Linse  (M-^)  220,  »>2. 
Lloyd  (M"«),  2(i2,  264. 
Longo,  2:3,  2.5,  29,  37,  :!X.  11.  Vi.  W.  fù.  fw 
Longprt',  199. 
Lorant,  234,  2:)8. 
Lucas,  287,  289,  302. 
Ludovic,  l'i5. 
Lucchesi  (M'"*),  311. 
Lyonnel  (Marie),  200. 


M 

Maillard  (Mlle).  \:\. 

Mainvielle.  108.  115.  122. 

Maisonneuve  (Tli.).  245,  2.''i0. 

Mangin,  118,  l:«,  tiMi,  108,  177.  179. 

Manon,  225. 

M  an-bot,  I5'i,  158.  188. 

Maicillac  (MU").  2«.)9,  302. 


TABLE   DES   MOMH 


3^i\ 


'«.  112 

...  ;ij.  w 

.    ,  .^..  .....   _^,  «UK.  :l«.. 

1UhU7.  14M.  MU.  ti;i.  lui, 


M  ri,  IJii. 


M'-rly.  !«{.  lA.. 
M.T-.l  (la  lianè.  '  " 
Ml  I  ton.  I«y,  H.'i 
.Mi'ijiilitr.  '^Hê.  v",  ..".M, 
MftstP  .  -iHS.  M^. 


11.   IW.  1...  !'.. 
j    «1.  '»4     "V      •• 


U,     ilU 


•iir?.  a». 

Stiijnon,    191. 

M...l!iM  farvalliô  (M*«).  IW.  171». 
.Mir;iiiii*,  261.  *r..  *VJ,  271.  ï/l,  UKI. 
Mirap^lli.  174.  177. 
Mirftllr.  iVv 

\f, ».•   ii.i .,.-if    •>  . 

M 

M 'M'  M -1     >iii''  II-''.  ..■"/.  ..■"'^. 

Moliore.  m.  II.  !•.?, 

M 
M 
M 
M 
M 
M 
\' 


lu  r.i.  »>,  ^2. 
Oli'Oix  do),  fl.  M.  i:t. 


'.Ti«>,  if.l.  '*"».  'ïvl. 


\l 


Moau<«i-SuUy.   tl^ 


N 


n.tmI.  rri.  •J7'*. 


s    vcli.  !•<. 


I  (.  10.  ta 


"•.  «v  3jr.7 


Ihinin  .\f< 


1  •■  I    !  -^ 

llorrwwl   '   '    r- 
M-).  «17. 

im#.  308. 


Ci. 


w<T4.  !ll\ 


lA  ItU. 


342 


LE  THÉÂTRE    A   NANTES 


Pré  aux  Clercs  (le),  123. 
Prévost-Colon  (.M«>e),  lai, 
Prévieux  (M""),  192. 
Princesse  cl' A  uberge,  294. 
Prophète  (le),  161. 
Puget,  100. 


nabany  (Alice),  219,  ^83. 
Rachel,  145,  153. 
Rai  ter,  221. 
Raucourt  (Ml'"),  20. 
Raynaut  (M^e;,  179. 
Régnier,  115,  119,  165. 
Reggiani  (Aima),  207,  208. 
Reine  de  Saha  (la),  237. 
Rêve  (le),  253,  254,303,304. 
Reyer,  183. 

Ribes-Tournié  (M"'),  262,  264. 
Richard,  214. 

Richard-Mutèo  (]\I°'<'),  110,  111. 
Ricquier-Dclaunay,  197. 
Rigoletto,  184. 
Robert  le  Diable,  125. 
Robinot-Bertrand,  32,  45,  119. 

Roche,  109,  106. 

Roche-Legrand  (M-"'),  109,  111,  115,  16C. 

Rocher  (Pauline),  256.  285. 

Rodel,  119. 

Rodolphe,  43,  44,  46,  48,  49. 

Roger,  193. 196. 

Roid'^s(\c),  241,  285. 

Roi  de  Lahore  (le),  217. 

Roi  l'a  dit  (le),  227. 

Roland  Saint-Léger,  168. 

Roland  à  Roncevaux,  188. 

Romain  (Eva),  273.  287,. 289,  291. 

Roméo  et  Juliette,  203. 

J^ougé,  190,  203. 

Roux  (M""),  124,  125,  133. 

Roux  (M.  et  M'"«  Léopold),  225,  227,  245. 

Roy  (M">e),  lOG. 

Rozan,  109. 


Saint-Charles,  137. 
Saint-Huberti  (la).  43. 
Saint-James  (Ml'-),  44,  45,  93,  94. 
Saint-Laurent  (M"e),  252,  25G. 


Raint-Saëns,  251,  2&3,  266,   275,  289.  292. 

Saint-Scrvan  (M™»),  44,  45. 

Salambiani  (Mlle),  248,  250. 

Salambier  (M"'),  262. 

Salarnmb('),  285. 

Samson  et  Dalila,  253,  257,  265,  268. 

Sany  (M'I»  do),  240,  aU. 

Sanz  (Eléna),  257,  258. 

Sasse  (Marie),  180. 

Scaramberg,  277,  2'.tl. 

Schwoyer-Lematte  (M™e),  227,  25». 

Séché  (Léon),  200,  204- 

Sentenac,  202,  264. 

Séran,  198.  214,  215. 

Serpette  (Gaston),  200,  230. 

Séveilhac,  284,  285,  289,  2i:>l,  2î)4. 

Seveste  (Ml'*),  203,  235. 

Si  j'étais  Roi,  259. 

Silvostre,  292, 

Sifftird,  240,  241.  270. 

Simiane,  184. 

Simon-Girard,  223. 

Sizes,  297,  29V). 

Solié  (Charles),  145,  146.  148, 149, 151, 152, 

IM,  157,   159,   KiO,   163.   16:1.   1»J«.   172. 

173,  179,  180,  224,  225,  226,  227,  22'.i. 
Songe  d'une  nuit  d'Eté  (le),  15'i. 
Statue  (la).  182. 
Stcrckmaans  ('M"').  302,  306. 
Strélesky,  231,  235. 
Strozzy,  192,  193,  311,  313. 
Sujol,  Ki8,  228,  232. 
Sylvain,  275. 


Taisy  (MU*  de),  188. 

Talexis  (M"'),  287,  291. 

Tallier,  151. 

Talma.  88,  89,  90,  91,  94. 

Tannhœuser,  182.»>4,  285. 

Tapiau.  205. 

Taiiol-Baugé  (M"»»),  262,  279. 

Todesco  (M»').  183. 

Teillais  (D'),  259,  266,  281. 

Tessier,  175. 

Thaïs,  306. 

Thamara,  269,  270, 

Théry  (Hélène),  302,  304,  300. 

Tliibâult  (M»»).  95. 

Thillon  (M-"*),  130,  153. 

Thuringer  (Ml'e),  240. 


TABLK   DES   J«OM9 


a«3 


Tilly.  li).  14:^.  IM.  14S. 

;  Hi.  iîJ8,.'ni. 

110.  31 .',  31  J. 
17.». 
I.  223,  «U.  't&\ 

*) 

JUH. 
l  i?7. 

TylUa  (M-«).'/rj. 


U 


Vnillant-Coattirieri  Marguerite).  214.  'l\h. 

21»;.  214.  aC.  2:tT.  i»,  ^VV.  775,  /T?. 
l'rt/  rf*.4niior.-  (l.i,  151. 


V<v««r(Mlw^  IM. 
V  - -"O. 


>l 


:la}.  «0.  £JUL 

-il».  H\,   3J0,  301. 


:.  55. 

•1.231. 

Voinm  (M-«^.  104.  IM. 


W 


.i'ii;«r<ii.  »- n  ,    .».-•.    »'.^'.   .:'il,  îBI| 
■  1 1  «     v>  I  •. 


J^. 


Vurvjer,  U. 


'>    Ml. 


..  ÎR«. 


ZoU  (EmiU).  «n.  «U.  301.  aOI.  3UG. 


f^^m 


^ 


£  H  IR,  J^jl  ,£Jk^ 


•iHl< 


Pugo  4,  ligne  9,  iiii  Ii«'U  «le  :  cette  itermère  œnrre,  lin»  :  rette  ilernitre  pi*^e. 

pHge  17,  ligni^s  7  ri  H.  au  liou  de  :  a  écrit  i/tie  l'hôtel  du  I'iiahk  i»»    i  \   I-onir, 
lire  :  fl  errit  ijue  l'hùtet  occufté,  jaiii»,  rue    Scrihe,  f*ar  le  Pmah» 

I.OIHK. 

l'iiKH  (M5,  li^ix*  1.  au  liou  (!••  :  DamjlarM,  lire  :  iJanglmt. 

l'iiKt'  1^,  iIcTiiièru  IIkiio,  au  li<Mi  de  :  qui  ait  itnrue,  lire:  qui  ait  paru. 

1*11^0  H7,  reinpliicer  tout  le  premier  alinéo  par  le  »aiviiiit  : 

a  Kn  178i,  un  sieur  J.  liëconnniK  fil  élever,  enln>  In  rue  du  Calvoirc  H  la 
groudo  rour   silut'o  dt>ri-ii-r«<   rilôlullrrii*    du   (IIiuimmiu  H<>  In 

o<c.ip«>,  il  y  H  iiuol'ju'"-    Millier»,  par  rilôl<«l  «!••«  Po-.».-.   >  re 

(le-ttirn'»«   aux    s;."'  !i»î»   «    \  ariri.-s.    A  t. 

spo<Jl«flL»»  de»  Hij  ..  .    ut  d«'  la  Koiro  ».  1'     ,  .  .  . la 

salle,  un  cirque  qui  disparut  en  1839,  lorw  dn  l'arlièvonient  de  la  riM*  Itoilrau 
vern  la   rue  <lu  (!al\aire.  (>  tl,     *  '■♦, 

n'avait  anruno  farudc.  Il  prit  I*'  né 

Colniann  x. 

l'oge  77,  ligne  39,  au  lieu  de  :  H'éceraient,  lire  :  ë'eleeaient. 

l'ag*'  ^<  lignii  13.  au  lieu  de  :  et  île  mrlodrame»,  lire  :  et  de»  mélodrame». 

Tugo  121.  au  liou  du  :  .V"*  Camfln  :  lire  A/'"  Camoin. 

Pagn  129,  ligne  2  du  Mutnmire  :  au  liou  de  :  Lnmermoor,  lire  :  Lammer- 
muor. 

Page  134,  ligne  35,  au  lieu  do  :  Lamermoor,  lira  :  Lammermoor. 

Page  152,  ligne  5,  au  lieu  de  :  Lamermmoor,  lire  :  Lammermoor. 

Page  178,  ligne  5,  aa  lieu  de:  deux  piéce$  de  cen,  lire  :  deux piieeê  en  «ert. 

Page  187,  ligne  6,  au  lieu  do  :  M"*  Wertimberg,  lire  :  Werthimberif. 

Page  198,  ligne  5,  au  lieu  de:  était  envahie,  lire  :  étant  entahie. 


r  HBUn: 


:{10 


l*ii^'(;  231,  li^'iKî  22  (il  2.S,nu  lien  (Ur.  lu  J''ii,s  SL-HNATLKni,  de  (ircncl-Din-dni-ourt, 
liio  :  lo  l''it.s  scKNATiHi'.i,  (le  (rt'cnct-Ddnfoni't. 

Vnix,{\    2.')1,  li-.',!)!'    2'i.  îiO   lien   (II':    l.cn"i'iirr    J<'ii  ,  l,i."'  '■/"''   J'i.rrhrsi  ri'.  \\v  : 
l.inwHe. 

Page  2r)'i-,  lii^Mic  S,  ;ia  lien  do  :  (ijjirlic  roiif  f.rticr.  lire  :  (tffirhr  jionr  rrrler. 

Va^a  260,  lignes  36  et  37,  an  lien  di^  :  ponvlnut  r'Pst  jwm-tdnt  connae  rchi. 
lire  :  r'V.s7  povHnnt. 

VkXixv,  2(i7,  li/^Mic  'i.  au  lien  di-:  (jui  n'ouhlirrrut  pus  dr  sitnl.  lire  :  'iiii  /l'oi'/i/if- 
roiil  jxis. 

l'afi-c  272.  li/jfiio  27,  au  lieu  (1(î  :  h'iijin,  jtoiir  /'('((iblisscmcnl  du  ti-n<\  Wva  :  h'n/iri. 
eu  ju'('vi.si<j/)  de  r<'t((h//!^.semcitt  du  (rue. 

Pa/^o  273,  dans  le  taljloau  do  troupe  d(!  la  saison  IcS'.lTi-lN'.Hî,  ajouter  lo  nom  lU' 
M'''  Franck,  contracte  en  double. 

Pai^c  31."),  lij>no  8,  au  Hou  do  lïidjci-t  ('(Li-tex,  lire  :  Ilid/crl  (,'astex;  ligiie3i,  au 
lieu  do  :  Mond  CléMcnt,  lire  :  Moïna  Chhiwnt. 

Pa.uro  323,  ligne  1,  au  lieu  de  :  niluç  rue  du  Calvaire  où  fie  /ronre.  lire  :  à  l'en- 
droit on  .se  tronre. 

Paye  332.  ligne  3Î),  au  lion  d'I;//tdrd,  lire  :  d'ïliiinard . 


Nanlf>s.  —  liiijirimt'rio  t".  Salibres,  riio  SanteuU,  !2. 


DU  même  ïiWïseuï[ 


Etudes  analytiques,  critiques,  thématiques 

L'Attaql'e  dv  Moulin,  d'AIJre'l  lirariean. 

Driskis,  iVKinmanuel  Chahricr. 

I-K  Chant  dk  i.a  Cloche,  do  Vincent  (l'inili/. 

L'I'ivor.rnoN  ml-sicalk,  t;iii:z  Vhudi  :  Aida,  Othello.  Kalstaff. 

Lf.s  1''i:mme.s  dans  l'œuvke  de  Richard  Wagner,  avec  une  préface 
iV Alfred  lirnncau  ot  vinf^t  dessins  d'/l.  *le  Rroca. 

I'"euvaai..  de  Vincent  (Vlndij. 

II.ENSEL  ET  CiRETEL,  iX li .  Ilunipenl inch. 

Kéuim  —  Requiem  —  Pentiiésilée  —  Lieds  de  I-rance  —  Chansons 
A  I)AN:iER,  d'Al/red  Jinineau. 

Les  Lnteri'Kètes  musicaux  du  Faust  de  Gœthe  (épuisé). 

Messidor,  d'Alfred  Bruneau. 

L'Q'^UVRE   LYRIQUE    DE    CÉSAR    FraNCK. 

L'Œuvre  théâtral  de  Meyerbeer. 

L'Ouragan,  d'Alfred  Bruneau. 

Proserpine,  de  Saint-Sfiën.s. 

Le  Rêve,  d'Alfred  Bruneau. 

Samson  et  Dalila,  de  .Sainl-S((ëns. 

Sancho,  do  h'.  Jaques-Dalcroze . 

Tannii-euser, 

Les  Troyens,  de  Berlior. 

Lf  Vmsseau   I'\ntome. 

Ouvrages    divers 

Coi. lot  d'Herhois  a  Nantes,  d'api-o.-?  une  pièce  originale  décou- 
verte dans  les  Arcliivcs  il<'  la  \'ill(\ 

Dix  jours  a  Bayreuth. 

Noies  de  Voyage. 

Souvenirs  i»i:  Rayreuiti. 

En  préparation 

CONSONNANCES    ET   DISSONANCES. 


Naiilcs.  —  Impriinoric  P.  Salières,  rue  Sanlouil,  VI. 


La  Bibliothèque 

Université  d'Ottawa 

Echéance 


The  Library 

University  of  Ottawa 

Date  due